Juan Branco, un inclassable sur les crêtes étroites
Je vous ai laissé parler !
  • Avec
    Juan Branco
  • Presentation
    Daniel Schneidermann
  • Préparation
    Erwan Batoz
  • Réalisation
    Antoine Streiff
Réservé à nos abonné.e.s

Avocat des Gilets jaunes, mais aussi de l'actuel Premier ministre du Sénégal Ousmane Sonko à l'époque dans l'opposition ;  pamphlétaire anti-Macron à succès, fâché avec le système de la librairie ; victime auto-proclamée de sombres manigances des puissants : Juan Branco développe sur les réseaux sociaux un personnage singulier de révolutionnaire de bonne famille, à distance des médias traditionnels, qu'il n'aime pas, et qui le lui rendent bien.

Il se lance aujourd'hui, assure-t-il, dans une candidature présidentielle (voir ici le Discord où s'élabore collectivement le programme). On peut être sûrs qu'il la mènera à sa manière, sans filtre, seul contre tous,  à coups d'amalgames catégoriques, d'insinuations acrobatiques ou de fulgurances kamikazes, sur la crête étroite du rocambolesque et du vraisemblable. Et en frappant au-dessous de la ceinture si nécessaire, par exemple contre les trois femmes qui ont porté plainte contre lui (deux plaintes pour viol, et une pour agression sexuelle, toutes encore à l'instruction).

A propos d'insinuations acrobatiques, le long passage de notre échange dans lequel il attribue implicitement à des pratiques "mafieuses" supposées de Xavier Niel, et à ses "liens avec le milieu" le dépôt d'une de ces plaintes, est le plus représentatif du grand mystère Branco, que l'on pourrait résumer ainsi : l'Ange noir de Saint-Germain-des-Prés (méchant surnom dont l'a affublé Paris-Match, qui lui colle à la peau) est-il un mythomane légèrement paranoïaque, ou la réelle victime de manigances des puissants ? S'appuyant sur des faits incontestables et avérés -la condamnation de Niel pour recel d'abus de biens sociaux dans un peep-show (de 2001 à 2004), le rachat par le même Niel en 2024 de la sulfureuse agence Bestimage de la "communicante" Mimi Marchand, laquelle avait elle-même été condamnée pour détention de 500 kg de cannabis au milieu des années 90- on  appréciera dans cet échange comment le jeune avocat insinue, sans jamais l'affirmer, qu'il pourrait être victime d'un "Kompromat" à la française. 

Suggérer sans jamais affirmer.  Souligner lourdement certaines coïncidences, mais en s'arrêtant là. Mêler dans la même démonstration des faits indiscutables à des confidences invérifiables, des condamnations documentées à de lourdes plaisanteries : on reconnait là un fumet complotiste familier. Comment, dans cet espace journalistique qu'est Arrêt sur images, donner à voir ces accusations sans les accréditer ? D'abord, avec un double présupposé : non, tout n'est pas complot. Mais cela ne signifie pas qu'aucune manoeuvre ne se noue jamais dans les coulisses de la République. D'un Foccart à un Benalla, en passant par un Charasse, un Barril, ou un Bertrand, au fil des présidences, ce n'est pas d'aujourd'hui que toutes sortes de moyens privés (médias) ou de moyens de l'Etat (Justice, police, Renseignement, fisc) sont mis en oeuvre en toute opacité par le pouvoir pour intimider, dissuader, discréditer, corneriser, silencier, des gêneurs, des lanceurs d'alerte, mais aussi des maîtres chanteurs, ou tous trois à la fois. Il est tout à fait possible que des intérêts politico-maffieux se liguent dans l'ombre contre l'Ange noir, pour l'empêcher de nuire. Certes, la preuve n'en est pas apportée dans l'émission. Mais pourrait-elle l'être ?

La réfutation la plus efficace de ces soupçons tient d'ailleurs à une contradiction interne au système Branco lui-même, puisque le journal appartenant à ce milliardaire qui "a des liens avec le milieu" (Le Monde) est aussi celui que Branco estime aujourd'hui "le plus lisible" dans le paysage et dont deux journalistes -Ariane Chemin et Raphaëlle Bacqué- méritent ses hommages.

Cette invitation me vaudra sans doute de nombreuses critiques, à la hauteur des allergies et des adhésions que suscite Juan Branco. Je n'y étais pas obligé. Voici seulement quelques années, il était logique de prendre à la légère ce parcours d'un provocateur narcissique, sans troupes, qui n'a jamais détenu aucun mandat électif, et se proclame cible de tous les puissants. Il était confortable de laisser la pompeuse violence de son style s'auto-détruire seule.

Mais entre temps, ont été élus dans de vénérables démocraties des profils tout aussi "transgressifs" que Juan Branco, faisant mentir eux aussi les certitudes traditionnelles de la science politique, comme Donald Trump (deux fois) ou Emmanuel Macron (deux fois aussi). Disons-le : en ce moment où toutes les catégories politiques sont sens dessus dessous, où jour après jour nous sommes submergés par l'inimaginable, cet inclassable reflète son époque. Et Je Vous Ai Laissé Parler est typiquement l'espace dans lequel laisser ces paroles "border line" se confronter, autant que possible, à un rappel aux faits. 

Bref, j'ai eu envie d'y voir de plus près. DS.

Contacté par mail puis par texto, pour lui permettre de réagir s'il le souhaitait aux différents propos le visant tenus par Juan Branco pendant cette émission, Xavier Niel n'a pas répondu aux sollicitations d'Arrêt sur images. 

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