Les deux histoires opposées de la crise de l'euro
, en train de se transformer en crise de la zone euro, le premier réflexe journalistique devrait être de hisser le drapeau blanc, et de formuler un préalable : on n'y comprend rien. Quand une crise aussi grave surgit si brutalement dans les écrans radar, quand ses signes avant-coureurs ont été à ce point ignorés, quand l'irrationnel semble guider la main des "marchés", ne faut-il pas faire d'emblée aveu d'incompétence ?
Faute de comprendre et de savoir, la plupart des récits journalistiques de la crise semblent se ranger, mécaniquement, dans l'un des deux schémas narratifs suivants : premier schéma, les odieux spéculateurs, aiguillonnés par une presse financière irresponsable dont chaque article redouble l'ivresse, ne cessent d'attaquer la Grèce, maillon faible de l'euro-cible, avant de s'en prendre, demain, à l'Espagne et au Portugal et après demain, s'ils le peuvent, à toute la zone euro. Schéma narratif opposé : la Grèce, fourbe pays du Sud, dissimulatrice sur ses déficits, a bien cherché ce qui lui arrive, et nul ne saurait reprocher aux "marchés", qui représentent au mieux l'intérêt de millions d'épargnants, retraités ou futurs retraités, de faire davantage confiance à des pays plus francs, plus fiables, qui regardent fièrement Bruxelles et le FMI dans les yeux. A ma gauche, Jean Quatremer, correspondant de Libération à Bruxelles, dans cette note ou dans celle-ci, à lire attentivement (si ce n'est déjà fait). A ma droite, la quasi-totalité de la grande presse essentiellement anglo-saxonne, épluchée par Gilles Klein ou en France, par exemple, ce matin, Nicolas Barré, des Echos.
Sur ces deux schémas, qui ont pour point commun de créer tous deux les personnages essentiels à l'histoire, du coupable et de la victime, se greffent à l'infini des variantes, et des variations sur les passions humaines : acharnement, humiliation, goût du meurtre rituel, etc. Toute l'équipe d'@si, si l'on additionne ses compétences en matière de psychologie des marchés, n'arrivant pas à la cheville des sommités sus-citées, nous allons dans un premier temps nous contenter de nous appliquer à recenser tout celà. En attendant mieux, bien entendu.
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