Tour Eiffel végétale : Le Figaro camoufle...son faux scoop
Brève

Tour Eiffel végétale : Le Figaro camoufle...son faux scoop

Un "projet fou" qui "pourrait débuter dès juin prochain". Scoop à la Une du Figaro du mercredi 30 novembre : la tour Eiffel pourrait être recouverte de près de 600 000 plantes. Montant du projet entièrement financé par des mécènes ? 72 millions d'euros. Seul problème : la mairie et la société exploitant la tour Eiffel ont démenti formellement avoir validé tout projet de ce type. Un bon coup de pub pour la société d'ingénierie et un emballement du Figaro qui a réussi à camoufler le démenti de la mairie le lendemain.

"Le plus grand arbre du monde". Le Figaro cachait mal son enthousiasme après s'être procuré un document "confidentiel" détaillant le projet de végétalisation de la tour Eiffel.

"Habillée de quelque 600 000 plantes pour une durée de quatre ans, elle prendrait 378 tonnes supplémentaires dès juin 2012 et aurait ainsi la charge symbolique de faire rayonner la France comme le fleuron de l'écologie aux yeux du monde", explique le quotidien particulièrement emballé par cette "prouesse technologique qui se veut aussi un modèle sociétal, emblématique des valeurs du IIIe millénaire, dans toutes les dimensions du développement durable: écologique, économique, humain et culturel". Dingue ! Et qui a eu cette idée géniale ? Il s'agit de la société d'ingénierie Ginger, qui a déjà été choisie par la société d'exploitation de la tour Eiffel (Sete) pour le réaménagement du premier étage de la tour.

Ce "projet colossal" est évalué à 72 millions d'euros mais que les Parisiens se rassurent, "le financement viendra principalement des entreprises de l'Euronext et du CAC 40". Autant dire que la tour Eiffel verte c'est pour demain, à en croire Le Figaro qui détaille le calendrier figurant dans le document : "développement des végétaux en pépinières jusqu'en juin 2012, pose sur le site de juin 2012 à janvier 2013, phase de croissance des végétaux sur la tour de février 2013 à janvier 2014, pleine expansion 2014 et 2015 et retrait de février à juillet 2016 (...) Concrètement, les plants seront dans des poches à substrat, suspendus à des filets de chanvre, eux-mêmes fixés aux membrures métalliques de la tour. L'irrigation se fera par un réseau de 12 tonnes de tubes en caoutchouc. L'ensemble des opérations de montage et démontage seront effectuées par des cordistes". Quelle aventure !

Seul l'édito situé à côté de l'article se veut plus prudent en précisant que "même si ce projet finit aux oubliettes, il nous aura au moins permis de rêver". Au mois le temps d'une revue de presse dans une matinale puisque l'information n'a pas échappé à France Info pour qui le projet est "très sérieux".

Hélas, le rêve n'aura pas duré longtemps. Car quelques heures après la publication de l'article du Figaro, la mairie et la société d'exploitation de la tour Eiffel ont démenti avoir validé un tel projet. Dans un communiqué, la Sete indique que "les informations présentées ce jour par le Figaro n'ont (...) aucune réalité" et "tient à préciser qu'elle n'a aucun projet de cette nature en préparation et que ni elle, ni la Mairie de Paris ne sont associées sous quelque forme que ce soit à un tel projet".

"On ne peut pas empêcher les gens d'avoir des idées ! Je peux vous raconter des propositions jusqu'à demain matin. On m'a même proposé de mettre un grand pull au premier étage! La Tour Eiffel suscite tous les fantasmes", a déclaré à l'AFP Jean-Bernard Bros, adjoint PRG chargé du Tourisme et président de la Sete. Si la mairie a bien eu vent de ce projet, il n'a "pas été étudié" a-t-il précisé sur Europe 1. La priorité reste à la rénovation du premier étage.

Du côté de la société d'ingénierie, qui devait officiellement présenter ce projet ce vendredi 1er décembre, on explique que la mairie était bien au courant : "On ne peut pas monter un tel projet sans tenir au courant des gens autour de nous, bien sûr qu'on en a parlé à la mairie, au ministère de l'Ecologie", a affirmé le directeur général de Ginger, Jean-Luc Schnoebele dans une déclaration à l'AFP. Un prototype d'une dizaine de mètres aurait même été réalisé à Elancourt (Yvelines). Mais entre la présentation d'un projet et sa réalisation effective, il y a manifestement une marge. D'ailleurs, l'AFP rappelle que "ce n'est pas la première fois que le monument payant le plus visité au monde (près de 7 millions de visiteurs chaque année) suscite autant d'imagination et d'idées venant d'agences qui au passage font leur publicité".

Ainsi, en 2009, "à l'occasion du 120e anniversaire de la Tour, l'agence Serero Architectes Urbanistes basée à Paris, avait fait jaser en présentant le projet d'installer une collerette au 3e étage de la tour, sorte de plateforme panoramique. "Le projet avait eu pour but de créer le buzz autour de cette entité symbolique qu'est la Tour Eiffel et c'était un véritable hommage pour les 120 ans", relate mercredi à l'AFP l'agence Serero".

Tout projet d'envergure, même s'il reste à l'état de projet, constitue donc un bon coup de pub. Restait à savoir comment Le Figaro allait traiter le démenti. A défaut de recouvrir la Tour Eiffel de plantes vertes, Le Figaro aura au moins réussi à camoufler le démenti de la mairie et de la Sete. Celui-ci était bien caché dans l'édition du 1er décembre avec un titre particulièrement bien choisi : "les autorités prudentes". C'est presque ça, oui.

Ce n'est pas la première fois qu'un quotidien publie une information choc destinée à être reprise dans les médias avant d'être démentie le lendemain. Rappelez-vous de la magnifique histoire des "bébés à puces" du Parisien. 

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