Emeutes : silence de Bouteflika (presse algérienne)
Le Soir d'Algérie s'étonne du silence total du chef de l'état, le président Abdelaziz Bouteflika, et annonce à la Une qu'il continuera sans doute de se taire. Le journal évoque ensuite le mutisme des médias officiels.
"Dans aucun autre pays au monde, un tel cas de figure n’est imaginable. Le pays est sérieusement secoué, l’embrasement est un risque bien réel, l’insécurité règne et son chef de l’Etat, premier responsable de la sécurité des personnes et des biens, l’homme que la situation interpelle directement et en premier lieu, Bouteflika donc se mure dans un silence troublant."
"Habitué à ne diffuser que les ronronnements officiels, les médias publics ont manqué d'être au cœur de l'événement et de l’actualité. Jeudi, lorsque les barricades ont jonché les quartiers de la capitale, la Télévision nationale, vraiment hors d’époque, n’a pas jugé nécessaire d’y braquer ses caméras. L’Agence de presse service (APS), réduite elle aussi à ne relayer que le message et la propagande officiels, n’a pas fait mieux. La radio non plus ne s’est pas autorisée une quelconque audace éditoriale. La diffusion a été celle des jours ordinaires, faite de l’enlisement de la situation en Côe d’Ivoire où Ouattara et Gbagbo se livrent une guerre d’usure, du morcellement qui guettait le Soudan à l’occasion du référendum du 9 janvier et d’autres actualités internationales plus ou moins chaudes. Lorsque, enfin, les médias publics ont daigné en parler, ils se sont limités à évoquer les pillages."
Le Soir d'Algérie lundi 10 janvier 2011
Le quotidien Liberté consacre, lui, huit pages à la crise, et un éditorial sévère :
"Les gouvernants n’ont pas failli à cette règle qui a toujours été la leur : aucun des officiels, qui ont eu à s’exprimer sur ces événements, n’y a lu un quelconque message politique. Et, à l’inverse, tous ont versé des larmes de crocodile en regrettant que les jeunes n’aient pas protesté «pacifiquement».”
Le journal affiche en bandeau, dans le coin supérieur droit de la Une le nouveau prix officiel maximum du kilo de sucre (90 dinars, soit 0,93 euros) et de 5 litres d'huile (600 dinars, 6,2 euros).
Il annonce aussi que toutes les compétitions sportives sont suspendues pour un mois.
Liberté lundi 10 janvier 2011
3 morts parmi les manifestants, 800 blessés sont 763 policiers, 1 100 manifestants arrêtés : El Watan publie le bilan officiel des émeutes en Algérie, au début d'un dossier d'une dizaine de pages.
L'écrivain Karim Amellal "voit en les émeutes qui secouent l’Algérie une expression d’abandon et de défiance. La mauvaise redistribution des richesses a créé des inégalités insupportables pour les classes populaires. L’augmentation des prix a été l’étincelle".
Le journal signale que plus de 40 établissements scolaires ont été saccagés, et cite le ministre de l'Intérieur, Daho Ould Kablia qui a donné une interview à l'agence de presse APS : "Les services de sécurité ont été instruits d’éviter tout dépassement".
El Watan lundi 10 janvier 2011
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