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noir, rouge, blanc

L'extrême gauche et l'extrême droite utilisent les mêmes couleurs de ralliement qui sont le noir, le rouge et le blanc. Pourquoi ces factions radicalement opposées ont-elles opté pour la même trilogie colorée ? Explications.

Derniers commentaires

Putain de billet, putain de forum.
P'tain.
C'est tout.
Merci Alain.
P'tain.
gna, gné.
J'ai lu je ne sais plus où que sous l'ancien régime, hisser le drapeau rouge signifiait « pas de quartier », on rigole plus, tuez les tous… Il était aussi utilisé dans la marine et par les pirates qui contrairement à la légende du pavillon noir à tête de mort passaient au rouge pour faire encore plus peur et ainsi s'emparer des navires coursés sans combat ou presque.
Cher Alain Korkos,
C'est avec une immense joie et une réelle fierté que j'ai pu constater que le bon Professeur Germain, enfin, vous donnait un satisfecit. Joie, parce que le brave Professeur, d'habitude, ne ménage pas son style vigoureux pour asséner leurs quatre vérités aux cancres sémiologiques (devrais-je dire sémiotiques?) que nous sommes. Fierté, parce que vous voilà désormais placé dans un cénacle où le bon goût le dispute à l'érudition, et la noblesse d'âme à la hauteur de vue (ah, Péguy!), et que cette nouvelle distinction (au sens quasi bourdieusien du terme) rejaillit un peu sur ma misérable personne, que vous aviez cru bon d'adoubez, provoquant ainsi l'ire bien justifiée du Grand Homme, véritable Parangon de Culture G.
Une question, cependant, me taraude: la Culture G. peut-elle, sous certaines conditions, provoquer la même jouissance que le Point du même nom?
Clair, solide et exhaustif. Voté.

Seule erreur notée : "les anciens communistes Dieudonné et Alain Soral", c'est une formulation un peu rapide. Je ne pense pas que Dieudonné se soit un jour désigné comme cela, quant à prendre le passage de Soral au PCF comme révélateur, ça me paraît être un peu trop dupe de lui et c'est voir les choses à l'envers. Il a toujours eu une sensibilité d'extrême droite depuis sa jeunesse ("je m'amusais avec des croix gammées", a-t-il reconnu un jour) et son adhésion au PCF ne lui a servi qu'à essayer de diffuser son discours nationaliste au sein du parti, comme il essaiera plus tard de diffuser sa lecture pseudo-marxienne au Front National.

Bon, j'ai conscience de m'attarder sur un détail et j'ai un peu honte de faire de la petite histoire 'people' devant un spécialiste éclairé de la grande Histoire, mais vraiment, c'est la plus grande supercherie actuelle de penser que Soral "vient de la gauche", comme on dit. C'est sa stratégie de faire croire ça. Ne le laissons pas réussir ce coup foireux, pitié. Merci.
On sent, Alain, que vous connaissez mieux l'extrême-gauche que l'extrême-droite, et je ne peux que m'en réjouir... Mais ça vous pousse à faire de grosses simplifications qui confinent à l'erreur.

Il est faux de dire que l'extrême-droite, à l'instar de l'extrême-gauche, a pour couleurs le rouge et le noir.
Ce qui est vrai, c'est qu'une certaine frange de l'extrême-droite (les quelques groupuscules se référant ouvertement au nazisme) utilise AUSSI les couleurs rouge, noir ET BLANC en plus des couleurs traditionnelles de l'extrême-droite française, et ce en référence au drapeau à croix gammée :
Oeuvre Française

Mais si on remonte plus loin on verra que le rouge a toujours été et reste le symbole de la gauche, de la révolte sociale, et qu'à chaque fois que le rouge a été utilisé par l'extrême-droite, c'était pour récupérer volontairement une image "de gauche".

A l'origine, l'extrême-droite, ce sont les réactionnaires contre la révolution française, donc les royalistes. En France comme dans plusieurs autres pays européens, le bleu est la couleur royale. Lorsqu'une fleur de Lys est représentée sur le drapeau bleu de la royauté, elle est généralement de couleur or.
Armoiries des rois de France

C'est de là que viennent les vraies seules couleurs qui réunissent toute l'extrême-droite, en tous cas en France : Le bleu et le jaune. On retrouvera principalement ces couleurs dans les mouvements royalistes, catho traditionalistes, etc... mais les autres mouvements d'extrême-droite les utilisent aussi. C'est l'Action Française, (menée par Charles Maurras dans les années 20/30) qui en remettant au gout du jour le royalisme, en l'associant au nationalisme, au racisme et en glorifiant le fascisme a permis une synthèse des courants de l'extrême-droite (et même d'une bonne part de la droite), et a réimposé le bleu et jaune comme couleurs de ralliement à l'époque ou se développait la propagande de masse :
Action Française
Action Française étudiante
Civitas
Civitas 2
Jeunesses Nationalistes
Front National de JM-Le Pen
Front National de Marine Le Pen
Front National Jeunesse
Bloc identitaire
Bloc identitaire 2
Nouvelle Droite Française
MNR (Mégret)
Parti de la France (même le site est jaune et bleu)

Pour revenir à la période révolutionnaire, tandis que le bleu continuait à symboliser la droite dans son ensemble (qui étaient tous royalistes au début), le rouge symbolisait la gauche révolutionnaire. Puis, associant le bleu et rouge de la garde nationale parisienne au blanc représentant à l'époque la France (et non le roi, dont la couleur est le bleu), les révolutionnaires adoptèrent le drapeau tricolore, qui était donc associé à la gauche. Même s'il fut adopté comme symbole de la France alors que celle-ci était une monarchie constitutionnelle, le fait que la première République se l'approprie en 1792 en a fait un symbole non seulement révolutionnaire, mais républicain, donc doublement de gauche. A partir de ce moment là, la gauche revendiquait donc soit le bleu blanc rouge soit le rouge tout court, tandis que la droite revendiquait le bleu de la royauté ou le pavillon blanc (avec parfois les armoiries royales bleues et or au milieu) qu'utilisait la France avant la révolution.
C'est alors que naquit la récupération politique...
La droite revendiquant ouvertement à l'époque soit le pouvoir aux nobles (les réactionnaires, conservateurs, légitimistes), soit le pouvoir aux bourgeois (les libéraux, appelés plus tard orléanistes, ou centristes), il était inconcevable pour eux d'en appeler au soutien du peuple (à qui il ne suffisait plus d'agiter la religion pour qu'ils obéissent). C'est Napoléon et Napoléon III qui les feront changer d'avis en fondant un nouveau courant d'idées à droite : le Bonapartisme, fondé sur la propagande, le culte du chef, la guerre contre des ennemis désignés, et surtout la récupération politique des symboles de la gauche. Napoléon a mis fin à la République avec l'aide d'une partie des réactionnaires et des libéraux, il a rétablit la royauté, la noblesse, le concordat, l'esclavage, etc... Il avait plus de pouvoirs personnels que Louis XVI, et a pu faire tout cela avec le soutien du peuple révolutionnaire et d'une partie de la gauche, en établissant le suffrage universel masculin (tous les hommes votaient, mais pour des gens sans pouvoir ou des listes choisies par Napoléon), et surtout en adoptant pour son régime de droite réactionnaire et bourgeois les symboles de la gauche révolutionnaire : la marseillaise, la nation, le drapeau tricolore.
Bien sur le sens de tous ces symboles fut transformé pour devenir compatible avec la droite, la Nation n'étant plus le peuple contre les tyrans, mais la France (même tyrannique) contre les étrangers (même démocrates).
Une bonne partie de l'extrême-droite actuelle descend des bonapartistes (on peut les repérer à leur volonté de se dire "ni de droite ni de gauche" ou "de droite ET de gauche" ou "au dessus du clivage gauche-droite", etc..). D'autres redécouvrent ce principe de la récupération des symboles républicains sur le tard. Du coup, après le jaune et le bleu, les couleurs les plus souvent présentes dans la communication d'extrême-droite sont les couleurs bleu-blanc-rouge :
Oeuvre Française
Renouveau Français
Egalité et Réconciliation
Front National

La bannière tricolore ayant été récupérée au fur et à mesure par la droite, la gauche s'est rabattue sur son autre couleur : le rouge. C'est ainsi que le drapeau rouge fut le drapeau révolutionnaire et républicain contre Napoléon III, puis celui de la Commune de Paris, repris par les bolcheviques et du coup par l'ensemble des socialistes et communistes dans le Monde. Mais le bonapartisme lui aussi avait évolué et eu des enfants pas très glorieux. Ainsi le concept de la récupération des symboles révolutionnaires et de gauche pour faire une politique de droite est revenue en force avec le fascisme et le nazisme. Même si ça fait mal de l'admettre pour beaucoup de militants de gauche, il faut le rappeler sans cesse : le succès du fascisme dans les années 20/30/40 a été possible grâce au soutien d'une bonne partie du peuple, du prolétariat, et de la gauche. Mussolini a commencé sa carrière politique au parti socialiste italien, dans le courant révolutionnaire; Jacques Doriot, fondateur du seul parti ouvertement fasciste en France dans les années 30 (le Parti Populaire Français), est un ancien dirigeant du parti communiste. Quant au parti National-socialiste, il ne s'appelle pas socialiste pour rien.
Concrètement, le fascisme a été un moment historique ou l'extrême-droite, opposée depuis toujours au libéralisme puisque favorable à l'ancien régime, a cherché à s'allier avec une partie des révolutionnaires de gauche (ou les récupérer, ça dépend comment le voit) contre le libéralisme
pour établir un mélange de socialisme et de nationalisme. Le programme initial du parti fasciste était très progressiste : "une réforme électorale qui introduise le vote proportionnel, l'abaissement du droit de vote à 18 ans, l'horaire journalier du travail à 8 heures, les salaires minimums garantis, la gestion de l'État (ou mieux de la part de coopératives des travailleurs), des services publics, la progressivité de l'impôt, la nationalisation des usines d'armes, la suppression de la nomination des Sénateurs par le Roi et la convocation d'une assemblée qui permette aux citoyens de choisir si l'Italie doit être une monarchie ou une république...". Et c'est aussi pour symboliser la dimension socialiste du national-socialisme que le rouge a été mis dans le drapeau nazi, directement emprunté à la gauche révolutionnaire. Notons que tous les fascismes ont fini par abandonner la plupart de leurs revendications sociales pour obtenir le soutien des industriels de droite, Hitler allant jusqu'à faire supprimer l'aile gauche du parti nazi lors de la nuit des longs couteaux. Mais notons que le rouge du parti nazi, reproduit de nos jours par les mouvements d'extrême-droite qui se réfèrent au nazisme, est une récupération du rouge de la gauche, qui symbolise encore de nos jours les dimensions sociales et révolutionnaires revendiquées par certains de ces mouvements.

Or, après quelques décennies ou l'extrême-droite a repris un discours plus réactionnaire ou bonapartiste (en y incluant le libéralisme à la Reagan), la crise, et la volonté de récupérer la colère populaire, les pousse actuellement à redécouvrir le vrai enseignement du bonapartisme et surtout du fascisme : Si l'extrême-droite veut gagner, il lui faut le soutien du peuple et d'une partie de la gauche. C'est pour cela que Marine Le Pen développe son discours social et antilibéral et récupère des anciens chevènementistes. C'est pour ça que les anciens communistes Dieudonné et Alain Soral développent leurs mouvements de la "gauche du travail et droite des valeurs", que Soral revendiquait récemment comme un "socialisme national", en servant de première étape pour ramener la banlieue et les classes populaires vers Marine Le Pen. C'est pour ça aussi que la "Manif pour tous" a repris et détourné de nombreux messages du Front de Gauche. Et lorsque l'extrême-droite récupère les mots de la gauche, elle les écrit... en rouge (sur son bleu et jaune traditionnel) :
Civitas
Front National

Notons que le seul mouvement d'extrême-droite à ne pas respecter complètement ces codes est "génération identitaire", mouvement de jeunesse du bloc identitaire (qui lui est en plein dans les codes). Ils ont mélangé les ensembles de couleurs traditionnelles de l'extrême-droite, et décidé de faire une communication tout en jaune et noir :
Génération identitaire

Pour finir, observez l'évolution des couleurs dans le temps : Les mouvements d'extrême-droite plus "institutionnels" commencent toujours par s'identifier auprès de leurs militants traditionnels en utilisant le bleu et jaune. Très vite, d'abord par leur logo puis par la communication, ils commencent à s'élargir avec un discours bonapartiste (donc bleu-blanc-rouge), puis tentent de ratisser encore plus large avec toutes sortes de couleurs (et du rouge lorsqu'ils ont un discours social) :
MNR (Mégret)
Bloc identitaire
Front National
Magnifique rappel !
Mais ne pourrait-on pas dire aussi, en détournant votre phrase, que si l'extrème gauche veut gagner, il lui faut le soutient du peuple et d'une partie de la... Droite ?
Dis autrement : n'est-il pas troublant que cette majorité de la population la plus pauvre ou précaire, qui objectivement, matériellement, possède des intérets communs (grosso modo survivre dignement) se retrouve judicieusement coupée en deux et placée aux extrémités idéologiques les plus éloignées de l'offre politique ? Pour qu'il leur soit quasi-impossible de s'unifier ? (je parle des électeurs)
Difficile question en effet... je vais essayer de répondre mais je crois que la question n'est pas tranchée.

Le problème avec l'alliance rouge-brune, c'est que c'est généralement le côté brun qui l'emporte, ce qu'on a encore pu voir avec les révolutions arabes, entamées par la gauche et actuellement récupérées par l'extrême-droite car les mouvements de gauche n'ont pas exclu les islamistes de leur révolte. Pourquoi le brun l'emporte-t-il si souvent ?

Peut-être parce que les dirigeants de l'extrême-droite sont prêts à tout pour le pouvoir, tandis que l'idéal de la gauche est sensé être de partager le pouvoir entre tous. Du coup au sein d'une telle alliance, les plus ambitieux sont à droite, et finissent par prendre le dessus.

Peut-être aussi parce que l'idéologie d'extrême-droite est plus facile à croire que celle d'extrême-gauche pour les gens les moins cultivés... D’où l'importance de l'éducation populaire à gauche si l'on veut avoir une chance de l'emporter.

Peut-être parce que l'extrême-droite est plus militariste et donc plus efficace en guerre civile, en ne s'encombrant pas de réticences pacifistes.

Et quand l'extrême-gauche réussi une révolution, c'est l'extrême-gauche la plus autoritaire et nationaliste, celle qui a le moins de réticence au culte du chef, bref, celle qui a le plus de points communs avec l'extrême-droite (voir l'URSS, la Chine ou la Corée du nord entre autres).

Bref je ne connais pas d'exemple ou l'alliance des deux extrêmes ait permis l'accession au pouvoir de la gauche...

Le point commun entre les bruns et les rouges est d'être contre le libéralisme. Mais leurs visions de la société idéale est diamétralement opposée. D'un côté le retour à un passé idéalisé (l'ancien régime, la pureté de la race, la loi "naturelle" du plus fort), de l'autre l'invention d'une société nouvelle (société sans classes, répartition des richesses). D'un côté plus d'inégalités, de l'autre moins d'inégalités. ils peuvent donc s'entendre sur un ennemi commun et sur l'analyse de la société capitaliste, mais pour s'entendre sur la société future, il faut forcément un malentendu ou une tromperie. Or quelqu'un sincèrement de gauche aura plus de mal avec l'idée de tromper le peuple volontairement, puisqu'il lutte pour le peuple, et pour le partage du savoir.

Bref je crois que le seul espoir de la gauche n'est pas dans l'alliance du peuple de gauche et du peuple de droite, mais dans l'éducation et la culture permettant au peuple de droite de devenir de gauche...

Ceci dit la démocratie représentative permet aussi quelques écarts avec cette stratégie, puisqu'il suffit que le peuple de droite s'abstienne ou se divise en plusieurs camps pour permettre à une gauche, même minoritaire, d'accéder au pouvoir... Mais alors le problème est que les divisions et l'abstention sont des choses changeantes... Et puis la droite est moins habituée aux divisions que la gauche, car elle a la culture de la soumission au chef, et il est plus facile de se mettre d'accord sur un retour au passé que sur une invention du futur, le nombre de sociétés ayant existé étant plus réduit que les sociétés nouvelles imaginables.
Un vrai plaisir de vous lire. Sincèrement.
Je suis entièrement ok avec votre analyse.
Mais je pense qu'elle est tout aussi vrai dans l'autre sens. Et d'ailleurs vous esquissez cette idée.
L'URSS, la Chine, la Corée (on peut en rajouter pas mal), ont largement pioché dans le corpus de droite (patriotisme, souverainisme, culte du chef, protectionnisme, fermeture des frontières, auto-suffisance etc…) Et dans ces cas là c'est la composante rouge qui a finalement dominé (internationalisme, collectivisme, effacement des traditions, des religions, égalitarisme, relativisme…). Le Brun ne l'emporte pas toujours. Et parfois les deux compostantes s'équilibrent (Venezuela).

Donc bon… Balle au centre ? L'extrême droite et l'extrême gauche représentent le même électorat populaire (ce n'est pas méprisant bien au contraire). Ils fondent leur légitimité sur les classes les plus précaires (ce qui inclus les petits patrons pour la droite et ils ont raison).
Donc leur seul espoir de conquérir le pouvoir (avec un petit coup de force pour fignoler) c'est que la population précaire explose et que les barrières idéologiques deviennent poreuses pour fédérer l'intégralité du rejet du système.

Le premier qui ouvrira son corpus idéologique à celui de l'ennemi héréditaire remportera la mise. Et j'ai bien peur que le FN possède une bonne longueur d'avance…
Il est intéressant de voir comment, la crise faisant ses ravages, le FN a muté. Pourquoi le FG ne fait-il pas de même ?! Les délires anti-démocratique et pro-lobby de la commission Européenne leur offrait pourtant un boulevard ! Trop tard…

J'aime beaucoup vos analyses et j'envie votre érudition. Mais je n'arrive pas à vous suivre sur vos conclusions.
Je me permet de caricaturer : Finalement la vrai gauche socialiste à raison, mais ils se heurtent à un manque d'éducation de l'électorat…
C'est un peu court.
1 - En quoi un homme, totalement inculte, ne serait-il pas éligible à juger de ce qui est bon ou mauvais pour lui ?
2 - point Godwin : l'aristocratie nazi se nourrissait de l'élite de l'intelligence et de la culture occidentale. Elle a pourtant livrée sa population à la destruction.
Je me méfie terriblement de l'éducation comme outil de libération de l'homme. ça tourne souvent mal.

Pour terminer et ce n'est qu'une intuition. Il est temps de cesser de se référer aux anciennes voies. La gauche collectiviste et la droite autoritaire ont déjà eu l'occasion de s'exprimer pleinement et sans entrave. Le centre matérialiste libéral est en train de fêter sa victoire totale dans l'effondrement. Il est peut-être temps de chercher une quatrième voie qui ne soit ni collectiviste ni autoritaire ni matérialiste. J'estime que l'écologie (pas EELV) peut remplir ces conditions.
Il y a une phrase qui me plait beaucoup (j'ai entendu ça chez Mermet) : L'Homme, c'est la nature qui prends conscience d'elle même. L'humanité a un besoin urgent d'humilité.

Salut.
Je ne crois pas qu'en URSS, en Chine, en Corée du Nord le "rouge" l'ait emporté sur le "brun", au contraire...

Dans ces trois pays, au final :
- A-t-on supprimé le nationalisme ? la bonne blague ! qui de plus nationaliste aujourd'hui dans le Monde que la Russie, la Chine et la Corée du Nord ?
- A-t-on réussi le collectivisme ? Tous ces pays sauf la Corée ont fini par tout re-privatiser...
- A-t-on effacé les traditions et les religions ? surement pas ! Non seulement on a créé une religion nouvelle pour remplacer l'ancienne (la religion stalinienne, maoiste ou kim-jong-ilienne, avec ses prophètes, ses livres sacrés, ses rites, son inquisition, etc...), mais une fois que la nouvelle religion lâche du lest, les anciennes reprennent avec plus de vigueur encore qu'avant le communisme (voir l’extrémisme des orthodoxes russes)! Le but de Marx était d'éliminer le besoin de recourir à la religion pour le peuple (sa dépendance à "l'opium"). Force est de constater que c'est un cuisant échec.
- A-t-on réduit ou éliminé les inégalités et les classes sociales ? non, c'est le contraire, avec les anciens apparatchiks du parti formant une nouvelle classe parasite qui finit par redevenir une classe de patrons et de banquiers exploiteurs au moment de la libéralisation de l'économie.

Quant au Vénézuela, pour ma part je prévois la même déconvenue que dans tous les pays ou la gauche s'est compromise avec des éléments autoritaires : Dès que les leaders s'en iront, la population qui n'aura rien appris d'autre qu'à aimer son chef, se cherchera un autre chef, qui finira bien par être de l'autre bord.

[quote=Ils fondent leur légitimité sur les classes les plus précaires (ce qui inclus les petits patrons pour la droite et ils ont raison).]
Euh non, ils n'ont pas raison. Qu'on le veuille ou non, qu'il soit pauvre ou riche, petit ou grand, un patron, dès qu'il embauche, a intérêt à appauvrir et exploiter ses employés pour améliorer sa propre situation. C'est l'intérêt irréductiblement contradictoire entre le patron et l'employé qui fonde la lutte des classes. Actuellement c'est dans les petites entreprises que les gens sont le plus exploités, ont le plus de contrats précaires, travaillent au noir et/ou n'ont pas de droits syndicaux. Ça ne veut pas dire qu'il faut accuser les petits patrons ni refuser d'écouter leur souffrance, mais on ne peut pas les inclure dans la classe laborieuse au risque de détruire complètement le sens de la lutte des classes. Le but des socialistes (communistes et anarchistes compris) doit être l'abolition des classes sociales, et pour ça il faut bien les identifier.

Comment abolir les classes sociales ? par la nationalisation pour les communistes (ce qui à mon avis est inefficace puisqu'on crée une nouvelle classe exploiteuse de bureaucrates), par l'autogestion d'après les anarchistes (et d'après moi). L'autogestion n'est rien d'autre que la destruction du rapport hiérarchique et l'instauration de la démocratie dans le seul bastion de la vie en société ou elle n'est toujours pas entrée : l'entreprise.
Mais ça, jamais l'extrême-droite ne pourra l'accepter, car elle croit à l'autorité et la hiérarchie naturelle, elle croit aux castes, à des gens supérieurs et des gens inférieurs qu'il ne faut pas mettre au même niveau.

je réponds à vos questions :
1) petite expérience de pensée : prenez deux nourrissons et prenez en main leur éducation. A l'un vous apprendrez le plus possible sur l'Etat des connaissances actuelles de l'humanité.
A l'autre vous apprendrez que la Terre est plate, qu'il existe des races humaines dont certaines supérieures, que le cyanure a très bon goût et qu'un Dieu en spaghettis géants demande aux gens de se déguiser en pirates pour lui rendre hommage.
D'après-vous, l'un des deux aura-t-il plus de chances que l'autre de savoir ce qui est dans son intérêt ou pas ?

Il ne s'agit pas de dicter au gens ce qu'ils doivent vouloir, ceci doit rester entièrement libre. Mais il est du devoir d'une société de donner accès à tout le savoir humain de son époque à chaque être citoyen pour qu'il puisse, en fonction de ce qu'il veut, éviter le plus possible de se tromper sur les moyens de l'obtenir.

Je ne prétends pas que tout le monde devrait vouloir la société sans classe, et je ne veux pas bourrer le crâne des gens avec ça. Mais s'ils croient atteindre le bonheur en éliminant les juifs, je me sens en droit de leur expliquer pourquoi il y a bien peu de chances que ça marche, puisque les races n'existent pas, puisque les juifs ne sont pas une race, puisqu'il n'y a pas de complot juif et que les juifs ne dominent pas vraiment le Monde.

2) je ne vois absolument pas à quel moment l"aristocratie nazie" (d'ailleurs c'est quoi l'aristocratie nazie ??) s'est appuyée sur l'élite de l'intelligence de la culture occidentale... Les autodafés de livres et d’œuvres d'art "dégénéré" ne traduisent pas un amour débordant pour la culture et la connaissance...

J'ai dit éducation populaire parce que c'est le terme consacré. J'avoue que moi aussi l’ambiguïté du mot éducation me gène. J'aurais du dire instruction. Il ne s'agit pas d'expliquer comment se comporter ou quoi vouloir, mais seulement donner accès aux connaissances démontrées de son époque.
Et je crois assez à la similarité des besoins humains pour penser que naturellement, les gens ayant connaissance du fonctionnement du Monde se rendront compte qu'ils aspirent grosso-modo à la même chose et que la manière de l'obtenir passe par la démocratie et la solidarité. En tous cas toutes les statistiques montrent un lien entre le niveau de connaissance et l'adhésion aux idées progressistes.

Enfin pour votre intuition, notons d'abord que le "centre libéral" n'a rien de matérialiste. Merci de respecter le sens des mots. Les libéraux sont des idéalistes, ils croient en la primauté de la volonté personnelle sur la matière, et donc en la liberté et la responsabilité totale de chaque individu sur lui même. D’où leur combat contre toute forme de solidarité, d'entraide ou d'entrave à la liberté de chacun de faire n'importe quoi. Le matérialisme, c'est le fait de croire qu'il n'existe que la matière, et, la matière étant régie par des lois scientifiques, l'esprit qui n'est qu'une production de la matière l'est aussi. Par conséquent chaque être humain est le produit de son environnement et ce qu'ils est et ce qu'il fait engage la responsabilité de la société toute entière. Le matérialisme est à la base de la pensée de gauche.
Bref je suis d'accord que le collectivisme, l'autoritarisme et le libéralisme (et non le matérialisme) ont échoué, mais l'écologie ne pourra pas les remplacer, puisque l'écologie elle-même ne dit rien sur ces questions. Il existe des écologistes collectivistes, autoritaristes ou libéraux. Par contre la voie qui a en partie marché et qui pourrait marcher encore, c'est celle de la démocratie et de l'autogestion (donc toujours la démocratie, mais dans les entreprises). Et celle-ci est tout à fait compatible avec l'écologie, et même plus précisément avec l'idéologie politique qui lui est associée, l'écologisme.
je précise aussi que quand Soral et les autres nazis parlent des petits patrons, ils voient large... c'est surtout les patrons d'industrie qu'ils défendent, contre les banquiers. Et les patrons d'industrie sont loin d'être uniquement des petits patrons précaires...
Tzitzimitl,

J'ai l'impression que vous répondez à quelqu'un d'autre.
Je ne défends pas l'extrême droite, je me fous du complot juif et d'Alain Soral.
Et je n'en parlais pas d'ailleurs.
Soral est typiquement l'idéologue d'extrême droite mystique qui ouvre sont discours à la Gauche (sûrement avec sincérité).
En cela il est très efficace. Mais comme nous en discutions plus haut j'ai aussi la conviction que le Brun dévoreras le Rouge à la première occasion. Il est profondément élitiste. Chassez le naturel…

Bon j'espère être sortit de la case dans laquelle vous ne m'aviez pas placé.

Cette discussion est vraiment vaste et tire dans tous les sens. Mais bon je pense pouvoir défendre un peu mes points de vue.

Savoir si l'URSS, la Chine ou la Corée ont été vraiment des expériences de Gauche authentique ?
C'est trop compliqué pour moi d'y répondre. Je ne dirais que ceci :
En un siècle il y a eu plus d'une trentaine d'expérience Marxiste, collectiviste. Sur 4 continents. Dans une multitude de cultures différentes. J'ai du mal à croire qu'au bout du compte le Marxisme n'ai pas eu sa chance. ça me fait penser aux libéraux qui nous explique que la crise capitaliste est dû au trop d'État. A l'impureté du système. Et qu'il faut donc plus de libéralisme.

Les salariés doivent-ils se solidariser aux petits patrons ?
Oui j'insiste. Bon déjà le spectacle des travailleurs, des indépendant et des artisans, tous précaires qui se chamaillent et ne veulent surtout pas faire partit de la même classe, doit beaucoup amuser les grands patrons et surtout les rentiers. Ce sont tous des travailleurs et ce n'est pas parce que celui-ci possède trois machines, ou celui là quatre ordinateurs, bref ses moyens de production qu'il devient un possédant exploiteur.

Vous avez une lecture industrielle des rapports de travail. Mais l'industrie a ses beaux jours derrière elle. Et dans ma vision d'un futur meilleur il est préférable (indispensable ?) qu'elle disparaisse ou soit intégralement automatisée et nationalisée.
Donc il reste un tissu dense de PME. 10-20 personnes c'est la taille idéale pour 99 % de l'activité créatrice humaine.
J'ai beaucoup réfléchi à l'auto-gestion. Mais à petite échelle cela n'a pas de sens.

Je suis un petit patron (15 ans indépendant et maintenant 4 employés). Donc selon vous mon intérêt serait de les appauvrir pour améliorer ma situation… Sans commentaire.
vous essentialisez et vous déplacez au politique des problèmes d'ordre moral.
Vous voulez faire respecter la démocratie dans l'entreprise ? Mais poussons plus loin. Il y a un autre lieu d'interdépendance humaine ou la démocratie ne règne pas. C'est la famille. Vous voyez à quelles extrémités l'égalitarisme peut pousser ? Quand je travaille avec des types de 20 ans qui sortent de l'école il n'y a aucune égalité entre nous. Pas plus qu'il n'y avait d'égalité entre eux et leurs professeurs.
Et ce n'est ni injuste ni déraisonnable ! Donc ce n'est pas mal. On ne devient pas tous égaux à la majorité. L'égalité doit se cantonner aux droits.

Soit dit en passant je pense vraiment que le salaria flexibilisé, précarisé, sous-qualifié, délocalisé, controlé est une forme moderne d'esclavage.

Pour l'éducation.
Si vous êtes sensible au concept d'éducation populaire, vous avez dû regarder les conférences de Lepage.
C'est dans l'une d'elle qu'il rappelait que selon Arendt (je crois) la deuxième boucherie mondiale avait définitivement invalidé la thèse que le degré de culture d'un homme, ou d'une société soit proportionnel à sa capacité au bien, au juste, au raisonnable. Grosso modo l'Allemagne, fleuron de la pensée et des Arts du 19eme, une des populations la mieux éduquée du monde a enfanté d'un monstre. C'est ce que je voulais dire en parlant d'aristocratie nazi (dans le sens d'élite). Adolf lui même était un romantique épris de peinture de musique de photographie et de cinéma. Pas vraiment le taxi du coin.

Matérialisme. Vous avez raison de me rétorquer que le matérialisme est fondateur de la Gauche. En revanche le libéralisme ne peut s'épanouir que dans une société matérialiste je pense.
De là à dire que la gauche a préparé le terrain… Je ne m'y risque pas (mais j'aime beaucoup Michéa)

Ecologie.
Je crois au contraire que l'Ecologie synthétise toutes ces idées :
Collectivisme. Une écologie est un système plus ou moins fermé ou chaque élément / individu est interdépendant des autres. Le tout étant auto-suffisant et durable. On est bien dans la mise en commun vitale des ressources et des compétences.
Autoritarisme. Une écologie suppose l'autorité du système sur ses éléments.
Matérialisme. Bien que ancré dans la réalité scientifique de la nature/matière, un eco-système ne pose pas de frontière à priori. Il peut être à l'échelle d'un jardin, d'une foret, d'un continent, de la planète etc… L'écologie peut-être une transcendance.

Salut.
J'ai l'impression que vous répondez à quelqu'un d'autre.
Je ne défends pas l'extrême droite, je me fous du complot juif et d'Alain Soral.


Hum non... Honnêtement je ne vois pas ce qui vous fait penser que je vous aurais assimilé à l'extrême-droite... Si vous voulez tout savoir j'avais plutôt l'impression que nous étions entre gens de gauche discutant des conditions d'arrivée au pouvoir de l'extrême-droite et de l'extrême-gauche en préférant ouvertement la deuxième option.

Et je n'en parlais pas d'ailleurs.

Alors là par contre il faudra m'expliquer, parce que toute notre conversation part de mes messages qui parlaient bien du fascisme, c'est à dire quand l'extrême-droite utilise des mots de gauche pour se rallier le peuple, ainsi que de ses représentants actuels à savoir Dieudonné et Soral.

Bon j'espère être sortit de la case dans laquelle vous ne m'aviez pas placé.

Effectivement je ne vous y avais pas placé.

MARXISME

En un siècle il y a eu plus d'une trentaine d'expérience Marxiste, collectiviste. Sur 4 continents. Dans une multitude de cultures différentes. J'ai du mal à croire qu'au bout du compte le Marxisme n'ai pas eu sa chance. ça me fait penser aux libéraux qui nous explique que la crise capitaliste est dû au trop d'État. A l'impureté du système. Et qu'il faut donc plus de libéralisme.

Je n'ai pas dit que le marxisme n'avait pas eu sa chance, j'ai dit au contraire que toutes les expériences connues d'application concrète du marxisme dans un pays avaient bien trop emprunté à l'extrême-droite pour être des exemples de victoire de la gauche, et qu'à différent degrés, ils finissaient tous par s'écrouler et livrer ensuite leur pays clé en mains à ceux qu'ils étaient sensés combattre.
Ma conclusion n'est absolument pas qu'il faudrait réessayer une expérience plus "pure" du marxisme, ma conclusion est que le marxisme , en tant que forme particulière du socialisme, est inapplicable et comporte en lui des vices de naissance qui ne peuvent le conduire qu'à une dérive autoritaire, malgré toutes les bonnes intentions du Monde. C'est pour ça que je ne suis pas et n'ai jamais été marxiste (ni communiste). Visiblement c'est plutôt vous qui m'aviez rangé dans une mauvaise case :)
Ceci dit c'est plutôt le marxisme-léninisme pour être précis qui a été tenté un peu partout sur la planète, on pourrait éventuellement discuter que ce qu'auraient donné des tentatives marxistes si Lénine n'en avait pas imposé sa vision.

Marx fait trois erreurs fondamentales à mon avis :
1) Il croit que l'histoire à un sens, qu'après le féodalisme ne peut venir que le capitalisme, puis le socialisme (enfin ce que les communistes appellent le socialisme, à savoir la dictature du prolétariat), puis le communisme (société idéale sans classes et sans Etat obtenue après destruction de la mentalité bourgeoise pendant la période précédente). L'histoire n'a pas de sens unique et irrévocable, même si certaines choses progressent sur le long terme (par exemple le nombre de meurtres par habitants baisse en moyenne dans le Monde entier de façon quasi-continue depuis qu'on les comptabilise). Il y a des accidents de l'histoire, des retours en arrière plus ou moins longs et localisés (comme la période fasciste en Europe), et on ne peut certainement pas démontrer que l'histoire mène forcément à un système politique précis.
2) Il croit qu'on peut imposer l'égalité, la fraternité, l'athéisme par la force et qu'en les imposant on les rend assez désirables pour un jour ne plus avoir à les imposer. C'est profondément faux, car Marx, obsédé par l'économie et le désir d'égalité matérielle de la population, en oublie le besoin viscéral de chaque être humain de se sentir libre de ses choix. Si on impose violemment une façon de pensée, il y aura toujours des gens qui se révolteront contre cette violence et réclameront de pouvoir penser autrement. Le jour ou la dictature se fissure, c'est alors le triomphe des idées exactement inverses à celles que l'on souhaitait répandre.
3) Il croit que le progrès scientifique et technique ne peut qu'améliorer continûment la vie des hommes. Or si des connaissances nouvelles n'ont jamais nuit à l'humanité (justifiant la recherche fondamentale libre), il n'en est pas de même pour la technique, qui peut parfois produire d'énormes régressions (par exemple l'invention des drones qui détruit toute forme de législation sur la guerre). Et l'évolution globale des technologie ainsi que leur banalisation peut avoir des effets pervers à l'échelle planétaire (réchauffement climatique par exemple).

Bon déjà le spectacle des travailleurs, des indépendant et des artisans, tous précaires qui se chamaillent et ne veulent surtout pas faire partit de la même classe, doit beaucoup amuser les grands patrons et surtout les rentiers.
Ça ne les amuse pas tellement en fait, car la majorité des petits patrons sont leurs sous-traitants, et c'est parce que les grosses boitent exigent de leurs sous-traitants des taux de rentabilité exorbitants que ceux-ci font le salle boulot à leur place, à savoir ne pas respecter le code du travail et empêcher les salariés de se syndiquer, ce qui est plus dur à faire pour la grosse boite avec ses salariés directs, car elle est plus surveillée par les inspecteurs du travail (qui sont trop peu nombreux aujourd'hui pour s'occuper de toutes les PME).

PME, CLASSES SOCIALES

Ce sont tous des travailleurs et ce n'est pas parce que celui-ci possède trois machines, ou celui là quatre ordinateurs, bref ses moyens de production qu'il devient un possédant exploiteur.
Et dire que c'est moi que vous accusez d'avoir une lecture morale des choses... mais c'est vous qui passionnez le débat et qui utilisez des mots à forte charge symbolique... je n'ai jamais parlé de "possédant exploiteur", j'ai dit que les patrons (même les petits patrons) et les employés appartiennent à deux classes sociales différentes, c'est tout. Et ça n'a rien à voir ni avec un jugement de valeur, ni avec un quelconque jugement de valeur. Il se trouve que quand on signe un contrat de travail, on accepte un lien de subordination, c'est écrit dans la loi. Le patron accepte d'être quelqu'un qui donne des ordres à un autre, l'employé accepte de recevoir des ordres d'un autre et s'y soumettre. Il y a donc, même dans la plus petite entreprise, à partir du moment ou elle embauche un salarié, deux classes sociales dont l'une est soumise légalement à la volonté de l'autre. Autrefois c'était le cas dans tout le système politique : la loi (ou la tradition) reconnaissait trois "ordres" (qui sont des classes sociales institutionnalisées), à savoir la noblesse, le clergé et le tiers-etat, avec un lien de subordination entre elles : la noblesse et le clergé ont autorité sur le tiers-etat. Avec la Révolution et l'abolition des privilèges, on a aboli ce lien de subordination qui était vécu par le peuple comme une oppression. Mais les bourgeois (là encore n'y voyez pas de charge morale, c'est juste le terme historique pour désigner les commerçants) qui ont été au pouvoir pendant une bonne partie du processus révolutionnaire ont remis en cause leur propre subordination à l'Eglise et aux nobles tout en refusant de remettre en cause la subordination qu'ils demandaient à leurs employés dans l'industrie balbutiante.

Je sais bien que beaucoup de patrons de PME croient sincèrement ce qu'ils disent quand ils prétendent que leur entreprise est une sorte de "famille", où eux et leurs employés sont dans un "projet commun", tous dans le "même bateau". Simplement c'est factuellement faux. A moins que l'entreprise ait été montée ensemble par un collectif (et dans ce cas en général c'est une coopérative ou les dirigeants sont élus démocratiquement quand il y en a), c'est bien un individu à la base qui a un projet personnel, et qui va embaucher des gens extérieurs à son projet pour l'aider à aboutir. Or ces gens ont leurs propres vies, leurs propres projets, leurs propres envies. Jamais ils ne s'approprieront le projet de l'entreprise autant que celui qui en est à l'origine. Ils sont donc contraints de se plier à l'autorité de quelqu'un pour accomplir son projet qui n'est pas le leur, afin de gagner de quoi vivre. C'est une situation difficile à vivre pour beaucoup de gens. Consacrer de l'énergie et du temps à un projet qui n'est pas le sien, se plier à une autorité même quand on n'approuve pas les ordres, tout ça n'aide pas à se sentir libre, et donc à être heureux. C'est le même sentiment d'oppression que les bourgeois connaissaient face aux nobles, il faut accepter qu'il soit normal qu'un employé ressente la même chose vis-à-vis de son patron puisque la situation est la même.

J'ai beaucoup travaillé dans des PME, et je suppose que le patron était sincère lorsqu'il m'invitait à boire une bière et me parlait comme à un ami... Mais ça ne l'empêchait pas de profiter de son autorité et de ma dépendance à l'égard de mon salaire pour m'empêcher, peut-être inconsciemment, de réclamer qu'on respecte mes droits. Tout le monde a connu ça, vous voulez réclamer qu'on compte vos heures supplémentaires, qu'on transforme vos CDD répétés ou votre travail au noir par un vrai contrat en CDI, etc., et le patron répond : "Mais enfin -votre prénom-, tu connais la boite aussi bien que moi, tu sais bien qu'on ne peut pas se le permettre, on est tous dans le même bateau". Vous allez parler à un syndicat pour qu'il vous aide, ou vous voulez monter une section syndicale dans l'entreprise, le patron répond : "Mais enfin -votre prénom-, pourquoi passer par un syndicat, des gens extérieurs qui ne connaissent même pas notre entreprise, tu sais bien que tu peux me parler directement". Et la plupart du temps ça marche. C'est justement parce que oui, dans une PME vous connaissez votre patron et peut-pêtre que vous l'aimez bien que vous acceptez de renoncer à vos droits légaux. Et c'est bien pour ça que les Grandes entreprises adorent sous-traiter l'exploitation aux PME, ça passe bien plus en douceur.

Comment résoudre le problème ? comme on l'a résolu pour ce qui est des institutions politiques : en remplaçant les "inégalités naturelles" et les rapports de subordination par une égalité en droit et un processus décisionnel collectif, à savoir la démocratie. Pour moi la principale justification de la démocratie est d'abord et avant tout celle-ci :
La question n'est pas de prendre la décision la plus efficace, ni de combattre une situation "injuste" ou "immorale". La seule chose qui compte en politique, c'est ce qu'on se donne comme but. Pour moi la politique ne peut avoir comme but collectif que le plus possible de bonheur pour le plus possible de monde. Or, parmi les nombreuses conditions nécessaires au bonheur pour un humain, il y a le sentiment d'être libre de ses choix, de ne pas être contraint. C'est en ce sens que la démocratie est le meilleur système possible : en faisant participer chacun à la décision, on atténue la sensation de contrainte lorsqu'il s'agira d'appliquer la décision. Vous voyez, pas la moindre question de morale dans mon raisonnement.

Vous avez une lecture industrielle des rapports de travail.
Absolument pas. Comme vous pouvez le constater, je n'ai pas parlé du tout d'un type particulier d'entreprise. Le problème, c'est le lien de subordination, et c'est valable dans tous les secteurs économiques.
Je ne me lancerais donc pas dans un débat sur l'avenir de l'industrie, on a déjà ouvert bien assez de débats comme ça et je manque de temps :)

J'ai beaucoup réfléchi à l'auto-gestion. Mais à petite échelle cela n'a pas de sens.
Amusant ça, c'est exactement l'argument contraire qui a été utilisé de tous temps (et surtout lors de la Révolution Française) pour renoncer à la démocratie directe : à grande échelle ça n'a pas de sens... A petite échelle pourquoi pas, cest faisable, mais pas à l'échelle d'un Pays, soyons sérieux !
Pour moi il n'y a aucune question d'échelle. Qu'il y ait 1 ou 1 million d'employés, chaque employé est un adulte soumis à la volonté d'un autre adulte, ce qui est toujours une contrainte et souvent une souffrance. Il faut donc qu'elle soit particulièrement indispensable et justifiable pour la faire perdurer. Il faut donc un peu plus d'arguments pour ça que :
Je suis un petit patron (15 ans indépendant et maintenant 4 employés). Donc selon vous mon intérêt serait de les appauvrir pour améliorer ma situation… Sans commentaire.
C'est dommage, j'aurais aimé avoir des commentaires justement, pour que vous m'expliquiez en quoi c'est faux.
Votre entreprise a besoin de faire du profit pour survivre, et vous tenez à ce que votre entreprise survive.

Pour faire du profit, il y a deux solutions : augmenter les recettes ou baisser les coûts.

Pour augmenter les recettes, il y a une seule solution : avoir plus de clients ou des clients qui achètent plus. Or c'est une variable sur laquelle le petit patron de PME a très peu d'influence. Il faut simplement que son produit corresponde à un besoin et que les gens aient de quoi se le payer. Une grande entreprise peut manipuler le marché et les envies des consommateurs par le biais de la publicité, un patron de PME n'a pas ce pouvoir d'influence. Mais au final toutes les entreprises ont surtout besoin d'une chose : que les clients aient des revenus suffisants pour consommer. A l'échelle du marché global, toutes les entreprises ont donc intérêt à ce que les salaires soient élevés (mais aussi que les gens soient en bonne santé et optimistes) pour que les gens consomment. Mais les entreprises, et en particulier les PME, n'ont pas le pouvoir de décider globalement des salaires et des conditions de vie de leurs clients. De plus il serait suicidaire pour un patron d'améliorer unilatéralement le sort de ses employés. Il ne serait alors plus compétitif par rapport à ses concurrents.
Ils pourraient exiger ces améliorations globales du sort des employés par le biais de la politique en votant à gauche, mais en bons héritiers des stoïciens (et comme beaucoup de gens), les patrons s'intéressent généralement plus à ce qui relève directement de leurs décisions personnelles.

Baisser les coûts, ça, c'est en leur pouvoir. Il suffit pour ça de limiter les salaires, profiter des niches fiscales (et donc payer moins de cotisations sociales pour les retraites ou le chômage), réduire la sécurité et l'hygiène, ne pas compter les heures supplémentaires ou tout simplement embaucher au noir. Pour pouvoir faire tout ça plus librement, un patron est sensé voter à droite, et c'est effectivement ce que la plupart font.
Bien sur, à long terme et à l'échelle globale, si toutes les entreprises font ça, alors les gens ont moins d'argent, sont plus souvent malades, plus pessimistes, et donc dépensent moins, entrainant au final une perte générale de bénéfice pour les entreprises (et pour l'Etat). Objectivement, les patrons de PME auraient donc plus intérêt à voter à gauche qu'à droite, mais celà nécessite d'avoir une vision globale et à long terme, ce qui n'est pas facile lorsqu'on gère son projet au jour le jour et qu'on voit surtout ce qui est immédiatement en son pouvoir : réduire les coûts.

Donc oui, je réitère : structurellement, parce que le patron est celui qui décide des règles dans l'entreprise, et parce qu'il veut que son entreprise fasse du profit, alors son intérêt immédiat est de dégrader les salaires et les protections de ses employés pour réduire les coûts. Or les employés ont bien évidemment intérêt au contraire à de hauts salaires et de hautes protections. A n'importe quelle échelle, de façon structurelle, les patrons et les employés ont des intérêts contradictoires, ce qui signifient qu'ils appartiennent à deux classes sociales différente, l'une dominante (les patrons qui donnent les ordres), l'autre dominée (les employés qui reçoivent les ordres).

Il est fort possible que vous refusiez dans votre propre entreprise de baisser outre mesure les salaires et conditions de travail de vos employés (peut-être même que vous les améliorez !), mais c'est un handicap pour votre entreprise face à la concurrence, donc si vous traitez bien vos employés, ce n'est pas parce que vous y auriez intérêt, mais parce que vos valeurs morales et votre compassion vous en empêchent (et c'est tant mieux). Ça n'enlève rien à l'analyse du problème, et même si vos employés sont bien traités et bien payés, ils se lèvent tous les matins pour fournir des efforts pour le projet d'un autre, tandis que vous vous levez pour votre propre projet. Ils se lèvent tous les matins pour obéir, vous pour décider. Vous ne pouvez donc pas prétendre vivre la même condition qu'eux.

DEMOCRATIE EN ENTREPRISE

Vous voulez faire respecter la démocratie dans l'entreprise ? Mais poussons plus loin.
Pourquoi pousser plus loin ? vous ne voulez pas répondre d'abord à la question posée plutôt que de la dévier dans un autre domaine ou je n'ai pas proposé de l'appliquer ?
C'est un peu éculé comme stratagème réthorique... Schopenhauer en faisait déjà son "stratagème N°1" dans son livre "L'art d'avoir toujours raison" :
"L'Extension. Etirer l'affirmation de l'adversaire au delà de ses limites naturelles, l'interpréter de la façon la plus générale possible et l'exagérer."

Enfin bref, dois-je vraiment expliquer la différence entre l'autorité des parents et des professeurs qui est justifiée par le fait que l'enfant est mineur, et l'autorité dans l'entreprise, qui s'applique à des adultes sensés être libres selon la constitution de leur pays (et qui ne s'applique pas aux mineurs) ?

Quand je travaille avec des types de 20 ans qui sortent de l'école il n'y a aucune égalité entre nous. Pas plus qu'il n'y avait d'égalité entre eux et leurs professeurs.
Je croyais que le paternalisme était un vieil avatar du capitalisme à l'ancienne, je vois qu'il a de beaux jours devant lui. Les gens dont vous parlez sont des adultes, qui peuvent très bien être plus intelligents ou matures que vous, à moins que vous ne vous assuriez de n'engager que des gens que vous considérez comme inférieurs. Vous n'êtes pas leur père, vous avez signé un contrat avec eux pour échanger de l'argent contre leur subordination à vos désir pendant les heures de travail.
Et puis qu'est-ce que c'est que cette justification absurde par l'âge ? Alors le contrat de travail serait juste si le patron est plus vieux que ses employés ? Et si c'est l'inverse, comment fait-on ? Et à partir de combien d'années d'écart le contrat de travail devient une subordination naturelle ?

Et ce n'est ni injuste ni déraisonnable ! Donc ce n'est pas mal.
Décidément, vous êtes obsédé par la morale... qui a parlé de "mal" ou d"injuste" ? Quant à déraisonnable, si votre seule justification pour trouver normal la subordination dans l'entreprise est le fait que vous êtes plus vieux que vos employés, laissez moi penser que c'est un peu léger. La subordination n'est ni le "mal" ni "injuste", elle est inefficace pour assurer le bonheur de tous.

L'égalité doit se cantonner aux droits.
C'est bien de droits que je parle ici : le droit à vivre pour ses propres désirs et à ne pas être soumis aux désir de quelqu'un d'autre. Ce droit vous l'avez, vos employés ne l'ont pas. C'est une inégalité en droit.
Et là encore je ne me lancerais pas dans un nouveau débât sur l'égalité des moyens, même si la question est intéressante, car ce n'est pas le sujet.

Soit dit en passant je pense vraiment que le salaria flexibilisé, précarisé, sous-qualifié, délocalisé, controlé est une forme moderne d'esclavage.
C'est bien gentil à vous de faire preuve de compassion.

EDUCATION

Si vous êtes sensible au concept d'éducation populaire, vous avez dû regarder les conférences de Lepage.
Oui. Ce qui ne signifie pas que ce qu'il dit soit une Bible dont chaque phrase serait la quintessence de la vérité.

C'est dans l'une d'elle qu'il rappelait que selon Arendt (je crois) la deuxième boucherie mondiale avait définitivement invalidé la thèse que le degré de culture d'un homme, ou d'une société soit proportionnel à sa capacité au bien, au juste, au raisonnable. Grosso modo l'Allemagne, fleuron de la pensée et des Arts du 19eme, une des populations la mieux éduquée du monde a enfanté d'un monstre.
Eh bien je ne suis pas d'accord avec Anna Arendt. Comment juge-t-on de la qualité de l'éducation de l'Allemagne dans les années 30 ? Croyez vous que le niveau de diplôme soit une donnée suffisante pour déterminer le niveau de culture générale, à une époque ou le nationalisme, la religion, et même le racisme étaient enseignés à l'école ?
Le fleuron de la pensée ? Pourquoi ? Parce que ses philosophes étaient connus ? Mais avaient ils raison ? autrement dit, ces philosophes enseignaient-t-ils de la connaissance ou des absurdités ? Certains comme Schopenhauer ou Marx ont eu des éclairs de génie, mais ce n'est pas eux qui ont inspiré les nazis. Globalement, tout le reste de la philosophie allemande a eu comme point commun d'être une réaction contre la philosophie athée, matérialiste et donc scientifique des Lumières. C'est le point de départ de l'idéalisme allemand, avec Kant, qui admet que la métaphysique ne devrait pas être discutée par la science, pour juste après dire qu'il faut quand même admettre sans poser de question Dieu et l'âme immortelle pour le bien de la société... pas vraiment un encouragement à l'esprit critique... Puis vint le romantisme dont l'idée principale est la révolte contre la raison triomphante depuis la Révolution française. Le but du romantisme est de rechercher les sentiments, les instincts, les pulsions naturelles qui sont sensés avoir été niés par la raison. Or c'est sur la raison que se base la démocratie. Enfin voilà Nietzsche, qui dénonce explicitement dans la démocratie un ennemi ayant mis au pouvoir les faibles pour opprimer les forts "naturels". C'est toute cette pensée qui mènerau nazisme, en favorisant les croyances métaphysiques (Les nazis faisaient des cérémonies néo-païennes mystiques, pas vraiment un exemple de la raison en marche), le culte des lois "naturelles" comme la survie du plus fort et des instincts violents, bref un retour mystique à un état naturel fantasmé qu'auraient détruit les philosophes des lumières, et enfin la construction du surhomme à travers la purification de la race aryenne, nécessitant une croyance aveugle à des concepts absurdes comme les races humaines et la hiérarchie des races.

C'est ce que je voulais dire en parlant d'aristocratie nazi (dans le sens d'élite).
Encore faudrait-il savoir sur quel critère on détermine l'élite... En tous cas les nazis n'étaient certainement pas une élite culturelle.

Adolf lui même était un romantique épris de peinture de musique de photographie et de cinéma. Pas vraiment le taxi du coin.
J'ai un ami taxi qui me semble bien plus cultivé que ne l'était Hitler.
Adolf était épris de romantisme, je n'en doute pas, et ça ne fait que confirmer ce que je dis : le romantisme est la haine de la raison. C'est le culte des sentiments, de l'instinct. En art, ça donne des trucs très jolis, c'est certain. En amour, ça fait plaisir, mais dans le domaine du savoir et de la politique, c'est une régression totale, c'est la négation de toutes les connaissances obtenues par la raison et même de la méthode pour les obtenir. Le romantisme c'est le culte de l'ignorance.

Je crois devoir définir ce que j'appelle culture : j'utilise ce mot en référence au capital culturel définit par Bourdieu, c'est à dire la quantité d'informations objectives détenues par un individu. Il ne s'agit donc pas d'être fan de telle ou telle forme d'art par exemple, mais plutôt de connaître l'état des connaissance scientifiques et des courants culturels de son temps.

Par exemple brûler la moitié des produits culturels comme l'ont fait les nazis empêche non seulement le peuple d'adhérer aux thèses qui y sont proposées, mais cela empêche même le peuple de savoir que ce point de vue existe. C'est donc en soi un acte qui réduit drastiquement la culture du peuple.


MATERIALISME

En revanche le libéralisme ne peut s'épanouir que dans une société matérialiste je pense.
C'est parce que vous n'avez sans doute jamais lu les philosophes fondateurs du libéralisme. Ils étaient tous croyants (généralement protestants) :

- Pour être libéral, il faut croire que chacun est entièrement libre et donc responsable de ses actes. Le matérialisme s'oppose à celà puisqu'il implique le déterminisme scientifique. Si l'on est déterminé, on n'est pas libre, et comme chaque personne est le produit de son environnement, la société toute entière est responsable des actes de ses membres. Le libéralisme s'oppose à tout ça, en décrétant que l'influence sociale n'existe pas et que chacun possède une volonté totalement indépendante et choisie. Comme on ne trouve pas trace du libre-arbitre dans la biologie ou la sociologie, les libéraux sont obligés de croire qu'ils existe "autrechose", à savoir une âme, et Dieu qui nous garanti qu'on est libres puisqu'il l'a dit dans la Bible.
- Pour être libéral, il faut croire qu'il existe des "lois naturelles", qui ne sont pas le produit d'un raisonnement à partir des besoins démontrés de la vie humaine, mais qui sont immanentes, qui ont toujours été présentes et vraies, mais bizarrement ignorées pendant des siècles par les rois et les nobles. Eux, les philosophes libéraux, les ont "découvert" (non non pas "inventé", "découvert"!!!) et exigent qu'on les respecte. Voilà comment les libéraux justifient le caractère sacré de la propriéte privée.
- Pour être libéral, il faut croire que par unprocédé magique inexpliqué, chaque personne possède automatiquement toutes les informations dont elle a besoin pour suivre ses objectifs. En effet, pour un libéral, si chacun fait ce qu'il veut, alors le bien commun est assuré. C'est la "main invisible du marché" qui est à l'oeuvre, là encore un concept tellement rationnel... Non seulement chacun sait ce qui est dans son intérêt immédiat et futur, il ne peut ni se tromper ni être trompé, c'est magique.

Bref le libéralisme est en parfaite contradiction avec le matérialisme, il ne faut surtout pas être matérialiste pour croire au libéralisme. Et la gauche n'a donc pas du tout préparé le terrain au libéralisme, en tous cas pas de cette façon (peut-être plus par les solgans de Mai 68 genre "il est interdit d'interdire" ou "jouir sans entraves" et qui n'avaient pas grand chose de matérialiste). Ce n'est pas un hasard si le libéralisme est venu avant le républicanisme et le socialisme comme premier succésseur au système féodal : La pensée mystique héritée de l'ancien régime a favorisé une idéologie qui était à peine moins mystique. D'ailleurs, le philosophe libéral Voltaire, bien que critique envers la religion auprès des riches (surtout dans son aspect condamnation du plaisir) le disait très clairement dans ses lettres privées :
“il est fort bon de faire accroire aux gens qu’ils ont une âme immortelle et qu’il y a un Dieu vengeur qui punira mes paysans s’ils veulent me voler mon blé”, ou “il est nécessaire qu’il y ai des gueux ignorants, un peuple sans religion sera bientôt un peuple de brigands”


ECOLOGIE

Bon on ne va pas se battre là-dessus ça n'en vaut pas la peine, tout ce que je veux dire c'est que l'écologie seule c'est la protection de l'environnement, et il y a des courants qui veulent faire ça partout, de l'extrême-droite à l'extrême-gauche. La définition de l'écologie change de l'un à l'autre et certains à mon avis se trompent complètement (comme par exemple ceux qui pensent pouvoir allier libéralisme et écologie). Il faut donc préciser de quelle écologie on parle, et pour celle à laquelle je souscris s'appellait "écologie politique" et est désormais appellée plus souvent "écosocialisme", même si là aussi il existe des variantes.

Salut
Merci pour votre réponse !
J'aime bien cette discussion, elle se précise :)
En revanche vous répondre va me prendre plusieurs heures. Et je ne les aurais pas avant un bon moment.
Mais je pense avoir encore quelques arguments pour défendre mon point de vue.

Ce billet étant très vieux je vous répondrai en message privé si vous le voulez bien.
Mais cela risque d'être dans plusieurs semaines...
A bientôt !
Vous faites, je pense, un défaut de raisonnement majeur.
En effet vous considérez qu'être de droite est une question d'inculture. Ce qui sous-entends qu'être de gauche serait la marque des gens cultivés.
On ne peut pas dire chose plus fausse.
C'est sous-entendre que les idées de gauche se démontrent, que cela est arithmétique.
Or vous oubliez qu'à la base de tout positionnement politique il existe une idée de la morale, celle-ci définissant le bien et le mal et ce qu'est la nature humaine.
Et ces valeurs morales ne sont pas démontrables. C'est une conception de la vie, en somme une croyance.
Et vous ne démontrerez pas le bien fondé d'une croyance, c'est absurde.

Vous ne pourrez que convaincre que vos valeurs sont justes. Mais gardee à l'esprit que rien n'est objectif là-dedans.
Si on considère aujourd'hui dans notre société que l'égalité et le partage, la liberté sont des valeurs essentielles, un peu de recul sur ces choses là nous amènent à considérer qu'elles ne sont dans notre intérêt que si nous avons une optique de vie hédoniste, matérialiste, et individuelle.

A l'inverse prenons le cas d'un religieux très pratiquant, son optique à lui sera peut-être d'avoir une vie de sacrifice, spirituelle et non basée sur l'individu.
Dès lors ce qui est vrai dans notre paradigme est faux dans le sien. C'est une question morale, et elle ne se démontre pas.

S'il est dans notre intérêt de défendre notre conception pour pouvoir appliquer cette morale qui est la notre, c'est ce qu'on appelle le combat politique.
Mais il faut comprendre le point de vue de l'adversaire politique, prendre du recul sur ce qu'est notre positionnement, qui n'est ni plus vrai, ni forcément meilleur si on prend du recul sur les choses. Il est simplement plus en accord avec nous-même.
De la nait à mon sens la vraie tolérance, on ne partage pas les idées de l'adversaire, mais on comprend qu'elles sont dans une perspective autre, et on peut alors probablement mieux les combattre sans fausse naïveté, et sans mensonge.
Tout à fait.
Il est suggéré je crois, que pour la Gauche l'homme est Bon / innocent a priori et doit donc être libéré alors que pour la Droite, l'Homme est mauvais / dangereux par nature et doit donc être canalisé.
C'est un peu grossier mais interressant.
Ce sont des croyances indémontrables qui prennent leur source dans le vécu.
la carte à jouer

Vous connaissez ce tour?
Pour faire croire à un gus que vous faites apparaitre la carte choisie?
- Dans les cartes y'a les rouges et les noires, lesquelles tu prends?
Gus: les rouges
- Dans les rouges, y'a les cœurs et les carreaux, lesquelles tu prends?
Gus: les carreaux.
- Tu me laisse les coeurs. Dans les cœurs, y'a les têtes et les chiffres, lesquelles tu prends?
Gus: les têtes.
- Tu me laisses les chiffres. Dans les chiffres, y'a le 7, le 8, le 9, le 10, choisis-en deux.
Gus: le 7 de cœur, le 9 de cœur
- Choisis-en une
Gus: le 9
- Tu me laisses le 7 de cœur. Clique sur le lien, c'est lui.

Parfois j'ai l'impression que nous sommes dans un jeu de cartes qui ressemble plutôt aux 1000 bornes mais au lieu de "crevaison", "panne d'essence", les cartes sont "extrême-droite", "scandale sexuel", "religion"...
Citation : "Bon papier Alain (comme d'hab')"

Ah que oui ! Ah que oui aussi sur le phagocytage des symboles ouvriers et révolutionnaires pas les nazis.
Toutechzégaleparayeur, comme on dit, écoutez et regardez Marine.

Là où je lâche un peu le fil, mais c’est presque hors sujet ici, c’est sur le lien vers « ouiqipédiâtre », si justement nommé par Alain Korkos.
Je ne suis pas convaincu que chaque fois que nous sommes perdus dans la compréhension de quelque chose, fut-ce d’un mot, le salut vienne de ouiqipédiâtre, le médecin de nos interrogations. Pensez aux clics et aux compteur à brozouf.
Il y a tant de dictionnaires et/ou d’encyclopédies.
Bon papier Alain (comme d'hab'), mais je pense que vous oubliez peut-être un élément en ce qui concerne le nazisme : pour la couleur rouge, il n'est pas à exclure qu'elle fut également reprise volontairement au mouvement ouvrier à des fins de propagande et de provocation contre les vrais Rouges. De même que furent ainsi reprises les étiquettes "ouvrier" et "socialiste" (alors que les nazis furent toujours des antimarxistes virulents et que leur "socialisme" se réduisait à des promesses de prospérité économique).
Pour compléter mon propos, je vous conseille de lire ce passage de Ouikipédia sur le "Parti ouvrier allemand", l'ancêtre du NSDAP.

(J'ai également le vague souvenir qu'Hitler justifiait l'usage du rouge car c'était "la couleur du peuple"...)
" La question critique surgit : cette ontologie du monde est-elle, somme toute, à la recherche du phénomène du monde, sinon pousse-t-elle au moins à la détermination d'un étant intérieur au monde assez loin pour qu'à son contact sa modalité d'appartenance au monde puisse se voir ?"
Je note avec satisfaction qu'en la présente chronique vous vous êtes cantonné dans le chromatique et l'historique et vous êtes bien gardé de vous risquer dans la moindre analyse sémiologique: en termes, en particulier, de signifiant et de signifié. Vous en aviez été forumièrement félicité pourtant à l'occasion de la précédente chronique par un abonné que vous avez pour ce motif expressément distingué parmi tous vos autres commentateurs jusqu'alors: et en usant d'un terme que Boileau saluant Malherbe n'aurait pas désavoué: "Ah enfin quelqu'un qui comprend ce que je fais !"*. Ce retour pratique à une plus mesurée compréhension ici de vos prestations me semble démontrer que, fort heureusement, chez vous, l'instinct iconophilique et le sérieux documentaire l'emportent de loin sur la présomption "sémiologique".


*Faut-il rappeler son fameux "Enfin Malherbe vint..." ? - Sans doute, car le sens classique de la litote ne fut pas le plus apprécié dans les commentaires de cette précédente chronique: au point de rendre stupéfait par l'inqualifiable grossièreté qui y a sévi de manière répétée. Il y aurait pour vous intérêt - un intérêt d'honneur - à formellement la condamner.
Et je suis reconnaissant à AK de ne pas avoir mis le lien vers la première chanson ayant permis à une même artiste d'atteindre pour la deuxième fois la première place du top 50 ;)
On avait causé sur un de tes vieux forums, du logo du collectif anarcho-écolo-punk-culturel CRASS, qui reprend les symboles de ses ennemis ("la croix chrétienne, la croix gammée et le drapeau de l'Union, combinés avec un Ouroboros à deux têtes pour symboliser l'idée que le pouvoir finira par se détruire"). Ils utilisent aussi du rouge, comme beaucoup d'autres groupes punk d'ailleurs, l'occasion d'écouter quelques notes, avec la Marseillaise en vedette, en regardant quelques images avec Bloody Revolution.
Les révoltés du Moyen-Âge
L’ont arboré sur maints beffrois.
Emblème éclatant du courage,
Toujours il fit pâlir les rois.
Refrain
Le voilà !, Le voilà ! Regardez !
Il flotte et fièrement il bouge,
Ses longs plis au combat préparés,
Osez, osez le défier !
Notre superbe drapeau rouge !
Rouge du sang de l’ouvrier ! (bis)

Il apparut dans le désordre
Parmi les cadavres épars,
Contre nous, le parti de l'Ordre
Le brandissait au Champ de Mars

Puis planté sur les barricades,
Par le peuple de février
Il devint pour les camarades,
Le drapeau du peuple ouvrier.

Quand la deuxième République
Condamna ses fils à la faim,
Il fut de la lutte tragique,
Le drapeau rouge de juin !

Sous la Commune il flotte encore
À la tête des bataillons
Et chaque barricade arbore
Ses longs plis taillés en haillons !
Variante :
Sous la Commune il flotte encore
À la tête des bataillons
L’infâme drapeau tricolore
En fit de glorieux haillons !


Noble étendard du prolétaire,
Des opprimés sois l’éclaireur.
À tous les peuples de la terre
Porte la paix et le bonheur !

Les braves marins de Russie,
Contre le tsarisme en fureur,
Ont fait flotter jusqu’en Asie
Notre drapeau libérateur !

Un jour sa flamme triomphale
Luira sur un monde meilleur,
Déjà l’Internationale
Acclame sa rouge couleur !
Le fils de l’os parle

Je frappe comme un sourd à la porte des morts
Je frappe de la tête qui gicle rouge
On me sort en bagarre on m’emmène
Au commissariat
Rafraîchissement du passage à tabac
Les vaches
Ce n’est pas moi pourtant
Qui ai commencé
À la porte des morts que je voulais forcer
Si je suis défoncé saignant stupide et blême
Et rouge par traînées
C’est que je n’ai jamais voulu que l’on m’emmène
Loin des portes de la mort où je frappais
De la tête et des pieds et de l’âme et du vide
Qui m’appartiennent et qui sont moi
Mourez-moi ou je meurs tuez-moi ou je tue
Et songez bien qu’en cessant d’exister je vous suicide
Je frappe de la tête en sang contre le ciel en creux
Au point de me trouver debout mais à l’envers
Devant les portes de la mort
Devant les portes de la mer
Devant le rire des morts
Devant le rire des mers
Secoué dispersé par le grand rire amer
Épars au-delà de la porte des morts
Disparue
Mais je crie et mon cri me vaut tant de coups sourds
Qu’assommé crâne en feu tombé je beugle et mords
Et dans l’effondrement des sous-sols des racines
Tout au fond des entrailles de la terre et du ventre
Je me dresse à l’envers le sang solidifié
Et les nerfs tricoteurs crispés jusqu’à la transe
Piétinez piétinez ce corps qui se refuse
À vivre au contact des morts
Que vous êtes pourris vivants cerveaux d’ordures
Regardez-moi je monte au-dessous des tombeaux
Jusqu’au sommet central de l’intérieur de tout
Et je ris du grand rire en trou noir de la mort
Au tonnerre du rire de la rage des morts

Roger Gilbert-Lecomte
(18 mai 1907 - 31 décembre 1943)

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