Orange voulait censurer un film qui déplaisait à Bergé (Mediapart)
Brève

Orange voulait censurer un film qui déplaisait à Bergé (Mediapart)

Tentative de censure dans la filiale cinéma d'Orange ? C'est ce qu'affirme Mediapart, documents à l'appui. Depuis 2011, les films politiques sont bannis des projets de financement d'Orange, et il a été demandé à la directrice générale de la filiale cinéma de ne pas financer un film sur Yves Saint-Laurent qui déplaisait à Pierre Bergé, l'un des actionnaires du Monde. Coïncidence : juste à ce moment là, le quotidien publiait plusieurs articles qui mettaient en cause le président d'Orange Stéphane Richard dans l'affaire Tapie.

S'attirer les bonnes grâce du Monde et surtout de l'un de ses actionnaires : Pierre Bergé. C'est le but qui semble ressortir des documents que publie ce mardi 25 février, Mediapart. Selon le site, alors que Le Monde publiait des articles sur l'affaire Tapie, en juin 2013, mettant en cause Stéphane Richard, actuel PDG d'Orange et ex-directeur de cabinet de Christine Lagarde à Bercy, il a été demandé à la directrice générale de la filiale Orange Cinéma, Frédérique Dumas de renoncer à financer le film de Bertrand Bonello consacré à Yves Saint Laurent. Le but ? S'attirer les bonnes grâces de Pierre Bergé qui lui soutenait le film concurrent sur Saint Laurent, signé Jalil Lespert.

Selon Mediapart, c'est Xavier Couture, conseiller spécial de Richard, qui était à la manoeuvre. Preuve ? Un message vocal, laissé par Couture sur le répondeur de Dumas, publié par nos confrères.

Que disait le message ? "Oui, Frédérique, c’est Xavier, écoute, on discutait avec Stéphane, de la problématique du Monde au sens le plus large avant que, voilà, que j’essaie de convaincre les journalistes du Monde d’être un peu plus gentils avec Stéphane, et pas de faire un feuilleton avec une histoire qu’on aimerait bien voir retomber. Je pense qu’il serait utile de réfléchir à deux fois avant de financer le film sur Yves Saint-Laurent qui est très contesté par Pierre Bergé comme tu le sais, voilà. Donc ça n’a pas un lien de cause à effet immédiat, mais je pense que c’est peut-être pas utile en ce moment de s’attirer les foudres de Pierre Bergé. Donc je ne sais pas où tu en es sur ce film. On me dit que Orange Studio aurait l’intention de le produire, or à ce stade Stéphane n’est pas vraiment favorable voilà, écoute tu peux me rappeler quand tu veux. Je t’embrasse."

Contacté par Mediapart, Couture, ex-dirigeant de TF1, a d'abord démenti l'existence d'un tel message, avant de retrouver la mémoire. "Ça me paraît assez bénin. Si on peut s’éviter de se mettre Pierre à dos, c’est aussi bien. Stéphane n’était peut-être pas favorable à ce qu’on mette Pierre Bergé de mauvaise humeur. On est tous copains avec lui. La belle affaire." Il conclut en menaçant Mediapart qui souligne que les intérêts privés du PDG Richard ont été mis en avant ceux de l'entreprise. "’C'est une ignominie à laquelle je ne peux qu’apporter une récusation formelle. Je porterai plainte en diffamation. Il va falloir que vous fassiez la preuve que j’ai tenu ces propos."

Etonnamment, le 7 février 2014, Frédérique Dumas a été révoquée (après avoir résisté à la pression, et avoir maintenu le financement d'Orange au film de Bonello). Interrogé par Mediapart, Orange assure que cela n'a aucun rapport avec l'affaire mais invoque des raisons juridiques pour ne pas en dire plus. Par ailleurs, Mediapart démontre, PV de conseil d'administration à l'appui, que ce genre de pratique était plutôt courant depuis 2011. En effet, sur le film de Mathieu Kassovitz l'Ordre et la morale consacré à la prise d'otages de la grotte d'Ouvéa, les administfrateurs d'Orange ont invoqué le fait que le groupe ne devait pas "continuer sur cette ligne de films politiques". Même constat sur le film de Nicolas Hulot, le syndrôme du Titanic, considéré alors "comme un mauvais choix." Résultat : Frédérique Dumas confie à Mediapart que la ligne éditoriale s'est infléchie. "Dans les deux années qui ont suivi, on est par exemple venu me proposer un film sur une candidate à l’élection présidentielle et un film sur Karachi. Je savais qu’il m’était impossible de les produire", confie-t-elle à nos confrères.

Lire aussi la chronique de Daniel Schneidermann, De la compétition des scandales

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