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Racistes, les mots de l'antiracisme ?

"Racisé", "blanchité", "racisme d'Etat" : ces termes ont resurgi dans le débat médiatique, à l'occasion de l'organisation par le syndicat Sud Education 93 d'un stage contenant deux ateliers en non-mixité, c'est-à-dire réservés aux personnes "racisées". Le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer s'en est indigné à l'Assemblée nationale, fustigeant "les mots les plus épouvantables du vocabulaire politique", et a annoncé son intention de porter plainte pour diffamation contre le syndicat pour l'utilisation de l'expression "racisme d'Etat." Que signifient exactement ces mots ? Peut-on retracer leur généalogie et les débats autour de leur utilisation? @si a tenté l'exercice.

Derniers commentaires

[quote=Éric Fassin, « Racisme d’État (2/2): politiques de l’antiracisme », 29 novembre 2017.]

[...]

Nombre de chercheurs répondront sans doute qu’il ne faut pas confondre « racisme institutionnel » et « racisme d’État », soit le racisme dans l’État et le racisme de l’État. C’est le cas de Michel Wieviorka, [selon qui] le racisme dans l’État existerait malgré l’État.

Beaucoup de personnes racisées auront du mal à partager l’optimisme du sociologue. Et le risque, c’est qu’aujourd’hui on oppose, à l’expérience des victimes du racisme, le savoir des spécialistes, soit une manière d’oublier que les premières sont parfois des chercheurs, et de souligner qu’on a tendance à se représenter les seconds comme Blancs. Le sociologue et militant antiraciste Saïd Bouamama l’a souligné [...] : tout se passe comme si les mots des racisés – de l’islamophobie au racisme d’État – étaient systématiquement frappés d’illégitimité.

Si, pour ma part, j’utilise assez peu l’expression « racisme d’État », c’est parce qu’elle peut prêter à confusion [...] Toutefois, à mon sens, il est des cas où l’on peut légitimement parler de racisme d’État aujourd’hui [...]

On se rappelle la controverse de l’été 2010, après le discours prononcé par Nicolas Sarkozy à Grenoble, autour de la question rom. [...]

La question s’est posée à nouveau avec les propos de Manuel Valls contre les Roms. [...]

Il est au moins un autre exemple, plus explicite encore, où l’expression « racisme d’État » paraît appropriée. Il s’agit des contrôles au faciès, soit une réalité avérée [...] On sait que l’État ne fait rien pour les combattre : la promesse de récépissés pour les contrôles d’identité reste lettre morte ; et aucune circulaire n’est venue rappeler aux forces de l’ordre l’interdiction des contrôles au faciès. Cela ne doit évidemment rien au hasard.

Lorsque l’État est condamné par la justice pour faute lourde en 2015, il fait appel. [...]

L’État justifie les contrôles au faciès au nom de l’idée que les Noirs et les Arabes sont « d’apparence étrangère », impliquant ainsi que la France serait d’apparence blanche… [...]

Sans doute en 2016 la justice a-t-elle confirmé en appel la condamnation de l’État : celui-ci ne parle donc pas d’une seule voix. C’est pourquoi on peut, comme le sociologue Abdellali Hajjat, discuter les limites de l’expression « racisme d’État » : à quel point s’applique-t-elle à la situation française aujourd’hui ? [...] On l’a vu, le front républicain (contre le Front national) est mort. [...] Dans un pays qui n’a jamais interdit le Front national, le gouvernement va-t-il, avec le soutien de toute la classe politique, bannir le vocabulaire qui permet de nommer les politiques de la race en France ?

[...] On peine donc à comprendre que, à l’instar des députés, des universitaires, et même des sociologues, applaudissent le ministre. On s’étonnait déjà de la rareté des protestations contre la censure qui se répand dans le monde académique ; faudra-t-il maintenant s’habituer à ce que nos collègues s’en fassent les défenseurs ? [...]
" stérilisation démocratique des racistes."

petit ajout: stérilisation dans une démocratie apaisée des racistes."
Je m'étonne que personne à gauche n'ait jamais proposé un programme de stérilisation démocratique des racistes.

Ce message a été supprimé suite à la suppression du compte de son auteur

Finalement, a-t-elle été déposée, cette fameuse plainte ?
Ou n'était-ce pas plutôt comme d'habitude un écran de fumée ?
Voici un article pour ceux qui parlent Anglais qui vient soutenir la lecture de ce bon article
Blanquer, Blanquer...un doigt, la lune

Tout cela, tout ce buzz dont sont friands et journalistes, et forumeurs @si et les mentons en pointe pour,
peut-être, minimiser (j'ai bien dit minimiser) l'annonce et la mise en place d'un Conseil Scientifique au sein de l'Education nationale.
Ce Conseil verrait la nomination d'un neuro-scientifique à sa tête.
Une main de plus des "scientifiques" sur l'Education.
Rappelez-vous Céline Alvarez?

Que nous préparent-ils?

Rappelez-vous Blanquer au cabinet de Gilles de Robien partant en guerre contre la méthode globale (jamais appliquée) mais mettant en valeur la " bonne" méthode syllabique...

Scintificons (j'emploie à escient ce barbaro-néologisme pour la syllabe finale) au maximum et nous aurons fini de détrousser la Princesse de Clèves.

Chacun peut aller fouiner. Voici le lien transmis par une ex-collègue de RASED...(vidé de leur contenu par un autre célèbre Darcos.)
La démolition prend du temps mais les tracto-pelles sont "en marche".

http://www.lepoint.fr/societe/education-blanquer-annonce-la-creation-d-un-conseil-scientifique-24-11-2017-2174792_23.php

Nous vivons une époque formidable
Et sinon, tout va bien, https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/burkina-faso/le-ton-surprenant-demmanuel-macron-pour-parler-du-president-du-burkina-faso_2489837.html

"Surprenant", oui, c'est le moins qu'on puisse dire. Normal de tutoyer son homologue, c'est ça être djeun. "Reste !"... Pourquoi pas "Au pied !"

On notera le sourire content de soi et la tête qui dodeline comme les petits chiens qu'on met sur les plages-arrière des voitures à chaque fois qu'il croit avoir fait un bon mot.
La "non-mixité" stricto sensu ne me dérange pas trop, même si je ne me sens pas comme appartenant à une hypothétique "race".
Mais de même qu'il peut y avoir des ateliers "réservés aux femmes" dans la mesure où la présence d'homme peut rendre certaines femmes suffisamment mal à l'aise pour qu'elles n'osent pas s'exprimer, éducation à la c0n oblige, je comprends qu'on puisse mettre en place des ateliers où seuls des personnes en difficulté à cause de la couleur de leur peau, de leur style de vêtement, etc. seraient présentes.

Reste que si en parallèle des ateliers réservés aux autres ne sont pas mis en place, ça me met très mal à l'aise.
J'imagine le tollé si demain un syndicat proche du FN mettait en place un atelier "réservé aux blancs" ou "réservé aux hommes blancs".

Bref, je pense que la non-mixité doit rester une exception, pas une règle.

Au fait, si je veux m'inscrire à un de ces ateliers et que je pense correspondre aux critères d'admission, y a t il des censeurs susceptibles de refuser ma candidature? Y aura t il des tests ADN à l'entrée? Ou de mesure du nez, de la couleur de la peau, des dents, etc?
Il n'y a pas de racisme au sommet de l'État :
Le trombinoscope montre bien le présence d'une femme noire : la Ministre des Sports Laura Flessel
il y a aussi Mounir Mahjoubi secrétaire d'état au numérique

Vous remarquerez sur le trombinoscope le placement une femme un homme une femme un homme. Comme quoi quand on se fait fort de respecter la parité, on renforce en l'affichant la disparité

Il n'y a pas de racisme d'État :
mon fils n'est jamais contrôlé sauf quand il est avec un copain encore moins de souche que lui, en fait visiblement pas de souche du tout
sinon jamais mon fils n'est contrôlé
son copain presque toujours

La boulangerie n'attire pas les gens de couleur, je n'en vois jamais derrière le comptoir. Par contre, les gens de couleur sont attirés par les travaux annexes dans les cuisines ou dans les maisons de retraite
Il y a plusieurs trucs qui peuvent justifier la critique de ces termes dans le débat public :

- la crainte d'une évolution à l'américaine du débat public français, on ne peut plus légitime à mon avis, et qui devrait être en premier lieu un souci pour la gauche vu comment ça a tourné là bas
- l'usage dans le débat public de termes issus de la recherche et qui peuvent prendre un sens différent dans un cadre militant (est ce que les militants du PIR etc... pensent réellement "relents occasionnels de racisme, ou discriminations inavouées dans la mise en œuvre de certaines politiques publiques ou le discours qui les accompagne" quand ils disent "racisme d'état" ou est ce qu'ils pensent "état raciste" et font peu de distinction avec les états vraiment basés sur une idéologie raciste, comme semblerait l'indiquer la virulence de certains discours ?)
- l'usage dans le débat public de termes relevant dans leur contexte d'emploi d'une généralisation abusive (qu'elle ait été commise ou pas par des sociologues à l'origine ne l'excusant pas) comme "racisés" pour dire "membres de minorités ethniques" ou "personnes de couleur autre que blanche" ; employer racisé en ce sens revenant à dire que toutes les personnes de ces groupes sont en permanence "réduites à une identité raciale", en France, de nos jours, ce qui nécessiterait il me semble quelques démonstrations ; là où un usage correct de racisé serait de ne l'employer que dans des contextes où des gens sont effectivement réduits à une identité raciale (par exemple "black blanc beur est une expression qui racise les joueurs de l'équipe de France", ou encore "l'écart de succès à cv égal / l'écart du nombre de contrôles d'identités subis sont un signe que les gens sont racisés par un certain nombre de recruteurs d'entreprises / la police")
- la tendance de certains amateurs de ces termes à faire comme si le type de sociologie qu'ils utilisent faisait consensus chez tous les sociologues (alors que... voir un numéro récent du Monde pour ce qui est des débats internes à cette discipline), ce qui nourrit les campagnes anti-sociologie en général

Par contre il y en a encore plus qui rendent l'action de Blanquer et les discours genre Printemps Républicain ridicules :

- Déjà s'attaquer à l'usage des termes au lieu des contre-sens pouvant résulter de leur usage sans définition claire
- ...Et porter plainte sur la base de la définition fausse d'un terme qu'ils cherchent ou devraient chercher à combattre (celle assimilant "racisme d'état" et "état raciste")
- Faire comme si ces termes étaient nouveaux dans le débat public et résultaient d'un plan récent pour le subvertir (délire quasiment complotiste). En dehors même des usages universitaires, "Racisme d'état" était déjà employé par le MRAP (pas vraiment un mouvement communautariste ultra radical) dans les années 80. Il l'est aussi par des historiens pour parler de périodes de l'histoire de France où l'état ne se montrait pas raciste dans ses principes en métropole mais menait bien des politiques racistes dans ses colonies (ou de fait vis à vis des colonisés), ce terme n'a jamais concerné que l'apartheid total.
- Y mêler la question des réunions non mixtes, elle même injustement assimilée à des regroupements "interdits selon l'origine" (alors que là où les identitaires ou autre PIR ne proposent pas d'activité alternative à leurs camps pour ceux n'ayant pas la couleur nécessaire à y assister, SUD 93 proposait une simple division de son public pour que chacun travaille sur son propre aspect du problème, ce qui n'a rien de bien scandaleux)
- Au sujet de la non-mixité poser une équivalence entre des réunions de type alcooliques anonymes ("on va témoigner des difficultés rencontrées, échanger des conseils et se soutenir moralement mutuellement") et des meetings politiques entre membres d'une communauté ("on va se réunir entre membres du groupe x rival des autres pour voir comment faire avancer notre cause et les écraser") , là encore un sujet où cette question devrait être traitée au cas par cas (et celui de SUD 93 n'a rien à voir avec celui des camps d'été identitaires) ;
- Ignorer le fait que "racisés" n'étant pas une race on ne peut pas parler de préférence raciale même si une réunion leur est réservée (après tout un blanc peut tout à fait aussi être réduit à cette appartenance à une race par certaines personnes ; à moins de donner à racisé une définition que le terme ne devrait pas avoir, et qui est encore une fois celle qu'ils devraient combattre)
[quote=Il y a des groupes qui prétendent imposer une certaine manière de dire et de voir le racisme et l'antiracisme.]

Au-delà du reste de l'article (très clair et complet), cette citation de Fabrice Dhume me fait sourire : car elle peut tout autant désigner ces groupes entendant combattre le racisme via la non-mixité, ou voulant le réduire à sa seule dimension systémique... Je la trouve assez symptomatique, cette phrase, de la façon dont une certaine gauche juge inacceptable, dans le débat public, les positions ou grilles de lecture contradictoires aux siennes.

Ce qui n'empêche pas les poursuites engagées par Blanquer d'être totalement débiles et disproportionnées...
Bravo Hélène pour cet article vraiment éclairant et enrichissant.
On tord les mots, on les vide de leur sens. Qui ça, on ? Ben, les ceusses que je soupçonne un tantinet racistes... Exemple : hommes ou femmes de couleur ; le blanc n'est-il pas une couleur ? Afro-Américains ; pourquoi pas « Noirs » ? pourquoi n'y a-t-il pas d'Européo-Américains ? Quand j'entends ces mots-là, je sens qu'ils viennent de gens qui se croient dans la norme, qui pensent assurément que c'est l'autre qui est différent ! La première fois que j'ai entendu Afro-Américain, j'ai cru qu'il s'agissait d'une personne ayant une double-nationalité. J'aime qu'on appelle un chat un chat, un Noir un Noir et un Noir américain un Noir américain (quoique Noir états-unien serait plus correct : mon épouse vient d'un pays d'Amérique centrale et elle est tout aussi américaine).
Il y a bien sûr quantité d'autres exemples de mots malmenés qui sont hors du sujet traité ici, comme par exemple : avenue, demandé à la mairie de ma ville par le promoteur alors qu'il s'agit d'une modeste impasse ; vidéo-protection, qui ne protège rien et qui remplace peu à peu le mot vidéo-surveillance...
Sur la plainte de Blanquer, j'ai lu plus haut de la part d'un forumeur qu'ASI nous tienne au courant de la suite de cette plainte. Ça finira par un non-lieu, c'est sûr. Ça fait partie du jeu, il faut faire voir qu'on lutte contre les excès en étant soi-même excessif, sinon, on risquerait d'entendre l'opposition de droite et d'extrême-droite se plaindre que le gouvernement est passif, qu'il ne prend pas le problème à bras-le-corps, etc.
Un petit exemple de racisme d'état : sur France-télévision, il existe une chaine "outre-mer". J'ai découvert avec stupéfaction sur le site de replay que les séries diffusées sur cette chaine ont pour point commun non pas de se situer dans un département ou un territoire d'outre-mer, mais de comporter un (au moins, et souvent un seul) acteur "non blanc", en général noir ou métis. Et ces séries, qu'elles se passent en métropole ou ailleurs, que les personnages ou les acteurs soient métropolitains ou pas, ne sont diffusées QUE sur cette chaine. Effarant, m'est avis.
Ma blanchité m'exonère au moins du terrible soupçon de chercher à me victimiser. Mais passée la sidération, c'est un sentiment de scandale et de révolte qui me saisit.
wé. C'était bien la peine que vous fassiez "barrage au front national"...
[Message du dessus à supprimer]

Comment ne pas voir que ces récents mouvements soit disant anti-racistes sont le fruit de la société libérale et individualiste ? Comment ne pas voir une éthnicisation des débats ? Comment ne pas voir qu'il s'agit d'une importation américaine non adaptée à notre pays ? Comme ne pas voir du communautarisme là dedans ?

On cherche à adopter le modèle américain en France mais celui ci est une catastrophe ! Ils sont embourbés dans une éthnicisation des débats dont il n'y a aucun moyen de sortir. Regardez la campagne d'Hillary Clinton : si vous êtes noir votez pour moi, si vous mexicain votez pour moi, si vous êtes une femme votez pour moi.. Les débats sur l'économie et la politique internationale passe à la trappe. Au moins aussi scandaleux que Trump, on en a pas parlé ici..

En France, il y a du racisme je ne le nie pas mais la solution à cela ne serait elle pas d'appeler à l'unité du peuple et à son indivisibilité plutôt que de sacraliser les différences et réintroduire sans cesse la notion de race dans le débat publique ?

Petit truc pour reconnaître un communautariste : il cherche sans cesse à se victimiser. Ainsi le FN se plaindra du racisme anti-blanc, Houria Bouteldja se sentira persécutée pour être musulmane, la Licra verra de l'antisémitisme partout..
Ah oui le FN c'est du communautarisme, celui du grand groupe, l'extrême droite s'est ramolli avec le temps, le racisme pur et dur de l'époque est terminé, point de danger fasciste.

Mettons tout ces briseurs d'unité dans le même sac et jettons-les à la boue amigo ! Ton ennemi principal c'est le Capital mon frère, c'est lui qui a le pouvoir, non la Réaction, en train de crever. Ne les laissons pas nous diviser ni nous divertir de la lutte contre l'Argent.

Ps : organisez donc un débat entre un de vos idiots utiles d'anti-racistes et Jean-Claude Michéa, on risque de bien se marrer..
Comment ne pas voir que ces récents mouvements soit disant anti-racistes sont le fruit de la société libérale et individualiste ? Comment ne pas voir une éthnicisation des débats ? Comment ne pas voir qu'il s'agit d'une importation américaine non adaptée à notre pays ? Comme ne pas voir du communautarisme là dedans ?

Il y a du racisme je ne le nie pas mais la solution à cela ne serait elle pas d'appeler à l'unité du peuple et à son indivisibilite
J'apprécie beaucoup cet article.

Et je n'ai toujours pas compris sur quoi se basent ceux qui veulent faire interdire des réunions et groupes de parole entre personnes choisies.

Moi, dans mes réunions syndicales (pas le même syndicat ni le même département que celui qui est dans le viseur de Blanquer), nous ne sommes qu'entre syndiqués du même syndicat : nos rencontres ne sont pas ouvertes à tous, et en plus, pour être dans le syndicat il faut payer. Je n'ai jamais entendu personne trouver cela scandaleux.

J'imagine que dans les associations de pêcheurs à la ligne il faut être pêcheur à la ligne, j'imagine que pour assister à une réunion du MEDEF il faut être patron, et qu'en conférence de rédaction d'@si il faut faire partie de la rédaction d'@si, au bureau des élèves d'une école il faut être élève de l'école ... et donc, c'est quoi le problème ?

Mais si on change cette règle, je veux assister à un conseil des ministres, et avoir mon mot à dire !
Cet article publié sur un blog de Mediapart complète bien celui d'Hélène Assekour, excellent au demeurant.
Il répond notamment à la question posée sur ce forum de la différence entre racisme d'Etat et régime d'apartheid (i.e. Etat raciste).
"Pourquoi, alors, une telle peur de l'usage de ces mots ?"

Mais qui vous dit que Blanquer a peur ?
C'est un agrégé de droit public, je ne pense pas qu'il ait peur des mots, il travaille avec, c'est la matière de son travail et la substance de toutes les interrogations.

Il a le droit en revanche de juger que ces mots, ces "concepts", ne sont pas pertinents, ce qui apparemment vous échappe totalement.

C'est le nouveau paradigme de gauche : quand d'autres ne sont pas d'accord avec vous, c'est qu'ils ils ont peur, ou sont ignorants.

Euh non, ils pensent simplement que ces mots ne disent rien de pertinent de l'état actuel de la société, et c'est de cela qu'il faut discuter, si on est pas d'accord.

Quant au détour par la sociologie, il est intéressant, mais ce qui le serait davantage, ce serait de porter la contradiction (ce qu'apparemment vous défendez volontiers face à des penseurs que vous n'aimez pas) et notamment en piochant dans ces mêmes sciences sociales des travaux contradictoires.
Quant à la dernière citation de l'article, elle est fabuleuse - comme si qui que ce soit voulait interdire à qui que ce soit de s'exprimer sur ce qu'il estime être sa condition. Simplement, s'il faut être d'une condition donnée pour en dire quelque chose de valable, alors rentrons chacun chez nous et parlons de nos nombrils, seul sujet que nous sommes susceptibles de maîtriser correctement.
Il y a 5-6 ans j'avais quitté Tumblr pour ce genre de conneries je crois que ça va finir de même avec Arrêt sur Image. Cela donne l'impression que les gens ne réalisent pas.
Rassurez-moi, ce Blanquer, il ne se mêle pas d'éducation, d'enseignement et de recherche, hein ? Ouf, on a eu peur ! (Comme pour Moscovici qui découvre l'évasion fiscale, heureusement que c'est pas sa spécialité.)

Donc le seul ministre de ce gouvernement à avoir une visibilité minime l'exploite pour taper sur les syndicats enseignants, les sciences sociales et les personnes racisées.

Je ne regrette pas de m'être abstenue au 2ème tour, tiens.

Es-ce que Blanquer a pensé à informer Macron que le racisme d'État n'existe pas, lui qui a expliqué à une femme marocaine sans papiers dont les parents vivent en France et qui sont malades que "s'ils sont soignés, c'est que QUELQU'UN a payé ?" (pas eux-mêmes en cotisant, on sait bien que les marocains, quand ils ne sont pas "rien", c'est des fainéants). Personne ne relève ni l'insulte ni l'insupportable arrogance, et tous les éditorialistes félicitent ce sale type pour sa franchise.

C'était bien la peine de faire barrage au FN.
Académie Française et gouvernement s'imaginent qu'ils peuvent nier l'existence de discriminations implicites dans la société en censurant le langage, Ce serait drôle si ce n'était pas si triste.

@asi: j'aimerais bien que vous nous donniez des nouvelles de la plainte pour diffamation dans quelques mois, quand elle aura été dûment enterrée sous son propre ridicule.
très bon article, bien documenté, la conclusion est parfaite.
Prenez le cas d'un jeune homme blanc de 25 ans, et demandez vous s'il avait été arabe ou noir si ça aurait changé son parcours.

Dans le cas de mon fils de 25 ans, bac, licence Pro, CDD au CNRS puis embauché dans une entreprise privée.

Je ne vois pas bien, en quoi, noir ou arabe, il n'aurait pas pu avoir le même parcours.

Précision, son parton actuel est arabe ...

Donc à part accuser de racisme, le CNRS ou l'éducation nationale,dans ce cas, je ne vois pas où il y aurait pu avoir discrimination.

Alors bien sûr le racisme existe, mais plein d'autre chose aussi, trop gros, trop maigre, trop moche, trop beau (?), vieux, peu vif d'esprit, pas de charisme, peu de soutient familiale ...

Donc oui, être racisé, c'est un handicap mais pas plus que plein d'autre chose et je pense que les gros, les moches ... n'en font pas un fromage et s'en porte mieux.

Quand à lutter contre le racisme, c'est perdu d'avance et contre productif, le racisé lui même fait parti d'un groupe où il y a plus ou moins autant de raciste que dans le groupe non racisé.

Aujourd'hui, tout le monde à un tél portable, si vous pensez que vous allez être victime d'un discours raciste (ou de harcèlement sexuel), enregistrer et diffuser, ce sera beaucoup plus efficace que de se plaindre que le monde entier vous en veut.

Conclusion, oui aux lois anti discrimination et à la traque des racistes, sexistes, etc ..., non aux luttes antiracistes ou autres qui divisent tout le monde et sont parfaitement inefficace et qui rendent paranoïaque la victime potentielle.

Prenez le cas d'un jeune homme blanc de 25 ans, et demandez vous s'il avait été arabe ou noir si ça aurait changé son parcours.



Dans le cas de mon fils de 25 ans, bac, licence Pro, CDD au CNRS puis embauché dans une entreprise privée.



Je ne vois pas bien, en quoi, noir ou arabe, il n'aurait pas pu avoir le même parcours.



L'existence de discriminations raciales est pourtant bien établie : s'il avait été noir ou arabe il aurait subi en moyenne deux ou trois fois plus de contrôles d'identité. Il aurait aussi eu moins de chances de trouver un logement à proximité de son travail. Il aurait donc probablement été en retard plus souvent au travail et/ou moins reposé, avec des conséquences potentielles sur sa productivité et l'opinion de ses supérieurs. Pou finir son CV avec un nom arabe aurait de toute façon eu cinq fois plus de chances d'être rejeté.

Donc oui, bien sûr il aurait pu avoir le même parcours, mais statistiquement ses chances de succès auraient été nettement plus faibles.
Damned, mal placé.
On attend l'argument : "d'ailleurs je connais un.e noir.e/arabe dont les parents sont maçon/femme de ménage et qui est chef d'entreprise/haut-fonctionnaire/élu, mais LUI/ELLE en voulait au lieu de passer son temps à se plaindre !"

Parce que c'est bien connu, il suffit de vouloir. La plupart des gens "n'en veulent pas" donc ils sont racisés, assistés epicétou et ceux qui en veulent, ils possèdent plus que la moitié dela planète, composée donc, CQFD, de fainéants, de glandeurs, de gens qui ne sont rien, bien fait pour eux !
Ah ben si, on l'avait l'argument : le patron de mon fils est arabe. CQFD again.
"quand on veut on peut ;)"
La conclusion de cet article est parfaite !
Oui, je sais bien qu'être arabe est un handicap, comme être moche ou gros et donc on fait quoi ?

On continu comme les 30 dernières années à bien appuyer là où ça fait mal et avec quel résultat !

Il n'y a jamais eu autant de racisme en France et c'est valable pour les deux camps fictivement crée par l'hystérisation du débat.

Je pense que s'il y a 30 ans, on n'avait parlé de racisme, de sexisme ou de n'importe quel autre discrimination uniquement dans les tribunaux, on avait une chance d'apaiser les choses.

Que je sache, les bruns au teint mate et yeux noir comme moi n'ont pas de racisme envers les blondes, blanches aux yeux bleus comme ma femme, pourtant la différence saute aux yeux.
"Les deux camps fictivement créés par l'hystérisation du débat"
Et oui, ce n'est pas le racisme qui divise la société entre ceux qui le subissent et ceux qui ne le subissent pas (et donc en bénéficient, volontairement ou non), c'est le fait d'en parler.
Vous avez d'autres blagues de ce genre en réserve ?
C'est un raisonnement circulaire : si on considère qu'il n'y a pas de racisme systémique alors le fait d'en parler crée une division- marche aussi avec le sexisme, la lutte des classes etc.

(C'est encore plus cocasse chez les tenants du racisme anti-blanc : non seulement y a pas de racisme mais en plus il est contre nous.)
Je crois que le chercheur cité dans l'article vous a répondu :

"Des gens qui ne subissent pas le racisme se permettent de dire comment on a le droit d'en parler et de dénier à ceux qui le subissent la possibilité d'en parler."

On peut difficilement faire plus clair.

Et c'est exactement pour éviter de répondre à ce genre d'argument que les racisés préfèrent DE TEMPS EN TEMPS parler de leur problème entre eux, comme les femmes préfèrent PARFOIS se retrouver entre elles pour éviter de perdre du temps à répondre à des types comme Finkie qui leur expliquent qu'elles ont le droit d''avoir une chambre à elles (???? y'a combien de pièces chez Finkie), et donc que l'égalité est acquise, affaire réglée, next, si on parlait plutôt des musulmans, hein, en voilà une idée qu'elle est bonne ?
Comme si les racisés ou les femmes n'avaient pas 1000 occasions de parler entre eux ou entre elles ...

C'est vrai qu'il est urgent de formaliser des réunions qui de toutes évidences contreviennent à la loi qui par ailleurs est faite justement pour lutter contre toutes les discriminations.
Il y a des tas de raisons qui peuvent faire qu'il n'aurait pas eu le même parcours. Et pas nécessairement par du racisme qu'il aurait subi directement. Peut-être par celui que vous auriez subi vous dans la France d'il y a 40 ans et qui vous aurait empêché de lui permettre de faire des études jusqu'au bac, tout simplement parce que votre position sociale n'aurait pas été la même.
Et tous les racistes qu'il a croisés ? Peut-être les a-t-il identifiés au détour d'une remarque, mais il n'a pas eu à subir les conséquences de ce racisme. Peut-être même a-t-il profité du racisme sans même le savoir parce qu'un autre candidat aurait été écarté sans même qu'il soit au courant ? Et le fait qu'il soit un garçon ? ça peut aider aussi.

Il est extrêmement difficile de voir à quel point la vie est différente quand, dans votre société vous êtes du groupe majoritaire. Il y a des choses tellement naturelles que leur sens nous échappe. Quand j'étais petit il n'y avait que des pansements couleur chair qui étaient roses pâles. Maintenant il y a du transparent mais je ne m'étais jamais étonné de cette dénomination et du fait que l'on ne trouvait que ça.

Quant à comparer le fait d'être racisé avec celui d'être handicapé, gros ou moche c'est d'une part, faire fi de la dimension de classement social, et d'autre part ne pas percevoir la particularité du racisme qui vient projeter une fracture entre racistes et racisés qui souvent est plus large que toutes les autres. Mais ce n'est pas cela qui est le sujet. Les groupes de parole qui souhaitent faire des réunions entre victimes de tels ou tels discrimination ne cherchent pas à résoudre les cas isolés. Comme vous l'écrivez le racisme individuel dans des cas précis est du ressort de la loi. Il s'agit plutôt de collecter puis de discuter les expériences que peuvent vivre des personnes racisées dans une société dans laquelle elles sont minoritaires. Ce discours est en amont du travail de résolution, il permet de mettre le doigt sur tout ce qu'une personne non discriminée ne verrait pas tout en permettant d'évaluer, avec d'autres victimes, ce qui ressort de l'expérience objective de ce qui serait mal interprété du fait de discriminations antérieures. Bien sûr, ensuite il faudra mobiliser l'ensemble des personnes qui se sentent concernés par le sujet pour trouver des moyens de résoudre ou du moins d'atténuer les problèmes identifiés.
Mais dans un premier temps, est-il nécessaire d'introduire dans le groupe quelqu'un qui n'a pas vécu les situations décrites et qui va dire que "ouais, être noir c'est un handicap comme un autre alors vous n'allez pas nous en faire un fromage." ?
Voyez ça comme les Alcooliques Anonymes. Vous pouvez être volontaire pour aider à organiser les réunions mais serez vous pertinent après avoir commencé par : "Bonjour moi c'est Jean-Luc et je ne bois pas. Et puis je trouve que la bière c'est amer, le vin ça pique et que le rhum ça pue. Encore que dans un baba c'est pas mal mais je résiste à la gourmandise parce que je ne veux pas devenir un gros porc." ?

Le but de la séparation lors des réunions de témoignage n'est pas de séparer les racistes des non-racistes, c'est de séparer les victimes du racisme d'une société majoritairement blanche de ceux qui n'en sont pas victimes. Le raisonnement est exactement le même pour les réunions qui abordent le sexisme.
ça me fait penser :

Est-ce que les Alcooliques Anonymes interdisent formellement (c'est écrit ?) la présence de personne n'étant pas alcoolique ?

Une personne non alcoolique qui se présente (ça arrive ?) on lui expliquerait gentiment que ça ne le concerne pas et que sa présence peu gêner, nulle besoin de l'interdire formellement.

Question : Pourquoi les AA n'ont pas besoin d'interdire leurs réunions aux non alcooliques ?

Hypothèse :
- Soit il existe dans le milieu de l'anti racisme des non racisés tellement hystériques qu'ils ne peuvent pas comprendre qu'il est gênant de participer à des réunions qui ne les concernent pas.
- Soit ce problème n'existe pas et il s'agit belle et bien de faire de la provocation. On montre par là que ce n'est pas le racisme qu'on combat mais qu'on fait la promotion de la lutte de tous les racisés contre tous les non racisés. Une forme de racisme inversé, qui malgré ses petits bras, n'est pas plus légitime que le racisme anti-arabe ou anti-noir.
Eh bien la sociologie, cette non-science, vous répond : des études effectuées dans les années 1990 ont montré qu'une grande partie des personnes qui participaient aux réunions d'A.A. n'étaient pas alcooliques. Elles se servaient du réseau pour se faire des amis, trouver du boulot, trouver un logement, etc. C'est parfaitement logique dans une région qui attire autant de migrants (de naitonalité américaine ou autre) et dans une société basée sur le plus petit dénominateur commun. Cela étant posé, il existe ALANON qui est pour les proches d epersonnes alcooliques et c'est là que les non-alcooliques sont censés se retrouver, pas chez A.A. où les personnes non-alcooliques font semblant de l'être. Parce que justement, A.A. a été fondé pour que des alcooliques parlent entre eux de leur "problème avec l'alcool" comme ils disent. (Par ailleurs, c'est un lobby - les tribunaux ordonnent systématiquement des "thérapies" A.A. dont l'efficacité n'a jamais été démontrée - et une espèce de secte protestante, mais c'est pas le sujet ici).

Dans le genre, vous avez le cas récent d'une femme blanche qui s'est fait passer pour noire à la tête d'une organisation anti-raciste et qui a été dénoncée par ses propres parents. Elle a été virée manu militari. Son histoire montre à sa manière à quel point la "race" est une construction sociale.

C'est ce besoin bien naturel de "to belong".

Et oui, il existe des non-racisés hystériques. Typiquement ceux qui ont séquestré la marche pour l'égalité de 1983 et ont renvoyé les "beurs" dans leurs quartiers après les avoir dépouillés de leur propre combat. Les personnes racisées en ont tiré les leçons.
Je ne vois pas bien, en quoi, noir ou arabe, il n'aurait pas pu avoir le même parcours.

Avez vous vérifié, au moment de son embauche, si un noir ou un arabe, voire même plusieurs, n'avaient pas postulé avec un CV équivalent, voire meilleur? C'est ce que constatent les expériences de testing... Le fait que le patron soit arabe ne modifie pas obligatoirement les pratiques.

Et j'aime bien la manière dont vous "conseillez", de façon très légèrement condescendante, les racisés pour qu'ils ne soient pas "contre-productifs", qu'ils cessent de se plaindre, alors que d'autres (vieux, moches, boiteux ou borgnes) n'en font "pas un fromage".

Vous auriez voulu nous faire une caricature de "chuis pas raciste mais" relooké en "soyez positifs", vous n'auriez pas mieux fait.

Euh, il me vient un doute, votre commentaire, c'est pas du second degré, au moins, que j'aurais ridiculement pris au sérieux?
Si c'est du second degré, c'est du grand art, et dans ce cas, chapeau bas !
Je ne m'adresse pas particulièrement aux racisés : "Quand à lutter contre le racisme, c'est perdu d'avance et contre productif"

Et je ne fais pas de différence entre racisés et non racisés, puisque je suppose "le racisé lui même fait parti d'un groupe où il y a plus ou moins autant de raciste que dans le groupe non racisé. "

Drôle d'idée (reste d'un esprit colonial ?) que de penser que j'aurais de la condescendance pour quelqu'un de racisé, alors même que l'anti-racisme est largement porté par des non-racisé.
"le racisé lui même fait parti d'un groupe où il y a plus ou moins autant de raciste"

Cette phrase montre que vous n'avez pas vraiment compris la notion de "racisé".
Relisez l'article, il est très clair.
Je veux bien comprendre racisé comme quelqu'un qui peut subir du racisme par rapport à un groupe dominant et c'est comme ça que je l'utilise.

Mais ça serait sympa de laisser quelques mots pour exprimer l'attitude de ceux qui stigmatisent l'autre en fonction de sa race même si celui-ci est lui même victime de racisme.

Je ne pense pas qu'être victime de racisme donne le droit de produire soit même du racisme, sinon, on ne va pas s'en sortir.

D'ailleurs, je ne pense pas qu'on va s'en sortir, le racisé se radicalise et la raciste se trouve conforté dans son racisme par cette radicalité.
L'article peut vous sembler clair, toujours est-il que la notion de "racisé" ne l'est pas tant que ça : "racisé" est fondamentalement une émotion, un sentiment, un ressenti.

Que les choses soient claires : ça n'en fait pas quelque-chose "d'imaginaire". C'est tout à fait "réel". Pour autant, c'est subjectif et variable. Pour une personne donnée, l'affect "racisé" est variable selon son interlocuteur, ses interactions sociales, les circonstances, l'environnement, le contexte, etc. Lors d'un contrôle de police au faciès, l'affect "racisé" est poussé à un certain paroxysme. Alors que dans la même journée, au travail par exemple, en famille, ou à la fac, cet affect serait peut-être moindre, voire oublié, inexistant, l'espace de quelques heures.

En ce sens, je me sens beaucoup plus proche de RRJL "qui a envie" d'une vie normale pour tout le monde, et tout le temps, que de cette proposition sociologique "qui a envie" de prouver un racisme continu et incontournable. Parce-que la prémisse me gêne: je ne souhaite pas que le racisme soit posé comme une variable constante, au même titre que la Gravité, la constante de Planck, ou ne nombre d'Avogadro.

Le racisme est réel, l'affect "racisé" est réel. Et malheureusement, ça se passe tous les jours, pour beaucoup de monde, et dans la plupart des d'endroits. Mais je refuse que le racisme soit considéré comme une vérité consubstantielle et éternelle du genre humain. Sociologiquement, si l'on regarde les gamins dans les crèches, il semblerait que le racisme leur soit totalement étranger. Le racisme et l'affect "racisé" ne sont donc que des constructions sociales. Détestables, quasi omniprésentes, mais certainement pas consubstantielles au genre humain.

Et c'est bien parce-que "racisé" est un affect, qu'il est facile de le combattre: il suffit de ne pas le combattre. Plus vous combattez un affect, plus vous l'alimentez, et plus il vous dévorera. Et au fur et à mesure que vous l'oubliez, il disparaît. Ca peut paraître contre-intuitif dans notre société, avec nos paradigmes, notre culture, mais toutes les questions ne sont pas bonnes à être ruminées. Vous ne devriez pas inventorier vos citoyens par race. Pas plus que vous ne devriez textoter votre ex, bourré, à 3h00 du matin. De la même manière que votre pays devrait lâcher prise sur l'armement nucléaire.

Vous êtes blanc, de situation modeste ou aisée : oubliez purement et simplement le concept de "racisé". Quand plus personne n'y pensera (ou seulement une irréductible fraction de connards), ce ne sera alors déjà plus un problème.
Si ce n'était qu'une question de ressenti personnel, ce serait pas mal mais on parle de constructions historico-sociales de catégories, de représentations imprégnant une société, qu'on le veuille ou pas.
Une vidéo pas mal faite : Tous racistes ? Les biais implicites — Crétin de Cerveau #7.

Et au niveau institutionnel, cas d'école aux USA : Ethnicity and race identification, formulaire type de 2005 que donne l'Office of Personnel Management, agence indépendante du gouvernement responsable de la fonction publique du gouvernement fédéral des États-Unis.
Les cases où les gens sont censés se reconnaître :
"> Are You Hispanic or Latino? (A person of Cuban, Mexican, Puerto Rican, South or Central American, or other Spanish culture or origin, regardless of race.)
> racial category :
- American Indian or Alaska Native : A person having origins in any of the original peoples of North and South America (including Central America), and who maintains tribal affiliation or community attachment
- Asian : A person having origins in any of the original peoples of the Far East, Southeast Asia, or the Indian subcontinent including, for example, Cambodia, China, India, Japan, Korea, Malaysia, Pakistan, the Philippine Islands, Thailand, and Vietnam.
- Black or African American : A person having origins in any of the black racial groups of Africa
- Native Hawaiian or Other Pacific Islander : A person having origins in any of the original peoples of Hawaii, Guam, Samoa, or other Pacific Islands.
- White : A person having origins in any of the original peoples of Europe, the Middle East, or North Africa"
"

Dans l'Europe n'ayant pas oubliée ce qu'a donné le racisme chez elle, ce genre de choses est sans doute aberrant. Il n'en reste pas moins qu'on a aussi nos catégories dans le discours public, dans les représentations spontanées, que d'aucuns comptent "les-noirs-et-les-arabes" dans l'équipe de foot nationale, que d'autres regardent les données de dépistage de la drépanocytose pour mesurer le "grand remplacement" à défaut de statistiques ethniques etc.
Il y a bien sûr des constructions historico-sociales. Mais elles se sont bâties sur des ressentis individuels... et les entretiennent. Ces ressentis étant les briques élémentaires de l'édifice.

La vidéo que vous me proposez va tout à fait dans ce sens. Schématiquement une personne est exposée à un "discours" sur l'agressivité. Cette personne "reproduit" un comportement agressif envers une autre personne (la personne qui récupère les copies). Et cette expérience suggère que puisque cette deuxième personne est alors à son tour exposée à de l'agressivité, alors il est probable qu'elle reproduise encore à son tour un comportement agressif (dans l'hypothèse où l'on ne serait plus dans un dispositif expérimental).

Les USA sont noyés par un discours sur le racisme et les racisés, auquel chacun participe, et personne n'échappe. L'effet boule de neige de ces biais implicites est tellement énorme que tous le monde y est exposé quotidiennement, et abondamment. A tel point qu'il ne serait probablement pas ridicule d'émettre l'hypothèse que cette "grille de lecture ethniciste" ait finie par faire partie intégrante de la culture états-unienne.

Il ne s'agit pas de dire que les USA sont racistes. Mais que cette grille de lecture y est un réflexe systématique. Probablement comme l'argent, du reste.
Quasi par définition, je parle des constructions historico-sociales pour les distinguer des ressentis individuels, distinguer les conditionnements ayant des causes sociales de ceux venant de l'individu tel qu'il se construit lui-même avec un minimum d'exercice réflexif. Quand vous dites que ça finit par faire partie intégrante d'une culture, c'est bien le sujet. Une culture n'est pas affaire individuelle, c'est une notion collective.
Il s'agit de voir ce qui dans une société entretient les réflexes racistes quoi qu'en disent toutes les déclarations d'égalité, la loi etc.
Quand Bruanne parle d'une de ses élèves qui ne se voyait pas professeur parce que les enseignants étaient "blancs", c'est une situation sociale qui a conditionné la représentation de la gamine malgré la bonne volonté des enseignants.

Et il y a aussi un historique raciste explicite chez nous : tout le discours du racialisme "scientifique" au XIXe, sa contrepartie culturaliste avec l'ethnie, le colonialisme civilisateur etc. se sont voulus objectifs, sont passés dans l'éducation des masses, avec expositions universelles, zoos humains et manuels scolaires.
Question conditionnement, cf ce manuel CE1-CE2, édition 1966 sur des programmes de 1957 :
- p. 141 : "Berbères et Arabes, de race blanche, vivent surtout dans les villages. Ils viennent nombreux travailler dans les villes comme ouvriers et artisans. Les Européens, surtout des Français, ont créé sur la côte de grandes villes modernes, ils ont mis en valeur les plaines bordant la mer et favorisé la naissance d'une industrie."
-p. 146 et 148 : "C'est l'Afrique Occidentale et Equatoriale, aussi appelée Afrique Noire parce qu'elle est habitée par des peuples de race noire. (...) Dans la forêt, les Noirs construisent des huttes avec des branchages. Ils mangent des fruits et des légumes récoltés dans les clairières ou les produits de la chasse. Dans la steppe, les Noirs sont surtout des éleveurs de boeufs et de moutons."

Les manuels scolaires ont bien changé mais on a le poids des médias et des vieux de la vieille qui ont grandi dans l'ambiance du bon vieux temps des colonies (Finkielkraut et Patrick Buisson nés en 1949). Et quelle image de l'Afrique ou du Moyen-Orient a-t-on quand on n'en parle que de manière négative, histoires de guerres, de réfugiés, de misère etc. ?
Le test de la vidéo avec l'association difficile entre insectes et qualificatifs positifs pourraient être fait avec des choses moins amusantes concernant de l'humain.

distinguer les conditionnements ayant des causes sociales de ceux venant de l'individu

Sauf votre respect, cette distinction n'a guère de sens. Si quelque-chose est "sociale" - si tant est que ce mot ait un sens - c'est qu'elle est le fruit d'individus. Par exemple, il est assez courant de désigner "le conditionnement médiatique" comme un "facteur social", voire une "construction sociale". Mais il ne faudrait surtout pas oublier qu'à la base un article c'est une autrice, qu'une interview c'est un intervieweur, et qu'un JT c'est une équipe de rédaction. Il n'y a rien de "social" qui ne porte de responsabilités individuelles.

Cependant, concernant le journalisme, les sociologues ne s'arrêtent pas à l'étude d'un article de manière sémantique ou linguistique, ni à la psychologie et aux intentions de son auteur. Non, ce que proposent les sociologues, c'est d'en étudier également la portée. C'est à dire qu'un article a non seulement une autrice, mais aussi des lecteurs. Une interview c'est non seulement un intervieweur et une interviewée, mais aussi des téléspectatrices. Et un JT c'est non seulement une équipe de rédaction mais aussi un public.

Ainsi, si le "social" est plus que la somme des individus qui le composent, c'est parce-qu'il s'y trouve également les interactions entre ces individus. Et loin d'être une abstraite entité éthérée, un "facteur social" relève de la responsabilité de ceux qui l'émettent ET de ceux qui le reçoivent. Dès lors, "chosifier" à outrance ces interactions et/ou une partie des acteurs, et en particulier les "émetteurs", c'est l'assurance de s'empêcher de penser et de comprendre le "social" parce-qu'on occulterait tout un pan de l'interaction.

Vous dites: "une culture n'est pas affaire individuelle, c'est une notion collective". Je suis d'accord. La culture est plus que la simple juxtaposition de pratiques individuelles. Il y a culture lorsque deux individus ayant les mêmes pratiques (par exemple une langue) interagissent. On peut alors s'interroger par exemple sur l'impact d'une langue sur les individualités, leur structuration intellectuelle et leur représentation du monde. Mais la langue, ce "conditionnement social" n'a rien d'une chose abstraite, désincarnée, qui flotterait dans l'éther de la mythologie politique: la langue, c'est des gens qui la parle, ou encore plus exactement, c'est des gens qui parlent à d'autres gens.

Quand la sociologue Monique Pinçon-Charlot décrit la "bourgeoise", il ne s'agit en aucun cas de chosifier, de mythifier, de fantasmer une construction et des conditionnements sociaux. Bien au contraire, tout son travail consiste à sortir la lutte des classes de son ghetto théorique pour lui donner corps et examiner les responsabilités concrètes et individuelles en les touchant, en les palpant, en les tâtant. Elle décrit alors des interactions tout à fait tangibles comme l'homogamie et la ségrégation spatiale.

La Révolution française, les manuels scolaires, la "société", les articles de presse, les classes sociales, le marché et l'économie ont un point commun: c'est des gens qui les font avec leur subjectivité, leur irrationalité, et leurs ressentis. Et tout facteur social que vous pouvez trouver a pour origine, in fine, une personne ou un groupe de personnes, eux-mêmes exposés à d'autres (ou aux mêmes) facteurs sociaux. Et une construction sociale n'a rien d'absolu, ni d'autonome, et encore moins d'éternel: elle n'a d'existence que si des personnes lui donnent corps, l'entretiennent, éventuellement la transforme, et la maintiennent en vie. Et c'est précisément ce qui fait la force et la faiblesse d'une république et d'une culture.

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Soit dit en passant, Harvad a élaboré des tests d'associations implicites (TAI) concernant l'orientation sexuelle, la couleur de peau, le genre, le poids, le pays, l'âge, etc. Un site web présente une méthode qui démontre des divergences entre pensées conscientes et non-conscientes, et permet d'effectuer ces TAI.
Vous dites "Si quelque-chose est "sociale" - si tant est que ce mot ait un sens - c'est qu'elle est le fruit d'individus" et en sociologie, on dirait plutôt "si quelque chose est individuel - si tant est que ce mot ait un sens - c'est en lien au social".

Vous insistez sur la responsabilité individuelle, la sociologie insiste sur ce qui conditionne concrètement les individualités. Je dis concrètement parce qu'on ne parle pas de généralisations creuses, de catégorisations abstraites mais de forces n'étant la propriété de personne en particulier, impersonnelles, intrinsèquement collectives (à noter que "champ" est entré dans la pensée sociale après qu'il se soit imposé en physique où il donne corps à une généralité avec la particule comme détermination particulière du champ, contre la vision atomistique des corpuscules indépendants.)

Je parlais de la tendance aux USA à la segmentation communautaire et du lien au marketing, et ce dernier ne doute pas de l'intérêt des sciences sociales, des faits sociaux avec leur explication causale propre. Il s'en sert dans le marketing politique et, bien sûr, pour faire de l'argent. Que font les exploitants de réseaux sociaux, les Facebook, Google, Twitter etc. ?
Domaine de recherche de Facebook sur les data avec des publications comme : Social Structure and Trust in Massive Digital Markets ou Untagging on Social Media: Who Untags, What do they Untag, and Why?.

Ils ne se préoccupent pas des personnes elles-mêmes, juste des comportements de masses, de groupe.

Et désolé, mais pour moi, les Pinçon-Charlot sont dans la droite ligne des analyses (marxistes) de classe ou de milieux à la Bourdieu, serait-ce un milieu réduit. Ils parlent d'une conscience de classe (haute bourgeoisie, aristocratie), de comportement de groupes n'ayant pas l'aléatoire de comportements individuels isolés. Historiquement, ces milieux sont là depuis au moins Molière et son bourgeois gentilhomme, alliance de l'aristocratie et de la haute bourgeoisie, cultivant sa distinction par rapport au petit peuple (cf Proust pour une vue de l'intérieur, les conditions d'entrée dans le milieu etc.).
La tribu défend sa culture, ses rituels, ses territoires, une certaine identité collective. Quand les Pinçon-Charlot disent qu'on peut les nommer, ce n'est pas pour leur individualité mais pour identifier leur réalité de groupe (cf le P.S. pour quelques liens familiaux).
Question politique, ces milieux ont intérêt à ce que le petit peuple croit au mérite individuel pendant qu'eux ont une conscience de classe, "premiers de cordées" nés pour être en haut, aristocratie républicanisée en méritocratie où on prétend qu'ont disparu les aspects héréditaires des positions.

Et pour aussi parler racisme : quand des "racisés" entendent s'organiser eux-mêmes, il ne faut pas s'étonner que des "non-racisés" ne voient pas à quoi ça sert, tiennent à conserver leur propre représentation d'une société fonctionnant à base d'individus et de beaux principes universalistes où ils ne souffrent de rien. Les "non-racisés" auront tendance à ne pas voir le problème et au pire ils le verront mais n'en seront pas gênés, trouveront normal qu'il y ait un privilège historique ou "d'autochtone"; de "blanc", de Français type etc.

Parce qu'au fond, ce qui est en jeu, c'est la remise en question de représentations collectives sur, par exemple, ce qu'est la France, un Français, à quoi ça ressemble, comment ça parle, ce que ça mange, ce qu'on demande pour l'"intégration", l'entrée dans le milieu, un "nous".
Dans la théorie politique de l'individu citoyen, il n'est rien dit des contraintes de moeurs, chacun est à égalité face à la loi et pour en défendre l'évolution selon ses desiderata, voudrait-il qu'on y mette un verset du Coran. Dans les réalités sociales et psycho-sociologiques, c'est plutôt le principe du "qui se ressemble s'assemble" avec phénomènes d'exclusion, de marginalisation des différences, différences de groupe minoritaire ou individuelles.

Il est compliqué de construire les collectifs pertinents, de trouver les bases d'une conscience collective permettant la transformation sociale pour qui souffre de son état, là où ceux qui n'en souffre pas ont intérêt à le perpétuer, à ce que rien ne change. Et le fait est que la foi individualiste sert mécaniquement cette perpétuation faute de faire naître des forces conséquentes de transformation.

Au passage, exemple de mécanique anti-immigrés : A Bordeaux, une ambiance anti-Parisiens depuis l’ouverture du TGV. Installation de parisiens à 2h de Paris, augmentation des loyers, gentrification etc., et réaction de bordelais.
Principe des Auvergnats de Hortefeux, "Quand il y en a un, pas de problème. C'est quand il y en a plusieurs que ça peut poser des problèmes", avec identification du problème à une identité géographique voire "ethnique", le parisien, là où le plus pertinent serait une question de classe socio-économique.
Va-t-on en appeler à une responsabilité/causalité individuelle ou faire du socio-politique (encadrement des prix de l'immobilier etc.) ? Tel ou tel parisien doit-il se sentir responsable de ce qu'il se passe, tel ou tel bordelais doit-il oublier qu'il n'arrive plus à se loger dans sa ville ?

P.S. Dans le genre "familles" et conditions d'entrée, Niel a épousé Delphine Arnault, fille de Bernard Arnault qui lui-même avait épousé Anne Dewavrin de la famille Dewavrin.
Et il se dit que Brigitte Macron fille de la bourgeoisie nordiste est amie de Delphine Arnault, Bernard Arnault né à Roubaix, nordiste comme les Dewavrin. Ce monde est petit avec survivance paradoxale dans une bourgeoisie chantre de l'individu, de la liberté des Anciens vs liberté des Moderne dirait Benjamin Constant, sens du lien familial, de caste, de maître de maison (dominer, latin dominari, lien avec domus, maison, maisonnée serait-ce la maison France ou quelque autre fief, domaine, entreprise, patrimoine)
.
De mon point de vue, vous omettez une partie des composantes d'un système social. Je vous invite à vous pencher sur des modélisations de systèmes sociaux. Réduit à sa plus simple expression, un système social c'est deux entités distinctes, liées par une interaction. Pour la communication entre deux individus par exemple, nous pouvons obtenir le schéma suivant:
A---------relation1---------B
A et B étant deux individus, et la relation1 étant leur communication.
Le sentiment que vous me donnez, c'est de ne retenir que la communication comme fait social; en oubliant que cette dernière est assujettie à l'existence des individus A et B. La communication n'existe pas en soi, comme ça, toute seule.

De la même manière, un conditionnement médiatique est une interaction sociale qui fait système.
M---------relation2---------T
M étant un média, T étant un téléspectateur, et relation2 étant le conditionnement médiatique.
De la même manière, le conditionnement médiatique n'existe pas en soi, comme ça, tout seul. Il est assujetti aux existences du téléspectateur et du média. Or, un média, c'est un groupe de journalistes qui discutent entre eux. On peut alors affiner notre modèle de la manière suivante:
[J1---------relation1---------J2]---------relation2---------T
J1 et J2 sont des journalistes, qui communiquent entre eux par la relation1. Cet ensemble constitue M, le média. Ce média conditionne par la relation2 le téléspectateur T.

Une première approche naïve de la domination de classe pourrait être
[B1---------relation1---------B2]---------relation2---------P
B1 et B2 : deux bourgeois
P : un pauvre
relation1 : homogamie
relation2 : ségrégation spatiale

Et ainsi de suite. Par ailleurs, vous pouvez reprendre mes schémas et mettre les entités au pluriel. Plutôt que "un pauvre", étudier "les pauvres" ou "des pauvres" ou "un groupe de pauvre", selon la population que vous souhaitez étudier. Peu importe.

Il y a probablement aussi une mésentente sur notre compréhension respective du mot individu. Un individu est pour moi un élément d'une population. Par exemple, dans un peuplement forestier, un arbre est un individu. Dans la population des titres de la presse française, le Canard enchaîné est un individu. Dans la population des journalistes du Canard enchaîné, Claude Angeli est un individu. Etc.

Et une fois cela dit, quelque-soit le fait social ou la population sociale que vous choisissez d'étudier, il est à priori toujours possible d'affiner l'analyse et d'aboutir à des individus (groupe ou solo) humains. Autrement dit, et vous conviendrez qu'il s'agit d'une lapalissade, il n'y aurait plus ni racisme ni domination de classe sociale s'il n'y avait plus ni raciste, ni bourgeois.
La décomposition en partie a ses vertus mais elle n'est pas opératoire pour tout. Au final, votre manière de voir insiste sur la responsabilité individuelle, ce n'est pas une mauvaise chose, mais les sciences sociales dont celles de l'information et de la communication, vont plus loin parce que la réalité est plus complexe.

Quitte à suivre votre approche, on peut s'essayer aux modèles multi-agents avec les questions d'émergence de propriétés comme dans ce papier Un modèle de système multi-agents pour l’émergence multi-niveaux ou cet article Modélographie multi-agents de la simulation des interactions sociétés-environnement et de l’émergence des villes.
Comment émerge un "centre urbain" ? A-t-on seulement l'idée de "centre" si on prend point par point ?

Et puis au niveau mathématique, il faut au minimum un "poids" des individus dans le domaine considéré. N'en déplaise à l'égalité de principe, nous ne sommes pas tous égaux en capital, en influence sur les opinions etc.
Ce n'est pas un bourgeois + un bourgeois mais par exemple, un patron de médias + un patron de médias, la même personne pouvant n'avoir qu'un poids négligeable dans un autre domaine.

Mais comme en physique, cette approche bottom-up, de l'élément à l'ensemble, n'est pas opératoire pour un tas de phénomènes demandant des variables globales, des notions de potentiel, de champ etc.
Cas simple : la température qu'en mécanique statistique on renverra à des interactions individuelles mais qu'on utilise comme variable globale simple concernant un milieu. On ne calcule pas les interactions microscopiques pour mesurer la température et il se produit des phénomènes non-linéaires, des transitions de phase macroscopiques à partir de seuils : l'eau devient glace à 0°C, l'état macroscopique change.

En communication, (cf ces modèles, article de blog trouvé en vitesse), on aura le bruit en théorie du signal, l'environnement social, le champ d'expérience commun, le contexte, le système social etc., des notions englobantes qu'on ne décompose pas.

Dans l'article que j'indiquais sur Bordeaux on parle d'"ambiance anti-Parisiens". L'"ambiance" est une notion globale et si on peut toujours tenter d'établir la dynamique de construction d'une ambiance à partir du cumul d'événements particulier, on ne traite pas de ce qu'il se passe quand l'ambiance est là, que l'effet émergent est constitué.
Idem avec les médias et leurs effets de masse, des effets qui n'existent qu'à partir d'un certain niveau de répétition, d'échelle de diffusion. On voit par exemple le souci avec Charlie Hebdo : le sens même de ce qu'il font peut changer selon l'ambiance sociale ou juste par le passage d'une diffusion pour aficionados à une présence médiatique générale.

Il y a aussi des effets réellement dynamiques, des affaires de vitesse de circulation, de charge (affective) d'une information, de force relative à tel ou tel moment, dans telle ou telle situation.
Dans le genre, sur le thème de la rumeur : "Une autre caractéristique de la rumeur pour Kapferer est sa vélocité. Elle court car elle a de la valeur. La rumeur est la rupture d’un secret : elle est rare donc chère. La valeur de l’information n’est pas durable. Il faut l’utiliser au plus vite. Transmettre la rumeur, c’est retirer les bénéfices de sa valeur tant qu’elle en a encore. En effet celui qui colporte la rumeur s’affirme comme détenteur d’un savoir précieux, comme un éclaireur, autant de reflets flatteurs pour son image auprès de ses récepteurs..".
Buzz, légendes urbaines, effet de mode etc., il ne s'agit pas juste de comprendre qui transmet quoi, d'établir le réseau de diffusion de point à point, mais aussi ce qui circule, comment ça circule, la force que ça a sur les esprits.

P.S. : Le Kapferer en question est Jean-Noël Kapferer qui écrivait ça en 1987 dans Rumeurs, Le plus vieux média du monde, et qui est aujourd'hui connu comme spécialistes des marques notamment par rapport à l'industrie du luxe. Qu'est-ce qui fait la valeur d'une marque, comment marche le bouche-à-oreille, pourquoi achete-t-on un iPhone Smic etc., le marketing comme sociologie concrète...
Cas simple : la température qu'en mécanique statistique on renverra à des interactions individuelles mais qu'on utilise comme variable globale simple concernant un milieu. On ne calcule pas les interactions microscopiques pour mesurer la température et il se produit des phénomènes non-linéaires, des transitions de phase macroscopiques à partir de seuils : l'eau devient glace à 0°C, l'état macroscopique change.
Mais il suffit d'un mulet pour se défaire de la psychohistoire :)
Presque. Vous avez lu Terre et fondation ? Je ne dévoilerais pas l'intrigue au cas où, mais il y aurait des choses à dire sur la vision de l'humanité qui en émerge. C'est pas loin du Léviathan de Hobbes à mon avis, le salut par l'abandon de l'individualité à une puissance supérieure, fusion dans une conscience collective par décision "contractuelle", par choix rationnel, le tout orienté par le pouvoir d'un souverain, avec peur de la dissolution par ennemi intérieur (le mutant...) ou extérieur.
Terre et Fondation, le livre sur l'écriture inclusive? Je/Nous/Gaia? Oui :)

Si j'ai dégainé la référence par rapport à la mécanique statistique, c'est aussi parce que ces questions d'individualité/collectivité est au cœur du questionnement du cycle Fondations.

C'est surtout très intéressant de voir le chemin parcouru par l'auteur, vu que 43 ans séparent Terre et Fondation des première nouvelles du cycle. On part d'un jeune auteur idéaliste qui verse dans le scientisme, à un vieil auteur qui se demande si finalement toute cette science ne serait pas un destin quelque peu triste et froid pour l'humanité.
Pas si sûr pour moi qu'il ait abandonné une forme de scientisme, y intégrant seulement la composante affective pour passer de la logique froide à la logique organique biologique.
En fait, j'ai relu Terre et Fondation dernièrement, et faudrait que je relise tout le cycle maintenant que j'ai quelque culture de philosophie politique parce qu'il y a peut-être la période concurrence des modèles de la guerre froide, quelque chose du matérialisme historique dans les rapports dialectiques entre fondation et empire, celle de la planification vers l'utopie et de la place de la liberté individuelle, et puis dans les deux textes finaux, on voit arriver la pensée écologique avec Gaïa.

Et en lien avec le racisme, si la fin m'a fait penser à Hobbes, c'est que le choix de l'option Gaïa (super-organique unitaire) plutôt que les rapports conflictuels d'une politique normale est justifié rationnellement par la menace de mort perpétuelle de l'état naturel : menace intérieure de la guerre civile et menace étrangère de l'alien.
L'état naturel apparaît comme celui de la violence, chose qu'on voit dans tout Terre et Fondation avec la série des planètes explorées chacune montrant une forme de danger, et l'état civil est vu comme seule garantie d'avoir au moins une non-violence intérieure par l'abandon de l'individualité à l'ensemble : paix et sécurité dans un équilibre écologique (et rationnel) intérieur mais avec la perspective de la confrontation à un autre organisme hostile, continuation au niveau des supra-organismes d'une logique "naturelle" de prédation.
Et à la toute fin, dans les dernières lignes, on revoit surgir le doute sur la menace intérieure : est-ce que cet.te enfant solarien.ne hermaphrodite qui va peut-être accéder au pouvoir est bien humain.e ?
"Après tout et là, Trevize ressentit un soudain tressaillement d'inquiétude, qu'il se contraignit à négliger ce n'est pas comme si l'ennemi était déjà présent parmi nous. Et il évita de baisser les yeux vers le regard que Fallom - hermaphrodite, transductive, différente - faisait peser, insondable, sur lui."

Il y a de l'ambivalence dans tout ça : Asimov était politiquement à gauche (cf le P.S.), sans doute dans l'humanisme rationaliste classique avec tendances socialistes mais un naturalisme "naïf" appliqué au social peut aussi bien donner le nazisme que l'idéal gentillet de Gaïa.
Tout ça se lie facilement au scientisme du XIXe : ingénierie sociale, darwinisme social, racisme "scientifique" & co., prétention à fabriquer de la société organique sur un modèle "naturel".
Ca me fait penser : je n'ai pas souvenir qu'il y ait l'idée de Dieu dans le cycle, idée qui a pourtant eu un rôle social majeur pour une maîtrise de la violence naturelle par une foi dans le surnaturel. Ca ne m'étonnerait pas qu'en bon scientifique il l'ait totalement évacuée. Après tout, c'est de la science-fiction.

P.S. : issu de la fiche Wikipedia d'Asimov : "After Asimov's name appeared in the mid-1960s on a list of people the Communist Party USA "considered amenable" to its goals, the FBI investigated him. Because of his academic background, the bureau briefly considered Asimov as a possible candidate for known Soviet spy ROBPROF, but found nothing suspicious in his life or background".
A la recherche de ROBPROF the Soviet spy, quelle belle époque...
Pour les personnes qui nous lisent, et qui me ressortent du langage et du fromage de chèvre, j'espère qu'elles comprennent bien que les exemples des modèles multi-agents donnés par Faab vont tout à fait dans mon sens: ces modélisations se proposent d'analyser des systèmes complexes jusqu'au niveau de détail de l'individu. Par exemple, le premier papier propose d'étudier l'émergence d'une intelligence artificielle dans une matrice 2D par la diffusion et réception de phéromones par des "agents", c'est à dire à l'échelle de l'individu.

Et après cela, Faab, vous me parlez de "notions englobantes qu'on ne décompose pas". Comme par exemple l'environnement social dans le modèle de Newcomb, modélisant la communication, que vous donnez en troisième lien. Mais si on ne décompose pas, ici, le système complexe de l'environnement social, ce n'est que pas parce-qu'il serait impossible de l'analyser plus finement, mais dans un souci de simplification et de clarté. Le système étudié est la communication entre les communicateurs A et B, et l'objectif est de montrer clairement et simplement que ce système de communication entre A et B est influencé par un autre système, extrêmement complexe, celui de l'environnement social.

De la même façon, j'ai proposé deux manières de modéliser "l'agent" média dans mon message précédent. Soit comme une entité simplifiée et globale: M pour média. Soit, de manière légèrement plus affinée comme un système où deux "agents" journalistes J1 et J2 en relation de communication. Parce-qu'un média c'est une rédaction et donc au moins deux journalistes.

Dès lors, "l'environnement social" de Newcomb n'est certes pas décomposé dans la modélisation de la communication qu'il propose, mais personne n'imagine un seul instant qu'il s'agit d'une chose tout aussi simple, homogène, et cohérente que parfaitement abstraite. L'environnement social peut et doit être analysé. Une des composantes de l'environnement social est par exemple l'éducation. L'éducation est elle-même un système complexe qui peut et doit être analysé. Une de ses composantes est l'Education Nationale. Elle même est un système complexe qui peut et doit être analysé, et une partie de ses composantes sont les profs. Et d'analyses détaillées de sous-systèmes en analyses détaillées de sous-systèmes, il devient évident que les enseignants participent à l'environnement social d'un individu en particulier, ou de la société en général selon l'angle d'étude adopté.

Simplifier des sous-systèmes imbriqués et entrelacés en une entité englobante que l'on ne décompose pas, ne signifie pas que cette entité existe comme telle comme par magie, de manière définitive et absolue. L'éducation, et même les enseignants sont eux mêmes influencés par l'environnent social par exemple. Les agents sont extrêmement nombreux et impliqués de diverses manières dans plusieurs sous-systèmes simultanément. Alors les relations sont extrêmement complexes. Donc s'il s'agit d'étudier un fait social en particulier, on va analyser certaines choses finement, et en simplifier d'autres. C'est pourquoi Newcomb a simplifié cette chose extrêmement complexe qu'est l'environnement social, parce-que son intention est de s'intéresser avant tout à la communication entre deux communicateurs A et B.

Pour autant, ce n'est pas parce-que Newcomb a simplifié l'environnement social que n'importe quelle autre étude doit reprendre aveuglément cette simplification. Prenons votre exemple bordelais. On peut choisir de simplifier "l'ambiance anti-parisiens" et d'en faire un fait social à l'échelle de la ville de Bordeaux. Comme au contraire, on peut étudier cette ambiance quartier par quartier, voire rue par rue, csp par csp, tranche d'âge par tranche d'âge, par statut de locataire ou propriétaire, etc. Et obtenir des résultats surprenants, disparates et contrastés.

Et il faut faire très attention avec les simplifications, car elles sont sources d'erreurs. En sciences, on simplifie quand on ne sait pas faire autrement, ou quand on établit la preuve que la simplification est pertinente. En sociologie, les erreurs par simplification peuvent amener à commettre des amalgames par exemples. Les agents immobiliers bordelais sont susceptibles de vous reprocher de les faire passer pour des anti-parisiens en les englobant sans distinction dans "l'ambiance bordelaise".

Si vous voulez étudier une rumeur de la manière la plus précise qui soit, je suis d'accord, il conviendrait de savoir le message qui circule, quand et comment ce message est déformé et amplifié, etc. Mais pour ce faire, il convient de se demander par qui, pourquoi, dans quel intérêt, sous quelles influences etc. Je ne comprends absolument pas votre position qui consiste purement et simplement à se cacher les yeux et se boucher les oreilles. Surtout après avoir parlé de modélisations de systèmes multi-agents.
En gros, vous me semblez parler de manière abstraite, sur le mode "en théorie on doit pouvoir..." et je vous parle de la manière dont ces sciences se font, concrètement, sans attendre ou trop croire que le "en théorie" puisse donner des résultats.

On ne décompose pas parce que ce n'est pas pertinent de même qu'un médecin prend la température avec un thermomètre parce que c'est la variable pertinente pour son domaine.
Et si le papier que j'indiquais sur les systèmes multi-agents avec émergence multi-niveaux est de ces tentatives de consolider un réductionnisme tout/parties dans un principe qui semble naturel depuis Descartes, malgré qu'il y ait à gérer une émergence multi-niveaux[.b], on ne sait pas si ça peut marcher, pour quels systèmes, et les sciences n'ont pas attendu ces modélisations informatiques pour avancer.
On fait de la biologie sans attendre que quelqu'un explique comment coller les morceaux moléculaires pour réussir à faire ne serait-ce qu'une cellule. Un chimiste n'aurait même pas eu l'idée de parler de biochimie si il n'y avait pas d'abord eu un tout biologique d'après lequel des réactions sont qualifiées de "bio".
Et on fait de la sociologie en prenant en compte les niveaux d'organisation supra-individuels avec leurs caractéristiques propres.

Mais bon, si vous préférez parler des sciences comme vous voudriez qu'elles soient, en ayant foi dans le réductionnisme, plutôt que comme elles se font, à vous de voir. Perso, je préfère l'approche épistémologique, aller voir concrètement ce que sont les pratiques et théories des spécialistes.
A partir de quand, la physique nucléaire serait devenue néfaste à l'étude des protéines ? Par quel miracle et au nom de quoi en arrivez-vous à la conclusion qu'il y aurait des limites dans l'analyse à ne pas franchir ? Qu'est-ce qui vous autorise à dire que la physique nucléaire serait du "réductionnisme" ?

Vous échouez à expliquer vos assertions à l'emporte-pièce: en effet, de "les faits sociaux ont leur explication causale propre" vous reculez à "on ne décompose pas parce-que ce n'est pas pertinent". Et vous vous appuyez non pas sur des explications, mais sur des analogies de tous ordres et ô combien malheureuses en opposant notamment physique nucléaire et biologie alors même qu'elles se conjuguent parfaitement. De tous ordres, sauf concrètement de sociologie.

Expliquez-moi la pertinence d'un concept aussi flou que le conditionnement médiatique lorsque l'on met dans le même panier la chaîne de télé Fox News et la revue Science au nom de "on ne décompose pas parce-que ce n'est pas pertinent". Je suppose qu'au nom de la globalisation, il faille aussi admettre que la jeunesse bourgeoise et la jeunesse populaire bénéficient du même environnement social, et de la même éducation. Mais pourquoi les comparer et les distinguer d'ailleurs, puisque le concept sociologique de jeunesse ne doit pas être décomposé. Enfin, comment Monique Pinçon-Charlot ose décomposer la population française avec son "réductionnisme" bourgeois/pauvre ?
Je vous connais autrement plus affûté, pertinent, et respectueux dans votre argumentation, cher Faab. Et je constate également, les interventions de cécile clozel, de Bruanne, et de jeanbat: vous me semblez là, très ponctuellement, motivées à m'apporter la contradiction plutôt qu'à creuser, préciser, explorer, étendre une question comme vous en avez généralement l'habitude.

Je peux me tromper, mais dès lors, je me demande si la discussion en apparence épistémologique ne cacherait pas une discussion qui serait en fait peut-être politique sans dire son nom. Un peu comme votre échange, Faab, d'avec Ervé, où il est question de savoir si l'on peut/doit parler d'islamophobie, de racisme, ou d'extrême-droite concernant Britain First. Cet échange sous ses atours polissés me semble en effet poursuivre les reproches mutuels et réciproques que s'adressent Mediapart et Charlie Hebdo, ou encore, ceux formulés à l'encontre de Mélenchon.

Je peux me tromper, mais je souhaite crever l'abcès.

Souvenez-vous de ce que disait Monique Pinçon-Charlot sur la mixité sociale dans la dernière émission où elle était invitée: "La proximité physique exacerbe les distances sociales au lieu de rapprocher. C'est à dire que comme sociologues, la mixité sociale que nous valorisons sur le plan politique, comme sociologues, ça ne fonctionne pas.". C'est à 8:00 du 3ème acte. C'est à dire que les Pinçon-Charlot ont des conclusions de sociologues et un avis politique de citoyens qui sont radicalement différents. En d'autres mots ils sont politiquement pour la mixité sociale, tout en sachant par études sociologiques que la mixité sociale ne fonctionne pas, et aboutit à l'effet inverse.

Cela peut sembler paradoxal au premier abord. Mais c'est là une très belle illustration de la séparation du politique et de la science, si tant est que la sociologie est une science. C'est là une très belle illustration que la politique ne doit pas être une affaire "d'experts".

De la même manière, ce n'est pas parce-que des analyses méthodologiques, appuyées par les progrès en modélisation, la puissance de calculs des ordinateurs, et le big data, permettent d'aboutir à une finesse d'analyse atomique - atomique au sens d'individu - que politiquement il faille abandonner l'idée d'actions collectives.

En aucune manière, politiquement, je suis un "libéral" pour qui tout résulterait de la responsabilité individuelle, quand bien même si méthodologiquement, et concernant les faits sociaux, ce sont mes conclusions. Les Pinçon-Charlot distinguent parfaitement sciences et politiques quand il s'agit de mixité sociale. Je vous invite à faire de même.

Dès lors, soit nous poursuivons cette discussion sur le plan politique en explorant les possibles mesures à l'aune de nos convictions citoyennes dont je ne doute pas qu'elles s'accordent, soit nous poursuivons cette discussion sur le plan de la sociologie et de la méthodologie, auquel cas, souffrez que les conclusions puissent heurter votre sensibilité citoyenne.
Comment "creuser" sinon en apportant des contradiction, en interpellant vos énoncés (à défaut de vos convictions) ?
Creusons, donc. Ça ne m’est pas très facile, pour commencer, de comprendre ce que vous entendez par « individu ». Dans quelle ontologie et/ou dans quelle théorie s’inscrit, pour vous, cette notion.
Vous en donnez une définition, qui, si je lis bien, est celle de l’individu statistique : « Un individu est pour moi un élément d'une population. Par exemple, dans un peuplement forestier, un arbre est un individu. Dans la population des titres de la presse française, le Canard enchaîné est un individu. Dans la population des journalistes du Canard enchaîné, Claude Angeli est un individu. Etc. »

Cet « individu »-là, vous le dites, peut être un groupe.

L’individu statistique est indiviSÉ dans l’application de la théorie, non indivisIBLE du point de vue ontologique. Ainsi, l’arbre peut en effet être un individu dans un peuplement forestier conçu par un garde-forestier et, dans la même définition statistique mais pour un usage différent, être une population et comprendre plusieurs individus génétiquement distincts. La théorie statistique n’en est pas atteinte, la notion d’individu y reste stable, mais elle ne nous apprend pas grand chose sur la question de l’individuation des arbres en biologie. Avec au passage la nécessité de prendre en compte ce que cette population n’est pas n’importe quel ensemble d’individus dispersés n’importe comment dans la nature, mais un ensemble constitué en arbre, ce qui aura, par exemple, de notables effets développementaux et épigénétiques.

Ailleurs, vous évoquez la notion d’atome : « une finesse d'analyse atomique - atomique au sens d'individu ».

Atomique, est-ce à entendre comme indivisIBLE ? Comme le niveau de finesse d’analyse en dessous duquel on ne peut pas descendre sans détruire son objet ? Comment cela peut-il s'appliquer à un groupe ? Est-ce que ça renvoie à la conviction qu’il existe un sujet humain « en soi », constitué comme tel de toute éternité, du point de vue physiologique et psychologique, dans sa phylogenèse comme dans son ontogénèse ?

Il me semble difficile de partager une telle conviction.
Même du point de vue physiologique, l’atomisme montre ses limites, par exemple avec le développement récent de la connaissance du microbiote, qui fait de « l’individu » humain un biotope complexe, dont la dynamique de peuplement a des effets non négligeables jusque sur son état émotionnel et peut-être ses processus de pensée.
Ne parlons pas, bien sûr, du fait qu’il est devenu insuffisant, non seulement pour la psychanalyse mais aussi pour la neuropsychologie, de concevoir le sujet psychologique comme un sujet univoque, sans processus inconscients divergeant, parfois fortement, de ses processus conscients. On aussi montré que les représentations, attitudes, comportements d’une personne peuvent être extrêmement différents, voire divergents, selon les situations dans lesquelles elle se trouve, si bien que si « indivisible » il y a, pour comprendre certains phénomènes, c’est le système formé par la personne et la situation. Ce qui peut sembler plus ardu à appréhender, du point de vue méthodologique, mais ne l’est pas moins que de cerner clairement ce qui « appartient » à l’individu, ou pas.
Et pour ce qui est de la communication, il est patent depuis fort longtemps que « l’individu » communiquant est divisible, et divisé, parfois même déchiré, entre verbal et gestuel, entre sens et référence, entre constatif et performatif…

Evidemment, selon la conception « atomiste » ou non de l’individu, on ne fera pas les mêmes hypothèses sur son comportement social, et surtout, on définira un objet particulier, radicalement différent de ce que sont les objets complexes de la sociologie. L’exemple le plus pur est « l’homo œconomicus », mais quel intérêt ?
Bref, quelle est votre définition de l’individu ?
Merci pour votre message. Il m'a donné et me donne encore du grain à moudre, et m'a ouvert des perspectives.

Présupposant que nous ne venons pas des mêmes disciplines, et ne souhaitant pas demander de pré-requis à mes interlocuteurs et mes interlocutrices, j'ai alors en effet opté pour un vocabulaire statistique, par souci de simplification, de clarté, et de recherche d'un terrain d'entente; en me disant qu'il s'agissait-là de notions neutres puisqu'empruntées aux stats, et familières à la sociologie qui a recours régulièrement à ces techniques. Vous m'avez aidé à comprendre que les mots "individus" et "atomique" étaient orientés et chargés de sens pour les sociologues. Mon but n'était pas de reprendre à mon compte ce vocabulaire, et encore moins d'en suggérer le sens spécialisé: en effet, j'en ignorais l'existence avant votre message.

Par exemple, quand je parlais de "finesse d'analyse atomique", ce n'était pas pour suggérer qu'un individu serait "indivisible" - au sens d'impossibilité d'y trouver des sous-systèmes -, mais qu'il s'agit, à priori, de l'unité de référence en sociologie. En effet, en deçà de ce degré d'analyse (appareil digestif, cerveau, cellule, protéine...), on quitte, me semble t'il, la sociologie pour tendre vers d'autres disciplines, comme la médecine, la psychologie, la biologie moléculaire, etc. Donc, c'était une manière pour moi de régler le "zoom" du référentiel, mais sans toutefois vouloir ériger des frontières entre les disciplines, bien au contraire.

Au regard des pistes de réflexion que Faab et vous m'avez proposé, je vais m'attacher à quelques lectures. J'y trouverai probablement une formalisation de mon intuition, certainement plus claire et aboutie que ma tentative malheureuse. Si vous êtes familière de l'approche objet (modélisations informatiques), alors nous avons un terrain d'entente. Sinon, il me faudra attendre que le vocabulaire sociologique me soit plus familier pour me permettre de vous répondre.

En tout cas, merci pour votre réponse qui, je le répète, m'a ouvert des perspectives.
Ca bataille quand je dis "ce n'est pas si simple" et qu'on me dit (pas que vous...) "mais si, c'est simple". Si je dis que ce n'est pas si simple, c'est que la position "simple" évoquée me rappelle des choses que je connais, les problèmes que ça pose et comment d'autres ont tenté d'y répondre.

Votre position me rappelle en gros celle de l'individualisme méthodologique, présent aussi en sociologie et qui a la préférence des libéraux. ("Libéral" ne signifie pas "méchant", c'est un courant de pensée orienté sur la liberté/responsabilité individuelle par rapport à l'action d'Etat, d'une puissance publique, collective.
De manière plus générale, dans l'articulation tout/parties, on a l'approche réductionniste et l'approche holiste avec dans celle-ci : "Durkheim, dans son ouvrage Les Règles de la méthode sociologique, expliqua que « La cause déterminante d'un fait social doit être recherchée par rapport aux faits sociaux antérieurs et non parmi les états de conscience individuelle »"

Pourquoi Durkheim a-t-il dit ça ? Peut-être pour éviter : "il est à priori toujours possible d'affiner l'analyse et d'aboutir à des individus (groupe ou solo) humains. Autrement dit, et vous conviendrez qu'il s'agit d'une lapalissade, il n'y aurait plus ni racisme ni domination de classe sociale s'il n'y avait plus ni raciste, ni bourgeois.".
Je souligne "humains" parce que vous me semblez partir du principe que c'est le critère pertinent, principe personnaliste dirais-je, cause déterminante dans les "états de conscience individuelle". Il y a d'autres manières de caractériser l'individualité mais je ne développe pas plus, et pour le reste, à vous de voir si vous voulez creuser ce qu'en disent d'autres courants de pensée.

Par rapport à la politique :
Une représentation conditionne la volonté, ce qu'on veut dépend de ce qu'on pense qui est.
Donc, oui, je peux batailler sur des prétentions à dire ce qu'est le réel, à défendre telle ou telle représentation parce qu'au final ce n'est pas neutre.
Si on pense que le racisme ne passe que par des questions de personnes, alors on va faire de l'éducation, du "touche pas à mon pote", essayer d'éveiller les consciences, on dira que les races n'existent pas etc., ça ne pourra pas faire de mal mais il ne faudra pas s'étonner que ça ne marche pas trop quand il y a de la ghettoisation de minorités, un contexte socio-économique poussant à l'anti-immigration, une désespérance du politique (inter)national avec repli sur ses intérêts particuliers ou de groupe etc., que tout pousse à la fragmentation et l'inimitié, que le contexte n'est pas favorable aux sentiments humanistes et à l'attention à autrui comme personne.

Et pour les Pinçon-Charlot, vous entendez le "nous valorisons" comme s'appliquant à eux, et je l'entends comme parlant des politiques publiques dites de "mixité sociale". Le problème qu'elles posent, c'est qu'on peut très bien avoir un immeuble où les gens ne se parlent pas parce qu'ils n'ont pas la même vie, bonjour-au revoir et pas de lien social.
Politiquement, il y a de l'ambivalence avec cette mixité : d'un côté ça peut éviter la constitution de véritables ghettos avec économie de délinquance et cercle vicieux de désocialisation, de l'autre, ça esquive la résolution du vrai problème économique, ça permet de garder ses pauvres en se disant que la dispersion évitera ces bruyantes révoltes qu'on appelle "émeutes". Mais qui sait, ça pourrait aussi finir par produire une convergence des perdants, des classes moyennes menacées aux classes populaire dont la sous-classe des "racisés", "racisés", "ethnicisés" notamment par les Finkielkraut et Zemmour que le FN se plaît à citer.
En tant que personnes, Finkielkraut et Zemmour se diront-ils racistes ? Sans doute pas, mais ils sont bien dans l'ambiance "angry white man" évoquée par Michael Moore expliquant pourquoi Trump allait gagner (bonne sociologie pour moi, contexte socio-économique, psycho-sociologie des électeurs, cas individuel de Clinton, c'est convainquant je trouve).
Merci pour votre message. Et on va dire que c'est d'une manière plus humble que je réponds présentement.

Effectivement, en suivant les pistes de réflexions que cécile clozel m'a proposé par ses interrogations, je suis tombé sur les différentes approches sociologiques: l'approche holiste, et l'individualisme méthodologique. J'ai cru comprendre qu'il se trouvait également la sociologie pragmatique.

Et c'est peut-être de cette dernière que mon intuition relève. Peut-être. Une chose est sûre, c'est que j'ai de quoi creuser. Quand bien même trancher pour un courant plutôt que pour un autre, n'était pas mon propos, c'est toujours une bonne chose que d'ouvrir ses perspectives.

Au risque de dire des bêtises, ou de mal le dire, je ne considère pas tout à fait que "l'individu est une cause déterminante dans les états de conscience individuelle". Par contre, il me semblait que c'était l'unité élémentaire de référence de la sociologie. Et quand je dis "unité", ce n'est pas dans le sens "atomiste" ou "indivisible", mais plutôt un réglage d'échelle du "zoom" de l'examen, de l'étude, de l'analyse. Et ce n'est évidement pas parce-que l'on définit comme "unité" le gramme que cela nous empêche de regarder ce qui se passe au niveau du mg, du kg, ou de la tonne.

Bien au contraire que de considérer "l'individu" comme "indivisible", si je devais le modéliser, je le considérerais comme un système. Or un système est autant déterminé par les interactions des différents sous-systèmes internes qu'il porte en lui-même, que par les interactions qu'il a avec l'extérieur, son environnement, et des acteurs tierces.

En ce sens cette modélisation systémique propose que les états de conscience individuelle sont à la fois déterminés par des mécanismes internes et à la fois par des actions, des relations, des évènements externes. Dit autrement, un individu a une frontière (sa peau, ses sens, etc.) et tout ce qui entre ou sort de cette frontière (et surtout vers quoi ça va, ou d'où ça vient) le définissent au moins autant que ce qui se trouve à l'intérieur de cette frontière.

Partant de là, à vous de choisir si vous optez pour une approche ascendante ou descendante (individualisme méthodologique ou approche holiste, si j'ai bien compris). Soit vous partez d'une "classe" individu à partir de laquelle vous avez fait ce travail de modélisation systémique et que vous étendez ensuite à des "instances" de classe particulières. Soit vous partez d'un ou plusieurs "objets" individu singuliers, et vous généralisez vos modèles systémiques à une "classe".

Mon idée n'est pas de trancher en faveur d'une approche sociologique plutôt qu'une autre mais de faire cohabiter dans le même modèle le cas général et le cas particulier. Pas de privilégier l'individuel sur le collectif, mais que l'individuel apparaisse aussi. Et les méthodes de modélisation, notamment informatiques, permettent assez facilement de faire cohabiter ces modèles.

Mais bon, peut-être que je m'enfonce ! Et vous avez probablement déjà entendu tout ça, et que tout ça amène à des impasses. En parlant d'entendre, et pour finir, concernant "nous valorisons", quelques minutes plus loin, Daniel Schneiderman demande à Monique Pinçon-Charlot: "vous nous dites que ça marche pas, mais vous êtes quand même pour ?". Et la sociologue de répondre: "oui, parce-que nos hypothèses peuvent être infirmées, et puis il faut bien faire quelque-chose". ;-)

En tout cas, je vous remercie aussi pour vos pistes de réflexions et vos éclairages. Comme je l'ai écrit, vous me donnez du grain à moudre, et l'urgence d'entamer quelques lectures approfondies.
Oui, il y a des questions de stratégie descendante ou ascendante, in english cf sur Wikipedia top-down and bottom-up design pour des liens à l'informatique.
En socio-politique, il s'agira de savoir si on privilégie la question des structures comme cadre définissant les comportements ou celle des acteurs et leurs possibilités d'auto-organisation. Les deux marchent ensemble notamment dans les dialectiques de transformation, quand il faut chercher ce qui au sein des structures "macro" avec toute leur force de conditionnement, se manifestent des mouvements "micro" tendant à l'auto-organisation résistant au conditionnement.

Pour ce que dit Monique Pinçon-Charlot, je suis comme elle dans l'expectative sur ce que peuvent donner ces politiques mais il faut un minimum la foi si on veut tenter quelque chose, sortir des effets "bidonville" et d'oppositions proches de la guerre civile, de communautés ennemis. C'est en fait une tension entre une approche sociologique insistant sur le poids des structures et le volontarisme politique qui veut croire que leur transformation est possible.
Comme je disais, l'effet immédiat peut être une fragmentation jusqu'à l'échelle individuelle, le chacun pour soi avec la perte de cette sociabilité territoriale qui effraie tant de gens quand ce sont des perdants qui la cultive (la peur des "quartiers", du "communautarisme"...) mais si les choses vont dans le bon sens, on obtient une sociabilité plus ouverte, classes moyennes à populaires "sans distinction d'origine, de race, de religion" comme dit la Constitution.

En fait, c'est finalement une foi "libérale" qu'il faut, l'idée que naîtra une nouvelle sociabilité à partir d'individualités, dans l'auto-organisation (principe bottom-up) même si les déterminismes sociaux font qu'on a du mal à sortir de son groupe, qu'il y a un poids des structures sur l'individu (principe top-down).
Il y a d'ailleurs tout un sujet autour du Programme National pour la Rénovation Urbaine avec un mélange de destruction-construction de logements, de relogement des populations avec parfois dispersions douloureuses (adieu le voisin, les amis).
On a d'ailleurs vanté le logement individuel, les lotissements de petites maisons, et on y a perdu des sociabilités qui se font dans les logements collectifs par le simple partage d'un espace commun. Le fait qu'on en soit à faire des "fêtes des voisins" pour compenser les pertes de sociabilité doit dire quelque chose de la situation.

Quant aux classes (socio-économiquement) supérieures, elles ont, elles, toutes les chances de rester dans leurs ghettos, les ghettos du gotha âprement défendus parce qu'elles n'ont aucun intérêt à changer ce qui leur profite.
Je survole les message ce dimanche soir, et en profite pour livrer mon sentiment puisque mon pseudo apparait :
pas le temps d'approfondir les interventions des uns et des autres sur ce forum-ci, et je comprends de moins en moins qui parle de quoi, en particulier vos messages Le Chien. D'habitude je comprends mieux ce que vous dites, mais je crois que j'ai loupé des épisodes au début.

Mais je ne vous demanderai pas de clarifier parce qu'en fait j'ai pas de disponibilité pour lire, reprendre les arguments des uns et des autres. Pas que ça ne m'intéresse pas, mais vraiment pas le temps.

Donc voilà, je ne sais pas en quoi mon intervention a pu gêner ou avantager qui ou passer pour je ne sais pas trop quoi, mais en tout cas n'y accordez pas grande importance : quand j'ai envie ( et le temps) d'argumenter, je sais faire des messages longs et détaillés, plutôt que d'un seul mot, mais là j'ai pas le temps, pas envie et pas envie de prendre le temps.
C'est la seconde fois que mes écrits vous heurtent. Cela ne se reproduira plus.
?
Je vous dis que j'ai décroché, c'est tout.
En tout cas, je ne me sens pas "heurtée".

Par contre, complètement débordée, ça, oui, par le temps qui me manque pour lire attentivement les nombreux messages car il y en a souvent de très intéressants sur les sites @si.

de forces n'étant la propriété de personne en particulier, impersonnelles, [s]intrinsèquement collectives[/s] [...] des faits sociaux avec leur explication causale propre.

Citez m'en un.
au hasard, le langage :)
pas du tout, comme je l'ai dit auparavant: le langage n'existe pas en soi, comme ça, comme par magie, avec ses explication causale propre.

le langage c'est une personne qui parle avec une autre personne.

Ce message a été supprimé suite à la suppression du compte de son auteur

attention, on ne parle pas ici des langages formels qu'on retrouve en mathématiques et en informatique sur lesquels le linguiste Chomsky a beaucoup travaillé, hein. On parle ici de faits sociaux, donc de langages au sens de langue et de patois, comme le français ou le berrichon.

Dans l'émission sur l'écriture inclusive, les invités ont beaucoup insisté sur ce qu'est la langue: certainement pas un vocabulaire et des règles imposées doctement par une autorité supérieure comme l'Académie française, dans une approche top down comme dirait Faab. Mais bel et bien des usages entre locuteurs qui fabriquent, modifient, et font vivre la langue, dans une approche bottom up.
insistance n'est pas démonstration... il suffit d'un contre-exemple pour invalider la vision exclusivement "bottom up" de l'évolution de la langue. L'académie a bel et bien influencé la pratique, et la langue, pour ce qui est de la règle d'accord de genre au pluriel. Ainsi on voit bien que, si elle est loin d'être toute puissante quant à l'usage et à l'évolution d'une langue, l'institution n'est pas totalement impuissante !
Saussure, cours de linguistique générale, introduction : "si nous pouvions embrasser la somme des images verbales emmagasinées chez tous les individus, nous toucherions au lien social qui constitue la langue. C’est un trésor déposé par la pratique de la parole chez tous les sujets appartenant à une même communauté, un système grammatical existant virtuellement dans chaque cerveau, ou plus exactement dans les cerveaux d’un ensemble d’individus ; car la langue n’est complète dans aucun, elle n’existe parfaitement que dans la masse." (c'est moi qui souligne)
"La langue poétise-t-elle et pense-t-elle à notre place, comme l’assurait Schiller ? Notre esprit est-il influencé par la grammaire de celle(s) que nous parlons ? Il existe une polémique célèbre sur les catégories de l’être selon Aristote : dans un article paru en 1958, le linguiste Émile Benveniste a fait remarquer qu’elles correspondent exactement aux différents sens du verbe « être » en grec ancien, et donc que dans une langue sans verbe « être », Aristote est inconcevable. On lui a répondu qu’il a été possible de traduire Aristote en japonais, langue qui n’a pas de verbe « être », et de trouver une traduction plausible à chacune de ses catégories. Mais il s’agit d’un travail a posteriori ; les traductions en question ne sont pas homogènes (elles recourent à des moyens linguistiques très divers), et par ailleurs certaines des solutions trouvées par le traducteur sont, semble-t-il, fort pesantes et contournées. Ce qui est essentiel, c’est que nul penseur japonais n’aurait spontanément pensé à associer toutes ces tournure entre elles : c’est bien le pur hasard de cet ensemble unique de formes auquel recourt le grec pour exprimer une série de concepts qui a suggéré ses catégories à Aristote, c’est la langue grecque qui lui a permis de philosopher comme il l’a fait — un mauvais esprit shillérien dirait qu’elle a philosophé à sa place."

Poésie du gérondif, Jean-Pierre Minaudier, pp 60-61

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un musicien jour de la musique à un auditeur.

et vous avez déjà vu une chèvre faire du fromage sans intervention humaine ?

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Un musicien qui joue seul, c'est une répétition solitaire, pas un fait social stricto-sensu. Toujours est-il que le musicien reste une personne, un individu.

Une recette, c'est une transmission de savoirs. Et ces savoirs ne sont pas les mêmes à Sainte-Maure de Touraine qu'à Rocamadour. La transmission de savoirs faire, c'est un prescripteur et un disciple.
On serait tenté de comprendre que pour dépasser une construction sociale il suffit de - tenter de - la nier individuellement.

Du coup ca ne peut pas être votre discours, mais ampors quel est-il.
Oui, c'est un peu l'idée. Mais pas la nier: l'ignorer.

Si vous regardez la vidéo proposée par Faab ci-dessus, on comprend que plus on est exposé à des discours sur le racisme (aussi bien racistes qu'anti-racistes) plus on a le réflexe d'adopter cette grille de lecture pour aborder n'importe quel problème. De ce fait, on propage alors soi-même un discours sur les races et les racisés, même si c'est dans l'objectif de l'égalité des citoyens. Et c'est un effet boule de neige.
Je comprends la logique que vous exposez, mais à mon avis elle ne contient aucune solution aux problèmes que rencontrent les vrais gens à titre individuel ou à l'errance des fonctionnements sociaux par rapport à leurs ambitions affichées. Parce que mine de rien, " liberté, égalité, fraternité", c'est pas les racisés de 2017 qui l'ont inventé ni eux qui l'invoquent à chaque discours électoral, c'est un peu la devise, et puis les droits de l'homme et du citoyen, tout ça ....

Oui, je suis d'accord avec vous, plus on en parle plus on rend les choses visibles, plus on aiguise les points qui fâchent.

Et si on en reste là c'est peut-être pire que ne rien faire. Mais on n'est pas obligés d'en rester là ... passé le constat, on peu aussi agir, non ?

Il me semble que d'une façon générale, pour régler un problème il faut d'abord le nommer comme tel, l'identifier, voir où et comment il se constate.

Je pense qu'on en est là ( depuis longtemps, mais les avancées sociales sont lentes).

Vous m'accorderez que quand on n'est pas soi-même victime d'une quelconque discrimination on n'a aucun légitimé à dire à ceux qui le sont que leur problème est très surfait et que "c'est rien, ça va passer", non ?
Le simple fait qu'un membre d'une société se sente mis à l'écart, je dis bien même s'il n'y a rien d'autre que son ressenti, est à prendre au sérieux au sein de la société : soit cette personne a des problèmes de perception qui nécessitent au minimum de la rassurer et peut-être de la soigner, soit il y a une réalité et il faut la changer, et commencer pour cela par la reconnaitre.

Dans le cas qui nous préoccupe, on voit qu'on en est encore à devoir convaincre certains qu'il y a du racisme dans notre société et qu'il n'est pas le simple fait de quelques intolérants obtus mais qu'il a une forme institutionnelle. Y'a de la route encore !
"vieux, moches, boiteux ou borgnes", ça se voit pas sur le CV :D
Humph, en tant que biologiste, la notion de race me met toujours mal à l'aise.
Mettons couleur de peau, apparence, etc.

Blanc de peau, j'ai testé dans ma jeunesse le port des cheveux longs. C'était le meilleur moyen pour que le vigile se colle à moi en magasin comme un amoureux...
Plus de contrôle aussi de la part de la police. Me couper les cheveux a suffit pour qu'on me fiche la paix.

Je sais que mes potes à peau sombre avaient plus de soucis. Y compris un cousin que les hasards de la génétique (et pas le facteur) ont fait naître avec une peau souvent qualifiée de couleur maghrébine. Serveur qui traîne au restaurant, vigile moins poli (y compris vigile noir) etc.
Moins violent que la génération de mon père qui avait vu un serveur refuser de servir son ami d'origine Iranienne (suite à quoi mon père et ses potes sont partis aussi sec).

Ca évolue dans un sens comme dans un autre.

J'ai aussi testé certains coins d'Angleterre où le "bronzé" est bien vu par les commerçants.
La raison? La délinquance locale est principalement le fait des "chavs", jeunes (12-17ans) blancs anglais aux cheveux blonds, les "bronzés" étant soit des touristes, soit des commerçants pakistanais, soit des étudiants. Bref, des -à priori- "non-délinquants".
ah ben oui mais c'est bien la biologie (la science du moins) du XIXe qui a inventé le "racisme scientifique" (phrénologie et tout le bazar), pour légitimer l'esclavage et la colonisation, en extrapolant entre autres les théories de Darwin.
(cf chronique de Mathilde Larrère: https://www.arretsurimages.net/chroniques/2017-02-18/De-Bamboula-a-l-histoire-du-racisme-et-retour-id9559
)
le problème c'est que le jour où la science a enfin admise que les races humaines n'existaient pas, le racisme n'as pas disparu comme par magie, ni ses effets tout à fait matériels sur ceux qui ont en été victimes. L'esclavage est devenue ségrégation, puis discrimination, la colonisation exploitation capitaliste (et source de main-d'oeuvre bon marché après l'abolition de l'esclavage puis après-guerre en France métropolitaine avec l'arrivée des Chibanis). Ceux qui étaient préfets dans les anciennes colonies se sont retrouvés préfet en Seine-St-Denis et y ont appliqués les mêmes méthodes; sans parler des restes concrets des empires coloniaux, dont on a vu à plusieurs reprises en France que les habitants étaient toujours traités comme des citoyens de seconde zone (Ouragan à St Martin, grèves en Guyane).

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Bon. Si on admet que la France pratique le "racisme d'état", on a quoi en stock pour qualifier l'apartheid ?
Il manque quand même une nuance importante. Ce n'est pas parce qu'un mot est utilisé en sciences sociales aux USA que son utilisation en Europe devrait aller de soi. On ne parle pas, ici, de climatologie ou de physique nucléaire...
Le traitement de la question du racisme et des questions ethniques diffère fortement de part et d'autre de l'Atlantique, le vocabulaire aussi.
On a de la chance d'avoir des gens qui pensent pour nous.
Gageons que d'ici quelques temps, on sera tous débarrassés du racisme grâce à ces nouveaux mots et expressions, et à ces réunions entre racisés..
Plus rien à faire pour nous. Quelle chance !.
Plainte en diffamation ? Comment décrire la réalité objective sans subir les foudres de celui qui s'en défend voire qui contribue à son organisation ?

... ou: "comment nous faire admettre que la terre est plate ?"

Blanquer satellisé .
un article très intéressant qui évoque sans détour un problème fort complexe . vous avez raison de citer Sylvie Laurent . ce qu'elle écrit sur la situation des Noirs américains est passionnant ,mais la situation est -elle transposable ? En revanche ,parler de racisme d' état ou organiser des ateliers interdits aux Blancs n'est pas sérieux.
Sans vouloir contester la blanchitude de Blanquer, je trouve qu'il a quand même l'air de venir d'ailleurs, loin.
Merci pour cet éclairage.

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