Le jour où le numérique n'a pas sauvé la gauche
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Le jour où le numérique n'a pas sauvé la gauche

En d'autres circonstances, j'aurais pu voter Christiane Taubira. En d'autres circonstances, j'aurais pu applaudir à la tentative citoyenne d'unir la gauche, en tordant le bras des chefs de partis. En d'autres circonstances, j'aurais pu applaudir à la mobilisation du numérique au service de la justice et du climat, à l'irruption bruyante des multitudes dans un débat désespérant.  Après tout, pourquoi 400 000 citoyens ne pouvaient-ils pas réussir là où deux millions avaient échoué en 2017 ? Il faut y croire, y croire encore et toujours.

Je n'ai pas de raison de mettre en doute la sincérité des initiateurs de la Primaire populaire. Mais dès décembre dernier, après la tentative de hold-up à pistolet à bouchon d'Anne Hidalgo, et en dépit d'un soutien des médias toujours affamés de nouveautés distrayantes, l'échec était évident : l'aventure était (de fait, sinon dans les intentions) une manip' contre le candidat de gauche le mieux placé. Sans doute, une fois la machine lancée, la Primaire pop était-elle obligée d'aller jusqu'au bout. Mais hier soir, la ligne d'arrivée franchie sur les rotules, la montagne ayant accouché d'une souris supplémentaire dans un univers de souricières, le panache aurait été de cliquer sur "delete", de déclarer l'entreprise nulle et non avenue, de tourner la page, et de réserver les archives aux historiens méritants de la gauche française au début du 21e siècle. On a tenté, ça n'a pas marché, à la prochaine. Au lieu de ça, la bombe à fragmentation va continuer de produire ses effets plusieurs semaines (jours ? heures ?) encore. Justice sociale et climat se présenteront au premier tour en ordre séparé, que le moins mauvais perde en beauté.

Le numérique n'aura donc pas sauvé la gauche. Encore la Primaire populaire n'est-elle pas le pire de tous les Frankenstein numériques. Au-delà de ce flop conjoncturel, la révolution numérique aura accouché des livraisons de Kinder surprise en quinze minutes chrono (voir la chronique de Thibault Prévost), de bases de données mutantes, des influenceuses, du cyber-harcèlement, du complotisme triomphant, de Trump, de l'insurrection du Capitole – et je n'oublie pas les tarifs yoyo de la SNCF. Sur l'autre plateau, le renversement de quelques dictatures, la presse indépendante, Wikipedia, Guillaume Rozier, les Sleeping Giants, ou de belles rencontres sociologiquement improbables. 10 % de vertueux, 90 % de bullshit toxique. Ce bilan d'étape ne doit rien au data journalism, il est totalement au doigt mouillé, à l'ancienne.


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