Croque-mort mis à pied pour avoir témoigné sur Rue89
s'immisce dans les porte-monnaies de ses riverains volontaires: un métier, un parcours, un salaire et une façon différente à chaque fois de gérer son budget. Mais quand un employé dévoile sa bourse, le patron guette parfois. Charly, croque-mort syndicaliste aux Pompes funèbres générales (PFG) de Valenciennes, se voit aujourd'hui mis à pied à titre conservatoire, pour un passage du témoignage qu'il avait livré à Rue89, rapporte le site dans un "droit de suite".
"Une fois, j'ai rendu visite à mon oncle, et j'ai laissé la voiture garée devant chez lui. Cinq minutes après, on entend taper à la porte... C'était la voisine, affolée. Elle croyait que quelqu'un de chez nous venait de mourir." Cette anecdote "drôle et anodine" d'une journée de travail ordinaire d'un croque-mort, Charly n'aurait peut-être pas dû la raconter à Rue89. Le 27 octobre dernier, son patron s'en est servi pour le mettre à pied à tire conservatoire au motif suivant : "utilisation d'un véhicule professionnel à des fins personnelles". Une sanction lourde comme le rappelle Rue89 : "La mise à pied conservatoire est une décision lourde dans le droit du travail, prise en principe pour faute grave, durant laquelle le salarié est privé de rémunération, sans limitation de durée... et qui débouche bien souvent sur un licenciement." Pour Willy Dans, syndicaliste à SUD Commerce contacté par Rue89, l'article en cause ne comporte "aucune date, aucun nom, aucun lieu... Rien de précis qui puisse prouver ce qu'on lui reproche, et donc justifier une possible sanction". |
L'accusation portée par le patron de PFG ne serait qu'une "excuse qu'a trouvée PFG pour se débarrasser d'un salarié gênant". Syndicaliste, porte-parole d'une grève de croque-morts en septembre dernier, Charly a également "défendu un de ses collègues suite à un litige avec la direction" et "initié un dossier auprès de l'inspection du travail, au sujet des conditions d'hygiène et de sécurité dans son entreprise".
Charly a été convoqué par ses supérieurs le 9 novembre, et "article imprimé et chiffre des visites à l'appui, le responsable des ressources humaines lui aurait fait remarquer que «l'article a été vu dans le monde entier» (sic) [environ 38 000 visites, ndr]", rapporte Rue89, qui ajoute : "Une manière, peut-être, de lui faire comprendre que son interview risque de nuire à l'image de la boîte ?" Une mauvaise pub pour cette entreprise qui enchaîne déjà "suppressions de postes, plan social, pertes des acquis sociaux, grèves et manifestations." Le syndicat compte porter l'affaire devant les prud'hommes, si Charly n'est pas "réintégré dans l'entreprise et indemnisé pour ses jours de mise à pied."
(Noëmie Le Goff)
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