La criminologie à l'université, en débat dans Le Monde
Brève

La criminologie à l'université, en débat dans Le Monde

"Entre succès médiatique et rejet universitaire."

Au lendemain du feuilleton de Toulouse qui a vu se multiplier sur les plateaux de télévision les "criminologues", une tribune publiée dans Le Monde du 28 mars dénonce l'avènement de la criminologie comme discipline universitaire. Une décision prise mi-février qui ne répondrait à aucun besoin pédagogique, ni scientifique, assurent les signataires. Ce que dément dans une deuxième tribune Alain Bauer, grand manitou de la profession et proche de Sarkozy, .

Les "criminologues" n'ont pas chômé avec la tuerie de Toulouse. Pendant plusieurs jours, ils ont été mobilisés par les JT pour livrer leurs "expertises" sur Mohamed Mehra en multipliant les jugements pour le moins hasardeux comme nous l'avions montré dans notre montage. Dans une tribune publiée dans Le Monde, Laurent Mucchielli (sociologue); Olivier Nay (professeur de science politique), Xavier Pin (professeur de droit pénal) et Daniel Zagury (psychiatre expert auprès des tribunaux) dénoncent aujourd'hui cette "mise en spectacle de l'événement" qui "donne l'illusion d'un décryptage scientifique".

Selon eux, "cette expertise consacrée par la télévision est largement désavouée dans les milieux scientifiques et universitaires". Et pourtant, le 13 février dernier, "le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche a publié un arrêté créant une nouvelle section de «criminologie» au sein du Conseil national des universités (CNU), l'institution qui représente, en France, l'ensemble des disciplines universitaires". Objectif à terme : recruter des criminologues reconnus. Or, selon les auteurs de la tribune, "la création d'une section de criminologie n'est ni l'aboutissement d'une réflexion collective au sein de la communauté scientifique ni une nécessité pédagogique". Réunis en assemblée générale, les représentations des sections du Conseil national des universités ont d'ailleurs voté une résolution à l'unanimité le 21 mars pour "dénier toute légitimité" à cette section universitaire.

Comment expliquer une telle opposition ? La création de cette section est la suite logique de la remise d'un rapport, publié en mars 2008, par Alain Bauer, criminologue omniprésent sur les plateaux, et proche de Sarkozy. La décision de créer une telle section serait purement politique, puisqu'il existe déjà des structures de recherche sur la criminologie comme l'Institut de criminologie de Paris. Alors pourquoi créer une telle discipline universitaire ? Pour les auteurs de la tribune, "les soi-disant nouveaux «criminologues» ne font en réalité que légitimer l'idéologie sécuritaire en vogue depuis quelques années, celle qui empile les lois les unes sur les autres sans aucune évaluation d'ensemble, qui défend le fichage intégral de la population et qui s'imagine que la diminution de la délinquance dépend du nombre de caméras installées sur la voie publique. Or l'université n'a pas vocation à être remodelée par le pouvoir pour promouvoir un agenda politique quel qu'il soit, pas plus qu'à apporter une caution scientifique à des discours pseudo-savants, quel que soit leur succès médiatique."

Dans une deuxième tribune publiée juste en-dessous, Alain Bauer défend au contraire la création de cette section de criminologie à l'université. Selon lui, "chaque rapport parlementaire sur la récidive, la folie homicide, la violence se termine par une demande de plus d'expertise, de formation, de connaissance. Il suffit de constater ce que la tragédie de Toulouse a provoqué en termes de demande d'explications. Le crime terroriste, qui n'est qu'un aspect de la criminalité, pourrait-il se traiter sans criminologues ? La réalité depuis longtemps a tranché la question de savoir si le crime devait être scientifiquement étudié. Voilà pourquoi ce projet a vu le jour. Avec le soutien d'enseignants assez nombreux pour constituer une section universitaire ou la soutenir".

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