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Guerre en Libye : les mots pour la dire

En ligne depuis quelques jours sur le site d’Acrimed, un passionnant papier de Julien Salingue fait l’analyse critique de la rhétorique déployée par les médias français pour couvrir la guerre en Libye.

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Oui - un autre mot qu'il faut bien analyser, c'est pourtant celui qu'on aime, "Révolution". Comment penser une révolution sans ses acteurs. Or, depuis le début, l'insistance médiatique à parler des "révolutionnaires" comme d'une évidence, et même, littéralement, comme d'une pluralité évidente, a quelque chose, sinon d'inquiétant, du moins de flou : on floute le réel en le désignant comme une évidence. Il y a les révolutionnaires d'un côté, et comme de l'autre il y a évidemment un "tyran sanguinaire", nous ne pourrions pas ne pas être avec eux. Or cette réalité mérite d'être analysée, décortiquée. Je n'ai vue qu'une tentative dans ce sens (ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en a pas eu d'autres), dans le magazine L'effet papillon du 14 mai 2011, présenté par Daphnée Roulier. Où pointe un gros doute.... on change d'équipe en prenant d'anciens tortionnaires plus à notre main mais en rupture de ban avec leur ancien patron, un certain Kadhafi. Un bel exemple de "Realpolitik" en somme.
C'est toujours un véritable plaisir de vous lire.
Rien à voir avec le sujet de la chronique mais un peti mot sur les trouvailles de nos politiques en matière d'euphémismes.
À Toulouse, nous ne parlons plus de SDF, déjà euphémisme de "sans domicile fixe" (un acronyme atténue le sens) mais de "personnes sans résidence stable".
Un euphémisme d'euphémisme d'euphémisme, ça s'appelle comment ? Ça existe dans la langue française ? Ou bien, tout simplement du foutage de gueule. C'est idiot, mais ça m'énerve.
La production ne parvient plus à satisfaire la demande !
Ces marchands de mort sont vraiment en dessous de tout.
Et pendant que "nos avions" tournent à vide, Kadhafi utilise des bombes à sous-munitions, c'est-à-dire de vraies saloperies qui répandent au sol des engins explosifs à retardement. L'orduuure !
Au départ, pourtant, les règles étaient très clairement fixées : que de la bombe propre pour tuer sans bavure, de la roquette bien calibrée pour éviter les salades. Mais allez donc faire confiance au colonel pour jouer le jeu.
Bonjour,
Dans cette querelle de mots, vous auriez pu ajouter "guerre". Car que je sache, la guerre n'a été déclarée à personne, ou le mot "mercenaire" pour les uns et "professionnel" pour le autres (du genre kadhafiste contre alliés)...
Bien à vous
Paul
votre chronique m'a déçu . Vous -êtes vous questionnée sur les antécédents de cette démocratie à laquelle vous semblez trouver des vertues? Egyptiens et tunisiens avaient renversé seuls leurs dictatures . Cette intervention va transformer ceux que vous approuvez en obligés à l'égard de puissances hypocrites qui ne se sont jamais préocupés de leur sort et va favoriser l'emergence des plus radicaux et des plus brutaux d'entre eux
J'ai apprécié l'analyse.

Par contre, êtes-vous réellement certaine que le peuple se soulève à l'unanimité contre Kadhafi ? J'ai comme des doutes, les informations que nous recevons proviennent d'une seule région qui est connue pour avoir été toujours été anti-Kadhafi pour diverses raisons. D'autre part, certains sites d'information d'extrême gauche donnent des informations vérifiables sur ce que Kadhafi a fait de bien. Bien que leur propagande est parfois très grossière et qu'ils vont même jusqu'à l'excuser de ses méfaits dans un pur esprit d'opposition à l'impérialisme américain, je m'étonne de n'avoir jamais entendu parler de toutes ces choses qui donnent une image du personnage plus contrastée. Après tout, Sarkozy est tout aussi mégalomane que Kadhafi, et personne n'appelle à la révolution pour cet unique fait. Je sais que ce n'est pas votre boulot dans la rédaction d'ASI que de vérifier l'information, mais j'aurais aimé de la part de la rédaction un article décrivant le personnage avec ses bons et ses mauvais côtés. C'est un travail plus qu'utile dans la situation de guerre de propagande que nous vivons actuellement.
C'est pourtant simple. Il s'agit d'utiliser les mots dans leur sens propre et non comme métaphore.

Envoyer des bombes et autre projectiles qui tombent du ciel, c'est "bombarder".
Les éléments armés qui attaquent les éléments institutionnels d'un Etat dont ils sont membres sont des "insurgés". S'ils remettent en cause le gouvernement légitime, ce sont des "rebelles". Ils peuvent se donner le nom de "révolutionnaire" quand leur motivation est un changement radical du système politique. On peut utiliser le même terme pour les désigner.
Utiliser "force loyaliste" est correct. Utiliser "force kadhafiste" est péjoratif et propagandiste. J'ai le souvenir de "sadamiste".

Sur le point de la légitimité de la guerre à la Libye. Nos forces armées sont sensés être utilisées pour défendre le territoire national, notre population, nos intérêts économiques et politiques, et en aucun cas, pour intervenir dans des querelles internes à des états tiers.
Avant que je donne mon aval à l'utilisation de la puissance nationale que je finance, il faut montrer autre chose que les débilités servies en l'occurrence.
Entendu hier soir au jité, un journaliste "embedded" aqueu l'armée française dire : "Nous avons délivré des bombes"...

Qu'en termes élégants ces choses là sont dites...
Un autre verbe aussi fréquemment employé à propos de l'intervention en Libye : neutraliser. Ca fait propre ca, neutraliser.

Exemple : la coalition neutralise l'aviation de Kadhafi.

La version inverse aurait sûrement donné : L'aviation kadhafiste a abattu un avion de la coalition.
Une brillante chronique pour nous dire ce que nous pensons pratiquement tous : on ne peut pas être pour l'intervention en Libye, mais on ne peut pas non plus être contre.

Il est sans doute inutile de se fatiguer les neurones : de toutes façons, que nous soyons d'accord ou pas, ce n'est pas nous qui décidons en quoi que ce soit. Alors, on peut se permettre de ne pas trop se prendre la tête.
Et votre lecture d'Acrimed confirme que ce genre de pensée extrême est utile pour remettre en cause les idées toutes faites qu'on veut nous imposer, et elle secoue la routine et la paresse intellectuelle où nous tombons trop facilement. Mais il reste que ça ne constitue pas une pensée pour l'action.

Ce sont les mêmes qui quand nous étions à l'école, critiquaient du fond de la classe tout ce qui se passait en ricanant, mais qui jamais n'auraient mis les mains dans le cambouis.
Sur Khadafi et ses potes sud-américains, l'article d'Halimi pointé par Djac Baweur est sanglant et rafraîchissant, je le conseille à tout le monde. Sur la politique d'ingérence, Jean-Claude Rufin (arrêtez de nous les casser avec votre Collon) a dit des choses simples et justes dans un papier du Monde. Cette intervention suscite de vraies et graves questions, qu'on ferait bien de se poser avant de sortir son petit drapeau tout naze.
"C’est le point de vue qu’adoptaient les philosophes des Lumières, qui ont massivement écrit contre la guerre, et l’on se souvient peut-être que j’avais déjà cité par ici un extrait de Micromégas, de Voltaire, où il réglait le problème de l’identification et du point de vue en donnant la parole à... un extra-terrestre de plusieurs kilomètres de haut (ce qui donnait à son point de vue toutes les sortes de «hauteurs»), ne voyant dans les étripages entre humains qu’une «fourmilière d’assassins ridicules»."

N'ayant pas lu ce Voltaire (OUhouhouhou-Oui, je sais), je me demandais s'il était conscient que ce type de vision depuis un géant ne rendait pas seulement la guerre ridicule, mais tout ce que nous faisions dans nos fourmilières. Car, cette perspective plus hautaine que haute aplanit tous ce qu'elle foule. Rendant par la même, tout ce qu'elle, cette entité surplombante, peut formuler caduque, inapproprié.

Ok, je le rajoute sur ma liste de lecture de trois kilomètres de long.

yG
Personnellement, j'approuve l'argumentation de Judith sur l'emploi du terme "Kadhafiste", vu que dans un seul pays, deux factions s'affrontent, il faut bien les désigner. Par contre, concernant l'identification des commentateurs aux matériels militaires ou aux soldats, je suis beaucoup plus dubitatif.

En effet, comme le fait remarquer avec ironie Julien Salingue l'emploi du "nos" ne se retrouve pas toujours chez les commentateurs pour désigner des "choses" Française : D’ailleurs, « nos » journalistes ne manqueront pas, à l’avenir, d’évoquer le destin de « nos » professeurs, de « nos » magistrats et de « nos » chômeurs, lorsqu’ils se mobiliseront à leur tour. Ce qui prouve bien que ce "nos" implique bien plus qu'une simple description de l'appartenance au pays.

Je pense que l'identification aux forces armées Françaises est inquiétante. Il me semble que le président est le président de la république. République, qui représente légalement les Français de nationalité (puisqu'ils votent). L'identification ajoute implicitement un aspect affectif qui me parait discutable quand on informe le public sur des problèmes de cette envergure.

Je porte d'ailleurs la même critique à l'armée Israélienne qui porte un nom propre : Tsahal. Je trouve tout cela extrêmement fourbe et dangereux.
Je vois que sur @SI on s'arrache à faire de la haute qualité, mais à quel prix pour les asinautes !
Entre Judith et Alain - Judith pour les idées, Alain pour leurs représentations - il nous est devenu impossible de rester bêtes, avec pour conséquence que nous réagissons de manière productrice, créatrice, aux infos que l'on consomme ici ; ce forum en est, du reste, une preuve éclatante, puisqu'on y affine ou précise, qu'on y discute en tout cas, la pensée de Judith, au lieu de simplement borborygmer, troller ou partir en vrac sur une spirale... collatérale.

Bienheureux les imbéciles qui se gavent de saloperies télévisées, eux au moins ne souffrent pas, tandis que nous encaissons chaque mauvaise foi, chaque mensonge, chaque torsion des évidences... Judith, en mettant les mots sur des maux ; et Alain, en donnant à voir ce qui pourrait nous orienter vers du plus humain(1), nous obligent à être à la fois lucides, et rêveurs ; ce qui est, je crois, la pire des conditions. Mais alors, quelle drogue ! Quelle drogue ! Daniel, vous êtes bien entouré. Respect.

Note 1 : Ou le croisement inverse, du reste : Judith nous donnant à penser vers plus d'humanité, et Alain nous donnant à voir d'autres manifestations du mal. Ces deux-là sont comme des apôtres, ne trouvez-vous pas ?
Pour ma part je donne totalement raison à Acrimed de bondir sur l'emploi du terme "Kadhafiste" pour la raison suivant : il légitime implicitement le "but de guerre" exprimé par l'OTAN, à savoir faire tomber Kadhafi (et donc, ceux qui le défendent). Ceci est à mes yeux très grave pour plusieurs raisons :

- ce n'est pas le cadre du mandat de l'ONU, qui est simplement d'empêcher les massacres de civils (des deux côtés). Que les gouvernements traditionnellement assassins (peu de gens réalisent que le boucher de civil dans le monde est, avec une avance considérable et depuis au moins trois décénnies, l'OTAN. Enfin, peu de gens dans l'OTAN, parce qu'autour, ça n'échappe à personne...) outrepassent le mandat au nom d'un prétexte humanitaire, c'est déjà assez grave. Que la presse plonge à sa suite, c'est dramatique. Si révolution, avec pique décorée il y a, il faudra aller chercher certaines têtes dans les rédactions de désinformation.

- au delà du respect du cadre officiel, il y a le simple bon sens historique et géopolitique. Il n'est pas interdit de dire que la guerre civile lybienne peut être considérée autrement qu'un soulèvement révolutionnaire pour la démocratie, à condition d'étudier un peu (à peine...) le contexte tribal. Évidemment, une guerre de domination tribal, ça ne permet plus d'intervenir. Si le but est d'intervenir, comme le pensent certains, alors construire une représentation du conflit en "révolutionnaire" plutôt que "tribal" par le mensonge est essentiel. Il me semble donc que, sans forcément donner raison aux cyniques, les médias devraient à minima rester sur leur garde et éviter de trancher par défaut. D'autant que comme toujours, mais peut être un peu plus vite, les contestations sur les infos clefs qui fabriquent un despote criminel contre l'humanité se font déjà jour - or rappelons que la fabrication de Ceacescu en génocidaire de son peuple était un faux (Timiçoara), celle de Milosévic également (plan Fer à Cheval, un précédent tellement énorme qu'il devrait être enseigné au collège), celle de Saddam également (les vols de couffins bidonnés...). Tout ça démontre qu'il y a des professionnels de la diabolisation, et que croire que magiquement ils ne travailleraient pas sur le cas de la Lybie alors qu'ils ont travaillé sur tous les cas précédents est évidemment déraisonnable.

A titre personnel, je regrette qu'@si n'ait pas (encore ?) traité le sujet de la propagande occidentale dans cette affaire. Le cas de l'avion abattu sur Benghazi au jour 1 du conflit, et le détail de son traitement tant par les médias que les politiques, en particulier, me semble caractériser cruement le biais qui fait des médias un simple auxiliaire de la machine de guerre de l'OTAN si l'on considère les conséquences qu'on aurait du tirer du vol de cet avion en premier lieu. Un plateau ou quelqu'un comme Michel Collon serait confronté à, disons, un journalistede Libé ou de TF1 serait certainement passionnant.
Mettons tout de suite la question bombardement/frappe de côté :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Bombardement

[quote=wikipediadiadia]Le bombardement (mot dérivé de bombarde) est une opération consistant à attaquer un objectif à l'aide d'éléments d'artillerie, qu'il s'agisse de boulets ou de toute variété de bombe.

Les bombardements ont généralement pour objectif la destruction des défenses ou des ressources de l'adversaire, ayant un intérêt stratégique, tactique ou psychologique. Ils peuvent être terrestres (bombardement d'artillerie), maritimes (bombardement côtier) ou aériens (lâcher de bombes par des avions).

Voir aussi :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Bombe_(militaire)

[quote=wikipedioudioudiou]Bombe guidée : Bombe possédant un système de guidage pour accroître sa précision. Le guidage peut se faire par GPS; avec une centrale inertielle, avec un faisceau laser.

Comme on le voit, la question du guidage n'entre pas en compte pour qualifier le bombardement.

En face, le terme de frappe n'est pas incorrect non plus, puisqu'il décrit la même action d'un point de vue militaire. La frappe pourrait aussi bien être faite depuis des chars, des bateaux, de l'infanterie (si l'infanterie servait encore à ça), etc.

On peut donc dire que le choix du terme frappe plutôt que bombardement occulte la réalité physique de l'action au profit de son objectif stratégique. Elle contemple les évènements au niveau d'une carte d'état major (et, dans la bouche d'un officier du QG, c'est un angle compréhensible) plutôt qu'à celui que vivent les intéressés (point de vue essentiel s'il s'agit de valider l'efficacité "humanitaire" des "frappes"...).
Judith, pour votre questionnement quant à l'emploi des termes "frappes" ou "bombardements", le terme "pilonner" ne vous semble-t-il pas, du fait de son étymologie, plus objectif et/ou moins pourvoyeur d'erreurs factuelles que porte le mot bombardement (pour les mêmes raisons) et/ou moins euphémisant que le terme frappe?...
[quote=Judith]parce qu’on ne qualifie pas de la même manière un avion volant pour une démocratie et un avion volant pour une dictature.
Mais somme nous encore en démocratie ?
J'ai moi même du mal à me positionner sur la façon actuelle de régler ce conflit, cependant cette guerre à été décidée sans moi et la politique précédente de commerce avec ce pays dictatorial qu'est la Libye n'aurait certainement pas été mon choix. Je suis un spectateur devant les décisions qui sont prises par l'armée sarkosiste, car comme Hervé Kempf, j'ai plutôt le sentiment d'être dans une oligarchie.
Dans la photo du Rafale, ce ne sont pas des missiles que l'on voit je pense mais des leurres, contre-mesure destinée à détourner les missiles anti-aériens.

A noter qu'il existe toujours des bombes comme durant la 2e guerre mondiale, sauf que leur trajectoire est calculée par ordinateur ou dont le point d'impact est déterminé par un laser.

Pour un militaire, frappes et bombardements n'ont pas beaucoup de différences je pense.

voilà, juste pour info, même si ça n'a pas grand chose à voir :)
[quote=Acrimed]« Sniper kadhafiste », « aviation kadhafiste »… Imagine-t-on un seul instant les médias français nous parlant de « soldats sarkozystes », d’ « aviation obamiste » ou de « marine cameroniste » ? Évidemment non. Le passage par un adjectif dérivé du nom du dictateur est une prise de position contre les forces armées libyennes, dont on se gardera ici de minorer la violence. Mais cela ne doit pas interdire de relever un abus de langage qui, consciemment ou non, participe du caractère partisan de l’ « information » diffusée au sujet de la Libye. Le JDD a publié sur son site, le 20 mars, une dépêche dont le titre était : « Libye : Paris confirme avoir abattu un avion kadhafiste ». Si l’inverse s’était produit, le JDD aurait-il titré « Libye : Tripoli confirme avoir abattu un avion sarkozyste » ? C’est peu vraisemblable.

Ca y est j'ai compris! Comme Daniel ne peut plus écrire en tant qu'envoyé spécial au Sarkozistan parce que cela insupporte certain-e-s @sinautes, il a pris un pseudo (on a reconnu la francisation du héros Julian Assange, Daniel), a abandonné la satyre ex-centrée pour un point de vue plus franco-centré (anti-guerre en l'occurrence) et a pondu un papier pour Acrimed! (Si je peux me permettre, c'est beaucoup moins marrant qu'avant). Et puis derrière ça Judith fait une analyse de l'analyse de Daniel et ça alimente le site!
Génial! Bravo!
=)

Non mais sans rire Daniel, libérez notre envoyé spécial! On ne peut pas, déontologiquement parlant, le laisser faire ses reportages, pondre ses billets QUE quand il est opposé aux évènements qu'il est censé couvrir... non?
Pas plus que Julien Salingue ou Acrimed n'est pro-Khadafi (je le suppose en tout cas), le fait de critiquer, de questionner, le lexique de nos journalistes et de nos politiques pour décrire cette guerre ne vous classerait mouammariste décomplexé.

Et au fait, merci Judith!
Ah ben moi, "nos avions", "nos moyens militaires", manœuvrés par "nos soldats", même si ça rappelle la prose va-t-en-guerre de la courageuse presse de l’arrière en 14-18, ah Déroulède, ah Barrès, ah Botrel, ça ne me gêne pas tant que ça.

Parce que c’est vrai.

Plus exactement, parce que ces adjectifs possessifs renvoient au fait que cette guerre est payée avec nos impôts, et que nous faisons donc partie des « dommages collatéraux ». Ce n’est pas avec ça que la situation des Français qui n’appartiennent pas au Fouquet’s gang, heu, band, va se redresser.

Mais celle des marchands d’armes comme Dassault et Lagardère, elle s’envole en rafale…
Merci Judith
Après cette lecture, je ne me sens plus tout à fait seul dans mon mal à l'aise vis à vis des évènements libyens.
Merci Judith pour cette chronique.

Les mots pour dire la guerre sont en effet difficiles à trouver, car ils dépendant du degré de légitimité qu'elle a à nos yeux.
Est-ce une guerre légitime, menée pour protéger la population civile, comme le laisse entendre la résolution du Conseil ?

Cette position est-elle tenable, et que signifie exactement "protéger la population civile" ?

Ne mène-t-elle pas, au fond, à éliminer les menaces qui pèsent sur cette population, renverser le régime qui la met en danger délibérément, armer des rebelles dont on ne connaît pas l'identité, car qui sont-ils ? Des démocrates en puissance ? A supposer que cette expression prenne un sens dans la culture politique locale, ce que je ne saurais confirmer ni infirmer. Mais peut-être sont-ils des islamistes en puissance, et comme les Talibans aidés par les Etats-Unis, retourneront-ils plus tard des armes si généreusement fournies contre leurs soutiens de la veille. Des bombardements au renversement du pouvoir existe un fossé que ne comblent pas les propos tenus publiquement les dirigeants de la coalition.
Le groupe de contact il y a moins de 48h s'interrogeait sur l'opportunité d'armer les rebelles, alors que la résolution 1973 confirme l'embargo sur les armes mis en place par un texte antérieur. Comment dépasser cet interdit ? Peut-on résoudre cette contradiction ? Quelle est la portée exacte de l'interdiction ? Ne peut-on pas faire une interprétation extensive de la résolution et en tirer le droit des intervenants de fournir un réel support logistique, s'il est la condition nécessaire pour "protéger la population civile" ? Peut-être, dans une semaine, nous demanderons nous si une intervention terrestre ne serait pas, là encore, nécessaire, pour atteindre ce résultat...

Pendant ce temps, d'autres dictateurs, en d'autres points du monde, terrorisent leur population sans que le Conseil n'intervienne. Est-ce de nature à décrédibiliser son action en Lybie ? Pourquoi la Khaddafi et pas Mugabe ? Où est passée la Corée du Nord ? Comment expliquer par ailleurs que l'Indonésie ait pu exterminer les timorais pendant plus de 25 ans sans que personne ne s'en émeuve ?

A l'inverse, ne pas intervenir, c'est laisser faire. Comme Pascale Clark objectant à l'argument diplomatique défendu avec courage par Rony Braumann, "mais alors qu'est-ce ce qu'on fait hein, on fait rien ?", émotion en bandoulière et injustice à tous les étages en guise de raisonnement, le fait est néanmoins incontestable : ne pas intervenir, c'est laisser massacrer.

Ou laisser se battre, peut-être, question de perspective. C'est laisser à la rébellion le pouvoir de gagner sa propre révolution, mais aussi peut-être de la perdre, souverainement, dans un sens comme dans l'autre, en toute indépendance. Les mouvements de libération réussissent lorsqu'ils arrivent à maturation, que collectivement la peur a disparu et la rage prend le pas sur la paralysie.

Peut-on intervenir dans ces processus ? Les accélérer ?
Et notre légitimité, où est-elle ? On m'a déjà répondu que ce plaidoyer critique contre l'interventionnisme aurait définitivement conduit l'Europe dans la peste brune, suivant l'expression de Daniel Guérin. C'est vrai. Je demeure néanmoins convaincue que si la démocratie et la liberté peuvent être rétablies là où elles ont déjà existé, elles ne peuvent se donner à qui n'en a jamais assumé la responsabilité.

Les tentatives récentes des Etats Unis en la matière se fracassent sur cette réalité, en Irak, en Afghanistan, où, s'il est possible de relever une amélioration, celle-ci n'est que relative : la qualité du Président et de ses sbires oscille constamment entre l'homme de paille et le narcotraficant.
Des œuvres cinématographiques ou théâtrales explorent brillamment ces questions, comme Manderley, de Von Trier, ou Ma chambre Froide, de Joël Pommerat, qui se joue en ce moment.
Compliments à la chroniqueuse: elle se tient, ici, dans les limites de son domaine de compétence et en distingue les enseignements de ses propres apports à la réflexion; d'où une argumentation d'un non-négligeable intérêt et une expression justement relevée: l'antépénultième alinéa toutefois, et la parenthèse du dernier sous-titre exceptés.
Techniquement parlant, si on se place du point de vue de la personne qui paie ses impots ou ses taxes en france, alors c'est bien de ses missiles, bombes, avions, bateaux, (...) dont on parle... Du moins en partie.
On ressent bien ca aux US avec l'utilisation recurrente du mot "taxpayer" dans les medias, mais aussi les instances gouvernementales.

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