En découvrant cette couverture, j'imaginais le long hurlement de bête blessée au Palais, quand on y reçoit Le Point. Pas d'inquiétude. Vous n'aviez pas vu les guillemets ? Fillon n'est pas vraiment président. C'est un président virtuel. Un président pour rire. Un président testé par la maison Giesbert. N'empêche. L'introduction de Fillon dans les sondages présidentiels ressemble tout de même à une sacrée claque au titulaire du poste. Comme les choix de couverture des hebdos obéissent autant à des considérations économiques que journalistiques, guettez attentivement les prochaines couvertures des autres zebdos. Si vous y voyez fleurir la bobine de Fillon, ce sera l'indication que Fillon se vend bien, et le début, pour Sarkozy, d'une prometteuse carrière de kleenex.

Cette carrière semble d'ailleurs déjà amorcée. Et, pour reprendre les termes de notre pugilat émission de la semaine, on dirait que parmi les journalistes politiques, les legrandistes sont en train de prendre le dessus sur les pleneliens. Autrement dit, que le "ce-nest-rienisme" est en train de gagner la partie (si vous ne comprenez rien à la phrase qui précède, je ne saurais trop vous conseiller de replonger dans ladite émission de la semaine).

Prenons l'affaire de cette phrase de Sarkozy, prononcée samedi devant les agriculteurs : "toutes ces questions d'environnement, ça commence à bien faire". On peut la voir avec deux sortes de lunettes (oui, je sais, voir une phrase avec des lunettes, l'image est un peu boîteuse, mais pitié, je rentre de vacances). Les lunettes legrandistes, et les lunettes pleneliennes. Les lunettes Plenel déterminent la vision suivante : "Sarkozy enterre solennellement le Grenelle de l'environnement. C'est très grave. C'est un signal négatif adressé à tous les efforts de réduction des pesticides, alors qu'ici et là commençaient à se développer des expériences prometteuses, saluées même par la presse économique pur sucre. Il faut alerter l'opinion". Interprétation legrandienne : mais non, ce n'est rien. Rien qu'un signal productiviste succédant à la multiplication des signaux écolos du Grenelle, mais avec aussi peu de prise, à l'arrivée, sur la réalité. A vue d'ouïe, il me semble que c'est plutôt l'interprétation legrandienne qui l'a emporté, la phrase en question ayant été assez peu reprise, tout au moins jusqu'à la réaction de Cécile Duflot ("Sarkozy fait tomber le masque vert"). Mais je peux me tromper, je n'ai peut-être pas tout vu ni entendu.