TF1, "la peur comme ligne éditoriale" (Mucchielli/Rue89)
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TF1, "la peur comme ligne éditoriale" (Mucchielli/Rue89)

TF1, chaîne de "la peur" ? Le sociologue Laurent Mucchielli revient sur son blog, hébergé par Rue89, sur l'émission Appels d'urgence, diffusée sur TF1 le 12 octobre.

Sobrement intitulé "Nîmes : flics sous tension contre jeunes délinquants prêts à tout", elle avait déjà été épinglée sur notre plateau par une chronique saignante de Didier Porte.

"Un fait est là: les jours et les années passent, et une certaine télévision -pas exclusivement celle dont on va parler ici- continue à distiller volontairement la peur dans la population", écrit Mucchielli, spécialisé des questions de délinquance. Il souligne que le prétexte de TF1 pour suivre des policiers de Nîmes est bidon.

Dans le lancement de l'émission, la présentatrice affirme d'un ton grave : "Depuis le début des années 2000, Nîmes partage avec Cannes la première et peu enviable place au hit parade du plus haut taux de délinquance. Agressions, cambriolages, trafic de drogue, incivilités, Nîmes illustre tous les maux qui font régulièrement l'actualité. Cette délinquance sévit principalement dans les quartiers sensibles, mais touche aussi désormais le centre ville et les petites communes périphériques jusqu'ici relativement épargnées."

Pour rappel, voici les premières minutes de l'émission picto


Sauf que. Le chercheur pointe une enquête "partiale, reposant sur un incroyable amateurisme en matière statistique". Car Nîmes et Cannes ne sont pas les villes au plus haut taux de délinquance en France : "Chacun peut consulter le classement du taux de criminalité par circonscription de police, publié chaque année par le ministère de l'Intérieur sur le site internet de la Documentation française. Le dernier volume, consacré à l'année 2009 fournit comme d'habitude un classement des villes selon leur taux de criminalité. En réalité, la ville qui arrive largement en tête de ce triste palmarès est Saint-Denis (93), suivie d'Avignon (84) et de La Courneuve (93). Nîmes et Cannes arrivent dans le premier peloton qui suit ces échappées, avec des taux de délinquance en réalité comparables à de nombreuses villes comme Nice, Lille, Marseille, Perpignan ou encore Aubervilliers et Bobigny."

Il explique ensuite que, dans le cas de Nîmes, ce fort taux de délinquance est aussi lié à l'organisation de la fameuse feria de la Pentecôte : "C'est du reste ainsi que le reportage de TF1 commence: par des scènes tournées lors de la féria, dont on rappelle qu'elle accueille environ 1 million de personnes sur seulement quatre jours, ce qui multiplie par sept la population (146 500 habitants au dernier recensement). Concentré de population, concentré de boissons alcoolisées (car cette fête traditionnelle liée à la tauromachie est aussi une énorme beuverie) et concentré de bagarres, de vols et de dégradations en tous genres. Et l'on pourrait ainsi multiplier les exemples: si Saint-Denis est la première commune du palmarès officiel de l'insécurité, quel rôle y joue le fait qu'y est implanté le Stade de France? Même chose pour le tourisme général et le festival particulier (de théâtre) à Avignon."

"Quelle part le taux de criminalité officiel de ces villes doit-il non pas uniquement à une activité délinquante locale et permanente mais aussi à des concentrations sans commune mesure de populations saisonnières?", interroge Mucchielli, qui déplore que TF1 ne soit pas posé la question et ait "choisi la peur comme ligne éditoriale d'Appels d'urgence".


Un internaute: merci tf1 !

Deux jours plus tard, Rue89 a publié la réaction d'un internaute nîmois en désaccord complet avec le sociologue : "Oui, le reportage de TF1 montre quelque chose qui fera peur, et alors? Cette chose existe-elle ou est-elle inventée? Cette chose est bien réelle, quel est le problème? En quoi TF1 doit-il se sentir coupable de diffuser un reportage sur ce qui se passe réellement à Nîmes? Doit-on, sous prétexte que cette ville est peu connue, en masquer la réalité de la forte délinquance?"

Après avoir expliqué qu'il n'appréciait ni la ville, ni son ambiance, il développe son témoignage sur la délinquance à Nîmes : "Tout appelle au désoeuvrement. Où et vers quoi pourrait se placer l'envie de travailler, de réussir? La création artistique s'y emploie un peu; quelques beaux concerts l'été dans les arènes, quelques petits théâtres amateurs sympathiques, mais tout cela reste relativement pauvre. C'est exactement ce qu'il faut et qu'il suffit à la délinquance chronique pour s'installer, l'ennui, le manque d'horizon social, le chômage, l'inculture et la brutalité d'une partie de la population, l'absence de lien historique (les Romains, c'est loin), voila où nous en sommes."

Et il laisse clairement entendre que la délinquance est dûe à des descendants d'immigrés : "Comment aborder maintenant la classification de ces délinquants sans risquer un procès? Difficile. Je ne l'aborderai donc pas. Je me référerais à une certaine phrase d'Eric Zemmour dont les termes ont été confirmés par Philippe Bilger et par «Dixième Chambre», film de Raymond Depardon. (...) Faut-il ne rien dire parce qu'on risque d'être aussitôt taxé de raciste ou osera t-on parler vrai?"

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