70
Commentaires

Lidl, le dernier mystère

Reste tout de même un mystère, après le mémorable Cash Investigation sur Free et Lidl

Derniers commentaires

Après le Cash Investigation du début de semaine, le Ventre de l'Hôpital donne une nouvelle fois à voir le travail dans ce qu'il a de plus quotidien. C'est à noter puisque dans les deux cas, les documentaires ne sont plus simplement des films adressés à des publics restreints et informés mais au grand public. Cela montre aussi en retour combien la scène du travail a été oubliée des médias (et des discours politiques, toutes tendances confondues) préférant plutôt parler de l'emploi et de sa rareté actuelle.

Quant aux réponses des directions aux médias, je ne ferais pas l'hypothèse d'une mauvaise préparation des dirigeants. La première partie du Cash Investigation semble plutôt montrer qu'il y a eu une volonté de la part de LIDL d'ouvrir ses portes à l'émission. Non, je pense, comme la pauvreté des réponses en communiqués de presse et autres "audits Qualité de Vie au Travail" qui se transforment en audit "temps inter-patients" le suggèrent, que les dirigeants ne s'attendent pas du tout à être sollicités sur la question du travail. C'est un constat que je crois beaucoup plus préoccupant.

J'espère avoir le plaisir de voir une émission d'Arrêt sur images décryptant ces phénomènes médiatiques et sociaux.
Pourquoi la recevraient elle mal alors que ces entreprises ne peuvent que se féliciter de l'image que renvoient les reportages de notre chère Elise à ceux qui comptent, leurs actionnaires ?

Voilà des groupes qu'ils ne suspecteront les léser en privilégiant honteusement le bien être de leurs salariés, ou en se montrant faibles face aux inutiles ou la vermine syndicale, et qui ont su trouver des cadres ayant suffisamment peu de scrupules pour manier la langue de bois presque avec autant d'aisance qu'un politique.
Devant un tel spectacle plus d'un détenteur de leur capital a dû se dire que son argent était bien placé, voire finir en érection devant son écran plasma.

Quant à la recevoir, ça fait partie du dispositif de cette publicité gratuite, la leçon a été retenue depuis l'ère Michael Moore, mettre les importuns dehors ça fait nettement moins pro que de leur mettre en face un communiquant démontrant l'aplomb de l'entreprise.

Et pour ceux qui penseraient que c'est juste mon mauvais esprit, j'ai vérifié : l'action Iliad (groupe free) cotait à 221,8 euros et était en baisse le 25 septembre, elle est remontée à 224,8 e depuis l'émission. Quant à celle du groupe Lang und Schwartz (propriétaire de lidl) qui était à 19,06 euros le 25 elle est maintenant à 20,015.
Merci Cash Investigation, la confiance est de retour !
Voici mon hypothèse. Ni Free, ni Lidl s'en foutent, et ils se sont préparés au piège Lucet de la manière qu'ils connaissent. C'est à dire qu'ils savent et estiment qu'un refus total de communication est encore plus catastrophique que de se faire fesser par la maîtresse Lucet.

Il y a également un autre paramètre essentiel et incontournable à prendre en compte, si on veut comprendre ce qui est l'oeuvre ici: on ne parle pas à une journaliste comme on parle aux actionnaires, et on ne parle pas aux actionnaires comme on parle aux collaborateurs. C'est à dire que pour une seule et même information, la stratégie de communication d'entreprise produit 3 récits distincts. Or le mécanisme Lucet repose précisément sur la confrontation de ces 3 récits.

Prenons l'exemple des cadences de 250 colis par heure, et synthétisons les 3 récits qui en découlent. Pour les actionnaires, on ne va pas leur parler de 250 colis par heure et par personne: on déshumanise cette cadence en agrégeant les chiffres par plateforme, par secteur, par région, par produit, et on en sort des indices de productivité permettant le pilotage stratégique de l'entreprise sur la base de chiffres "rationnels". Le but du jeu n'est pas tant de déshumaniser les ouvriers, mais d'éviter de tendre la perche à ce que les actionnaires se posent des questions éthiques, afin qu'ils se concentrent sur ce qu'ils savent faire: de la gestion, de la comptabilité analytique, investir, et engranger du pognon. Ce récit communique le management d'entreprise.

Pour les collaborateurs, cette cadence leur est présentée comme un objectif personnel. Avec tous les atours du management social. On ne va certainement pas leur dire combien les actionnaires vont se mettre dans les fouilles, ni combien leur équipe de 10 personnes brasse de produits et de chiffre d'affaire. On leur présente des objectifs personnels, et on les leur présente comme une réussite personnelle. C'est pour ça que dans le bureau, la RH dit au journaliste-ouvrier, "il est temps de montrer ce que tu vaux". C'est à dire qu'on insère dans l'esprit des collaborateurs l'idée selon laquelle leur valeur en tant qu'être humain se mesure à leurs résultats professionnels, en l'occurrence à leur cadence. Pour ce faire, on enrobe le tout avec un discours corporate: vous faites partie d'une famille (on vous donne des tee-shirts aux couleurs de l'entreprise par exemple), notre réussite c'est votre réussite, vous avez le droit à une médaille en chocolat et à votre photo dans les vestiaires si vous faites péter les scores, on fait miroiter des perspectives d'évolution, de promotion, de réalisation personnelle, etc. Ceci afin que petit à petit, les critères de valeurs morales des collaborateurs se déplacent de l'éthique de la société civile et citoyenne, aux valeurs de l'entreprise. Le but est le même: que les collaborateurs se concentrent sur leur tâche. Ce récit communique le management social.

Enfin, pour les journalistes (mais aussi pour les politiques et la société civile), cette cadence est présentée comme un choix politique de société: le fameux "travailler plus, pour gagner plus". Du même ressort, on trouve tous les arguments du type: le marché est en évolution, la concurrence est rude, l'ouvrier signe son contrat librement dans le plus strict respect de la loi, l'entreprise crée des emplois (avec notre organisation du travail, on fait signer des CDI), le travail a des vertus de réalisation de soi, notre activité change le monde et améliore la société (confort et consommation accessible à tout le monde), etc. Ce récit gère la communication externe et publique.

Dès lors, une bonne communication se mesure dans l'efficacité respective de ces 3 récits. Un bon management social produit des ouvriers corporate et motivés, avec peu d'absentéisme et pas mal d'heures sup'. Un bon management d'entreprise produit des actionnaires en confiance et une presse "spécialisée" séduite. Une bonne communication externe va produire du lobbying et véhiculer une bonne image de marque. Une bonne communication se mesure à son efficacité respective dans chacun de ces 3 domaines, mais elle se mesure aussi dans sa cohérence. Ces 3 récits sont distincts. Ils parlent de la même chose, la cadence de 250 colis par heure et par personne, mais de manière différente, présentée sous un angle différent. Le but du jeu est que ces 3 récits ne soient pas trop contradictoires, ni entre eux, ni avec "le bon sens moral des vrais gens".

Et c'est là que Lucet entre en scène. Elle prend un document destiné aux actionnaires, et le "traduit" en réalité concrète pour un salarié moyen. On prend un objectif de production (250 colis par heure et par personne) et on le "traduit" en poids de voitures, en poids d'airbus, ou encore en poids de Tour Eiffel. C'est le côté contradictoire avec le "bon sens moral". Dès lors, tout l'enjeu pour une entreprise sur laquelle Lucet et son équipe enquêtent, est de trouver la bonne personne qui va être capable elle aussi de traduire l'un ou l'autre de ces 3 discours en un discours compatible avec "le bon sens moral". Mais également de démontrer que ces 3 discours sont cohérents les uns avec les autres.

Jusqu'à maintenant, dans les entreprises, on n'avait pas besoin de faire trop d'effort de cohérence entre ces 3 récits. Puisqu'ils étaient relativement cloisonnés. On se souvient par exemple comment Ruffin se fait sortir de l'AG LVMH par exemple. Free a Angélique Berge-Girard, mais elle, sa spécialité c'est de s'adresser aux collaborateurs, de leur vendre du rêve corporate, en se déguisant en starship trooper: "t'as vu on est trop geek chez Free, on est tous une bande de copains complètement guedins et trop lol", et de théoriser tout ça et même d'avoir un axe de stratégie de communication. En l'occurrence basée sur "l'enchantement" des collaborateurs. Mais c'est pas Berge-Girard qui s'adresse aux actionnaires: ce n'est pas la bonne personne. Pas tant en terme de fonction, mais en terme de personnalité et de manière de communiquer. Elle n'est pas consensuelle. Son rôle est un rôle d'animatrice, de GO du club méd'. Sa tâche c'est des donner l'impression aux salariés que la boîte a une identité propre, et qu'ils font tous partis du même club Mickey.

Chez Free, on a tendance à prendre ses collaborateurs pour des enfants immatures, mais on se doute que ce serait "déraisonnable" de brancher Lucet sur "l'enchantement" de Berge-Girard. Parce-que cette dernière est très probablement intimement convaincue de la valeur de ses médailles en chocolat pour en avoir reçue dès 23 ans de la part de Niel, et pour en distribuer aux collaborateurs ou pour les en priver depuis 17 ans. Ce serait "déraisonnable" de présenter cette zélote du corporatisme et de la liquidation à Lucet: cata' et bad-buzz assuré ! Dès lors, ils ont présenté la meilleure personne pour ce job, ou disons la moins pire: Maxime Lombardini. Normalement, son job en tant que directeur général est de s'adresser aux actionnaires. Et en tant que tel, il a commis quelques erreurs: en particulier celle de parler de "vaincre" aux prudhommes. Il a laissé transparaître une partie du récit destiné habituellement aux actionnaires: la conquête, la croissance, stratégie gagnante, etc. dans un récit destiné au public et à la journaliste. Et pareil quand il est acculé face à une démonstration implacable, il prétexte fallacieusement un manque de performance (là aussi une notion qu'il utilise au quotidien face aux actionnaires) en parlant de manque d'organisation et d'incompétence pour justifier de ne pas connaître telle ou telle information.

Chez Lidl la préparation à Cash Investigation est la même. C'est à dire qu'on se pose la question de savoir quelle personne a les meilleurs atouts pour faire face à Lucet. Mais le problème est différent. Le pendant de Lombardini chez Lidl est allemand et ne maîtrise pas assez le français pour faire face à Lucet. Passer par un interprète serait catastrophique pour l'image de la boîte en terme de distance vis-à-vis du consommateur. Par ailleurs, les casseroles sont de toute autre nature que les "simples" conflits légaux direction-salariés chez Free: suicide de Sansonetti, absence de management social "vertueux" au profit d'un management social autoritaire et violent, institutionnalisation de la déshumanisation dans l'organisation des process, etc.

Autant chez Free on est expéditif dans les négociations avec les mouvements syndicalistes, autant ça reste une boite relativement "normale", du moins pour une boîte au management à l'américaine. Le management social par l'enchantement d'Angélique Berge-Gérard peut apparaître cul-cul la praline, et ses liquidations immorales. Mais chez Lidl on est véritablement dans un autre monde: celui de la maltraitance physique et morale des collaborateurs, avec des faits illégaux et médicaux caractérisés. Donc autant chez Free on peut prétendre envoyer un gars plutôt malin qui va s'évertuer à esquiver la fessée en argumentant de la cohérence des discours de l'entreprise et de son pilotage avec le "bon sens moral", autant chez Lidl on sait dès le départ que ça va être une catastrophe.

Et donc la stratégie de la direction, c'est d'envoyer un "bon gars" au casse-pipe. C'est une évidence que ça ne lui a pas été présenté comme ça par sa direction. Mais clairement, Denis Marold, c'est plutôt un "bon gars". Et c'est d'ailleurs pour ça que la séquence "fonctionne": il est contrit, accablé, hébété, il bafouille. C'est un bon gars dans le sens qu'il porte encore en lui le "bon sens moral". Même si ça fait des années qu'il ferme les yeux (et qu'on l'aide à fermer les yeux) sur la réalité concrète du travail des ouvriers -et c'est d'autant plus facile qu'il travaille sur des indices de comptabilité analytique, et des déclarations de principe- il reste un bon gars au sens de brave et gentil. C'est pas le type hyper brillant, mais il est loyal, et croit dur comme fer aux bienfaits du capitalisme. Et c'est bien parce-qu'il n'est pas pourri jusqu'à la moelle comme sa direction par le cynisme, qu'il ne trouve pas les mots face à Lucet. Deux discours, deux réalités se confrontent dans son esprit, peut-être pour la première fois, ou au moins depuis longtemps. Il se rend compte, sous nos yeux, du caractère injustifiable des méthodes Lidl. Il se rend compte sous nos yeux de l'incohérence de son discours RH France qui a vocation à motiver des responsables régionaux avec le discours et la réalité vendue aux collaborateurs de base, ouvriers et caissiers.

Et je ne sais pas vous, mais moi très clairement, autant j'étais ravi que Lucet fasse mettre genou à terre au combatif et flegmatique Maxime Lombardini, autant je commençais à être mal à l'aise et entrer en compassion pour ce pauvre Denis Marold, sur lequel, bien qu'accablé, dépassé, inerte et à terre, Lucet continuait de "s'acharner". Autant je me suis délecté du spectacle du superprédateur au sang froid de chez Free acculé par la brillante journaliste du service public, autant la mère Lucet a fini par m'écoeurer à s'acharner à tirer sur une ambulance. En fin de compte, j'ai fini par trouvé que Denis Marold était un "personnage du reportage" comparable à un autre "personnage du reportage": Fayral Messac, le RH repenti de Free qui a licencié à tour de bras: un ancien salaud qui a renoué avec son humanité (mais seulement à partir du moment où il s'est fait viré à son tour), qui, finalement, apparaît plutôt sympathique au téléspectateur que je suis.

C'est à dire que la stratégie de Lidl, consciente qu'un entretien face à Lucet est inévitable et que l'enquête de Cash Investigation précipiterait inéluctablement Lidl dans le mur, la stratégie mûrement réfléchie et préparée est de donner en pâture au fauve Lucet, un brave gars qui n'a pas grand chose à voir avec un requin cynique amoral -et je ne suis même pas sûr qu'il se rêve ainsi. La stratégie de Lidl est de présenter un visage humain, plus empêtré dans ses propres contradictions qu'empêtré dans les casseroles de la boîte, un visage qui n'a pas perdu toute son humanité. Denis Marold est un épagneul breton au milieu d'une meute de loup.

C'était de toute façon perdu d'avance, Lucet allait de toute façon atomiser son interlocuteur, les casseroles sont trop énormes. Alors pour contre-balancer cette déshumanisation violente et insupportable dévoilée au grand jour, Lidl lâche un visage humain, assez haut dans la hiérarchie pour être considéré comme une prise de guerre, mais pas trop pourri jusqu'à la moelle pour qu'il puisse être contrit et sincèrement embarrassé à l'écran. Il est d'ailleurs probable que pour arriver à cette fin, sa direction lui ait dit qu'une journaliste voulait faire un reportage sur la réussite de Lidl, et l'axe stratégique récemment pris par Lidl consistant à quitter le low-cost, pour s'attaquer à Casino et Super U. C'est bien enjoué et ravi qu'il se fait maquiller. Contrairement à Lombardini qui fait la tronche dès le départ, et la fille à l'accueil qui refuse d'être filmée. Bref, Denis Marold est comme une offrande sur l'autel du pardon: on sacrifie le moins pire d'entre nous, on vous lâche ce qu'on a de plus humain, et qui vous concèdera ce qui se rapprochera le plus à des scrupules. On le pousse dans l'arène du cirque romain de l'impératrice Lucet II, en lui disant que le public souhaite l'entendre chanter de sa belle et mélodieuse voix...

A un certain niveau de hiérarchie dans le management, l'Art de la Guerre cesse d'être un livre de chevet: il est directement pris par intra-veineuse. Un chef de guerre sait que les batailles ne peuvent pas toutes être remportées. Et quand une bataille est perdue d'avance, la stratégie consiste à limiter les pertes. Denis Marold, c'est le cavalier qu'on sacrifie pour s'assurer une retraite sans trop de perte, tout en préparant la prochaine offensive.
Cash Investigation n'aura sans doute pas l'occasion d'aller chez Amazon.
Sur le blog De Paul Jorion le dernier sujet montre une vidéo dans laquelle les postes de manutention des colis sont occupés par des robots. Ils peuvent porter 500 kg, sans jamais se plaindre.
Lidl devrait sans doute s'y mettre, on peut le parier.
Mal placé.
Un couple de retraités passant aux caisses dans une moyenne surface a longuement expliqué à la caissière qu'elle avait bien de la chance de ne pas travailler chez LIDL, en gros qu'elle était une privilégiée de travailler ici. La caissière a gardé un visage neutre, elle ne leur a pas souri, ils attendaient une approbation qui n'est pas venue. Je crois qu'elle avait hâte qu'ils dégagent avec leur bêtise. J'espère qu'elle n'a pas à subir ça plusieurs fois par jour.
Les réponses du dirigeant et de Pénicaud font penser aux réunions de DP d'entreprise. Les DRH sont formés à répondre systématiquement à côté de la plaque, Il faut poser la même question plusieurs fois de suite et souvent elle revient de mois en mois. Le vrai dialogue social , c'est le rapport de force qui oblige ces messieurs dames à changer de discours et à apporter du concret.
J'ai une petite idée pour répondre à la question de Daniel Schneidermann " pourquoi ces dirigeants d'entreprise, qui reçoivent E.Lucet ne se préparent-ils mieux à l'interview ?". Parce que, justement, ce ne sont pas des "dirigeants", ce sont des "cadres intermédiaires" souvent autodidactes, quelquefois diplômés, très peu cultivés le plus souvent, qui ont l'échine souple, sont capables de toutes les bassesses pour grimper dans la hiérarchie. L'hypocrisie règne en maître absolu, ainsi que la couardise, "fermer sa gueule" , fait office de philosophie dans ce genre d'entreprise. La grande distribution est une jungle où tous les coups sont permis. J'ai connu ça au cours de ma carrière, et ce n'est pas réjouissant de voir que cela perdure et même s'amplifie.
Bon , ...y aura-t-il une plainte de Lidl pour "diffamation" à l'encontre de Lucet ? C'est de celà qu'il faut s'inquiéter ...http://multinationales.org/Multinationales-les-batailles-de-l-information
Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose (propos généralement attribué à Francis Bacon)

Ces types sont des kamikazes, prêt à se sacrifier pour que l'on parle de leur entreprise !

PatriceNoDRM
pourquoi ces dirigeants d'entreprise, qui reçoivent Elise Lucet, ne se préparent-ils mieux à l'interview "à la Lucet" qu'elle leur fait subir ?

C'est une excellente question et je vous remercie de me l'avoir posée.

Ce message a été supprimé suite à la suppression du compte de son auteur

les interviewés sont tout simplement surpris qu'on les interpelle sur quelque chose qui à eux leur paraît évident et
du ressort de la routine managériale ..... je me souviens encore du manque d'empathie du PDG d'orange interrogé sur les suicides dans son entreprise.... un point de détail , un ajustement du curseur à faire.
Elise Lucet est un robot servant la com' d'@si


1 regarder l'émission @si vendredi
2 regarder France2
3 lire la chronique de Daniel jeudi
4 vérifier que les commentaires ont "bien marché"
5 Daniel est un héros !
............SUBTIL
Cash Investigation est une excellente émission et Elise Lucet et son équipe des investigateurs hors du commun qui se distinguent positivement dans un monde médiatique plutôt plat et soumis.
Ils doivent être quand même très dérangeants pour pas mal de monde, on l'a vu une fois de plus dans cette émission.
Pour moi la question qui se pose: Est-ce une émission volontairement "alibi" pour donner l'impression d'une certaine objectivité de France-TV envers les puissants?. Et si la réponse est non, en parallèle, combien de temps avant qu'Elise Lucet soit réduite au silence?

Ce message a été supprimé suite à la suppression du compte de son auteur

"On est toujours surpris, de constater la vulnérabilité de Goliath." Les Goliath ne sont vulnérables que lorsqu'ils se placent à portée de fronde... Lombardini est descendu dans l'arène, au contraire de Xavier ou Angélique (quel prénom mal porté)... Toutes les préparations en communication du monde pour ces gens, ne serviront à rien tant qu'on les confrontera à du factuel et des vérités.
Ils s'en tapent, tout simplement, de leur crédibilité !
Le pouvoir est nu, Todd l'a bien expliqué sur votre plateau entre les deux tours. C'est fini, de raconter que le bon seigneur va veiller sur les bouseux ! Que le bon seigneur il va donner un nonos à son chienchien.
Ce qu'ils disent à Élise Lucet à mots à peine couverts c'est : "je vous emmerde, ma petite dame, vous n'êtes qu'une salariée, bien payée, certes, mais une rien du tout". (Tiens, "Riens du tout", un film de Klapich de l'époque où il avait vaguement des trucs à dire, qui traite exactement du sujet, le management "bienveillant"). Le communiqué grotesque de Lidl ou la disparition mystérieuse d'Angélique Gérard et de Xavier Niel, c'est du pareil au même : on vous pisse à la raie ! Quand leurs têtes se baladeront au bout d'une pique, là, peut-être, ça changera.

Encore une fois, à quoi ça sert d'inviter Todd et Pinçon-Charlot si vous n'écoutez pas ce qu'ils s'évertuent à vous dire ?
J'ai bien peur que le cas Lucet soit un cas d'école: une petite goutte de pluralisme dans un océan de pensée unique.....

Qui sera dilué très rapidement...

Mais que l'on pourra ressortir à l'envie pour justifier du pluralisme,de l'indépendance,de la liberté du journalisme......

Pensez-vous qu'il y aura une enquête de suivi?
Ce qui était aussi remarquable, ce sont les premières réponses de la ministre, exactement à l’identique de celles des responsables de Lidl et Free ; tous les trois sont en fait de même formation.
Ils comptent sur la mémoire des téléspectateurs, qu'on voudrait croire aussi courte que celle qu'on prête au poisson rouge dans son bocal ?
Mince ils ont oublié le classique "Nous nous sommes mal fait comprendre, nous allons redoubler de pédagogie pour mieux vous expliquer notre projet". (ou quelque chose comme ça)
Les éléments de langage ne tiennent pas face à un discours argumenté. Le problème de ces dirigeants, est, on le voit bien, qu'ils sont in fine peut etre conscients des problèmes mais qu'ils s'interdisent de l'admettre face caméra.
''Rester dans les éléments de langage, surtout rester dans les éléments de langage!'', doit se dire le cadre dirigeant!
La force d'Elise Lucet est d'insister tellement intensément qu'elle arrive à mettre en évidence l'absurdité d'un discours récité, absolument pas réfléchi par la personne qui le prononce. Chose qu'un Pujadas ou autre n'est pas capable de faire....

Il faut tout de même saluer le courage du service public qui avec cette émission n'a pas peur de perdre des annonceurs. Avec un peu de provoc on pourrait penser que la réforme de Sarko sur la surpression de la pub a peut etre un peu de bon en réduisant la dépendance du service public au privé.
Je verrais bien une émission avec Elise Lucet pour discuter de cette (apparente ?) contradiction entre la force de ces puissants qui semblent tout d'un coup disparaitre face à Elise Lucet et ses questions
Pourquoi pas face à Frederic Lordon ?


DAKODAC!
Le talent de la com' c'est de faire des réponses qui font croire que le problème a été pris en compte alors que dans les faits il y ne se passera presque rien.

Lidl va surement faire un geste sur les quelques cas cités dans le reportage mais cela n'ira pas bien loin, il y a pour moi un cas simple à vérifier : est-ce que les caissières Lidl vont travailler debout ou assises dans les prochains jours ? Et pour le suivi de l'émission : combien de salariés témoignant dans le reportage vont être virés prochainement ?

Sinon il y a la stratégie de Free (qui a peut être tout compris) : garder le silence.
Je pense que la stratégie de l'idiot est une stratégie comm'... Ça permet de ne pas répondre tout en donnant l'impression d'écouter... Au final, qu'on fait les dirigeants de Free et Lid'L ? Ils se sont posés comme totalement surpris par les questions (alors qu'evidemment ils savaient de quoi on allait leur parler), ont joué la carte de "je ne peux pas savoir ce qu'il se passe dans chaque recoin de notre gigantesque entreprise" et ont remis en doute chaque point pour apporter de la confusion...

Je pense au contraire qu'ils étaient très préparés et que c'est une stratégie pas si stupide...
Il existe une explication simple à ce "paradoxe": les patrons croient tout simplement qu'ils vont rouler Elise Lucet.

Il faut les comprendre: dans leur vie quotidienne, personne ne leur résiste, personne ne les contredit. Ils se croient supérieurs, plus intelligents que tous les autres. Alors, vous pensez bien, une journaliste....
- Mais ils ont bien vu les autres interview, les autres patrons se faire piéger.
- ils se disent simplement: "Les autres, c'est les autres. Moi, c'est moi. Je vais leur montrer comment on réplique à Elise Lucet."

On voit le résultat.
Je verrais bien une émission avec Elise Lucet pour discuter de cette (apparente ?) contradiction entre la force de ces puissants qui semblent tout d'un coup disparaitre face à Elise Lucet et ses questions

Pourquoi pas face à Frederic Lordon ?
"Pourquoi pas avec Frédéric Lordon"? Parce qu'on le voit un peu trop donner son avis sur tous les sujets ?

Entendons-nous bien, je trouve Lordon très intéressant, mais il n'y a pas que lui dans la vie. Je suis parfois un peu lassée de l'entendre ou le lire sur les médias où je vais (certes, me direz-vous, comme je m'informe principalement sur @si, hors série et le monde diplo, c'est logique. Si j'allais sur BFM ou TF1 je n'aurais pas ce problème). Mais des fois ça m'embête de voir mes médias préférés tomber dans la facilité de réinviter toujours les mêmes "bons clients".

Surtout, je pense qu'il y a des personnes tout aussi intéressantes qu'on n'entend pas assez et qui seraient pertinentes sur des sujets comme la pénibilité et le suicide au travail ainsi que la rhétorique managériale actuelle. En ce moment, je suis en train de relire "Extension du domaine de la manipulation, de l'entreprise à la vie privée", de la philosophe, chercheuse au CNRS et femme politique franco-italienne Michela Marzano, c'est passionnant, percutant. Ce livre a 10 ans et préfigure exactement du triomphe de la vision macroniste du travail que nous vivons. Bon, elle a l'air d'être plus en Italie qu'en France maintenant, mais cela vaudrait le coup d'essayer, sur ce sujet ou un autre.

Sur le suicide et la souffrance au travail, il y a les excellents travaux de Christophe Dejours, psychiatre et psychologue spécialisé sur le sujet.

Ce ne sont que des pistes, il y en a sûrement d'autres...
Ca me fait penser, cette présentation du bouquin de Marzano se concluait par : " L’espace entrepreneurial reste peu exploré par des philosophes qui ne s’intéressent pas à un « discours qu’ils considèrent trop pauvre et trop spécialisé » (p. 32)."

C'était sous-estimer les aptitudes des entreprises à tout récupérer, Quand les philosophes font irruption dans les entreprises :
"Loin de se cantonner à la théorie et au concept, les philosophes proposent aussi aux managers une démarche opérationnelle. (...) Des stars de la discipline, comme Luc Ferry ou André Comte-Sponville, font ainsi un cours magistral sur le sens du travail, l'épanouissement personnel, le bonheur ou encore la motivation. (...)
Philosophe et diplômé d'une école de commerce, Jérôme Lecoq se propose de jouer les Socrates au sein des équipes: tous les collaborateurs s'installent autour d'une table et répondent à ses questions sur un thème donné, l'innovation ou l'efficacité par exemple. (...) Cette démarche permet aux équipes de gagner en maturité et en lucidité. «Cet atelier nous a fait prendre conscience de mauvaises habitudes de travail», confirme Céline, responsable de développement dans le secteur financier. Comme celle qui consiste à se jeter sur la première idée séduisante sans vérifier qu'elle s'appuie bien sur des arguments solides.
"

Rentabilité d'un cursus et misère de la pensée...

Tiens, un peu d'ironie socratique :
"SOCRATE : (...) Vois chez qui il est à propos que nous l'envoyions pour apprendre cette vertu. N'est-il pas évident, sur ce que nous disions tout à l'heure, que ce doit être chez ceux qui font profession d'enseigner la vertu, et se proposent publiquement pour maîtres à tous les Grecs qui voudront l'apprendre, fixant pour cela un salaire qu'ils exigent de leurs disciples?
ANYTUS : Et quels sont ces gens-là, Socrate ?
SOCRATE : Tu sais sans doute comme moi que ce sont ceux qu'on appelle sophistes.
ANYTUS : Par Hercule ! parle mieux, Socrate. Que personne de mes parents, de mes alliés, de mes amis, soit concitoyens, soit étrangers, ne soit jamais assez insensé pour aller se gâter auprès de ces gens-là. Ils sont manifestement la peste et le fléau de tous ceux qui les fréquentent.
"

Menon, Platon.
Comme dirait l'autre, "Misère de la philosophie"...
Non seulement, " ils sont mal, très mal ", mais ils sont mauvais, très mauvais ...

DÉCOUVRIR NOS FORMULES D'ABONNEMENT SANS ENGAGEMENT

(Conditions générales d'utilisation et de vente)
Pourquoi s'abonner ?
  • Accès illimité à tous nos articles, chroniques et émissions
  • Téléchargement des émissions en MP3 ou MP4
  • Partage d'un contenu à ses proches gratuitement chaque semaine
  • Vote pour choisir les contenus en accès gratuit chaque jeudi
  • Sans engagement
Offre spéciale
3 mois pour 3 € puis 5 € par mois

ou 50 € par an (avec 3 mois offerts la première année)

Sans engagement
Devenir
Asinaute

5 € / mois
ou 50 € / an

Je m'abonne
Asinaute
Généreux

10 € / mois
ou 100 € / an

Je m'abonne
Asinaute
en galère

2 € / mois
ou 22 € / an

Je m'abonne
Abonnement
« cadeau »


50 € / an

J'offre ASI

Professionnels et collectivités, retrouvez vos offres dédiées ici

Abonnez-vous

En vous abonnant, vous contribuez à une information sur les médias indépendante et sans pub.