Brève

Madame Figaro contre Mme Figaro (Rue89)

La rédaction

28 juin 2012 Maj: 28 juin 2012

Dans la famille Figaro, rien ne va plus. Le groupe de presse a menacé de poursuites judiciaires une enseignante si elle ne changeait pas le nom de son blog intitulé "La Classe de madame Figaro", au motif qu'il reprenait le titre de son hebdomadaire féminin. Sauf que l'institutrice s'appelle vraiment... madame Figaro. Une affaire, révélée par Rue89, qui n'a pas vraiment fait rire l'enseignante.

Mme Figaro n'est pas contente, Madame Figaro non plus. Depuis mai 2011, une institutrice met en ligne différentes activités d'anglais à destination de ses élèves et d'autres professeurs des écoles sur son blog intitulé "La Classe de madame Figaro". Logique : c'est son nom. Mais depuis près de deux mois, elle est harcelée par le groupe Figaro qui lui demande de changer le titre de son blog, qui est pourtant peu fréquenté (environ 50 visiteurs par jour d'après Rue89)

C'est l'institutrice elle-même qui a raconté sa mésaventure sur son blog. Début mai, elle a reçu un mail du groupe de presse : "L'usage non autorisé et répété de MADAME FIGARO constitue une atteinte aux droits de propriété intellectuelle. (...) Je vous remercie donc de bien vouloir cesser immédiatement tout usage de cette marque dans votre blog." Suite au refus de l'enseignante, qui veut pouvoir utiliser son nom librement, la directrice juridique lui demande alors de rajouter son prénom. Nouveau refus de l'enseignante, qui ne souhaite pas communiquer son prénom à ses élèves : "Dans mon contexte professionnel, mes élèves, les parents, mes supérieurs, les élus (…) m’appellent «Madame Figaro», et ne connaissent pas nécessairement mon prénom. A l’école élémentaire, il n’est pas d’usage d’appeler les enseignantes par leur prénom", explique-t-elle.

Résultat ? Le groupe de presse lui a envoyé une mise en demeure en lui demandant de changer le nom de son blog sous peine de poursuites judiciaires. "La contrefaçon de marque peut faire l’objet d’une action civile [...]. Les sanctions pouvant atteindre trois ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende", indique le courrier cité par Rue89.

Cette démarche est d'autant plus étonnante que d'après le site d'information, qui s'est renseigné auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), l'enseignante est dans son bon droit pour trois raisons : c'est son patronyme, son blog n'a pas de but commercial, et son contenu diffère complètement des thématiques du magazine.

Suite à cette mise en demeure, l'enseignante a tout de même décidé de modifier le nom de son blog : "Je n'ai pas la carrure ni les moyens d’affronter ces gens en justice", a-t-elle expliqué. "La classe de Madame Figaro" est ainsi devenue "Les chantiers de l'apprentissage".

picto L'enseignante a cédé et changé le nom de son blog

Fin de l'histoire ? Non. Moins de vingt-quatre heures après la publication de l'article de Rue89, le groupe de presse s'est fendu d'un communiqué : la direction de Madame Figaro dit "regretter le malentendu". Le service juridique "n'a fait qu'appliquer une procédure systématique visant à empêcher qu'une confusion ne s'installe dans l'esprit du public, via un ultime courrier d'avocat, qui dans ses termes, a pu paraître trop directif", poursuit le communiqué, qui se termine par une petite bassesse en donnant le prénom de l'enseignante qui ne souhaitait pas le communiquer à ses élèves : "En aucun cas, il n'a été demandé à Mme Elise Figaro de modifier le contenu de son blog. Le groupe Figaro a simplement souhaité que son prénom soit ajouté. Nous sommes navrés de cet incident et comprenons que la mise en demeure dont son blog a fait l'objet ait pu la heurter. (...) Si Mme Elise Figaro le souhaite, nous serons heureux de lui ouvrir une tribune libre sur notre site." Sous un pseudonyme ?

L'occasion de relire notre enquête sur une affaire un peu similaire : le groupe Lagardère, propriétaire de Elle, s'était attaqué à une petite radio qui s'appelle LFM, laquelle avait finalement pu garder son nom.