Benalla, Sarkozy, Fillon : l'art de se blanchir au 20h de TF1
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Benalla, Sarkozy, Fillon : l'art de se blanchir au 20h de TF1

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Le 20 heures de TF1, tribune favorite des grands de ce monde accusés de dérives ? Alexandre Benalla, ancien collaborateur de l'Elysée mis en examen pour violence, était sur le plateau du JT de la première ce vendredi pour se défendre. Emboîtant le pas à d'autres soupçonnés, voire mis en examen, tels que Nicolas Sarkozy, ou François Fillon.

Imaginez donc : vous êtes accusé d'avoir employé fictivement votre épouse, mis en examen pour "financement illégal de campagne", ou bien encore pour "violences" et "usurpation de fonctions". Vous vous appelez François Fillon, Nicolas Sarkozy, ou Alexandre Benalla. Face à la crise, comment répliquer ? Rien de plus facile, le 20 h de TF1 est à votre disposition.

Car oui, Alexandre Benalla, ancien collaborateur d'Emmanuel Macron désormais mis en examen pour des faits de violences sur des manifestants le 1er mai dernier, était bien sur le plateau de la première chaîne de France ce vendredi (une version montée a été diffusée, l'intégralité se trouve sur le site de LCI). Suivant les pas de l'ancien président Nicolas Sarkozy en mars dernier, après sa mise en examen pour financement illégal de campagne dans l'affaire du financement libyen, ou encore de François Fillon en janvier 2017, accusé d'avoir employé fictivement son épouse Penelope Fillon comme assistant parlementaire - ce dernier s'était rendu sur le plateau de TF1 avant sa mise en examen

Alors à quoi ressemblent ces interviews au 20 heures de TF1, où les soupçonnés viennent défendre leur honneur, costume-cravate bien ajustés ?

La presse dans le collimateur

A chaque interview, son déroulé... et ses thèmes récurrents. Côté invité, on déroule des éléments de com' bien rodés, qui ne vont pas sans rappeler les précédents. Ainsi, les trois invités ne manquent pas, chacun à leur manière, de s'en prendre aux médias, ces éternels bouc-émissaires. Alexandre Benalla s'en prend ainsi au "déferlement médiatique", largement exagéré selon lui (mais pas pour tout le monde). Quelques mois plus tôt, les "tribunal médiatique", "enquêtes biaisées", et autres "avalanche de calomnies" de François Fillon concurrençaient les attaques en règle de Nicolas Sarkozy contre Mediapart sur l'affaire du financement libyen de la campagne de 2007.

Autre élément de langage : le complot. Complot, pour Sarkozy, du "clan Khadafi", qui chercherait à se venger, et auquel Mediapart aurait servi de "porte-voix". "Officine" et "groupes extérieurs" sont, pour François Fillon ceux qui veulent faire tomber "le vainqueur de la primaire de la droite", créant "quelque chose de pourri dans notre démocratie". Alexandre Benalla ne fait pas exception, lui qui répète à l'envi qu' "on veut atteindre" le président à travers lui, s'estimant victime d'un "règlement de comptes". Des preuves ? lui demande la présentatrice Audrey Crepso-Mara. Le "déferlement médiatique". La boucle est bouclée.

Regrets et sentiments

Il faut dire que les invités ne sont pas toujours bousculés. A commencer par la première question. "Estimez-vous avoir trahi le président de la République ?" entame la journaliste de TF1 face à Alexandre Benalla. La question, sans doute, que se posent "tous les Français". Face à Gilles Bouleau, Nicolas Sarkozy s'était vu lui invité à raconter "dans quelles conditions" s'était déroulée sa garde à vue, durant laquelle l'ancien président avait eu le droit de rentrer chez lui pour la nuit. Si François Fillon s'était vu attaqué bille en tête sur la réalité du travail fourni par son épouse, le présentateur du JT n'avait toutefois pas manqué de rappeler que le candidat se trouvait "dans la tourmente".

La "tourmente", les sentiments. Ils ont en effet la part belle dans ces interviews-défense-contre-attaque. "Pensez-vous que les magistrats [...] veulent se payer Sarkozy ? Quel est votre sentiment ?" interroge Gilles Bouleau face à l'ancien président. Et de s'intéresser au fait de savoir si Sarkozy a "des envies de revanche politique". "Aux yeux des Français, est-ce que vous êtes encore cet homme irréprochable ?", veut-il savoir face à François Fillon. "Vous n'avez aucun regret ?", lui demandera-t-il en conclusion de l'interview.

"Est-ce que vous vous dites, pardonnez-moi l'expression, j'ai pété les plombs ?", demande de son côté Audrey Crespo-Mara à l'ancien collaborateur de l'Elysée. Spoiler : non. Pas de regrets pour l'ancien chargé de mission d'avoir "appréhendé" ces deux  personnes. Il admet avoir commis "une grosse faute", "une grosse bêtise" et regrette simplement d'avoir "été observateur" lors de cette manif. 

La présentatrice de TF1 veut également savoir si Alexandre Benalla trouve sa sanction initiale après les faits (suspension de deux semaines) "appropriée". Là encore, la réponse est un "non" clair et net, l'homme ayant "mal vécu" sa suspension. Benalla serait-il "arrogant", veut-elle savoir ? Mais pas du tout, répond en substance l'intéressé. Pour finir avec cette introspection en règle : "Iriez-vous jusqu'à dire qu'Emmanuel Macron a eu tort de vous faire confiance ?". "Je ne pense pas", répond Benalla, pas déstabilisé.

"Aucun coup à la nuque" ? TF1 conteste en images

Ce qui n'empêche pas que le fond soit lui aussi évoqué. Gilles Bouleau ne manque par exemple pas de pointer l'incohérence de la défense des Fillon, le candidat assurant que Penelope Fillon avait bien travaillé pour lui quand cette dernière avouait dans une interview ne s'être "jamais impliquée" dans le travail de son mari. Ce même Gilles Bouleau qui, face à Nicolas Sarkozy, tient à lui rappeler les multiples témoins qui s'expriment contre l'ancien président de la République. 

L'interview d'Alexandre Benalla, qui revient en détails sur les différents points d'enquête qui posent question (la réalité de la suspension, l'obtention des images de vidéosurveillance, les frictions avec les services de sécurité du président) ne manque pas non plus d'un certain piquant. Face à une Crespo-Mara qui s'appesantit sur les coups portés par l'ex-collaborateur au manifestant, ce dernier assure : "Moi j'ai porté à aucun moment des coups". "Les coups donnés sur la nuque...", insiste la présentatrice. "Il n'y a pas de coups donnés sur la nuque", rétorque Benalla. Tandis qu'au même instant, sur l'écran de TF1, on peut voir sur la vidéo désormais tant partagée des événements du 1er mai ce même Benalla qui lève la main puis l'abat au niveau de la nuque du manifestant. Des avantages d'un bon montage.

L'opération Com' se poursuit

Ce dimanche, l'ancien collaborateur d'Emmanuel Macron a lui continué son opération de communication-sauvetage, entamée jeudi avec un premier entretien au Monde. C'est au tour du JDD d'obtenir les propos "exclusifs" de "l'homme qui voulait protéger le président". Trois pages de portrait dans l'édition papier, dans lequel il peut raconter son parcours, la confiance du Président (qu'il continue de défendre), assumer  à nouveau les faits qui lui sont reprochés (ces "vidéos fatales"), avec un "calme" qui a "de quoi étonner", nous assure le journaliste Hervé Gattegno en ouverture du portrait. Où l'on apprend que, summum du sacrifice, Alexandre Benalla aurait été "prêt à démissionner". "On m'a répondu que ce n'était pas la peine", raconte l'homme au JDD

Un long portrait dont une partie a été reprise par le site de Closer. Pas n'importe laquelle : celle sur "l'enfance difficile" d'Alexandre Benalla. "Mon père a essayé de m'enlever trois fois", raconte-t-il au JDD, repris par Closer. Obligé de se cacher chez sa tante, habillé avec des vêtements du Secours Populaire... voilà donc les propos que retient le site, de l'interview exclusive à l'hebdomadaire. La pipolisation en marche ? 

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