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L'enfant juif du ghetto de Varsovie, ou l'icône invisible

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Tiens, Alain, un petit détour par ici pour signaler un article publié aujourd'hui, qui me semble témoigner d'une crainte pas très éloignée de celle exprimée dans votre article :
Auschwitz est devenu le parfait contre-exemple du travail de mémoire.
http://www.marianne2.fr/Auschwitz-symbole-de-l-holocauste-tourisme_a221856.html

Avec, au passage, une allusion aux questions de la responsabilité et de l'engagement individuels :
Surpris par le nombre de villages ou bourgades environnantes, vous osez poser la question qui fâche, à savoir celle de l’attitude de la population locale durant le Seconde Guerre mondiale. Subitement, le ton monte d’un cran et vous avez droit à la remarque suivante : « que vouliez-vous qu’ils fassent » ? Sur quoi, poli, vous répondez : « donner des informations à la résistance »
Il y a aussi la biographie romancée du commandant d'Auschwitz du bon écrivain Robert Merle
La mort est mon métier

existe en Folio
Encore félécitations pour ce décryptage passionnant. Pour ceux que cela ne rebute pas, j'invite à lire (livre difficile à trouver) Au fond des ténébres de la journaliste Gitta Sereny (Denoël, 1974 et 1975). Il s'agit de l'examen de conscience de Franz Stangl, ancien commandant du camp de Treblinka. Et puis bien entendu, comme complément incontournable, Un si fragile vernis d'humanité de Michel Terestchenko (La découverte, 2005, 2007), qui donne une lecture pédagogique et instructive sur cette banalité du mal (et du bien).
Merci pour cette chronique Alain K. Merci pour ton érudition, ta culture, ton partage, ton humilité. Définitivement je vois les images autrement, c'est-à-dire, je les VOIS tout simplement. Grâce à toi je progresserai encore. Non, non, je ne fayote pas :) Je suis toujours entièrement sincère. :-)))
Une admirable chronique.merci
La discussion est partie sur du assez pointu...
J'ai pensé un truc. Pas aussi élevé niveau Histoire, je sais.
Mais on ressort parfois tantôt des christs, tantôt des formes symboles universels, tantôt des images bibliques, pour expliquer que des images nous fascinent plus que d'autres.
Les réminiscences auxquelles on peut en appeler pour cette photo haut les mains ne sont pas autant les bienvenues. Non vraiment. L'humour d'écorché à la Gainsbourg, qui sied mal quand on n'est pas écorché, est exclus d'office.
Pourtant qui peut être sûr qu'elles ne jouent aucun rôle, ses sous images?
Remarquable et utile chronique.

PS: Es gibt keinen jüdischen Wohnbezirk in Warschau mehr! (Il n’y a plus de zone de résidence juive à Varsovie!)…
Petite remarque, si j'ose: le mot "résidence" n'est pas faux mais il me semble que "zone d'habitation" serait plus approprié.

Ce message a été supprimé suite à la suppression du compte de son auteur


Au lendemain de la guerre, on ne publiait pas ce genre d'images. L'heure était alors à la célébration des résistants et si l'on évoquait les victimes des camps d'extermination, c'était pour se demander pourquoi tous ces gens s'étaient laissés conduire à l'abattoir tels des moutons.


Ce genre de questionnement, hélas, a perduré. Je me souviens que lors du procès Papon, cette vieille baderne de Maurice Druon (oui, le co-auteur du chant des partisans), témoin de moralité de Papon, a dit à la barre à peu près la même chose en évoquant, en parlant des déportés, "les juifs passifs, comme des brebis offertes au sacrificateur". Autrement dit, en substance, "nous, nous étions Résistants, tandis que les Juifs..."
Je me souviens que ce jour là, plusieurs parties civiles, écœurées, ont quitté la salle d'audience.
A écouter la rediffusion, ce jour, d'un numéro de Répliques qu'Alain Finkielkraut a consacré au procès Eichmann.
A lire aussi, "Entretiens avec le bourreau", de K. Moczarski, livre à partir d'entretiens que l'auteur, résistant polonais de l'armée intérieure, eu avec Stroop en personne au fil de 9 mois passés ensemble en prison.
Merci pour cet article. Le livre de Frédéric Rousseau est passionnant, cela me donne envie de le relire.
Pourquoi m'enfermerai-je
dans cette image de moi
qu'ils voudraient pétrifier ?
pitié je dis pitié !
j'étouffe dans le ghetto de l'exotisme

non je ne suis pas cette idole
d'ébène
humant l'encens profane
qu'on brûle
dans les musées de l'exotisme

je ne suis pas ce cannibale
de foire
roulant des prunelles d'ivoire
pour le frisson des gosses

si je pousse le cri
qui me brûle la gorge
c'est que mon ventre bout
de la faim de mes frères

et si parfois je hurle ma souffrance
c'est que j'ai l'orteil pris
sous la botte des autres

le rossignol chante sur plusieurs notes
finies mes complaintes monocordes !

je ne suis pas l'acteur
tout barbouillé de suie
qui sanglote sa peine
bras levés vers le ciel
sous l'œil des caméras

je ne suis pas non plus
statue figée du révolté
ou de la damnation
je suis bête vivante
bête de proie
toujours prête à bondir

à bondir sur la vie
qui se moque des morts
à bondir sur la joie
qui n'a pas de passeport
à bondir sur l'amour
qui passe devant ma porte

je dirai Beethoven
sourd
au milieu des tumultes
car c'est pour moi
pour moi qui peux mieux le comprendre
qu'il déchaîne ses orages

je chanterai Rimbaud
qui voulut se faire nègre pour mieux parler aux hommes
le langage des genèses

et je louerai Matisse
et Braque et Picasso
d'avoir su retrouver sous la rigidité
des formes élémentales
le vieux secret des rythmes
qui font chanter la vie

oui j'exalterai l'homme
tous les hommes
j'irai à eux
le cœur plein de chansons
les mains lourdes
d'amitié
car ils sont faits à mon image

Guy Tirolien
"....Les Allemands guettaient du haut des miradors
La lune se taisait comme vous vous taisiez
En regardant au loin, en regardant dehors
Votre chair était tendre à leurs chiens policiers..."


incroyable histoire que celle de la photo de ce petit garçon utilisée avant tout par un obéissant général de la Waffen SS pour démontrer l'"efficacité de son travail à vider le ghetto de ses Juifs indésirables" !!!..
...rapport qui ne cherche sans doute qu'à mettre en place le protocole le plus rapide et le plus profitable à l'organisation nazie pour appliquer la solution finale prévue par un des plus grands criminels de l'Histoire !...

reste l'histoire de millions de Juifs, homosexuels, malades mentaux,... exterminés par des hommes et des femmes obéissants, exterminés méthodiquement, scrupuleusement, photos à l'appui, à l'injonction d'un seul qui a fini planqué dans son bunker parce qu'il n'a pas eu le courage d'affronter l'Histoire !

le parcours de cette photo est très émouvant : pour le peuple allemand en mai 1943 elle devait prouver l'"efficacité" de ses fonctionnaires à la solde, aujourd'hui elle n'est que la preuve de leur monstruosité !..
reste une question à laquelle personne ne peut répondre : comment des milliers d'hommes et de femmes ont pu commettre autant de crimes à la chaîne et en si peu de temps sans se poser la moindre question sur leurs actes si ce n'est celle de leur "efficacité" ?!...

merci m'sieur Korkos pour ce rappel salutaire..

nb : je me permets cet autre rappel car la barbarie pourrait bien démarrer par ce genre de jugement : "Les Pussy Riots condamnées à deux ans de camps pour vandalisme !...
en 1933 Hitler avait été empêché d'exterminer les malades mentaux parce que le Vatican avait eu pitié d'eux ?!
aucune chance pour les les Orthodoxes de Russie, graissés jusqu'à l'os par le machiavélique Poutine, prennent la défense de la liberté d'expression et des artistes en Russie : bien trop corrompus eux mêmes !!
la Russie pourrait bien devenir un immense goulag sous Poutine....
mais mais mais...on me dit qu'il a été élu démocratiquement ???
ah oui c'est vrai, comme d'autres avant lui qui ont exterminé en toute légalité sur leur territoire parce qu'"élus démocratiquement" !...
De même, aucun élément ne permet de dater sans aucun doute possible celle de l'enfant juif.

Absence de l'étoile jaune telle qu'on se la représente généralement, mais brassard (avec étoile bleue - ou jaune pour les juifs allemands -) : je me rappelle que ce détail (possible repère chronologique) contribuait à la polémique concernant la datation.

Je souligne en passant ce détail parce qu'il me semble lié à votre conclusion une icône devenue invisible: il se pourrait bien que de nombreuses personnes décrivant ce cliché de mémoire préciseraient en toute bonne foi que l'enfant a une étoile jaune sur la poitrine.
POMPASTEL : La situation de la Pologne en 1939-1945 était très complexe. Il y avait, d'une part, toute une partie de la Pologne administrée par le Gouvernement général de Pologne. Par les nazis, en fait, qui en 1939 avaient annexé cette partie du territoire sans l'incorporer au Reich. Là, les Juifs durent porter à partir de 1939 un brassard blanc avec étoile de David bleue. Varsovie faisait partie de ce territoire.

Il y avait aussi, d'autre part, le Reichsgau Wartheland qui était un territoire polonais annexé par les nazis en 1939 et incorporé au Reich. Là, en revanche, les Juifs durent porter une étoile jaune sur le côté gauche de la poitrine et sur l'épaule droite. Le port de l'étoile jaune sur la poitrine (mais pas sur l'épaule) fut imposé dans tous les autres territoires conquis par les nazis.
Oui, c'est ce à quoi je faisais allusion.
Raison pour laquelle le détail que je soulevais me semblait renforcer votre conclusion de l'icône devenue invisible.
Complètement décontextualisée puisque devenue un support à émotions polyvalentes.
Aujourd'hui, l'évocation du sort réservé aux Juifs pendant la seconde guerre mondiale amène immanquablement l'image de l'étoile jaune, visible sur la poitrine. Il faut avoir quand même un peu planché sur la question pour être au courant des subtilités historiques que vous précisez et de quelques autres... (Il arrive d'ailleurs par ici que ça déplaise à quelques-un(e)s quand on souligne le risque d'anachronisme :-) )
Je sais que, malgré l'hyper célébrité de ce cliché, de nombreuses personnes voient l'étoile jaune dans la représentation que leur mémoire leur propose de cette photo (photo à laquelle, je pense, personne n'a échappé).
Il me semblait donc que ce détail renforçait votre démonstration, avec laquelle je suis vraiment en phase.
(Je voulais juste soutenir la confusion entre la connaissance historique et la "consommation" mémorielle, le brouillage entre l'histoire singulière de cet enfant avec les représentations qu'on en a, sans compter la charge émotionnelle abondamment exploitée - comme vous le rappelez - : tip top dans mes petites obsessions névrotiques personnelles :-) )
Il y a un autre fait troublant à propos de cette photo : nombre de gens ont cru se reconnaître en l'enfant. C'est, d'une certaine manière, le même phénomène que pour la photo du Baiser de l'Hôtel de Ville. Une identification extrêmement forte, d'une puissance au delà de la raison.

(On connaît, en revanche, et sans aucun doute possible, l'identité de quatre des adultes prisonniers visibles sur l'image. La liste est par là.)
Pour ajouter à la confusion, précisons que l'édition amerlocaine de Der gelbe Stern par Gerhard Shoenberner (L'Étoile jaune, en français), affiche en une de couverture la photo de l'arrestation de Juifs à Budapest. Le sujet principal de cette image est un homme en manteau, portant l'étoile jaune, qui lève les bras. Comme l'enfant de Varsovie. D'où une confusion possible.

La couverture du livre.

La photo originale.
Pourquoi "amerlocaine" ? Ce me semble quelque peu méprisant, non? Les Américains ont tout de même perdu bon nombre des leurs dans la lutte contre le Nazisme.

Pourquoi "amerlocaine" ? Ce me semble quelque peu méprisant, non? Les Américains ont tout de même perdu bon nombre des leurs dans la lutte contre le Nazisme.


Mais non, rien à voir. Alain Korkos dit "amerlocain" même quand il parle de Léonardo DiCapriccio. C'est comme quand on dit les rosbeefs pour parler... des rosbeefs. C'est pas méchant.
C'est pas méchant mais c'est bien beauf franchouillard.
POTEMKINE : Quand je croiserai Queneau, je lui dirai que son idée d'écrire Amerloquaine est, d'après vous, beauf et franchouillarde. Je suis sûr qu'il réécrira alors Zazie dans le métro pour vous satisfaire. Prévenez votre libraire !
Dans un contexte surréaliste burlesque c'est une chose, dans un article sérieux sur l'holocauste (avouez, on fait pas plus grave) c'est autre chose.
Potemkine n'a pas entièrement tort. Queneau a traqué toute sa vie la franchouillardise, c'est à dire la connerie.
et lorsque les messieurs très très bien ont fini de dire leurs conneries très bien
prononcées avec une orthographe très bien
on leur sert des consommations très bien
de pipi de chat, de l'urine de chèvre et du ouisqui très bien


= fin d'un poème de Queneau

Je crois que Potemkine a tort d'autoriser à Queneau ce qu'il refuse à Alain.

Les mots déformés brisent une certaine déférence et c'est voulu je crois dans un cas comme l'autre.
Car l'excès de vénération nuit.
Dans un autre poème Queneau dit "la Franceu, ou la Franss" ou la France (c'est un poème sur l'histoire récente). On ne pardonne pas tout à ceux qu'on aime. Plutôt moins. Rien de plus terrifiant qu'un respect absolu comme si on était parfait.

Queneau n'aurait jamais dit "les ricains" et ce n'est pas le livre qui est le contexte propice à dire "amerloquaine", c'est l'époque de Queneau, elle-même le contexte, avec son regard.
C'est gentil avec les mots de les déformer, c'est une taquinerie.
Pourquoi voir pire et chercher querelle?
En appeler à un certain ordre qui protège? Mais de quoi?
C'est gentil avec les mots de les déformer, c'est une taquinerie.
Pourquoi voir pire et chercher querelle?

Sans vouloir usurper votre identité, je crois surtout que nous sommes nombreux ici, fidèles d'Alain, à être comme un poisson dans l'eau au coeur de son écriture.
Si Potemkine s'est inscrit hier sur @si*, il faut peut-être lui accorder deux minutes pour se familiariser avec une patte d'écriture très identifiable par nous tous.


*Merci FdeC pour l'éducation progressive aux réflexes de vérification :-)
Il a bien fait de poster Potemkine. Je voudrais pas qu'il croit que je me permet de lui interdire de penser que "amerloquaine" est franchouillard, (c'est à dire une pique de mépris?) et qu'il ne sonne pas pareil dans la bouche de Alain que dans celle de Queneau. Au début je croyais que c'était le rosbeef" de D.Godin qu'il traitait de franchouillard.

Et puis Potemkine postant directement sous Alain Korkos qui vient de clarifier les choses pour pas qu'on s'imagine un sous-entendu non voulu, quand vous dites Potemkine est nouveau, il ne peut pas savoir. Comme si je traitais Potemkine de haut: non je ne vois pas en quoi je montrerai que Alain Korkos est au dessus de tout soupçon parce qu'on le connait bien. Je lui réponds en parlant de Queneau, je vous fais remarquer. Alain Korkos je m'en méfie comme de la peste...
Lui répondre c'est dire le contraire de "t'es nouveau tu ne peux pas savoir" ce que vous sous-entendez.

Je me suis exprimé pour qu'il sache qu'on peut voir d'une façon moins radicale.
Et je suis intéressée à ce qu'il m'explique pourquoi il craint un sous-entendu intentionnel (anti-américain) et goujat (faisant comme si on ne leur était pas redevable de la libération en particulier des camps).

C'est quoi ces intrigues...
Comme si je traitais Potemkine de haut:
Ah non, votre message était très posé, je ne sous-entendais pas ça du tout.
Pas plus que ça, d'ailleurs : Lui répondre c'est dire le contraire de "t'es nouveau tu ne peux pas savoir" ce que vous sous-entendez. .
C'est l'impression inverse : justement, personne (et peut-être Alain non plus) n'a pris en compte qu'il débarquait (si j'ose).

Nous sommes branchés sur Queneau parce que nous connaissons et nous aimons l'univers d'Alain, mais il ne me semble pas impossible de comprendre que pour quelqu'un pour qui cette chronique d'Alain (sur un sujet vachement sérieux, traité de manière très professionnelle et documentée) est un des premiers contacts avec @si , le mot "amerloquain" puisse surprendre et le pousser à s'exclamer.
En clair, j'ai eu l'impression qu'il était un peu choqué, je n'ai pas senti son ton comme une recherche de querelle.

Mais je fais comme tout le monde, je ressens et j'interprète.
Ne sachant de surcroît pas du tout qui est Potemkine, c'est juste une hypothèse, elle me semblait la plus probable.
C'est XC qui s'exclame... pas Potemkine.
Potemkine s’inscrit hier sur @si.
Il lit l’article d’Alain.
Pas habitué (je suppose) à la petite musique singulière de son langage, il vient faire un tour sur le forum.
Il lit l’exclamation de XC, dans laquelle il se reconnait (je suppose)
Malgré la réponse de Dominique Godin (qu’il ne connait pas, je suppose) et celle d’Alain (qu’il ne connait pas non plus, pas encore, je suppose) il en rajoute une toute petite couche : je comprends qu’il souligne à sa manière la différence à ses yeux entre une conversation de vacances en marcel (vocabulaire fantasque à sa place ) avec la démonstration très pensée et très construite d’Alain (vocabulaire académique attendu).

D’où ma suggestion, si je ne me trompe pas, de lui laisser le temps de s’habituer à l’univers irremplaçable d’Alain ,et, s'il en a envie, de méditer sur le pertinent poétariat proposé ci-dessous dans la conclusion/question de Germain Rital.
Avant de filer, une petite anecdote personnelle à propos de Queneau :
Voici quelques jours, une de mes copines éleveuse de Terre Neuve organisait une réunion sur sa grande terrasse (la veinarde) : une quinzaine de convives dont moi, réunis autour d’un projet (organisation d’une journée de démonstration de travail à l’eau/sauvetage, mais soit).
Soudain, pendant qu’on sert un verre, il y en a un qui raconte qu’il avait hésité à appeler sa chienne Zazie, mais qu’il y avait renoncé en dernière minute.
Moi, très spontanée : « Ha ha, t’as bien fait, y’a des tas de gens qui auraient cru que c’était à cause de la chanteuse ».
Grand silence. Echange de regards, gigantesques points d’interrogations dans l’air.
Prise de conscience brutale, embarras soudain : personne autour de la grande table ne connaissait une autre Zazie (ou, s’ils en avaient entendu parler, ils l’avaient oubliée, en tout cas, aucun doute n’était permis : le choix du nom auquel le chien avait échappé était bien une référence à la chanteuse).
Ah, tous ces pré-requis individuels qui modulent la manière dont on s’exprime, dont on se comprend – ou pas -, qui orientent le type d’humour auquel on est sensible, qui entretiennent souvent à tort des susceptibilités, et qui, dans tous les cas, multiplient les risques de malentendus !
Pas mal, j'aime !
gamma
Queneau, faut-il le rappeler, ne fut pas seulement l'écrivain que l'on sait, ou, plutôt, il ne le fut, que pour avoir retenu, et publié les leçons d'Introduction à la lecture de Hegel d'Alexandre Kojève, lesquelles initièrent la dernière grande génération intellectuelle française (Lacan, Sartre, Merleau-Ponty) à la pensée de celui qui domine encore aujourd'hui les esprits: le succès du livre de Fukuyama en est la preuve manifeste, mais pas le plus révélateur demeuré aujourd'hui encore latent. Ce dont Queneau, en particulier, témoignerait, pour peu qu'on veuille interpréter son hégéliano-kojévisme, du reste patent dans les titres d'au moins de deux de ses romans: Pierrot mon ami, et, surtout Le dimanche de la vie, qui est une citation littérale de la fameuse caractérisation par Hegel de la peinture hollandaise. Tout comme Socrate connut une double postérité: prestigieuse avec Platon, et populaire avec Diogène, Hegel aura de même connu avec Lénine une postérité politique: dialectique révolutionnaire "bien connue", et avec Queneau une postérité poétarienne* méconnue. Ainsi à la grande sagesse stalinienne et au formalisme japonais sur lesquels Kojève clôt son interprétation de l'hégélienne fin de l'Histoire, Queneau substitue sa vision personnelle: celle, non point burlesque ou surréaliste, mais joyeusement désabusée d'un destin populaire: poétarien. Cet adjectif renvoie à l'invention linguistique par René Edme** du terme de poétariat qui, étonnamment, me paraît retenir juste ce qu'il faut du sujet de l'Histoire imaginé par Marx**** sous le nom de prolétariat. Me trompé-je beaucoup en considérant les chroniques d'Alain Korkos, non seulement comme, thématiquement, des analyses iconologiques, mais, littérairement aussi, sinon d'abord, des "exercices de style" démontrant que: si l'humanité doit être sauvée, elle ne le sera que grâce au poétariat ?

* Non il ne s'agit pas d'un lapsus comme il va être précisé.
** Je laisse à chacun le soin d'en découvrir le destin.
***Marx qui, sans renoncer à sa critique, sut prendre la défense de Hegel lorsque celui-ci était traité en "chien crevé", comme Spinoza le fut avant lui (voir la postface de 1873 à la deuxième édition allemande du Capital.)
XC : Comme on ne me l'a pas demandé depuis longtemps, je vais redonner l'explication : amerlocaine est un emprunt à Raymond Queneau qui, dans Zazie dans le métro, écrivait amerloquaine. Il en a fait d'autres dans le genre, que je lui emprunte régulièrement.
A part ça, je crois bien être, dans ma petite partie, l'un de ceux qui parlent le plus de la culture visuelle amerlocaine. Alors pas de mépris, non. Juste une familiarité langagière que je ne suis pas près d'abandonner.

(Et merci à Dominique G.)
@pompastel : je trouve intéressant votre texte : ma mère vivant dans une ville occupée par les nazis n'arrivent pas à se rappeler (elle n'est pas gâteuse, loin de là) si elle a rencontré, vu,regardé, parlé à quelqu'un portant l'étoile jaune. Demi juive pourtant elle savait que c'était obligatoire et bien "de bonne foi" il lui est tout à fait impossible de me répondre : en as-tu rencontrées des personens portant l'étoile : dans un train, rue tram??? Elle voudrait me dire oui (ou non) IMPOSSIBLE alors que des tas de "détails" lui reviennent ; pour cette raison je me méfie de la mémoire d'une seule personne, et puis avec le temps elle se reconstruit à travers les témoignages des "autres"... je sais ce que j'écris n'est pas important, mais c'est que vous écrivez ces 3 mots "en toute bonne foi" qui me plaît...

à A. Korkos : tout me plaît dans votre reportage/ Nous nous disons "amerloques" et pourtant nous visitons les cimetières américains, je ne crois pas que ce soit péjoratif???peut être mon père lisait il Queneau???
Ah, merci pour ce témoignage .
Que l'impossibilité de se souvenir d'un élément comme celui-là puisse être le sujet d'une conversation avec vous me paraît assez rare (puisque ça suppose d'abord d'en en être conscient, ensuite de l'admettre).
Donc, contrairement à la réserve que vous émettez, très précieux :-)
Oui, lorsqu'on l'utilisait dans l'argot de rue des années cinquante amerloque avait parfois le caractère péjoratif impliqué par le suffixe "oque" (voir chinetoque, vioque ou même pébroque : parapluie).
L'inénarrable inspecteur César Pinaud de la saga San-Antonienne souvent qualifié de "débris" était aussi parfois "l'amère loque".
"amerlocain" qu'Alain attribue à Raymond Queneau ne semble pas avoir cette connotation.
Si l' mot Ricain n'était pas là, on dirait tous des Amerloques?
En vlà, une belle citation détournée !

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