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Le porno, cette inconnue...

A la suite de notre émission D@ns le texte avec Vincent Cespedes, nous avons reçu l'éclairage suivant d'un de nos @sinautes, Benjamin Wolff, étudiant, qui prépare une thèse sur la pornographie.

Derniers commentaires

Et l'art dans tout ça ?
Les modèles ne réalisent-ils pas une véritable performance ?
Un homme peut il plus sincère que lorsqu'il éjacule ?
"C'est codifié" dit Cespedes : "toujours le même rituel". Mais la danse n'est elle pas codifiée ?
La dimension artistique finira bien pas être reconnue et permettra de trier le porno marketing des fantastiques performances artistiques... qui en disent long sur notre société et sa libido, concept qui s'étend bien au delà du sexe...
Entre les "moi je..." et les "ça a déjà été dit avant", ça avance dur sur le sujet... On peut étouffer le débat de chiffres et noyer le poisson dans une apparente complexité, ou encore faire entrer en ligne de compte des lignes idéologiques dans un débat qui a priori échappe à celles-ci, on peut mettre en avant une réalité plurielle - tout en tombant dans les clichés pathétiques genre "vous voyez ce que je veux dire" sur le couple gay "dix ans d'ancienneté" (dit-on ça sur un couple hétéro?) ou "le jeune des banlieues" (qui, en plus d'être forcément jeune en banlieue, a le droit à des guillemets qui signifient sans doute "arabe", "noir", "désoeuvré", " à prendre avec des pincettes" ?) mais quelle réalité n'est pas plurielle? "Chaque cas est différent", entend-on dans les conversations de bistrot ou à la sortie des lycées ou à la réunion du Rotary (pour casser un peu vos clichés et vos a-prioris...). Mais alors, n'étudions pas la société! Ne nous embêtons pas avec des thèses. Sauf si l'objet des sciences sociales est une analyse "en tendance" qui n'échappe pas à la finesse et à la nuance. Finesses et nuances qui sont bien souvent le fruit d'une confrontation de faits, de données, de points de vues, d'approches méthodologiques. Or, vous ne confrontez pas les points de vue dans votre post, vous démontrez clairement que vous parlez de haut, avec un double statut, qui méprise définitivement les petits "essayistes", en l'occurrence, selon tout ce que vous voulez bien mentionner : 1. un homme 2. un doctorant ou un chercheur si vous préférez qui plus est à l'EHESS à Paris.

En tant qu'homme (vous), je pense que la question du biais sexiste pour parler de la pornographie transparaît par endroits dans vos propos - à l'instar de la mention de ces thèses sur l'homme qui aurait également son image dégradée dans la pornographie... Oui mais, tendanciellement, celle de la femme l'est bien plus (c'est un peu comme l'histoire des hommes battus quand on parle des violences faites aux femmes, toujours quelqu'un pour dire "ah! mais les hommes aussi sont battus..." et ainsi faire croire que la société serait symétrique et que le problème se réduirait à un simple phénomène de violence sans aucun lien avec une construction socio-historique de la répartition des rôles sociaux et l'essentialisation desdites constructions). C'est la femme qui définit le "genre" pornographique à partir de son corps effectivement passé au stade d'étiquette, d'objet ou de produit: gros seins, gros cul, mère de famille, teenager, noire, asiatique, éjaculatrice, sodomite, pom-pom girl, que sais-je encore etc. Sans compter qu'une importante part de la production, même si elle n'est pas majoritaire, est explicitement violente envers la femme (ou le gay aussi...): rape movies (films de viol) et films zoophiles existent. Par ailleurs, je me permets de vous rappeler qu'on ne saurait disserter sur le porno sans analyser ses conditions de production: c'est ce que fait par exemple le film documentaire "Shocking truth" en Suède, que vous considérerez comme pornophobe. Celui-ci a réuni plusieurs témoignages de producteurs, d'actrices et d'acteurs porno et tend à démontrer, de façon plutôt convaincante d'ailleurs, que le porno est une industrie qui utilise comme main d'oeuvre les classes les plus fragiles de la société, généralement des personnes ayant un capital économique et culturel de départ très faible, et bien souvent des personnes qui ont été victimes d'abus dans leur enfance. Certes, cette thèse me paraît également un peu simpliste: les actrices du porno seraient le nouveau lumpenproletariat de notre temps (pour répondre au commentaire sur "la misère", je ne vois pas en quoi ce débat serait moins important d'ailleurs car il touche tous les pays et toutes les classes sociales, et en particulier la misère du monde, il suffit de voir comment les producteurs qui faisaient leur "marché" d'actrices dans les années 1990 en Hongrie ou en Tchéquie "délocalisent" leurs chasseurs de fesses au Kazakhstan, en Thaïlande, en Malaysie, etc.). Mais encore une fois, en tendance, il y a des analyses qui collent complètement à la réalité du monde social. Pour ma part, et je me permets de faire appel au témoignage de quelques amis de l'époque où je travaillais dans l'audiovisuel (il y a 10 ans maintenant), et qui ont fait leurs armes de cadreurs, ingés son, monteurs, dans l'industrie porno. L'odeur du sang, de la merde, des sécrétions, de la sueur, les cadences industrielles, les scènes forcées, les tortures, la dope, les anésthésiants, tout cela existe. Quand on parle du porno, on disserte sur le regard du spectateur, pour ou contre le porno... Mais jamais du point de vue des actrices qui sont vues comme des putes, des salopes-qui-aiment-ça (et se présentent généralement comme telles, puisque c'est leur seule gloire et qu'elles finissent parfois par y croire).

Et donc en tant que bon doctorant appliqué et synthétique, en train de défricher un nouveau terrain, avec de nouvelles idées (parce que ce qui n'est pas nouveau n'a aucun intérêt dans le monde de la recherche), vous confrontez pour mieux les dépasser la thèse du monde qui serait pornophile et celle du monde qui serait pornophobe. Bon, on aurait pu dire qu'effectivement le porno est omniprésent dans nos vies et abondamment consommé et référencé mais qu'effectivement, de façon hypocrite, il est attaqué et censuré constamment et relégué aux marges. A un moment donné, nous sommes obligés, comme le font plusieurs intervenants sur ce forum, de dégager encore une fois, une tendance, une réalité dominante. Arrêtons de fantasmer sur un porno qui se renouvelle en ses marges underground, féministes ou d'auteur totalement minoritaire. Arrêtons également de fantasmer sur un porno mettant en danger la famille et l'enfance, des snuff movies qui circuleraient sous le manteau et des atrocités pédophiles en ligne... La réalité, et ses productions pornographiques dominantes, à savoir celle des films porno hollywoodiens, se suffit à elle-même. Oui à 200% pour évacuer au plus loin l'évocation sans rapport et déplacée de la barbarie nazie! Oui également pour évacuer l'évocation, pourtant si proche, de la prostitution. Oui également pour déclarer que la censure et les interdits sont contre-productifs et alimentent la violence. Mais force est de constater qu'en prenant l'objet pornographique et sa production en soi, la violence domine, l'exploitation existe, le sexisme est écrasant.

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Une analyse bien plus profonde que le verbiage superciel de Cespedes sur la pornographie. On espère que ce futur docteur sera invité à un prochain "dans le texte" une fois sa thèse soutenue.
Dans sa position d'analyse universitaire et scientifique, je regrette cependant l'absence de terminologie définissan lat pornographie qui a fait le charme de la récente émission quand nos interlocuteurs se sont balancés des "éjacs faciales" et des "sodomies non préparées" (véritables tortures fascisantes) pour notre plus grand plaisir. Certes, notre futur docteur ne rédige pas l'encyclopédie du porno - certainement plus large (oh oui) et plus fournie (oh oui encore) que l'encyclopédie des films tout court - qu'ignore à mon avis en grande partie notre ami Cespedes.
Euh, y a-t-il une relation (inavouable) entre le point Godwin et le point G ?
J'ai l'impression que la plupart des commentaires ne prennent pas en compte la nature de l'article proposé. Je ne pense pas qu'il s'agissait de faire état de l'avancée ou du contenu de la thèse de B.Wolff ou de proposer une définition exhaustive de la pornographie, ou encore des études qui s'y rapportent. Il me semble que cet article cherchait seulement à resituer les termes du débat, ce qu'il fait de manière claire et concise. Il exhibe des présupposés implicites à l'œuvre dans le discours de Cespedes et résume simplement les thèses sur lesquelles s'appuie tacitement son argumentation. J'ai l'impression que beaucoup de commentaires portent, avec plus ou moins de pertinence, sur la question de la pornographie au sens large, comme concept ou problème, alors que l'article de B. Wolff tendait justement à critiquer un discours généraliste, approximatif, sur la pornographie, comprise comme une réalité univoque, -illustrée notamment par la conception de Cespedes-, pour proposer une approche tournée vers l'étude plurielle des usages du matériel pornographique. Il souligne simplement la prégnance d'un discours théorique normatif qui ne prend pas en compte la réalité des usages/des usagers, et de la diversité de la consommation pornographique, -remettant en cause l'idée d'UNE pornographie dont l'essence pourrait être saisie en faisant l'économie des réalités concrètes, diverses, à l'œuvre dans sa production comme dans sa réception. Le titre même de l'article indique qu'il y a certes déjà un discours florissant sur la pornographie, mais que cette dernière fait rarement l'objet d'une étude sociologique sérieuse, axiologiquement neutre, qui viserait à observer les comportements concrets des usagers face au dispositif pornographique, selon la différence des sexes, des catégories socio-professionnelles, etc, bref, qui étudierait la diversité des réceptions, au lieu de proposer un discours vague, englobant, sans aucune portée sociologique réelle. Quoiqu'il en soit, cet article me paraît tout à fait pertinent et intéressant, si l'on accepte de le lire pour ce qu'il est: une recontextualisation synthétique du cadre dans lequel le discours de Cespedes s'inscrit, montrant les failles et limites d'un tel discours.
Bon alors, finalement, le porno, c'est fasciste ? C'est capitaliste ? C'est libertaire ? C'est réactionnaire ? C'est épanouissant ? C'est dégradant ? C'est excitant ? C'est dégoûtant ? C'est progressiste ? C'est rétrograde ? C'est ludique ? C'est pathétique ?

Au final, cette discussion, c'est pas un peu de la masturbation intellectuelle ?
Je trouve extrêmement problématique qu'une philosophe comme Michela Marzano précise lors de ses passages à la télévision, ou à la radio, qu'elle base ses réflexions sur des méthodes scientifiques comme ... la psychanalyse ?! Je ne pense pas qu'avec ce genre de méthodologie on n'arrive à rien de très sérieux. C'est utiliser une théorie molle pour justifier ses propres a priori.. Une démarche comme celle de Benjamin Wolf qui consiste par commencer à regarder les faits me semble plus prometteuse.
P.B.
Comme disait Madame Marcelle, la barmaid de la cafétéria de l'imprimerie du faubourg : "C'est çui qu'en parle le plusse qu'en fait le moins"... et après avoir servi la tournée de "limé" (vin + limonade) aux typos assoiffés : "Beaucoup d'érotisme et peu d'(h)ardeur". Marrant que personne n'évoque l'invasion du rasage de culs (à la mode bédouine) et la pratique semble-t-il universelle de la sodomie comme dernier argument. Où va-t-on ? Tiens, souvenir de bordel : "La bouche cé fait pour manger, cé pas fait pour niquer"... A ciao!
Bonjour à tous


A la lecture de ce texte, ma première inquiétude intellectuelle touche à la catégorisation du débat. Notre cher @sinaute contributeur souligne un débat fondé sur la légitimation ou délégitimation éthique de la pornographie. Et effectivement, le fond du problème consiste essentiellement à rejeter non pas l'objet pornographique, mais son usage. On considère l'objet comme dévalué par avance en raison de son mode de production : tournage expéditif, post-production quasiment inexistante, une esthétique brute et répétitive, presque laconique. Partant de là, il n'est pas étonnant qu'aucun des deux partis ne discute de la pornographie en tant que technique, ni en tant qu'esthétique, puisqu'il n'y a pas véritablement de point de vue opposé observable dans la pratique actuelle de la pornographie. Il s'agit donc de juger des productions actuelles.

Et si on se penche sur ce mode de jugement, on découvre une catégorisation étrange. Prenons la "pornophobe". On trouve une argumentation assez disparate, d'un point de vue philosophique, et pourtant présenté sous l'égide de la cohérence. La redéfinition du désir par Deleuze y côtoie celle de Freud, alors qu'initialement elle s'y oppose, par exemple. La "ligne de fuite" est un concept deleuzien, mais qui lui servait à répondre profondément à Freud en clamant que le désir n'est pas un manque mais une production. Et ici le désir n'a pas lieu parce qu'il n'y a pas de manque... Contradiction importante. Mais précisément, cette lecture freudienne laisse place, en filigrane, à la potentielle pathologisation de la pornographie. Ce que l'on emploie, pour justifier la position éthique du "le porno c'est mal", c'est purement et simplement le "ça va vous rendre malade". Comme chez Zemmour, on emploie Freud comme une théorie stable aux réponses fixes, évidentes et indéniablement sûres et certaines... Bien entendu, les arguments qui sont branchés à ce désir comme manque qui est absent n'est pas exactement médical, mais moral (l'autre est un outil, nous prenons autrui comme un moyen et non comme une fin, c'est mal). Mais le fondement de cet argument est une définition du fonctionnement humain "normal". On définit un critère de normalisation des individus à partir duquel on peut tracer une ligne de séparation entre ce qui est admissible car normal et ce qui est inadmissible car anormal. Il y a donc un désir normal qui est ligne de fuite et manque (aussi absurde que cette théorie puisse être), et à l'inverse une pornographie anormale parce que inhumaine puisque fondée sur une perversion du désir humain.

Mais plus encore, la codification est posée comme contrecarrant le manque. Habituellement c'est plus le genre d'argument que l'on trouve dans une étude de l'art. Les fameux Maîtres chanteurs de Wagner, où les règles ne font que rendre plus acceptables socialement l'inspiration sauvage et novatrice de l'artiste naturel, c'est-à-dire traversé par une force profonde de la nature qui est sa puissance créatrice. Mais ici, l'objet pornographique étant disqualifié par avance, on lui retire jusqu'à sa position d'objet culturel, on considère que la codification de l'acte sexuel empêche le désir, l'interdit. Mais deux amalgames sont présents dans une telle conception, lesquels découlent de la disqualification par avance de l'objet pornographique. Premièrement, puisque le film n'est pas oeuvre d'art, il faut saisir que l'activité sexuelle pornographique doit raconter une forme de réalité de la sexualité. On considère donc qu'il y a disqualification de l'acte sexuel montré parce que les acteurs et actrices ne sont pas eux-mêmes dans un désir mutuel. s'il n'y a pas de réalité du désir dans l'acte montré, alors la liaison avec le réel est par avance viciée. Mais selon ce mode de pensée, alors un meurtre dans un slasher devrait être réel sans quoi il irait vicier le rapport du slasher avec la réalité. Argument absurde si on considère que la pornographie est oeuvre culturelle (même si elle peut être mal fichue). Puisqu'on admettrait alors qu'il y a différence entre la représentation du plaisir (et pas nécessairement du désir, une étude pourrait être faite permettant de distinguer les phases de désir et les phases de plaisir au sein des oeuvres pornographiques) et le vécu du plaisir. La pornographie n'est pas nécessairement l'aveu d'une pratique, mais sa mise en oeuvre, c'est-à-dire son emploi dans un processus culturel précis. L'usage d'une position ne relève pas nécessairement de son potentiel de jouissance, mais de sa mise en avant de la plastique de l'actrice, de celle de l'acteur, de l'acte de pénétration, etc. Et de ce fait, si on admet que l'usage pornographique n'est pas exclusivement masturbatoire, alors on peut admettre aussi qu'il peut y avoir rupture fondamentale entre la fascination pour l'acte sexuel et la pratique sexuelle elle-même. Deuxièmement, la codification elle-même n'est pas à confondre avec la répétition de cette codification au sein du genre pornographique. La répétition de schème n'indique pas que le schème est le seul au sein de la pornographie, Ce deuxième point correspond à la limitation des deux pensées de la pornographie présentées par notre cher @sinaute à une conception de la pornographie actuelle, dans des réseaux bien déterminés. Le renouvellement du genre est pourtant tout-à-fait envisageable, il est virtuellement présent. Mais volontairement mis de côté. Cohérent propos puisque l'enjeu premier est de disqualifier moralement l'usage de la pornographie. Mais cette absence démontre à quel point cela relève en même temps du refus de saisir ce qu'est la pornographie avant de la juger.

Enfin, il y a l'argument de l'absence d'intimité. Celui-ci attaque la pornographie en prônant à la place une sexualité masquée, personnelle, qui fonctionne comme une possession et un échange exclusif. Une telle attaque de la pornographie peut en fait s'appliquer à d'autres domaines, comme par exemple l'échangisme. L'enjeu n'est pas d'attaquer un objet culturel, mais des pratiques sexuelles, toujours au nom du désir normalisé. Il existerait par conséquent une sexualité mauvaise dans son immanence même, en tant qu'elle est la perversion d'un désir premier par rapport à un acte sexuel toujours second. Il faut envisager que la pratique sexuelle est nécessairement quelque chose qui n'a pas d'existence en propre, qui n'a pas de droit véritable d'être s'il n'est pas relié à cette immanence du désir. Laquelle est manque, privation... Frustration, dirait Deleuze. il s'agit d'une pensée qui considère que le désir est la justification première à toute nos actions et que celui-ci fonctionne sur une économie de la frustration.



Mais, en face, a-t-on une vision plus libre intellectuellement, moins fondée sur des préjugés posés avant même l'étude de la pornographie? Eh bien elle est envisagée comme objet, effectivement, mais toujours pas culturel. C'est au droit de la circulation des informations (et non des idées ou des oeuvres, il faut bien le noter), au nom de la circulation donc des supports qu'on envisage l'objet pornographique. Il s'agit d'un film, et rien d'autre. Il n'y a donc pas de caractérisation de l'objet. Il ne s'agit pas ici de savoir s'il a raison ou tort de donner droit à une circulation libre de la pornographie, je souhaite surtout pointer du doigt qu'il refuse purement et simplement, par cet argument, de saisir ce qu'est dans sa constitution même, un film pornographique. Et précisément, lorsqu'on en vient au contenu, il s'agit toujours de se fonder sur l'objet actuel de la pornographie, et de le qualifier de mauvais pour des raisons similaires : instrumentalisation, corruption de la représentation des individus sexués, etc.

Le deuxième mouvement est donc curieux, puisqu'après avoir contribué, non pas à une réévaluation du support, mais au renversement des victimes du support, donc une autre forme de dévaluation, il propose enfin l'étude de la pornographie pour ce qu'elle est elle-même. Et qu'est-ce qui en ressort? Toujours une vision moraliste, mais non pas cette fois-ci fondée sur une théorie rigidifiée de l'homme, mais son exact opposé : un relativisme des points de vue et des théories. Nous n'avons donc toujours pas reproblématisé la pornographie, il s'agit toujours de la saisir en tant qu'objet dévalué dont il ne s'agit que de discuter les victimes exactes de sa dévaluation. Je dois malgré tout admettre qu'une petite nouveauté émerge, qui consiste à envisager l'usage de la pornographie comme vengeance sociale. Mais on n'entre pas dans l'usage même, on ne saisit rien d'effectif, si ce n'est des complaintes, des souffrances, des maux, des difficultés. Il est curieux que dès qu'il s'agit de parler de pornographie, la première question qui nous vienne soit immédiatement ce champ de souffrance.


J'en viens donc à mon propos : la pornographie n'est pas envisagée comme objet technique. Comme production culturelle dans son sens actif. L'histoire de la pornographie cinématographique professionnelle (qui commence en 68 en Suède) n'est pas envisagée. On ne cherche ni à saisir les différentes potentialités de la forme pornographique dans le cinéma, ni ses différents usages technico-esthétiques. On préfère revenir systématiquement aux catégories vieillissantes de l'évocation opposée à la représentation. Il ne s'agit ni d'enchanter ni de réenchanter le sexe. Le fait même d'envisager les choses ainsi suppose la dévaluation première du sexe comme réalité à laquelle il faudrait attacher des parures. On ne saisit pas que la pornographie part d'une réévaluation du sexe comme quelque chose, non pas qui se montre, mais plutôt comme quelque chose qui se décide en tant que pratique. La révolution sexuelle n'a jamais eu lieu sur le plan social. Mais une revendication d'une sexualité qui s'explore, s'opère sans cesse et sans honte, dans une multiplication des lieux, des pratiques, des partenaires, des expériences, celle-ci a bel et bien existé au travers de la pornographie.

Cette revendication laisse des traces aujourd'hui, derrière des pratiques qu'on dévalue en elles-mêmes. La pornographie, c'est une industrie, et cette industrie est critiquée au même titre que d'autres quant aux conditions de ceux qui y travaillent. La pornographie est une iconographie qui peut faire peur, fasciner ou exciter. Mais la pornographie est une exploration visuelle du sexe lui-même, dans sa matérialité. Et cette dimension n'est pas étudiée pour elle-même, débarrassée des préjugés traditionnels de la médecine (comme dans la première critique) et des conditions sociales (comme dans la deuxième critique). La pornographie n'est pas une information qui doit circuler - argument purement économique qui ne problématise pas la pornographie mais le fonctionnement médiatique - la pornographie est une histoire, des techniques, des esthétiques, une économie et des idées qui, rattachées à la question de l'image, donnent lieu à des questionnements esthétiques constants, bien qu'actuellement limités par son industrie.

Depuis les années 80, on ne met plus en rapport Sade et la pornographie. On ne discute plus de l'histoire littéraire de la pornographie, de son histoire picturale et pourquoi pas plastique en général. Une nouvelle vague de moralisme l'a engloutie et entend continuer de le faire. Mais les intellectuels devraient au moins faire la preuve qu'il y a là un champ de recherche qui dépasse de très loin ce qu'en font les discours actuels. (et pour le coup, ce que j'écris correspond à une idée de morale : celle de l'étude. A bon entendeur salut ^^)
Sincèrement, votre le post de Benjamin est intéressant, surtout par les infos provenant d'une étude qui nous fait rentrer dans l'intime des Français.

Mais en le lisant, on a l'impression que l'on n'a plus besoin de visionner l'émission.

Heureusement, depuis l'épisode de la chronique "chez nous" ou Daniel nous expose que son émission est invisionable pour causes de cris et hurlements d'Élisabeth, et ou finalement après l'avoir vu on se dit que plusieurs argumentaires méritaient d'être vu, pis parce que depuis que l'émission est téléchargeable et que j'ai trouve le temps dans un avion de la visionner et d'y être d'un coup d'un seul addict (au point de me mettre a lire du Despentes avec "Les jolies choses"), je vais quand même la regarder.

Sinon, Ben, ne vous laissez pas troubler par les donneurs de leçons zut, dont je fais parti) qui vous enjoindront a vous taire sous prétexte que vous vous posez en donneur de leçon. Mais vous avez oublie de nous donner un de vos avis. Vous trouvez ca comment, vous le porno?
Les choses qui fachent :

Chapitre 1 : On parle, mais on n'agit pas

Où est la contradiction ? Vu les chiffres, l'homme mate plus souvent de porno que la femme, ce qui veut bien dire en passant qu'il regarde sa petite vidéo tranquille tout seul qu'avec sa tendre épouse, s'il en a une !

Et puis, que les gars qui ont beaucoup de partenaires (là, je crois qu'on s'écarte de la vision du couple, en passant) achètent plus de porno, ne veut pas dire péremptoirement que "l'activité sexuelle compensatoire ou de remplacement vient s’ajouter en plus à la sexualité relationnelle". Cela veut juste dire que ceux qui ont beaucoup de partenaires sont des obsédés du sexe, qui le consomme sous toutes ses formes. La belle affaire !

Le jour ou vous verrez bras-dessus bras-dessous des couples venir faire leur shopping au sex-shop, surtout, appelez-moi !
Bref, le porno est surtout fait pour une activité masturbatoire. Il n'y a pas de contradiction avec Cespedes.

Chapitre 2 : L'autre, réduit à son sexe

Là non plus, je ne vois pas de contradiction. Juste un exposé des différentes écoles de pensée.

Par contre, l'évocation de Godwin comme justification me gave un peu beaucoup, cela revient à dire quelque part que la pensée fascisante n'existe plus. Comme disait l'autre, pour être sûr que le racisme perdure, on a créé SOS-racisme.

Bref, je cite : "les deux penseurs concluent in fine : « la pornographie, c’est la barbarie et le fascisme »". Alors "in fine", cela veut dire qu'ils ont fait tout un long laïus construit avant pour expliquer en quoi c'était de la barbarie. On est loin du trollage.

Chapitre 3 : Contre la tyrannie de la pornophobie

Autre citation : "Vincent Cespedes soutient également que « la femme est soumise »"

Ben oui, c'est globalement vrai ! C'est de l'économie, je rappelle qu'une femme dans un porno est payée trois plus qu'un mec. C'est bien la preuve qu'il faut graisser un peu plus la patte aux femmes pour qu'elles jouent dans un porno que l'homme. Si elle était à meilleure enseigne que l'homme, permettez-moi de douter que cet écart de rémunération soit justifiable.

Chapitre 4 :Cespedes pioche à droite et à gauche

Il me semble que si l'idée de départ de Cespedes pour cette polémique est issu de son expérience/réseau social, TOUS les chapitres sont grandement documentés et référencés (dixit Judith) et qu'il est fait référence à des données chiffrées sérieuses (rapport des femmes à la technologie, industrie du sexe : les ventes n°1 de DVD sont du porno, etc.). Après, libre à chacun d'apprécier ou non son interprétation.

CONCLUSIONS

- "Cespedes ne fait que recycler de vieilles thèses universitaires en les dotant d’une portée médiatique", Cespedes n'a donc pas développé de pseudo-théories fumeuses. Ce n'est donc pas l'imposteur dont le précédent forum nous a rabattu les oreilles notamment sous prétexte qu'il n'aime pas Zemmour, Despente, Ferry et Badiou.

- L'auteur de cet article, Benjamin Wolff, n'est ni philosophe, ni sociologue, ni statisticien, ni écrivain pour pouvoir diffamer de cette manière le travail de Cespedes. J'espère que ce dernier aura un droit de réponse s'il le juge nécessaire. Je trouve un peu gonflé qu'ASI propose à ce niveau de diffusion, ce qui n'est somme toute qu'un avis d'un asinaute parmi d'autre et qui aurait dû par conséquent rejoindre le forum idoine de @dans le texte.

- une dernière remarque, concentrez-vous plutôt sur votre thèse du porno, montrer que vous pouvez faire mieux que du Bogdanov !
Je n'ai pas lu "Penser la pornographie" de Ruwen Ogien mais j'ai lu d'autres bouquins de lui, et je suis très étonné d'apprendre que sa thèse est "d'inspiration kantienne". Car Ogien est utilitariste (conséquentialiste), pas du tout kantien. Dans l'éthique aujourd'hui, par exemple, il se moque joyeusement de Kant.
Est-ce un raccourci de langage malheureux, un contre-sens, ou une étonnante virevolte de R.O. ?
On distingue deux grandes tendances : d’un coté les positions de la gauche morale (dans laquelle se range Cespedes) et de la droite conservatrice, lesquelles mettent l’accent sur la critique de la marchandisation des corps, la dégradation de l’image de la femme et la protection des mineurs ; de l’autre coté la vision libérale-libertaire (dans laquelle se range Judith Bernard), voyant dans la pornographie une « école du désir ».
cette phrase indique visiblement que monsieur l expert n a pas lu le livre de Cespedes ou alors trop vite ou avec des lunettes deformantes
Inutile d aller plus loin devant pareil mauvaise foi
Vraiment très intéressant! Merci pour cette participation et quand la thèse sera terminée, je serais ravie de la lire!

Bien à vous!
Minibule
S’il pouvait y avoir ce type de contribution à chaque article ou émission, ce serait parfait.
vous nous emmerdez sérieusement avec ce genre de trucs à la con.
Cet article me semble occulter une partie de la réflexion de Michela Marzano. Je ne crois pas qu'elle définisse dans son livre une série de règles ou qu'elle cherche à substituer aux codes du porno d'autres codes. Dans le fond j'ai l'impression qu'elle aborde une question très vaste:qu'est-ce que l'humain? dans quelle mesure l'homme peut-il perdre son humanité? il me semble que ce n'est pas un hasard si cette question est posée par une femme car nous sommes confrontées à toute instant à une forme de chosification (dans la publicité par exemple) mais ce n'est qu'un point de départ. Cette problématique est élargie dans le livre aux deux sexes. Les réponses que les philosophes tentent d'apporter à ces questions sont toujours à discuter mais cela n'empêche pas le travail de la philosophie, la tentative de définir ce qui fait l'homme. Au final, la volonté de contrôle d'une société, qui conduit au repli sur soi (Visages de la peur de Michela Marzano), s'étend peut-être aussi à une certaine vision de la sexualité, extrèmement cadrée, dans laquelle nous dominons notre corps et le corps des autres. Or Michela Marzano rappelle les limites de cette toute-puissance, qui se trouvent dans notre propre altérité, ce que nous ne connaissons pas de nous. En effet, notre corps constitue notre personne, il n'est pas détaché de nous, et en ce sens il est porteur d'altérité. Cet article est intéressant mais en résumant ainsi la pensée de philosophes, il donne l'impression d'une pensée systématique et met de côté les questions profondes que fait émerger Marzano par son analyse de la pornographie.

Cet article me semble occulter une partie de la réflexion de Michela Marzano. Je ne crois pas qu'elle définisse dans son livre une série de règles ou qu'elle cherche à substituer aux codes du porno d'autres codes. Dans le fond j'ai l'impression qu'elle aborde une question très vaste:qu'est-ce que l'humain? dans quelle mesure l'homme peut-il perdre son humanité? il me semble que ce n'est pas un hasard si cette question est posée par une femme car nous sommes confrontées à toute instant à une forme de chosification (dans la publicité par exemple) mais ce n'est qu'un point de départ. Cette problématique est élargie dans le livre aux deux sexes. Les réponses que les philosophes tentent d'apporter à ces questions sont toujours à discuter mais cela n'empêche pas le travail de la philosophie, la tentative de définir ce qui fait l'homme. Au final, la volonté de contrôle d'une société, qui conduit au repli sur soi (Visages de la peur de Michela Marzano), s'étend peut-être aussi à une certaine vision de la sexualité, extrèmement cadrée, dans laquelle nous dominons notre corps et le corps des autres. Or Michela Marzano rappelle les limites de cette toute-puissance, qui se trouvent dans notre propre altérité, ce que nous ne connaissons pas de nous. En effet, notre corps constitue notre personne, il n'est pas détaché de nous, et en ce sens il est porteur d'altérité. Cet article est intéressant mais en résumant ainsi la pensée de philosophes, il donne l'impression d'une pensée systématique et met de côté les questions profondes que fait émerger Marzano par son analyse de la pornographie.



Il me semble que la "profondeur" de la question dont tu parles corresponde surtout au brouillard dans lequel elle demeure depuis plusieurs siècles. On ne peut pas légitimer une pensée simplement parce qu'elle demande un fois de plus ce qu'est l'être humain. Cela dit je te rejoins sur un point : le problème ne devrait pas être exactement les thèses qu'elle emploie, mais plutôt la problématisation qu'elle propose. Problématisation qui n'est pas présente comme telle dans le compte rendu ici proposé. Mais problématisation qui transparaît dans les thèses et leur agencement.

Le grand point faible de cette pensée, c'est sa dimension normalisatrice. Parce qu'elle n'exprime pas ce qu'est l'homme exactement, elle ne reprend qu'une seule théorie qui lui correspond. Théorie qui n'est pas tellement avérée, que ce soit dans sa fonctionnalité où sa portée explicative.


La profondeur dont tu parles, elle se situe finalement dans la moralisation première qu'elle propose de l'être humain avant même d'analyser quelque problème que ce soit. Ce point précis pose problème. On dira profondeur car la dimension morale rattache à un mode de vie, voire à une spiritualité. Mais on peut dire également masque pour une pensée de simple application d'auteurs, car précisément cette moralisation première lui permet de se dispenser de la seule question qui aurait valu l'intervention d'un philosophe : la reproblématisation de la sexualité.

S'il s'agit simplement de nous rappeler que l'image que Freud et ses collègues proposent de l'être humain ne correspond pas à la manière que ce philosophe trouve de présenter la pornographie, alors je crois que l'on peut dire que son intervention est inutile.


L'instrumentalisation du corps, par exemple, il est très étrange que l'on cherche à tout pris à la comprendre sous l'angle d'une représentation de soi-même. On conçoit, depuis maintenant 60 ans, les icônes publicitaires comme des sources de dérèglement du rapport à soi-même. Ce qui a mené systématiquement, et ce en particulier dans le freudo-marxisme, à une surévaluation de l'impact publicitaire. Comme si, dans les domaines commerciaux et politiques, la seule préoccupation dans la prise en charge des individus devait être la transformation de sa propre représentation. Si l'on pourrait admettre que cela puisse jouer un rôle (dont l'ampleur demeure encore et toujours à évaluer), on ne peut pas pour autant y voir la seule question à élucider. Bien au contraire, les problèmes de pouvoir et de contrôle du comportement des individus a déjà été reposé selon des angles multiples, dont celui désormais célèbre de Foucault dans Surveiller et punir.

Ce qui est effarant, ce n'est pas tant que cette dame puisse être contre la pornographie (quoi de neuf à ce sujet?), mais bien plutôt que l'on puisse concevoir une telle pensée comme étant actuelle, alors qu'elle se trouve de bout en bout historiquement positionnée dans des courants successifs. Qu'a-t-on trouvé à penser de plus sur la question? Tel est le problème à mes yeux.
Mais on ne peut jamais se lasser de questionner l'être humain. Se poser la question "une fois de plus" est nécessaire à chaque époque. Sinon pour répondre à quelques points:
encore une fois Marzano ne normalise à aucun moment de son livre la sexualité.Par exemple, si elle décrit des pratiques sexuelles, il s'agit seulement de les aborder dans le milieu très particulier du porno (réalité sociale concrète) et dans les films (mise en scène, images données à voir). Jamais elle n'élabore de règles concernant les pratiques sexuelles de chacun (type cette position est autorisée et pas celle là). Elle se situe plutôt sur le plan de l'intériorité, de la subjectivité.Il me semble que le véritable objet du débat peut se situer sur ce plan car il implique des concepts qui sont toujours à redéfinir.
Ensuite une pensée n'est jamais totalement actuelle (franchement, une philosophe qui ne tiendrait pas compte de l'histoire de la philosophie et prétendrait élaborer un pensée venue de nulle part, qui ça intéresse?).
Petite remarque pour finir: il ne s'agit pas d'être contre la porno: qu'est-ce que ça peut bien signifier:vouloir interdire le porno? l'auteur est philosophe pas députée!Il s'agit de déconstruire les représentations qui imprègnent notre vie intime pour la régenter.

Mais on ne peut jamais se lasser de questionner l'être humain. Se poser la question "une fois de plus" est nécessaire à chaque époque.


Oui, on peut reposer le problème de l'être humain, c'est-à-dire trouver un angle qui permette de le requestionner. Mais là il s'agit de se fonder sur une théorie dont on ne sait pas si elle est vraie ou fausse et de rester cramponnée à elle. Et en ce cas, on peut se lasser d'entendre toujours les mêmes discours, de se satisfaire des mêmes réponses.



encore une fois Marzano ne normalise à aucun moment de son livre la sexualité.Par exemple, si elle décrit des pratiques sexuelles, il s'agit seulement de les aborder dans le milieu très particulier du porno (réalité sociale concrète) et dans les films (mise en scène, images données à voir). Jamais elle n'élabore de règles concernant les pratiques sexuelles de chacun (type cette position est autorisée et pas celle là). Elle se situe plutôt sur le plan de l'intériorité, de la subjectivité.Il me semble que le véritable objet du débat peut se situer sur ce plan car il implique des concepts qui sont toujours à redéfinir.


La normalisation qui a lieu tient dans la définition du sujet. En fondant toute action sur le sujet, on en déduit ce que l'on peut se permettre de faire et ce qui est mauvais pour nous. La normalisation tient dans la définition même du désir et dans l'idée de fonder la sexualité sur cette notion. Typique de la psychanalyse : toujours tout fonder sur la libido.



Ensuite une pensée n'est jamais totalement actuelle (franchement, une philosophe qui ne tiendrait pas compte de l'histoire de la philosophie et prétendrait élaborer un pensée venue de nulle part, qui ça intéresse?).


Ce que tu dis est absurde. L'actualité d'une pensée n'est pas caractérisée sur le fait de discuter ou non avec les théories antérieures, mais sur le fait de se limiter à une seule théorie dont les résultats ne sont pas satisfaisants. En ce sens, toute pensée philosophique correspond à une actualité de la pensée. Même Nietzsche qui parlera de l'inactualité nécessaire de sa pensée, est en fait très attentif à ce dont discutent ses contemporains, comme on le note par exemple dans Naissance de la Tragédie qui est totalement traversé de débats esthétiques, historiques et philologiques et dont Nietzsche propose une compréhension inédite.

Par contre, on imagine mal aujourd'hui un livre expliquant que de toute manière Descartes a eu raison pour tout sans rien en dire de plus. Imagine-t-on une critique de la pornographie fondée sur le dualisme cartésien qui ne ferait qu'appliquer ses schèmes de pensée?


Petite remarque pour finir: il ne s'agit pas d'être contre la porno: qu'est-ce que ça peut bien signifier:vouloir interdire le porno? l'auteur est philosophe pas députée!Il s'agit de déconstruire les représentations qui imprègnent notre vie intime pour la régenter.


Mais ce lien entre le langage visuel de la pornographie est l'intimité de l'individu n'est pas démontré. Elle l'envisage par postulat et non à la suite d'une étude.
Mal placé (et vu le sujet, il vaut mieux pratiquer directement l'ablation)
C'est sympa ce sujet : au moins, ça demande de prendre position...
Le point de vue de Cespedes est certes réducteur, mais il semble que celui-ci l'est également. Le féminisme queer pro-sexe a donné naissance à une nouvelle forme de pornographie (Dirty Diaries, Too much pussy…), qui ne se place pas sur le territoire de "l'école du désir", mais sur la légitimation de la quête du plaisir et sa réappropriation, longtemps interdite aux femmes. C'est une pornographie de l'intime (l'indécence suprême), esthétique, souvent outrancière et festive, qui se trouve loin des poncifs et de la chosification dénoncée ici et là.

En matière de pornographie, il y a toujours une question de pouvoir en toile de fond, avec certaines tendances constatées sur les régimes politiques eux mêmes. La question est forcément indécente puisque la mettre dans le débat public, c'est exhiber sa propre relation intime avec elle, à mots plus ou moins couverts. On l'a constaté une fois de plus ici avec Judith Bernard et Vincent Cespedes, ce qui rend le débat objectif et rigoureux impossible. En cela, la pornographie démontre toujours son grand pouvoir subversif.
Prétendre être "de gauche" et reprendre les antiennes de la "droite" prétendument moralisatrice (alors que, avec la législation anti-drogues que ces "gens de bien" de droite ont fait adopter, les mafias du monde entier sont financées), leurs préjugés, au sens cartésien du terme, c'est vertigineux. Concernant la "pornographie", il ne faut pas oublier l'origine religieuse du mot, de la considération (l'Inquisition), et que selon ses promoteurs, l'amour libre était déjà de la "pornographie". Désormais, industrie d'un type de représentations et monde de ces représentations, que s'agit-il de montrer ? Hommes, femmes, nus, nues, ayant des relations dites "sexuelles", en fait les plus totales qui soient. Bien sur, il y a des formes délirantes de ces relations au point qu'il n'y a pas "relation", mais esclavagisme et violence, limite criminelle, mais il s'agit là de marges, de minorités, qui ne peuvent servir à caractériser la majorité. Bien sur, une part non négligeable de ces films sont comiques, tant la PERFORMANCE domine, comme si "faire l'amour" relevait d'un concours international (la plus longue, la plus résistante, etc). Mais comme un commentateur de l'article concernant Cespedes l'a remarquablement dit et démontré, dans ce monde, les femmes ne sont pas "objet" (même si dans une part non négligeable des mâles qui se pensent dominants entendent l'exprimer dans un rapport explicitement dominateur dans ses signes de), mais sujets, il faut donc toute l'ignorance de Cespedes sur le sujet (volontaire, histoire de laisser penser que, lui, il n'est pas pornophile et voyeur !) pour aller s'emboutir dans une telle impasse. Car pour que la dite représentation puisse être réellement pornographique (représentation ET jugement), il faudrait que la relation humaine le soit elle même, intrinsèquement, et c'est précisément ce que dit "la religion". Crypto-catho ?
J'ajoute que, dans cet ouvrage, il utilise un néologisme, "l'encouplement", que j'ai, à ma connaissance, crée (même si, dans le domaine, on ne peut pas le certifier absolument), et que V. Cespedes a probablement lu dans des échanges lus sur Facebook, quand nous étions encore en contact, ce qui n'est plus le cas. Car, bien loin de vivre selon son principe d'une "intelligence collective", on mesure qu'il mène une démarche hautement personnelle, et rien de plus, hélas, comme la plupart des intellectuels de cette génération.
'achement intéressant ce texte, Benjamin Wolff aurait pu être l'invité de Judith :-))
"A l’opposé, le philosophe Ruwen Ogien dénonce, non sans humour, la tyrannie de la pornophobie. Iconoclaste, il revendique un droit à la pornographie, fondé sur une éthique minimale, d’inspiration kantienne, laquelle ne s’intéresse pas à ce qui est bien mais à ce qui est juste. L’affirmation d’un droit à la pornographie, même pour les jeunes, résulte du principe que dans des sociétés démocratiques avancées l’information doit être libre, quelle qu’elle soit, car la multiplicité des sources permet le correctif nécessaire. Mais une telle conception n’est-elle pas soutenue par un idéal tout aussi normatif que les principes défendus par Michela Marzano, étant donné qu’en pratique, la rationalité et la capacité critique ne sont pas données à tout le monde d’emblée ? "

Lecteur habitué de la prose de Ruwen Ogien, comme je l'ai déjà dis sur le forum initial, je la trouve ici passablement mal retransmise et donc caricaturée, tout cela à des fins de faire rentrer le tout dans une forme purement scolaire, thèse Marzano, antithèse Ogien, synthèse... les deux étant renvoyé dos-à-dos.

Ogien mérite bien mieux que cela et Marzano... pas autant.

Comme l'écrit Ogien dans l'ouvrage cité :"A mon avis, la pornographie ne menace aucun des principes de ce que j'appelle l'"éthique minimale". J'estime, par conséquent, qu'il n'y a aucune raison morale, au sens de l'éthique minimale, de désapprouver la pornographie." (p.10)

Pour comprendre, l'éthique minimale, il vaut mieux se référer à cet autre ouvrage :

"l'éthique minimale. Son idée centrale, c'est que ce que nous faisons de nous-mêmes n'a pas d'importance morale, tant que nous ne causons pas de tort direct à autrui. C'est une conception qui repose sur trois principes seulement :
1. Indifférence morale du rapport à soi-même.
2. Non-nuisance à autrui.
3. Égale considération de chacun.


Ruwen Ogien in L'éthique aujourd'hui, Maximalistes et minimalistes (folio essais, 2007, p.196.)

yG
Mouais... enfin de toute façon tant que le porno continuera à ressembler
à une séance d'aérobic façon télé-achat (au mieux) ou à une séance de
torture (au pire), continuera à être codifié au millimètre près par des règles
pitoyables et dictatoriales sorties d'on ne sait où, et continuera enfin à n'être
que le symbole le plus ignoble de l'agonie du néocapitalisme sur l'autel de
sa décadence, alors Cespedes, aussi intellectuellement charognard qu'il
puisse être selon vous, continuera à avoir raison malgré tout.

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