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Copyright : une nouvelle folie douce ?

Quel est le point commun entre Tintin, le petit prince, une météorite tombée sur la Russie, et la sangria ? Tous quatre sont protégés, à des degrés divers, par une législation sur le copyright. Tous quatre sont tombés sous le coup du "copyright madness", la folie du copyright, pour reprendre le nom du blog de nos deux invités du jour, Lionel Maurel et Thomas Fourmeux.

Derniers commentaires

J'ajoute que les vrais ancêtres du profit sont le butin et la rapine.
Bravo Lea, votre message est peut-être le plus subversif qui soit. L'essence de la propriété intellectuelle est tout entière dans la pub: ce sont les marques ( cf l'affaire laguiole).
L'appropriation des mots et des idées. Voila ce que c'est le mot. Aucun auteur, aucun inventeur, aucun poète, aucun musicien, aucun scientifique n'a inventé quelque chose sans s'appuyer sur de l'existant. C'est la toute la folie du droit d'auteur. Folie fondée sur le fait que l'un pourrait être "le premier", chose bien souvent très relative. Sony a breveté le CD, pourtant, sans l'invention de la roue, du laser, de l'électricité.... cela ne pourrait exister. Le droit d'auteur est un vol. Un vol du travail collectif.

Mais tout le monde reste figé dans la posture que l'on peut s'approprier des mots et des idées. Chacun accepte cela. Comme un postulat. Sans voir qu'au final, ce n'est pas la question. La question est : comment font pour vivre ceux qui écrivent, chantent, composent, inventent sans passer par l'appropriation aux effets négatifs que tout le monde constate: Johnny est richissime, et la majorité des musiciens peinent à joindre les deux bouts, pour ne prendre que l'exemple de la musique. Les poseurs de brevets fous également... Tout le monde reste figé dans la posture que la seule façon de permettre à ces gens de reproduire leur conditions d'existence passent par le brevet, par un rapport marchand...

Supprimons les brevets et le droit d'auteurs. Ceux qui créent, comme ceux qui ne créent pas, touchent un salaire à vie, un revenu de base, ou quelque variante que ce soit... Et l'humanité sera libérée du droit d'auteur. Libérée par le haut. Libérée au sens propre du terme de l'emploi. Une utopie? Pas vraiment. Il faut que la majorité envoie bouler une minorité qui profite de nous tous.
Bonjour

Je viens de décompter l'ensemble des invité-e-s de 14h42 : 86 % d'invités homme.

Evidemment, les réponses classiques seront :
- On ne trouve pas de femmes à inviter
- Ce qui compte c'est la compétence et pas le sexe
- L'émission parle essentiellement de sujets dans un secteur fortement masculinisé

Je souhaiterais reprendre ces 3 arguments classiques pour tenter rapidement de les déconstruire ;

1. Oui, les femmes acceptent plus difficilement d'être invitées sur un plateau notamment parce que leur éducation les porte à ne pas se sentir légitimes et à envisager qu'il existe plus compétent qu'elles. Cela implique qu'il faut faire un effort pour les convaincre et trouver davantage d'invitées afin de s'assurer d'un minimum de présence féminine

2. Les femmes réussissant tout aussi bien voire mieux que les hommes leurs études, elles devraient être aussi souvent qu'eux invitées en tant qu'expertes sur des plateaux. Ce n'est pas le cas. Il y a donc un biais : celui de la cooptation qui défavorise les femmes.

3. Certes. Pour autant le rôle d'@si n'est-il pas de contrer les représentations ? Comment aider les femmes à s'orienter vers ces secteurs si aucun modèle ne leur est présenté ?

Cette problématique est pour moi cruciale. Comment être crédible dans son discours tout en ostracisant une partie des voix qui devraient avoir la possibilité de s'exprimer ?
STRUMF. : « Comment se fait-ce que les non-occidentaux aient tant de mal à gober le concept de propriété intellectuelle ? »

il me semblait avoir traité ce sujet dans une chronique ou un Vite dit, mais je ne retrouve pas. Peut-être ai-je pondu ça ailleurs, il y a longtemps.

En tout cas, voilà une bonne idée de chronique ;-)
Trêve de plaisanterie. La question de la propriété intellectuelle est cruciale. Il faudrait une émission pour poser au moins la folle question de la durée des brevets ( entre zéro et l'infini, où est le pseudo équilibre ?). Quel est le caractère collectif de la création ? ( Mozart est impensable sans Haydn, Bach, et les Italiens) Comment se fait-ce que les non-occidentaux aient tant de mal à gober le concept de propriété intellectuelle ? Cette émission, intéressante mais trop technique à mon goùt, néglige la question de comment résoudre toutes ces problématiques, comme on dit sur BFN-RMC.
Un pianiste ne travaille que quand il fait ses gammes. S'il donne un concert, non seulement il ne travaille pas, mais il joue. Le mécénat ( y compris le mécénat d' Etat) est donc, avec le cachet, le seul mode de rémunération de l'artiste. Prétendre salarier les artistes est commettre la même erreur que l'Union soviétique: c'est considérer la culture comme un besoin, alors qu'elle nous en délivre.
Bon ,
je débarque comme tout alpin un peu arriéré.
pour moi, la folie douce, c'est des restaurants branchouille dans les stations de ski branchouille.
Pour moi, la folie douce c'est tout sauf ce à quoi un asinaute conscient et organisé devrait prêter attention.

J'ai rien compris, ou quoi ?
très bonne émision,revigorante pour envisager un furur d'internet pas seulement marchand.
et évidement c'est pas un hasard si ce sont des bibliothécaires qui militent dans ce sens.car les médiathèques sont encore des espaces d'ouverture à la culture magnifiques:des centaines de milliers d'ouvrages potentiellement consultables,gratuitement ou pour une somme symbolique (6 euros pour un an!) qu'on peut garder une quarantaine de jours.en général elles se situhent en plein centre ville,dans de très beaux batiments.comme à la rochelle,poitiers,limoges...
et qu' appolinaire tombe dans le domaine public exeptionnellement plus de 90ans après sa mort,si on prend un de ses livres de poésie en médiathèque,on engraisse ni ces ayants droit ni gallimard.

d'autre part,c'est un retournement de perspective assez cynique, que des créateurs(surtout leurs ayants droit),après avoir recherché le succès public à leurs débuts,dénient à ce même public le droit de faire référence(sans aucun mercantillisme) à leur création une fois ce succès obtenu.un des intervenants disait qu'il y a 6000brevets déposés aux usa chaque semaine,pour essayer de faire du pognon en justice à tout prix et sur n'importe quel sujet.bientôt il faudra payer des droits pour...couper les poils du cul en quinze!!
Excellente émission !
Excellent aussi la notion de pirate box, que je ne connaissais pas, et qui est à faire connaître !

Et je trouve bien dommage que notre Korkos national s'accroche à ce modèle de copyright.
Il y a tout un modèle post-capitaliste à réinventer. Quand tous les artistes auront de quoi vivre décemment indépendamment de la masse de leur production, peut-être qu'ils auront moins de velléités capitalistes.

Je trouve qu'encore une fois Friot y répond très bien, avec son salaire inconditionnel.

Sinon, connaissez vous Youssouf et son Tintin en Irak ? Comment se fait-il que cette excellente parodie (excellente dans ce qu'elle dit, pas techniquement) soit en vente, vous avez une idée ?
I am apology man !
oh mon dieu ! alors je serai en infraction sur tous mes disque dure plein de films et de séries et de BDs et de....
Lionel !!!

Je suis bibliothécaire aussi, et je suis tout à fait d'accord avec Lionel Maurel, Thomas Fourmeux et SavoirCom1, pour les raisons que je vais un peu détailler ici (que les intervenants ont évoqués, mais n'ont pas pu trop développer).

Prenons tout simplement pour commencer l'histoire du prêt de livres. En France, les bibliothèques municipales ont été constituées légalement à la Révolution Française. Le principe, c'était que le citoyen puisse les utiliser pour accéder à la culture et à la connaissance, et ainsi être un citoyen émancipé. Les bibliothèques municipales prêtent des livres, ce qui n'a jamais posé problème à personne... Jusqu'à l'arrivée d'Internet.
Eh oui, au moment où les éditeurs accusaient le choc de l'existence du copier-coller, ce n'est pas contre Internet qu'un débat violent s'est élevé, mais contre les bibliothèques municipales, accusées, par le biais du prêt de livres, de causer un manque à gagner dommageable aux éditeurs et aux auteurs. Ce qui est factuellement faux, car comme il a été indiqué dans l'émission, les pratiques culturelles se cumulent (ça veut dire qu'un gros emprunteur de livres est probablement un gros acheteur de livres). Mais bon, une loi a été passée en 2002, et depuis les bibliothèques font une déclaration de l'ensemble des livres achetés dans l'année pour que les sommes adéquates puissent être reversées aux ayants droits. On peut considérer que c'est légitime et ce n'est pas ça qui va mettre en péril les bibliothèques, mais rappelons-le juste : jusqu'en 2002, ça n'avait jamais posé problème à personne que les bibliothèques prêtent les livres.

Autre exemple peut-être plus parlant : les revues scientifiques dans les bibliothèques universitaires. Les bibliothèques universitaires servent aux chercheurs, elles doivent donc proposer tous les articles à la pointe dans la discipline concerne. Or, les acteurs qui commercialisent les revues scientifiques, depuis qu'elles sont dématérialisées, sont extrêmement concentrés et pratiquent des tarifs tout à fait prohibitifs (exemple : Elsevier, dont Arrêt sur Images a déjà parlé), plusieurs centaines de milliers d'euros / an pour un accès à des bouquets de revues où on ne peut pas sélectionner les revues que l'on souhaite avoir. Pourtant une très grande partie des articles publiés le sont par des chercheurs rémunérés par des deniers publics. On est donc là dans une privatisation au détriment du contribuable/de la recherche d'une ressource produite par le secteur public.

Autres exemple plus banal, pour en revenir aux bibliothèques municipales : je suis bibliothécaire. Je veux afficher en vignette les couvertures des livres que j'ai dans mon catalogue sur mon site web ou les bibliographies que je fais. L'intention est noble : valoriser les documents, donner envie aux gens de les lire/regarder, etc. Aucun dommage pour l'éditeur ou l'auteur, au contraire. Eh bien, je n'en ai pas le droit, car l'image est protégée. Pour le faire, il faut que j'en négocie les droits ou plutôt que je m'adresse à quelqu'un qui en a négocié les droits. Doc j'ai comme choix :
- Electre, ce n'est pas donné (500 à 1000€/an). Tout ça, ça correspond à des documents que je ne peux pas proposer au public (et, à noter, contrairement aux idées reçues, les services publics ne croulent pas sous l'argent)
- Amazon veut bien me filer ses vignettes si je mets un lien vers leur catalogue où on peut acheter le livre. Pas très cool pour le libraire local.
Pour beaucoup de services en ligne, c'est comme ça : je paie un prix prohibitif, ou j'accepte de participer à un système fermé que je ne souhaiterais pas forcément cautionner.

Encore un exemple, le spleen des documentalistes. Être documentaliste dans une structure, c'est faire de la veille, des dossiers de presse, compiler et partager des informations pour aider les personnes travaillant sur ces sujets dans la structure. Mais un article, on n'est pas censé le copier. D'où cette remarque d'une amie documentaliste il y a quelque temps : "j'ai un problème, presque tout mon métier est devenu illégal." Les documentalistes en arrivent à mettre en place des ruses de sioux pour faire de la veille sans copier des articles.

Autre exemple : le livre numérique apparaît, avec la liseuse. Toutes les bibliothèques se réjouissent : chic ! on va prêter des livres numériques ! Ah mais non, pas si vite ! En effet :
D'abord, il y a des questions de droits : est-ce que c'est vraiment un livre ? Ah bah non, pas tout à fait. C'est pas sûr que ce soit bien légal de le prêter. (en même temps, la négociation des droits de prêt est tout à fait étrange pour les bibliothèques. En général, on achète un DVD entre 40 et 80€ l'unité, soit beaucoup plus cher que dans le commerce, à cause du droit de prêt. Mais les CD, on les achète au même prix, parce que le droit de prêt n'a jamais été négocié et que nous sommes donc dans une illégalité qui est devenu une tolérance de fait. Les jeux vidéos, on n'est pas sûr de pouvoir les prêter, donc on propose plutôt du jeu sur place, sauf dans les collectivités dont les services juridiques sont braves et n'ont peur de rien)
Question du droit levée, on rencontre la charmante question du DRM. Les DRM bloquent plein d'usages du livre numérique, à commencer par, souvent, le simple fait de pouvoir le lire. Comme le dit notre libraire qui vend du livre numérique et avec qui on discute "c'est quand même dommage après avoir vendu un livre numérique de devoir passer trois quart d'heures au téléphone avec le client qui n'a pas réussi à l'ouvrir". Soyons réalistes, la plupart des usagers ont trouvé la parade aux blocages intempestifs des DRM : les craquer, tout simplement. Nous on est fonctionnaires, on n'a pas le droit, on doit donc s'arracher les cheveux pour trouver comment faire avec.
Et on se rend compte en creusant un peu la question : "euh, mais le document numérique acheté avec DRM, les gens ont carrément beaucoup moins de droits dessus que ce qu'ils achetaient autrefois en format physique !" Un exemple ? Bruce Willis a intenté un procès à Apple il y a quelques temps. Il s'est en effet rendu compte qu'il n'avait acheté qu'un droit d'usage sur les milliers de chansons et d'albums présents sur son iTunes, et pas les fichiers des albums et chansons. Donc, s'il mourrait, sa bibliothèque iTunes se volatilisait, alors qu'il aurait pu transmettre des CD ou vinyls physiques à ses enfants, ou autres. Bruce Willis a les moyens de faire un procès, mais les millions d'autres utilisateurs d'iTunes, non. Et rappelons-le : ce retrait des documents acheté ne bénéficie aux commun des mortels, mais à la plateforme de revente de ces droits d'accès.

Bref bref. Pourquoi pleurer sur ces limitations et embêtements fait aux bibliothèques ? Eh bien tout simplement parce que ce n'est pas de nous qu'il s'agit, mais avant tout de notre modèle et des gens que nous servons. Nous représentons un truc assez important, qui est le partage du savoir et de la culture légal, légitime, et non marchand, dans le but de l'émancipation du citoyen, et ce quelles que soient ses ressources. Si nous ne pouvons pas accomplir notre mission, si nous sommes incapables de suivre les évolutions des usages parce que l'on nous met des barrières légales, si nous avons l'air de ploucs et n'arrivons plus à attirer notre public parce que nos sites n'ont pas d'images alors que les sites marchands clignotent dans tous les sens, ce qui restera sera une alternative entre le tout piratage, qui n'est pas idéal, et le tout marchand, qui pénalise les plus démunis.

Le problème n'est pas que nous ne voulons pas que les ayants-droits aient une juste rémunération, au contraire. Le problème, c'est que d'une part le capitalisme actuel a commencé à cannibaliser les créations de l'esprit, en transformant un droit d'auteur qui vise originellement à assurer une juste rémunération aux créateurs en une rente de situation se prolongeant bien au-delà du délai pour lequel cela a un sens (l'accession au domaine public, c'est aujourd'hui 70 ans après la mort de l'auteur. On ne risque pas de faire mourir de faim un auteur nécessiteux en défendant le domaine public), d'autre part, les auteurs et producteurs légitimement crispés en raison de l'évolution majeure (mais probablement irréversible) que fait peser le web sur le partage des productions culturelles en arrivent à mettre en place des systèmes et des lois inefficaces pour lutter contre le vrai problème, et qui vont donc uniquement mettre des bâtons dans les roues des services publics respectueux de la loi qui cherchent seulement à servir la population.

Pour aller plus loin :

Une présentation de Lionel Maurel sur la copie et les excès du copyright : http://www.dailymotion.com/video/x16j61p_tu-ne-copieras-point-pour-une-redecouverte-de-la-copie-1-2_creation
C'était à l'occasion de la troisième édition de Brest en Biens Communs, premier festival de France dédié à la protection des biens communs (domaine public, etc.) (plus d'infos et de conférences là : http://www.a-brest.net/article14528.html)

Il y a aussi, sur le contexte américain, le sympathique documentaire "Everything is a Remix", de Kirby Ferguson : http://www.dailymotion.com/video/xsu9y4_exclu-everything-is-a-remix-kirby-ferguson-fr_news
Bonjour,

Le droit d'auteur est-il légitime?
Ce droit n'existe que pour les formes d'art qui dépendent d'une industrie: industrie du cinéma, du disque, du livre, du jeu vidéo...
Est-ce qu'on n'est pas en train de confondre art et business?

Un peintre ou un sculpteur ne va pas créer une oeuvre en 5 minutes et s'il arrive à vendre cette oeuvre, il ne touchera pas de droits d'auteur de la part du musée qui l'exploitera.

Le droit d'auteur tel qu'il existe freine la diffusion de l'art. C'est donc une mauvaise chose.
De plus, les sommes colossales gagnées par certains artistes, quel que soit leur talent, sont-elles légitimes?
Est-ce que leurs oeuvres ne devraient pas, dans ce cas, être vendues moins chères pour profiter à plus de monde?
Je n'arrive pas à comprendre l'héritage dans le droit d'auteur. Qu'est-ce qui justifie le paiement à la progéniture pour utiliser une œuvre ?
Un artiste peut-il écrire dans son testament en cas d'utilisation de l'œuvre, l'argent revient à l'État qui m'a fourni une bonne éducation, des bonnes routes pour partager mes œuvres ?

Il y avait un ce soir ou jamais sur le même thème en décembre dernier.
Petite rectification : ce n’est pas un « local » qui a déposé Laguiole, c’est un Francilien.
Jean-Jacques Rousseau :

« J’ai toujours senti que l’état d’auteur n’était, ne pouvait être illustre et respectable, qu’autant qu’il n’était pas un métier. Il est trop difficile de penser noblement, quand on ne pense que pour vivre. Pour pouvoir, pour oser dire de grandes vérités, il ne faut pas dépendre de son succès. Je jetais mes livres dans le public avec la certitude d’avoir parlé pour le bien commun, sans aucun souci du reste. Si l’ouvrage était rebuté, tant pis pour ceux qui n’en voulaient pas profiter. Pour moi, je n’avais pas besoin de leur approbation pour vivre. Mon métier pouvait me nourrir, si mes livres ne se vendaient pas ; et voilà précisément ce qui les faisait vendre. » - Les Confessions - Livre IX
Contrairement à certains commentateurs ci-dessus, je n'ai pas du tout l'impression que les invités prônent le tout gratuit. Ils sont favorables à la valorisation du partage non marchand de la culture et demandent la protection du domaine public, ce qui n'est pas la même chose.
Ils ne revendiquent pas la fin de toute forme de copyright. (D'ailleurs les Creative Commons ou les licences libres de type GPL sont également une forme de copyright, non?). Ici ils dénoncent les dysfonctionnements et les abus (et il y en a beaucoup!) du système de copyright tel qu'il existe actuellement, et soulignent le besoin de clarifier la législation à ce sujet. A aucun moment il n'est question de demander aux artistes/journalistes/créateurs de bosser pour pas un rond !
La question du copyright est très compliquée, et je suis bien contente que Lionel Maurel et Thomas Fourmeux fassent l'effort pédagogique de rendre le sujet un peu plus accessible à toute personne non titulaire d'un doctorat en droit. Evitons de caricaturer leurs propos :-)
Je suis auteur BD, je gagne l’équivalent d’un smic en droits d’auteur, je travaille 7 jours sur 7, 8 à 10 h par jour à dessiner . Une simple question, si les deux intervenants Lionel Maurel et Thomas Fourmeux n’étaient pas agents de la fonction publique, seraient-ils aussi prompt à laisser leur travail en accès libre ? Si le moyen de gagner leur vie était lié aux droits d’auteur que pourraient générer leur travail, quelle serait leur réaction devant cette émission ? Je ne dis pas qu’il n’y a pas d’abus mais que le droit d’auteur est le seul moyen actuel pour les auteurs de remplir la marmite.
Ils sont gentils, ces deux gars qui promettent de ne pas attaquer @si si d'aventure le patron de ces lieux publiait sous forme de livre leurs travaux sans leur verser un kopeck de droit d'auteur.
Oui, ils sont bien gentils.
Mais ils sont salariés par ailleurs.
Dans ces conditions, c'est un peu facile.
C'est vrais, ils sont salariés par des institutions, donc ils n'ont pas les mêmes contraintes qu'un "simple" auteur qui n'a que ses contrats de distribution et ses droits pour bouffer.
En même temps, travaillant dans un esprit de service public, c'est pas etonnant qu'ils se liberent de leur droits, je suis de ceux qui pensent que tout ce qui est fabriqué par le service public devrais appartenir au domaine public. C'est rarement aussi simple malheureusement, on vois regulierement des institutions financées par nos deniers mettre des copyrights sur ce quelles produisent (ce qui est déja discutable) et sur ce qu'elles conservent (ce qui est une forme de copyfraud)

PS: je conseille a tous la lecture du Blog de Lionel Maurel pour approfondir ces questions. http://scinfolex.com/

Ils sont gentils, ces deux gars qui promettent de ne pas attaquer @si si d'aventure le patron de ces lieux publiait sous forme de livre leurs travaux sans leur verser un kopeck de droit d'auteur.

Oui, ils sont bien gentils.

Mais ils sont salariés par ailleurs.

Dans ces conditions, c'est un peu facile.


J'ai du mal à voir en quoi cumuler leur travail salarié et leur travail bénévole est une solution de facilité.
NONOOSTAR : La solution de facilité consiste à abandonner ses droits (c-à-d autoriser la copie et la reproduction même à usage commercial de son travail sans contrepartie financière) quand on est salarié par ailleurs.
C'est facile de se la jouer grand sire, d'avoir de grands principes quand on a de toute façon de la thune qui arrive à la banque chaque fin de mois.
S'ils n'étaient qu'auteurs, nos deux petits gars, s'ils devaient courir les éditeurs pour vendre leurs textes, ils ne cracheraient pas sur les contrats (en supposant qu'ils en décrochent) et sur les avances sur droits afférents.
CQFD
Alain, je sens poindre dans ces propos une amertume qui me paraît un peu exagérée.
Lionel Maurel défend le domaine public. Il place ses écrits dans le domaine public. C'est cohérent, et justement, comme il est salarié, il peut le faire (notez bien qu'il y a tout un tas de gens salariés qui ne crachent pas sur des revenus potentiels supplémentaires).
Vous avez bien remarqué qu'à aucun moment il n'invite tout le monde à faire pareil. Il indique qu'une de ses amies fait pareil. Une. Pourtant il est de la sphère libriste, il y a plein de gens qui écrivent ou créent en creative commons, mais on voit là qu'il s'agit d'une position extrême.

De la même façon, vous aurez remarqué qu'à aucun moment, dans les exemple de copyright madness donnés ici, on ne parle d'un auteur. Les cas cités correspondent à des ayants droits plus ou moins éloignés ou à des sociétés qui abusent de leur pouvoir au nom du droit d'auteur, du brevet ou du copyright.

Votre répartie serait justifiée si les personnes invitées étaient en train de faire la morale aux auteurs, mais ils ne le font pas. Ce qu'ils pointent, ce sont des abus ou des inadaptations du système qui sont réels.
ROLLEYES : J'ai bien noté ce que vous dites. Mais je trouve que cette répartie finale (ou presque) a le don de fusiller tout ce qui a été précédemment dit dans l'émission. Et franchement, je trouve ça quasiment… (attention je vais choquer)… indécent.
Vous avez beau trouver ça indécent, Mr Korkos, cela ne vous donne pas raison pour autant.

Il y a un vrai problème autour du droit d'auteur et des gens qui en abusent qu'il convient de rééquilibrer les droits et d'éviter que les "droits" des uns tuent la créativité ou la liberté des autres. C'est particulièrement vrai dans le domaine du numérique où la "défense des droits d'auteurs" telle qu'elle est exercée actuellement fait peser des contraintes injustifiées (DRM, condition d'utilisation abusives, flicage des connexions internet) sur l'ensemble des citoyens et au final ne profitent pas aux auteurs, mais seulement aux intermédiaires (les majors, la sacem, etc).
Êtes-vous sûr que "la défense des droits d'auteur" ne profitent pas aux auteurs? Cela ne semble pas logique pourtant.
Et justement les majors, les éditeurs et tous les intermédiaires commerciaux sont bien entravés, pas pour diffuser mais pour "commercialiser" surtout, rentabiliser, par les droits d'auteur. Ils font leur possible pour que le "public" croit ce que vous croyez et ils mettent en avant les "méchants" ayant-droits et se gardent bien de s'attaquer directement aux auteurs que pourtant ils n'hésitent pas à spolier parfois (cette affaire de la BNF qui voulait vendre des "introuvables" et créait une dérivation zappant complètement l'auteur montre bien que l'idée d'éliminer l'auteur, même vivant, ne choque pas).
Pourtant la valeur financière d'une oeuvre ou d'un travail artistique est 100% dépendante de l'auteur et de sa singularité.

Enfin parfois pour la BD, on pourrait imaginer une usine à BD avec des dessinateurs salariés: youpi un nouveau modèle économique! Mais si on veut préserver l'inspiration et l'originalité, la création, quoi de mieux que les droits d'auteur? Dont le défaut est surtout qu'ils sont trop maigres parfois.

Si on analyse, on trouve que partout le problème est qu'on produit trop, (style embrasse-les tous, dieu reconnaitra les siens) imprimons tout, filmons tout, enregistrons tout et le consommateur reconnaitra les talents dont il a besoin. La part commerciale est préservée car les coûts de production sont rétrécis et elle est centralisée (elle n'a pas grossi, pas plus de personnes à se partager le pactole), la rentabilité de la part créatrice est réduite, divisée car les créateurs sont trop nombreux et se partagent le gâteau, d'une façon ou d'une autre, pas selon leur choix en tout cas. Les créatifs ne maitrisent pas, ils subissent cette organisation. Et en plus on les attaque! Pour bien prouver que l'avantage du rapport de force n'est pas de leur côté.
Sachant que des gens, plus ou moins sans talent, sont prêts au bénévolat. Ou que des gens riches sont prêts à payer pour être "artiste reconnu". L'artiste, le vrai, le pur, va bientôt être remercié?, tout va fonctionner sans lui? Car le secteur commercial de l'Art peut fonctionner sans nouveaux artistes au stade où on en est. Est-ce une finalité qui nous sied?

Protéger le droit d'auteur, c'est protéger la liberté, car la liberté s'est s'extraire des lois commerciales et non pas s'extraire du commerce.

Comment analysez-vous le problème, Tristan Le Gall pour croire que ce sont les droits d'auteur qui tuent la créativité, tout en disant que la défense des droits d'auteur ne profite pas aux auteurs?.. Difficile de vous suivre, qu'Alain Korkos ait raison ou pas, de trouver ça indécent, n'est pas que la question.
Quelqu'un qui se plaint de son genou en sang parce qu'il est tombé de vélo, si le gars du vélo d'à côté lui répond "je sais pas, j'ai rien senti", non seulement c'est pas très solidaire, mais ça ferait limite rire si c'était pas si indécent.
Tristan Le Gall n'a pas parlé du principe des droits d'auteurs mais, je cite texto, de "la "défense des droits d'auteurs" telle qu'elle est exercée actuellement".

Le problème avec ce débat c'est qu'il part facilement sur la question du principe, et on tombe alors dans de l'absurde. Parce que quasiment tout le monde est d'accord sur le principe ! Tout le monde veut défendre le droit d'auteur et personne ne veut voir mourir les auteurs de faim !
Le truc, c'est que ce noble principe ne justifie pas que l'on fasse n'importe quoi en son nom, surtout quand les intérêts défendus ne sont plus ceux des auteurs eux-mêmes, mais ceux d'ayants-droits.
Que Alain Korkos relève que l'émission semble se conclure sur "pas de droit d'auteur du tout" est possible n'est pas une position de principe.
Et j'ai pas rêvé que Tristan Le Gall surgit pour contrer Alain Korkos, même en se tortillant pour se donner l'apparence du bien, il semble plaider pour le bénévolat.

Maitre Eolas en 2009 a dit:
Car, et c'est là ma deuxième observation, rappelez vous ce que je vous ai dit. Le droit d'auteur est apparu pour protéger les auteurs contre les éditeurs qui s'enrichissaient sur leur dos, puis contre les producteurs de spectacle et les interprètes qui faisaient de même. Le combat des ayant-droits aujourd'hui présente une grande nouveauté : il oppose les ayant-droits à leur public, qui ne s'enrichit pas sur leur dos. Les musiciens insultent ceux qui apprécient leur musique en les traitant de voleurs, les réalisateurs font de même avec ceux qui apprécient leur film en les traitant de dealers.

L'opposition entre ayant-droits et le public qui déboucherait sur la fin des droits d'auteur: j'ai tendance à penser que ça arrangerait bien les éditeurs, les producteurs et les interprètes. Donc la méfiance est de mise envers cette évidence qu'on nous sert sur un plateau, celle qui invite les auteurs à généreusement livrer leur production. Curieux que ça échappe aux intervenants de l'émission.
Rapidement,

- L'émission ne se conclut pas sur le fait de supprimer le droit d'auteur mais sur le fait que les invités placent leurs propres écrits dans le domaine public et pensent que ça favorise la diffusion de leur idées. Nuance.

- Quand on replace la citation de Maître Eolas dans son contexte, le sens que vous lui donnez change complètement :
Deux mots pour conclure, comme disent les avocats qui en ont encore deux cent à dire : d'une part, la protection des œuvres de l'esprit, et le droit de leurs auteurs de les exploiter commercialement est pour moi tout à fait légitime. Permettre à un artiste de vivre de son art est normal et sain pour la vie artistique. Je ne suis pas en guerre contre les droits d'auteur. J'émets simplement des doutes sur la réalité de l'étendue du préjudice que les ayants droit prétendent subir à cause du téléchargement par des particuliers (télécharger une œuvre ne fait pas obstacle à l'acheter par la suite pour l'avoir en meilleure qualité ou bénéficier des bonus, et rien ne permet d'affirmer que ceux qui ont téléchargé une œuvre l'aurait acheté s'ils avaient été mis dans l'impossibilité de se la procurer de cette façon), et constate que le conservatisme de cette industrie qui espère arrêter le cours du temps et de la technologie plutôt que faire face aux défis que représentent l'évolution de la technique est proprement suicidaire. Nous sommes en 2009, et l'industrie musicale commence tout juste à proposer légalement des titres au format largement compatible, ayant semble-t-il compris la bêtise que constituaient les mesures techniques de protection qui protégeaient surtout contre l'écoute du morceau.

Car, et c'est là ma deuxième observation, rappelez vous ce que je vous ai dit. Le droit d'auteur est apparu pour protéger les auteurs contre les éditeurs qui s'enrichissaient sur leur dos, puis contre les producteurs de spectacle et les interprètes qui faisaient de même. Le combat des ayant-droits aujourd'hui présente une grande nouveauté : il oppose les ayant-droits à leur public, qui ne s'enrichit pas sur leur dos. Les musiciens insultent ceux qui apprécient leur musique en les traitant de voleurs, les réalisateurs font de même avec ceux qui apprécient leur film en les traitant de dealers.

Je ne suis pas expert en marketing, mais qu'il me soit permis d'émettre des doutes sur la viabilité de cette attitude, et même de sa simple rationalité.


Source : http://www.maitre-eolas.fr/post/2009/02/20/1321-les-droits-d-auteur-pour-les-nuls

C'est à peu près ce que nous disions ici...
ROLLEYES : Pardonnez-moi si j'ai une vision simpliste des choses, mais ce que je comprends de cette émission, c'est que 1. on nous montre les abus du droit d'auteur 2. on ne nous explique pas en quoi ce droit est fondé 3. on termine par une déclaration du genre : Nous on n'utilise pas ce droit, on livre gratuitement nos productions.

Il y a là une condamnation implicite du droit d'auteur.

Et le commentaire de Tristan Le Gall (mais il n'est pas le seul) va dans le même sens puisqu'il parle de « vrai problème autour du droit d'auteur » et de « "défense des droits d'auteurs" telle qu'elle est exercée actuellement [qui] fait peser des contraintes injustifiées ».

Insister lourdement sur des abus sans jamais affirmer le bien-fondé de la notion de droit d'auteur revient à condamner ce dernier.

Ce n'est pas plus compliqué que ça.
J'ai plutôt tendance à penser que le bien fondé du droit d'auteur n'est pas expliqué parce qu'il tombe un peu sous le sens. Et comme je le disais plus haut, ceux qui sont en cause dans les exemples donnés ne sont jamais directement les auteurs.

Après, les deux invités sont proches (je crois) de la sphère libriste, donc peut-être remettent-ils en cause la notion traditionnelle de l'auteur. A noter quand même que la sphère libriste, même si elle insiste sur les créations collectives et moins sur l'image d'un auteur créateur seul dans son coin, est très respectueuse du droit d'auteur en règle générale, puisque c'est l'auteur qui choisit la licence sous laquelle va être diffusée son oeuvre et que les différente licences creative commons sont très détaillées pour permettre l'utilisation adaptées aux droits que souhaitent donner les auteurs sur leur oeuvre.

Pour le dernier volet, c'est le présentateur qui leur fait préciser qu'ils écrivent en domaine public, aussi.

Pour avoir assisté à plusieurs interventions et débats sur les questions de droits d'auteur et de biens communs, c'est généralement tout à fait intéressant de creuser les raisons de ceux qui mettent leur travail sous licence libre, ceux qui arrêtent de le faire, etc.
C'est à peu près ce que nous disions ici.

Ce que vous disiez sans doute, mais pour avoir eu affaire avec d'autres forums sur @si que celui-là sur le droit d'auteur, le ressentiment, la hargne, le mépris pour les auteurs est bien plus prégnant que ce que vous semblez croire.
On fait passer les auteurs pour des amoureux du flicage, des ennemis de la liberté, du partage (à aucun moment, personne ne fait remarquer qu'en dépit de ce stalinien droit d'auteur, il n'y a jamais autant de diffusion de culture dans l'histoire de l'humanité, mais enfin, ça doit être un détail...), pour des grippe-sous qui ne pensent qu'à leur rente, voilà même qu'ils tuent la créativité (ha ben oui, un auteur, en créant, tue la créativité, c'est bien connu) - mais à part ça, aucune hargne rentrée contre les auteurs et contre le principe même de leurs droits, non non non, qu'allons-nous imaginer là...
D'accord, c'est ce que je disais mais je trouvais un peu présomptueux de dire "Maître Eolas dit comme moi !" :p

Je vous crois tout à fait, même si ça m'étonnes, j'ai rarement l'occasion d'entendre ce genre de discours (mais c'est peut-être parce que je suis parmi des bibliothécaires, qui aiment le partage ET la culture). J'imagine que pas mal de ceux qui tiennent ce genre de discours sont assez peu au fait de l'économie de la culture et du fait que même si certains tirent très bien leur épingle du jeu, les auteurs ne gagnent en règle générale pas bien leur vie.

Et il y a peut-être un ressentiment plus existentiel là-dedans qui vise ceux qui ont osé dédier leur vie à la création alors que la plupart des gens n'accomplissent pas vraiment cette possibilité (mais y ont pensé un jour).

Ce n'est pas parce qu'on a quelque abrutis qu'il faut jeter tout le débat, pourtant.
Je pense que vous, comme Alain Korkos et bien d'autres, se trompent en croyant que ce que l'on fait au nom du "droit d'auteur" profite aux créateurs, et en invoquant les difficultés financières réelles de la plupart des auteurs comme une "preuve" que si on touche à ce droit, ce serait pire.

Je ne suis pas contre le principe de droit d'auteur, en revanche je pense que ce droit:
1) devrait s'éteindre à la mort de l'auteur. Quel mérite ont donc les héritiers pour bénéficier de ce droit ? On peut imaginer que le droit s'exerce encore 15-20 ans après la mort de l'auteur (le temps d'élever les enfants d'un auteur décédé jeune) mais les 70 ans ou plus de la législation actuelle sont clairement un abus.
2) aurait une "exception de citation" étendue, pour toutes les formes d'expression (et non simplement l'écrit) qui couvrirait aussi les hommages/parodies/satires qui font référence à une oeuvre tout en la réinterprétant
3) permettrait un droit de copie pour tout usage non-commercial et non-malicieux, ce droit étant éventuellement lié au paiement d'une "license globale" d'un montant raisonnable.

Les "petits" auteurs, ceux qui sont broyés par le système actuels, n'auraient rien à perdre avec de tels changement. Ce sont eux qui ont tout intérêt à ce qu'un maximum de monde ai accès (quasiment gratuitement) à leur oeuvres, c'est ce qui leur permet de se faire connaitre et au final de valoriser leurs oeuvres. Le succès de certains auteurs de BD comme Maliki ou Marion Montaigne qui vendent (très bien) les BD tirées de leurs blogs accessibles gratuitement devrait vous faire réfléchir sur l'intérêt d'interdire toute reproduction/partage soit disant pour "protéger les auteurs".

Ce n'est certainement pas la diffusion gratuite, le partage par de simples citoyens des ouvres qu'ils aiment qui empêchent les auteurs de vivre. Bien au contraire. Plus les gens seront cultivés (y compris s'ils se cultivent en téléchargeant illégalement des films ou de la musique, ou en allant à la FNAC lire les BD sans les acheter), plus ils acheteront des oeuvres et rétriburons ainsi les auteurs qui leurs plaisent. C'est l'inculture, et non le "piratage", qui tue les auteurs.
[quote=Alain Korkos]
Ils sont gentils, ces deux gars

Quant à moi, je ne les trouve pas du tout gentils, mais inféodés à la loi du profit, laquelle ne bénéficie qu'aux exploiteurs ou privilégiés bénéficiaires (: en l'espèce fonctionnaires) du travail, du talent ou du génie d'autrui. J'avais rédigé, il y a déjà quelque temps de cela, un texte (devenu depuis la première partie d'une contribution à un ouvrage collectif à paraître) actualisant la toute première philosophique leçon sur la question du droit d'auteur (et droits apparentés). Je vous en adresse le texte, en soutien non seulement de votre défense de sa vitale partie financière, mais aussi et plus encore de sa partie essentielle, symptomatiquement "oubliée" sur le forum. Au-dessus de la vie, en effet, très au-dessus, il y a la dignité dont témoignent en particulier le métier, l'inventivité, le talent ou le génie des personnes qui ont pris le risque d'exercer des professions exigeant de sacrifier sa vie à sa vocation. Cela dit afin également d'épurer un malentendu qui nous aura fâcheusement "opposés". Car autant j'ai pu regretter qu'en une occasion vous vous en soyez remis à l'épigonale - et obsolète - sémiologie de Barthes, autant j'avais auparavant plusieurs fois souligné ce qui, dans vos chroniques, relève de votre propre génie. Votre survalorisation du dilettantisme de Barthes, autrement dit, n'eut d'égale que la sous-estimation de votre professionnel mérite personnel: parfaitement idiosyncrasique. Souffrez donc donc lecture du texte çi-après que vous pourrez, s'il ne vous agréait, verser quant à vous au registre de ces miennes "leçons de cuistre" contre lesquelles vous ne devriez pas continuer d'avoir le tort de vous emporter.

La leçon du calife

« La fin du XVIII?me siècle a été, en matière de "librairie", le temps des règlements. » écrit Dominique Lecourt dans sa préface à la réédition, sous le titre Qu’est-ce qu’un livre?, de quatre textes de l’époque remarquablement présentés et mis en relation avec notre actualité par Jocelyn Benoist. Les trois premiers sont de Kant et le dernier de Fichte, tous quatre consacrés à démontrer l’illégitimité de la contrefaçon définie comme reproduction d’un livre sans mandat de l’auteur à son éditeur. La présentation met particulièrement bien en évidence l’intérêt que revêt leur lecture aujourd’hui. C’est à Kant en effet que nous devons la distinction entre droit réel et droit personnel sur laquelle la légitimité du droit d’auteur se trouve fondée. Alors que le premier ne régit que la propriété des choses, le second ordonne le respect des personnes, lesquelles ne sauraient jamais être considérées comme objets de propriété, fût-ce par elles-mêmes. Ainsi le discours tenu dans un livre par un auteur est-il beaucoup plus que sa propriété : il ne fait qu’un en réalité avec lui-même et ne peut par conséquent en être séparé, "aliéné", comme on disait : vendu ou donné. Seuls le peuvent les exemplaires : ces blocs de pages imprimées dans lesquels l’auteur a expressément — par contrat — consenti que son discours soit reproduit. Cela n’exclut évidemment pas la possibilité d’autres supports ou vecteurs de reproduction comme les éditeurs le prévoient par contrat aujourd’hui. Ainsi se trouve fondé le droit de l’éditeur en tant que publieur : médiateur entre le public et l’auteur, sa légitimité est assurée par le mandat de l’auteur au nom de qui il officie. — Quels que soient les retours de confusion sur la question de "la librairie", on ne sache pas que cette leçon de droit ait perdu de sa vigueur aujourd’hui.
Que cette "déduction de légitimité" ait nécessité le génie personnel de Kant, la preuve en est que son disciple le plus fervent n’ait pu la retrouver quand il s’est efforcé, à son tour, d’apporter la preuve de l’illégitimité de la contrefaçon des livres. L’intérêt de son texte est toutefois, sinon juridiquement du moins philosophiquement, aussi important que celui de son maître. — Et, dans son double souci de la forme, pour nous ici, d’une actualité autrement plus évidente : pour ne pas dire "brûlante". Fichte en effet, commence par établir l’illégitimité de la contrefaçon par « un raisonnement » que l’on peut ainsi résumer : bien que les pensées d’un auteur puissent être objet d’appropriation par ses lecteurs, la forme toutefois qu’en son œuvre il leur a données, ne saurait être, elle, objet de propriété. L’éditeur n’en obtient donc, par contrat, et aux conditions de l’auteur, que le simple usufruit. La contrefaçon se définit ainsi comme vol d’usufruit. Dans son retrait d’avec le personnalisme kantien, et dans son avancée par rapport à lui quant à la détermination de la propriété : artistique et non seulement littéraire, le texte présente ainsi déjà l’originalité d’ordonner la pensée dans toutes ses expressions à la notion de forme. Mais l’intérêt qu’il revêt ne s’arrête pas là, car dépassant le simple souci intellectuel, Fichte nous présente pour terminer sous forme de parabole la défense et illustration du principe auquel la rigueur de son « raisonnement » doit son caractère probant. «Du temps du calife Haroun al Rachid, qui est connu à cause de sa sagesse dans les Mille et une nuits », nous conte-t-il, « vivait ou pourrait avoir vécu un homme qui confectionnait une essence […] qui devait remédier à tous les maux, voire à la mort elle-même. » Ne voulant pas s’occuper de la commercialisation de sa médecine ce « chimiste » confia cette tâche en exclusivité à un marchand. D’où évidemment la jalousie des autres « apothicaires » et leur décri de leur confrère et de son « essence ». Mais à cela s’ajouta le vol de celle-ci par l’un des concurrents et sa revente à bas prix. Conduit, après moult péripéties, devant le calife par le marchand exclusif, ce revendeur pour sa défense développa une argumentation dont l’impudence reposait sur le même principe que celui des contrefacteurs en librairie. « Il est bien connu que le seul étalon valable de la bonté de nos actions est leur utilité. » Et de passer en revue les services rendus par sa volerie non seulement « au peuple crédule » et « à l’utile artisan du produit », mais jusqu’ « au plaignant lui-même ». Se présentant comme « un martyr pour le bien du monde » du principe d’utilité, il requiert par conséquent « le respect de son commerce » et la venue à résispiscence du plaignant. Mais à son grand désappointement le calife en jugea tout autrement : « Cet homme utile fut pendu. » — Sans doute la sanction fut-elle trop sévère : la prison et le mépris auraient suffi, et la leçon n’en aurait été que plus clairement administrée. Car il n’est aucune humanité dans l’ordre de l’utilité, il n’y en a que dans celui de la dignité.
Kant, illustre contemporain de Haydn et de Mozart, aura pu voir le contraste de l'ancien et du nouveau: Haydn resta jusqu'à sa mort un domestique de luxe, même si le prince de Galles s'inclina spectaculairement devant lui. Mozart passe pour être le premier artiste entièrement indépendant, " auto-entrepreneur", qui allait jusqu'à chiffrer certaines de ses partitions pour les protéger des copistes. Sa veuve traîna des procès pour plagiat pendant des années ( le thème de l'ouverture de la " flûte enchantée" est de Clementi). Les deux musiciens, apparemment si différents, offrent néanmoins un des plus beaux exemples d'amitié dans l'histoire de l'art. Moralité: le monde de l'économie et celui de l'art ne sont même pas antinomiques: ils sont absoluments étrangers.
GERMAIN R. : On voit par là que Kant établit ce qu'on appelle le droit moral et le droit patrimonial, qui sont les fondements de la loi sur le droit d'auteur. Mais après Beaumarchais, me semble-t-il. Enfin, peu importe.
Fichte, quant à lui, semble faire - si j'ai bien compris - la distinction entre l'idée qui appartient à tout le monde et l'utilisation de l'idée qui est personnelle.
Ainsi, tout le monde peut écrire une histoire d'amant dans le placard, cette idée n'est pas protégée. Mais personne n'a le droit de copier une pièce de Barillet et Gredy exploitant ce filon.

A part ça, concernant Barthes, nous serons toujours opposés. Je ne comprends pas votre animosité contre cet homme qui fit grandement avancer la réflexion, mais bon, ce n'est pas grave. Signifiant et signifié seront toujours dans un bateau et quand ils tomberont à l'eau, il restera toujours le référent à la barre.
Euh, moi je la trouve un peu problématique, cette histoire de Calife.

Si on transpose, voilà ce que ça donne :

- Un chimiste de génie créée un médicament qui soigne du sida, de tous les cancers et du rhume du cerveau.
- Il autorise un laboratoire pharmaceutique à breveter le médicament.
- Le laboratoire vend le médicament très cher, ce qui permet à environ 1% de la population ou aux populations dont les pays ont un bon système de sécurité sociale de bénéficier du remède contre le sida, les cancers, etc. Tant pis pour les autres.
- Un autre labo sent le filon ou est poussé par un sentiment de justice et créée un générique accessible à tout le monde
- Le premier lavo porte plainte. Le labo qui a commercialisé le générique est dissous, son dirigeant décapité et le générique est interdit.
- Le médicament retrouve son prix initial et c'est bien, parce que sinon à travers les intérêts économiques du premier labo, c'est la dignité du chimiste qui était atteinte, et tant pis pour les gens qui meurent (parce que leur vie n'est rien à côté de la volonté de l'auteur admirablement défendue par les intérêts économiques du labo).

Ah ben tiens, Fichte a trouvé mes limites dans la défense du droit d'auteur. On aurait pu juste lui filer un prix Nobel, à ce chimiste, non ? Y a pas des gens parmi vous qui étaient partisans des génériques pour permettre aux pays du tiers-monde d'accéder à la trithérapie ou des trucs dans le genre ?
cES DEUX JEUNES GENS SONT EXTREME"MENT INTERESSANTS COMPETENTS ET DEMONTRENT QU'UNE SOCIÉTÉ COMMUNISTE (SANS PROPRIÉTE PRIVÉE PAS STALINIENNE) N'EST PAS UNE UTOPIE IMPRODUCTIVE BIEN AU CONTRAIRE. TRES INTERESSANTS. A REVOIR PLUS LONGUEMENT AVEC DES EXEMPLES DETAILLES DANS TOUS LES DOMAINES DE LA VIE.

FAUT-IL METTRE UN COPYRIGHT À LA LOI DE NEWTON ? UN DROIT D'AUTEUR AU BACILLE DE KOCH ?

lA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE PRIVÉE C'EST AUSSI UN PEU LE VOL DE L'INTELLIGENCE COLLECTIVE.
fORMIDABLE CETTE EMISSION. MERCI
Jean-MArc, il faudrait demander au dessinateur avec qui vous avez bossé pour la revue dessinée si il s'accorde avec vos deux invités. ;-)
D'une manière générale, même lorsque vous envoyez un cd par la poste ou que vous achetez des cd dans le commerce, vous payez aussi une redevance. Mais l'argent ne va que très peu "dans la poche des Johnny Halliday", il tourne essentiellement en circuit fermé dans les organismes chargés de collecter ces redevances. ( ne serait-ce que-déjà-parce que beaucoup d'artistes ne sont pas inscrits dans ces organismes...)

Le point de vue des 2 invité est quand même très très très partial. L'exploitation de licences, ça sert aussi aux éditeurs à financer de nouveaux projets. Aujourd'hui, les auteurs qui ne sont pas suffisamment gros pour pouvoir s défendre correctement, se retrouve coincés entre les gens qui prônent le tout gratuit sur internet et les éditeurs qui profitent de la crise pour faire signer des contrats léonins.


Si tout devient gratuit, commençons par PC impact et arret sur image, on verra pour "les Johnny Halliday" après... :-D

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