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Carglass, et la souffrance au travail

L'entendez-vous, donlong donlong, le tocsin que l'on sonne depuis quelques semaines à propos de la "souffrance au travail" ?

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Le bonheur est parfois dans l'entreprise

Je voudrais revenir dans ce fil de la belle chronique de Judith Bernard sur un reportage passé dans le JT de 20h de France 2 du Dimanche 8 janvier 2012, reportage de cinq minutes de A. Guery – T. Breton – G. Liaboeuf.

À 22'38 Laurent Delahousse lance le sujet: « L'histoire d'un homme qui a voulu que dans sa PME ses salariés soient heureux. Un rêve, une utopie, pour quels résultats? »

D'entrée, la voix off nous situe en quoi consiste le "bonheur" des salariés de cette entreprise: « c'est qu'ici, on est en horaires libres, pas de pointeuse, chacun arrive au bureau à l'heure qui lui convient », illustré par un salarié qui salue en arrivant le pool "administratif" de ses collègues déjà en plein travail. Car, « l'horaire, ce n'est pas ce qui nous importe » dit l'un d'eux.
« Ce qui importe, c'est que le travail soit réalisé », ponctue la voix off:

La première partie du reportage nous présente les différents secteurs de l'entreprise impliqués dans cette organisation innovante .
Voix off: « Les ingénieurs, dessinateurs, comptables, bref tous les administratifs sont logés à la même enseigne: liberté des horaires, liberté de s'organiser. »
Si l'on en croit la « responsable contrôle » en extase: « c'est quand même génial, du coup il n'y a plus aucune pression liée à ses horaires. Je pense que c'est une vraie relation de confiance qui s'installe. »
« Et dans les ateliers, continue la voix off, la liberté c'est l'autonomie dans les tâches. Pas de travail à la chaîne, pas de chef pour lui dire ce qu'il y a à faire, ni comment le faire. Comme tous les autres, il a sa marge de manœuvre, libre de modifier une pièce comme bon lui semble. »
Cela veut-il dire que si, pour les « administratifs », la liberté se mesure à la « liberté des horaires et à liberté de s'organiser », pour les « techniciens » seule la seconde leur est accessible? On ne peut que l'induire.

Quoiqu'il en soit, pour la voix off, cette liberté semble incommensurable: « c'est pas vertigineux d'avoir cette liberté là, finalement? »
Ce à quoi l'heureux opérateur technicien répond catégoriquement: « Non, au contraire, vraiment c'est la "liberté" entre guillemet. C'est quelque chose d'agréable quand on est au travail d'avoir cette liberté là. Devant sa machine on peut s'exprimer en faisant notre petite modif. » N'est-il pas lui-même l'incarnation du constat de Jean-Robert Viallet cité par Judith Bernard: « Tout être humain a envie de s'épanouir au travail. Tout être humain a envie de faire du bon boulot »?
Bien que si ces interviews provenaient d'une enquête sur les conditions de travail en Corée du Nord ou en Chine, nul doute que maints bons esprits "démocratiques" de par chez nous n'hésiteraient pas une seconde à dénoncer comme Judith la « soumission librement consentie » et que « la position servile et absurde où nous met l'absence de choix, ça s'appelle l'aliénation : mais à ce stade de la hiérarchie, et face à une caméra surtout, ça n'se dit pas - et ça n'se pense pas, monsieur. » Mais bon, on n'est pas en Corée du Nord, nous sommes en France de souche.

Ici, dit la voix off, c'est « comme si chacun était son propre patron. » C'est ce qu'explique le patron justement, qui n'avait qu'un rêve en tête, que ses salariés soient heureux: « je ne voulais pas de contraintes pour moi. Donc, je n'en voulais pas pour les autres. C'est une logique très simpliste. » Certes, mais qui caractérise un bonheur "dans l'effort": « C'est un système qui demande beaucoup plus de, entre parenthèses, "mouiller la chemise", parce que du moment où vous n'avez plus de galons sur les épaules, c'est le bonhomme qui est jugé, c'est plus le poste, le titre. Ça demande plus d'efforts que de faire une note de service ou d'envoyer un mel. » Curieux cet usage de la métaphore militaire (sauf si on se souvient que l'entreprise a été longtemps calquée sur l'organisation militaire). Le bonheur, c'est d'en chier plus, comme dirait mon colonel.
Notons aussi, au passage, l'"élément de langage" qui dans la bouche de l'ouvrier met la « liberté » « entre guillemets », et dans la bouche du patron « mouiller la chemise » « entre parenthèses »...

Mais voici le troisième secteur, non humain, qui nous est présenté comme « la clé de voute de ce système », et se trouve « dans l'ordinateur accessible à tous où il y a tous les comptes de l'entreprise. » Il ne s'appelle pas encore Hal 9000 mais pas loin, car à en croire l'opérateur/technicien devant la bête: « on ne peut se cacher. » Mais ici, c'est beaucoup plus subtil car l'œil est à l'intérieur de l'individu qui scrute les « chiffres » vomis par le computer: « C'est les chiffres qui sortent, c'est notre travail, parce qu'on peut devant notre machine agir sur cette marge, en travaillant bien, en travaillant vite, tout en respectant la qualité que nous demandent nos clients.»* Et pas sans raisons puisque « 40% du salaire est indexé sur les résultats de la société. » On comprend que « chacun trouve ici la motivation ». Ben oui, « pourquoi "veut"-on travailler, sinon d'abord pour gagner de l'argent, parce que sans argent on ne peut ni se nourrir ni se loger ni se vêtir? » se sent obligée de nous rappeler judicieusement Judith Bernard.

Grâce à une habile transition qui nous montre la « fille du patron » à laquelle celui-ci « a passé le flambeau et qui développe (le rêve de son père) dans des entreprises qu'elle rachète » pour nous rappeler que ce n'est pas uniquement pour les beaux yeux de la princesse prolétaire que le patronat innove, nous entrons dans la deuxième partie du reportage qui met en scène un petit groupe de patrons de PME en visite d'étude dans l'entreprise modèle. « Un modèle social qui ne fait plus sourire les patrons de PME de la région, en tout cas les plus jeunes, même si parfois il les intrigue. »

Qu'est-ce qui intrigue si fort ces gestionnaires de forces de travail?
« L'autorégulation, par exemple, répond la voix off: que faire quand dans une équipe il y a un salarié peu travailleur? »
Notre heureux patron, lui, s'est délesté de cette charge ingrate: « finalement, ce sont les salariés eux-mêmes qui disent à leur petit camarade: ça va bien, ton histoire, faudrait peut-être bosser un peu plus, parce qu'on va être les premiers pénalisés. » Et il précise sans fards: « en ce qui nous concerne on n'a jamais mis personne dehors. C'est les petits camarades qui des fois poussaient en dehors. »
Notons le « on » (nous) patronal opposé aux « petits camarades » staliniens.
Un patron en visite est toutefois dubitatif, ayant du mal à rêver: « c'est vraiment l'entreprise idéale dont tout le monde rêve. Seulement, on se rend compte qu'effectivement, au quotidien, il faut des fois être un peu dur pour que le boulot soit fait, il faut un petit peu cadencer le travail, et on se dit qu'on est loin de mettre quelque chose en place comme ça chez nous. Je me dis: comment fait-il et est-ce possible partout. Si aujourd'hui Techné est un cas unique, c'est que c'est pas si simple que ça et que beaucoup de gens ont essayé et pas vraiment réussi. »
La voix off en conclut, dépitée: « pas si simple d'innover dans le management. Entre le rêve d'une entreprise idéale et la réalité, il y a parfois une marge. » Une marge des profits sans doute.

Pourtant, un critère semble-t-il décisif confirme le prix de ce bonheur d'entreprise: « en tout cas, cette entreprise là à un résultat qui en fait rêver plus d'un: moins de 2% d'absentéisme quand la moyenne nationale est de 8%. Et l'absentéisme, c'est le baromètre du bien-être au travail. »
2%/8%? Y a pas photo. Voire. D'où vient ce chiffre?
Une rapide recherche nous renvoie pourtant ceci: « Le phénomène de l’absentéisme connaît ces dernières années des fluctuations importantes, globalement marquées à la hausse. L’Alma Consulting Group révèle cette année que le taux national 2010 s’élève à 4,85%, soit 17, 8 jours d’absence en moyenne par salarié. C’est une augmentation de près d’un point par rapport à l’année dernière. » . Chiffre repris ici, bien que dans une tendance curieusement inversée! Et ici aussi, inversé à nouveau.
À chacun de se faire son opinion.

Mais l'absentéisme, qui comprend toutefois la maladie, et l'on sait que pour le patronat et certains politiciens un salarié malade est un tire-au-flan, est-il le seul « baromètre » pertinent?

Si l'on en croit ce tableau tiré de cette enquête, si, pour les directions des ressources humaines, l'augmentation de l'absentéisme vient bien en tête des « signaux révélateurs des troubles psychologiques au travail », pour les salariés, c'est loin d'être le seul: l'augmentation des conflits avec la hiérarchie et les difficultés relationnelles entre collègues sont aussi « révélatrices ».
C'est peut-être ce dernier indicateur qu'un des patrons en visite avait en tête lorsqu'à la tirade du patron à l'innovation heureuse sur l'autorégulation des salariés, il rétorque de manière à peine audible: « ça crée surtout des conflits ».

Voilà donc l'entreprise du bonheur au travail à venir telle qu'elle nous apparaît à la fin du reportage: un patron faisant fructifier son entreprise pour le bonheur de sa petite famille, cachant l'exploitation derrière le masque froid de la machine à calculer, déchargé du contrôle (à la fois physique et administratif) de ses salariés, puisque ces derniers, « libérés » des contraintes horaires et « libres » d'organiser leur travail, s'autorégulent à la fois individuellement par la motivation liée à la « participation » au chiffre d'affaire de l'entreprise (travaillant bien et vite, en « mouillant la chemise », tout en respectant la qualité) et collectivement par la surveillance des uns par les autres**. Et cela en ayant le "devoir" d'être heureux puisque libres « comme un patron », « dans une entreprise qui parle de "bonheur", de "vision" et "d'idéal" pour ses salariés » (Judith bernard). Bonjour l'ambiance hors caméra!

Ne doutant pas de la capacité des @sinautes à se faire leur propre opinion en regardant le reportage, si j'ai raconté ce film de cette manière, c'est qu'une curieuse impression m'impose une réflexion.
Il me semble que ce film est une "commande" (non-dite) participant d'une campagne de promotion d'une fédération quelconque du patronat de PME-PMI (je n'ai pas les moyens de vérifier cette assertion). Mais curieusement, entre les lignes de l'exercice obligé (l'enjouement outrancier des salariés interviewés exprimant leur bonheur au travail), transparaît justement ce que j'y vois: « les manigances de la rhétorique entrepreneuriale, pointant la recherche exclusive du profit là où l'on prétend ne s'inquiéter que de la "satisfaction du client", relevant les mécanismes de la compétition individuelle là où l'on vend "l'esprit d'équipe" et l'aliénation générale des employés», comme Judith Bernard le voit de manière forcément plus explicite dans le film de Jean-Robert Viallet.

Ainsi, d'après ma lecture, des journalistes "feraient passer" dans un "devoir" d'allégeance, subliminalement, un message critique de cette commande. Si l'on doit alors saluer ce travail de taupe (non, ce n'est pas Bernard Maris) dans la triste banalité de la connivence et du larbinat, par contre, qu'aujourd'hui en France, des salariés en soient, "comme" dans les plus purs régimes totalitaires, à coder leurs œuvres (ah! Ce « vertigineux »!), fait aussi froid dans le dos que des salariés jouant (avec sincérité en plus) à l'employé heureux.

Bien sûr, l'autre option, plus triviale, serait que ce film est l'expression des luttes d'influence à l'intérieur du patronat, entre la tendance "progressiste" (innovante capitalistiquement) et la tendance "conservatrice" (frileuse capistalitiquement), ceci expliquant les réflexions dubitatives. (Je laisse aux "Michéens" le soin de choisir leur camp :-)).

La première option peut être le produit de ma croyance indélébile en la résistance des hommes (de certains) à l'oppression et à l'indignité, la seconde être le reflet de la dure réalité. Mais je préfère placer, comme Judith Bernard, mon rêve de bonheur dans l'émancipation plutôt que dans le « travail ».
L'opinion des @sinautes sérieux me serait bienvenue.



* Sur ce thème, lire: « L'implication,une nouvelle base de l'intervention sociale », Pascal Nicolas-Le Strat, L'Harmattan, 1996.

** Le "contrôle qualité" comme (autre) innovation dans l'organisation du travail provoquant la "guerre" entre ouvrières est explicite dans le documentaire de Gilles Balbastre sur Moulinex dont j'ai cité par ailleurs de larges extraits:
« On nous disait qu’on travaillerait en flux tiré, en fin de compte c'est du flux poussé; parce que c’était toujours: le plateau, dépêches-toi de le prendre que je remette le suivant, alors qu’en réalité on aurait dû attendre que la personne prenne le sien et toujours comme ça. Mais ça se passait pas comme ça dans la réalité. (...) En fait c’était plus dur que de travailler sur le convoyeur. Vous êtes fatiguée, vous êtes moins rapide une heure, parce qu’il y a un moment où vous vous relâchez, vous allez bien bourrer pendant deux, trois heures et après il y a un petit relâchement, et là, l’autre à coté, elle vous faisait la tête, ou alors elle vous dit: alors? Qu’est-ce que tu fais? Avance! C'était la guerre entre filles. »
Donc votre "travail" d'écrivaine, ce n'est pas du travail ?
Ha ,
Je retrouve Judith, admirablement traités, la réponse à la question de Judith, c ’est que avant il existait un syndicalisme entre le patron et les employés avec un vrai dialogue.
Là comme le fossé c’est creusé actionnaires contre employés, le but est de tirer le plus possible le fric pour les actionnaires, ils en ont plus rien à foutre de la santé des personnes qu’ils emploient.

Cela est vrai dans ce cas, mais aussi dans d ’autres cas et cela en vers les personnes payant un service. Les assurances type Carrefour, ou la Maaf, certes les prix sont attractifs, mais il ne fait pas bon avoir deux bris de glace en deux ans, car le bonus 50 à vie c ’est du pipeau, en effet si cela vous arrive vous êtes radiés de ces assurances, et il vous propose alors une assurance 3 fois plus chère par des sociétés holding, Vous ne pouvez plus d ’ailleurs allez voir une autre assurance puisque vous êtes radiés.

Quel est le point commun entre ces deux faits, c ’est le profits en vers les actionnaires!
Depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, l'homme... dit moderne, est placé dans un système de production aveugle et inconscient ; dans ce système, il peut donc produire et agir sur le monde sans avoir à penser aux conséquences, encouragé par le fait que personne ne lui demandera des comptes ; et la débâcle financière du mois d’octobre 2008 ne fait que confirmer ce phénomène propre à l'aire moderne ; débâcle qui a bien failli mettre à genoux le système bancaire et financier de l'Occident (Europe et les deux Amériques) mais qui, pour sûr, plongera des millions d'individus dans la précarité, le chômage, la pauvreté et la misère.

Qu'à cela ne tienne : aucune responsabilité ne sera établie et par voie de conséquence, aucune culpabilité non plus.


Un pas de plus vers un "Ni responsable ni coupable" généralisé, cette impunité qui, nul doute, en affligera plus d'un (souvenons-nous de Eichmann qui n'avait fait que servir mais qui a tout de même fini au bout d'une corde) et qui n'est que la suite toute logique d'un "responsable mais non coupable" déjà trop familier à nos oreilles depuis une bonne vingtaine d‘années.



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"Ecoutez-moi Monsieur !
- Mais... je vous écoute ! Je fais que ça !
- Aujourd'hui, il n’est plus question de rentabilité... car le besoin légitime d’un retour sur investissement finit là où commence la recherche effrénée du profit maximal ; et cette recherche-là, c’est la recherche du seuil de rupture des modes de production et de fonctionnement musculaires et psychiques de l’espèce humaine salariée. Le fameux point-mort, c’est ça ! Le moteur de cette production humaine, c'est bien le meurtre ! C’est la recherche perpétuelle du concurrent à trucider, pour occuper seul la place et imposer sa loi. Et si d’aventure on ne peut pas le tuer ce concurrent, eh bien, on s'entend avec lui sur le dos de tous les autres ou bien, on le neutralise, on l’absorbe, on l’avale et puis, dans le même temps, on expulse tous les éléments non assimilables ; éléments devenus du jour au lendemain des matières fécales dont il faut au plus vite se débarrasser avant de déféquer en douce, à l’abri des regards indiscrets. Et là, triomphants et enfin seuls, ils maintiennent les mêmes cadences infernales pour, cette fois-ci, non pas tuer la concurrence mais engranger des bénéfices colossaux. L'entreprise, c'est une machine de guerre incestueuse, scatologique et anthropophage. Une fois la concurrence éliminée et la source tarie, on jette tout le monde : les clients, les salariés improductifs et usés, et les fournisseurs récalcitrants ; ces fournisseurs qui ne veulent plus se plier aux conditions de leurs donneurs d’ordres. Ils ne supportent personne. Ils ne tolèrent que le besoin qu’il faut créer, le monopole pour le satisfaire et le profit pour ne pas perdre son temps et son argent. Dans ce système, tout le monde est le client et le fournisseur de tout le monde et seuls les donneurs d'ordres sont aux commandes : plus intolérants, plus misanthropes qu‘eux, vous ne trouverez pas. Monsieur, saviez-vous que le commerce, c'est la haine ?
- Non Monsieur mais... maintenant que vous m'en parlez, je vous crois.
- On fait des affaires le couteau entre les dents car, le moteur de cette production-là, c’est bien le meurtre. Ils sont prêts à tout pour survivre même si ce système les condamne tous à se sacrifier quand le moment sera venu pour eux de se retirer parce qu'un plus performant qu'eux les aura balayés, eux, leurs salariés, leurs fournisseurs et leurs clients. Leurs successeurs pourront toujours se réjouir, et ceux à qui ils distribuent des miettes, avec eux, insoucieux qu'ils sont, les pauvres bougres, du sort qui les attend. Bientôt, il n'aura plus de nom ce système. On ne sait déjà plus comment le nommer. Il n'a déjà plus de visage ! Lorsque le sacrifice de tous contre tous sera partagé par tous, en kamikazes d'une défaite universelle, ce système sera sans morale et sans honneur, car sous le couvert de l'anonymat, tout lui sera permis : absolument tout ! Nul doute à son sujet : le moteur de ce système, c'est bien le meurtre ; le meutre du meurtrier et de ses victimes et puis encore... le meurtre de ce même assassin qui se donne la mort en tuant. Alors, aujourd'hui, qu'est-ce qui nous reste à célébrer ? Je vous le demande.
- Eh bien, je...
- Sûrement pas la vie ! La fin, nous sommes ! La fin et les moyens... et rien d'autre. Plus rien devant nous, plus rien derrière. Plus rien ne nous précède. Plus rien ne nous dépasse. Pourquoi croyez-vous que les femmes n'enfantent plus là où ce système triomphe sans conteste ? Il vient de là, le déficit démographique : quelque part au fond de nous-mêmes, nous savons tous que nous sommes tous... déjà morts."

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Littérature et écriture Serge ULESKI
Alors que je suis en train de préparer l'émission de mardi, consacrée au Club des incorrigibles optimistes, de Jean-Michel Guenassia, je retombe sur ce paragraphe, que j'avais souligné pendant ma lecture : c'est Sacha qui parle - et c'est tellement raccord avec le thème ici traité :

"Durant des années, j'ai travaillé comme un fou, sans compter mon temps, sans prendre de repos. Pour rien. Ce temps m'avait été donné et je l'ai perdu. Aujourd'hui je lis, je dors, j'écoute des concerts à la radio, je flâne dans Paris, je bavarde avec les gens, je vais au cinéma, je fais la sieste, je nourris les chats du quartier et quand je n'ai plus un rond, je me faufile entre les mailles du filet ou je vais bosser. Le minimum vital. Je n'ai jamais été aussi heureux de ma vie. Le scandale, ce n'est pas l'exploitation, c'est notre connerie. Ces contraintes qu'on s'impose pour avoir le superflu et l'inutile. Le pire, c'est les pigeons qui triment pour des prunes. Le problème, ce n'est pas les patrons, c'est le fric qui nous rend esclaves. Le jour de la grande bifurcation, celui qui a eu raison, ce n'est pas le couillon qui est descendu de l'arbre pour devenir sapiens, c'est le singe qui a continué à cueillir les fruits en se grattant le ventre. Les hommes n'ont rien compris à l'Evolution. Celui qui travaille est le roi des cons." (p. 498)
Chronique interressante.
Je suis retraité et je travaille... pour le frigo ? Non, pour payer toutes les taxes qui encombrent notre vie quotidienne. J'ai calculé que plus de 30% de mon petit revenu y passe.

Allons plus loin.
Le travail est souffrance mais il y avait des barrières dréssées par les salariés. Aujourdh'hui, elles sont tombées prtiquement sans réel combat.
Notre drame est là.
Du temps des 40h, j'étais moins fatigué que du temps des 35h car travail de nuit, dimanche, fêtes, heures supplémentaires, pauses, coupures étaient très réglementées. J'ai connu la sécurité sociale qui remboursait à 90%. Le chômage bien indemnisé.
Certes il y avait quand même "aliènation" (en attendant mieux).

SI l'on n'avait pas laissé BALLADUR nous retirer 23% du montant de nos retraites, SI l'on avait empêché ROCARD de mettre en oeuvre la CSG et la RDS 12, 5%... SI la gauche n'avait pas cogéré ces mesures (toute la gauche) ? Aujourd'hui, je ne travaillerais pas pour une entreprise. Je travaillerais pour des associations, pour aider des jeunes à se former, pour plein d'autres choses.

Les barrières sont tombés et des millions de gens souffrent.
Nulle part je n'entends quelqu'un dire à minima : remettons en place les barriéres.
Ils participent tous ainsi de ce génocide.
Bien. Un dernier message avant de partir.

Je prends le pari que Judith ne se serait pas fait attaquer comme elle l’a été si son chevalier (des)servant n’avait pas passé autant de temps à parler à sa place.

Je propose donc à la foule un boycott de yG. Pas demander son exclusion, non, mais ne pas réagir à ses posts, et surtout ne pas réagir à ses critiques qui ne visent, in fine, qu’à néantiser les gens comme Djac vient de le démontrer plus haut. Le laisser soliloquer.

Observez au passage que Cassandre s’est fait tacler par le webmestre pour UN message injurieux, alors qu’on ne dit rien à yG

(Mike est-il un être humain ou un robot ?)
le travail, c'est quand même dingue qu'il faille le rappeler, c'est tout bêtement une nécessité économique déterminée par un système bien précis - le capitalisme.

Euh, non, c'est une nécessité tout court, même en autogestion, même en ermite, il faut un minimu "travailler" pour trouver sa nourriture, son toit et ses vêtements. Pour moi, elle n'est pas déterminée par le capitalisme.
Donc, ce point du raisonnement, là, je ne le comprends pas.

Sinon, ok, nécessité économique, mais toute la partie fierté, intérêt pour le boulot, et bien, c'est quand même [s]lier[/s] lié à l'envie/au besoin de ne pas "s'ennuyer" pendant ce temps contraint.

(je ne sais pas pourquoi, mais j'ai carrément un problème de participe passé depuis lundi)
Ah ! Le choix, quel rêve.

Même que ça porte un nom : L'Eden (avec un Ouest et surtout un Est). Endroit où les fruits tombent tout épluchés dans la bouche (et non pas sur la tête, parce que là c'est la Newtonie) et où les montons s'embrochent tout seuls après avoir allumé le feu, mis le couvert et taillé des frites dans les pommes de terre qu'ils avaient aimablement plantées, arrosées puis ramassées et épluchées au préalable.

La bulle, le travail qui se fait tout seul grâce à des esclaves même pas revendicatifs…

Hélas cette éclate ne dura, paraît-il, pas longtemps. Dieu qui est très méchant, prude et moralisateur a foutu nos ancêtres à la lourde à coups de pompe dans les miches en leur disant à peu de chose près (c'est une tradition orale) :

- Cassez-vous de là, bouffeurs de pommes défendues (car détenant le plus dangereux de tout : la connaissance), fornicateurs impudiques… Dorénavant, puisque vous ne savez pas vous tenir, pour votre punition vous devrez gratter pour bouffer. Bien fait pour vous !

Fortes paroles qui laissèrent Adam et même Eve atterrés, on s'en doute… Mais ils se relevèrent assez vite parce qu'ils commençaient à avoir un creux. C'était le début du travail qui avait un seul avantage : celui d'ouvrir l'appétit.

UNE PAGE DE PUB à acheter d'urgence au kiosque du coin car il y a deux pages d'interview de Michel Onfray sur le "capitalisme libertaire" - j'y reviendrais - et un peu sur Sarkosy, "Petit garçon pas fini utilisant le pouvoir pour régle ses problèmes personnels et conduisant une grosse voiture sans permis..."

Pour tout dire ce qui me surprend c'est l'idée que le travail serait la conséquence du capitalisme. Or pas du tout, il est la pénible conséquence du fait que les moutons ne s'embrochent pas tout seuls (ou plus). Ni plus ni moins.

Du fait aussi que nous avons faim, ce qui nous conduit à nous mettre au taf pour trouver quelque chose à bouffer… Puis avec le temps, qui conduit toujours à la dégénérescence, nous avons voulu nous saper (c'est vrai qu'il fait froid l'hiver en Europe) et même pour les plus aliénés avoir des Ipod. Et là il faut bosser !

Parce qu'une observation même sommaire conduit à constater que la principale alternative au capitalisme est le communisme – ne parlons pas des systèmes archaïques ou embryonnaires qui ont marqué d'obscurs temps anciens heureusement révolus.

Hélas le communiste s'est avéré (et continue ici et là) comme une catastrophe assez largement pire que le capitalisme tant sur le plan de la liberté que dans celui de l'économie. À tel point que, comme chacun a pu le constater (sauf ceux qui habitent sur Mars), le bastion principal du communisme a été contraint d'y renoncer pour cause de faillite (et non par revirement idéologique comme le croient les naïfs) La Chine, quant à elle, a renoncé à continuer d'appliquer les doctrines tout en maintenant la limitation drastique de la liberté d'expression.

Or donc le problème n'est pas tant dans le capitalisme, qui n'est pas totalement mauvais en soi, et surtout généralement moins liberticide et affamant que le communisme, le problème disais-je est la façon de pratiquer le capitalisme et sa dérive qui atteint aujourd'hui le point de rupture.

Vous voulez savoir pourquoi ? Eh bien ! Je vais vous le dire (J'ai beaucoup appris de Sarko en dialectique manipulatoire et boisée) : d'abord parce que quand le patron d'une grande entreprise gagnait 10 fois le salaire moyen de ses employés c'était acceptable, mais maintenant qu'il [s]gagne[/s] se goinfre 400 fois ou 1.000 fois plus que ses esclaves ça ne l'est plus – du tout (et encore moins quand c'est un salarié qui ne risque pas son propre capital dans l'affaire.)

Ensuite parce que la conséquence de ce pillage est un pouvoir d'achat en berne pour les autres (selon la théorie arithmétique de la non-ubiquité du pognon. Donc une destruction du pacte social pour cause d'injustice criante.

Enfin parce que la précarité organisée et l'épée de Damoclès du chômage créent des attitudes de défense, de stress et d'agressivité envers les autres.

À cet égard il serait utile de tenter de comprendre comment il est possible de maintenir éternellement un chômage honteusement élevé (le seuil incompressible et naturel est de 1,5% environ et nous sommes à plus de 20%) alors même qu'en dehors des conséquences humaines monstrueuses c'est une totale et ruineuse aberration économique…

Enfin pour conclure très provisoirement j'évoquerais le mauvais exemple donné par les rentiers, les politiciens invisibles en séance et certaines variétés de fonctionnaires (là je vous entends pigner, mais je pense au planqués de la machine à café au fond d'improbables et Courtelinesques administrations). Ce n'est pas bien de montrer qu'on peut vivre sans rien foutre, et puis ça engendre des jalousies… Par ailleurs, Judith le dit très bien, on peut aussi aimer son métier, et réaliser que c'est un lien social indispensable. La moindre période de chômage permet de le mesurer exactement.

***
Excellent travail Judith ! Dommage, j'ai déjà voté aujourd'hui, ce sera pour demain. ;)
Le travail est toujours une aliénation.
Mmm.
Franchement découper nos interventions, même celles qui relèvent, de manière tout à fait pacifique, qu'un post ou plusieurs ont disparu, est indigne d'@si. Indigne de l'idée que je m'en fais en tous cas.

Bon pour finir sur une note plus constructive, ce serait effectivement une bonne idée de motiver la suppression de commentaires dont le contenu n'est ni diffamatoire ni n'engagerait la responsabilité du site vis-àvis de qui que ce soit.
Question d'honnêteté.
Belle chronique.
Un ouvrier abimé ?
" Carg-lass ré-pare - Car-glass rem-place "

Ravi de savoir aussi qu'il vient toujours de nouveaux @sinautes, navré de voir le forum amputé pour officiellement ne pas effrayer ces derniers.
Je plussoie la méthode que suggère Mebahel plus haut. Et même, pourquoi ne pas "replier" le commentaire incriminé (selon je suppose la méthode Dailymotion contenu rejeté pour mauvaises conditions d'utilisation), avec un onglet spécial pour qu'un abonné (et non un lecteur de passage) puisse le déplier afin de savoir ah que pourquoi ça ? Du moins, tant que ceux-ci ne sont pas des injures et autres insultes.

Merci pour votre point de vue sur le sujet, Judith, et de vous être attaqué à un tel sujet. Le genre de sujet où je ne sais jamais par quel bout commencer quand j'en parle, même alors quand j'étais délégué du personnel, naguère :-)
Tout est question de limites. Travailler avec une bonne dose d'autonomie peut-être une expérience difficile mais enrichissante surtout si ce même travail sert des idées enthousiasmantes.
Le problème comme dans les grands groupes est que la hièrarchie est très pressante, que finalement les choses fabriquées dans 50% des cas sont inutiles. Cela à tendance à démotiver les salariés. Pour des raisons de rentabilité le travail est répétitif pour être efficace... C'est contre la nature humaine qui puise sa force dans la découverte et l'expérimentation.
Socialement le monde de l'entreprise est assez peu ouvert, l'inovation est assez peu développée, et peu de place est accordée à la créativitée. C'est tout l'hémisphère droit de notre cerveau qui est inihibé en privilégiant la pure rationalitée. On a beaucoup de progrès à réaliser sur ce point.
Message 3/5max du 29/10/09.

Depuis Eichmann qui symbolise à lui seul notre refus possible et nécessaire face à ce type de comportement, nous savons qu'aucun système totalitaire, quel qu'il soit, quelque soit sa taille, sa finalité, ne peut exister sans notre collaboration.

Dans le documentaire en question, la dénonciation des défauts des autres, sous couvert d'amélioration collective, va de la délation pure et simple et autres manipulations (dans le supermarché notamment) aux réunions de brainstorming (chez Carglass) et autres cabinets d'analyses, extracteur d'information, visant à transformer l'exception en norme et l'échelle haute des ventes, de la production d'aujourd'hui en échelle basse de demain.

Sous couvert que nous avons tous un frigo à remplir, nous serions prêt aux plus extrêmes bassesses, la guerre, c'est la guerre, tous contre tous...

Cette guerre, nous ne pouvons la gagner, le dieu frigo est trop puissant, trop séduisant, nous ne pouvons que limiter notre participation à celle-ci et résister au quotidien, lutter parallèlement, vivre parallèlement, faire sécession en interne (l'externe n'existant plus, nous n'avons pas trop le choix).

Et que ceux qui alimentent cette machine ne viennent pas se frotter trop prêt de nous, ils ont beau nous traiter comme des bœufs, à certains d'entre nous, ils restent au moins les cornes.

yG
Si l'inéluctabilté de l'existence du Travail offre peu de prise à la critique, c'est peut-être aussi qu'il nous manque encore les concepts qui permettront cette critique et le vocabulaire qui les accompagne.
Le mot travail en lui-même me semble un joyaux fourre-tout. Dans ce mot, où est donc la nuance entre le travail forcé, subi, alimentaire de la caissière d'hypermarché, métier dont l'exercice répétitif et fastidieux n'est que rarement facteur d'épanouissement, et le métier-passion de l'écrivain par exemple?
Ne devrions-nous pas avant tout nous forger les mots qui recouvrent ces différentes situations et ainsi pouvoir mieux jongler avec ces concepts?
De nouveaux mots à forger pour exprimer de nouveaux maux, un sacré travail! N'auriez-vous pas des pistes à nous proposer, ma chère Judith?
Ceci dit, je doute que le monde nous laisse en paix... sans effort de notre part, il tombe en ruines et poussières. Le travail du réel par l'homme pour en faire un monde n'est pas une option facultative. Alors que faire ? Surement y mettre les formes, mais dans le fond, n'ayons pas la prétention d'avoir le choix entre une vie de rentier et celui d'un travailleur. Tout rentier l'est par aliénation de ses contemporains qui le protège de la fin du monde par leur travail.
"on vous demande d'aimer votre entreprise" dit l'un des salariés de carglass
On aime sa famile ,souvent
ses amis (le plus) souvent
la glace au caramel ou a la vanille ou....
Le foie gras
Les chansons de Léo ferre
Les tableaux de Monet
Les romans de Patrick Modiano
Mais son entreprise
Pourquoi pas Sarkozy
Il y a des limites
excellent article, je partage tout à fait votre point de vue sur l'injonction à l'épanouissement dans le travail, qui est d'ailleurs suivie de près par l'injonction au bonheur dans le couple, l'injonction de partir en vacances, etc... qui conduit plus d'un à se sentir sur la touche.

seule remarque : Judith, parlez vous réellement du travail ?

J'ai plutot le sentiment que l'aliénation que vous abordez relève plutôt de "l'entreprise", avec laquelle l'individu se doit aujourd'hui de faire corps, et qui impose d'ailleurs des "valeurs", des règles de conduites (chartes, engagements, etc..), sans bien entendu parler tout bêtement des actions à accomplir (process, étapes à respecter, paroles à utiliser, codes vestimentaires...) ....

Enfin dernière remarque, pour me faire l'avocat du diable, est-ce vraiment nouveau de considerer le travail sous l'angle de la souffrance, quand la notion même de travail fait référence à la punition judéo-chrétienne : le travail de l'enfantement qui vient punir l'humanité...

Merci en tout cas pour toutes vors reflexions sur ce thème et sur d'autres,
En 2005, Arrêt sur Image avait rapidement traité d'un reportage d'envoyé spécial intitulé "Noël à Manchester : France". Manchester est un quartier de Charleville-Mézières, dans les Ardennes. En fait, asi avait rapporté les réactions des habitants du quartier de Manchester, scandalisés par l'image que les journalistes donnaient d'eux-même. C'était le misérabilisme, la caricature, caricature d'aliénation : des enfants plantés devant la télé du matin au soir. Des "gaulois" (le film est un peu raciste) résignés à leur conditions, passif mais solidaires. Tous plus cons les uns que les autres.
A l'époque j'avais vu le reportage, vu la chronique d'asi et deux ans plus tard, j'ai emménagé à Charleville, pas loin de Manchester. La première chose dont on m'a parlé en arrivant sur le quartier, c'est du reportage.
Ce reportage a donné un coup terrible au quartier. Un photographe vient de terminer d'essayer de le remettre debout, par un travail sur l'image, justement. Quatre ans de travail qu'il a élargi a d'autres quartiers.

Alan Rotshild (l'auteur du fameux reportage) n'est pas Christophe Nick. Mais j'imagine sans mal quelle trahison les gens qui figurent dans le reportage peuvent ressentir.

Ce que n'avait pas vu envoyé spécial, c'est d'abord la combativité des gens. Correction. Ce que le reportage a caché délibérément, préférant montrer des assistés, c'est la combativité des gens. C'est le fait qu'ils ont un regard lucide sur ce qui se passe et qu'ils se bagarrent. Y compris en s'organisant politiquement. Et oui, c'est caché, volontairement. Par exemple, la moitié des gens qu'on voit dans le film de Rotschild sont des miens camarades, parfois même des élus du quartier.
Si les salariés de car glass ne se retrouvent pas dans le reportage de Christophe Nick, c'est peut-être parce que Christophe Nick n'a pas vu un truc.
Argh, déjà plus en ligne? Essayez ?
Ha.... c'est pas la première fois que je lis que des trucs disparaissent sur les forums, suggestion: dites le quand vous supprimez des posts, genre laissez leur cadre en supprimant le contenu et mettant une phrase explicative à la place, non?Ca serait plus clair et alimenterait moins la suspicion.

Sinon, le pbme de la souffrance au travail ca fait un moment que je m'y penche, mais je voulais préciser un point:
la souffrance au travail des profs/zinstits existe aussi, elle n'est pas moins grave (un-e enseignant-e qui souffre est face à un certain nombre d'élèves qui ont besoin d'avoir un adulte bien dans ses bottes en face, non?), et pas moins importante en proportion.
Mais bon ce sont des rienfouteurs tout le monde sait ça.

Je venais d'acquérir les 2 derniers tomes de Dejours, ça tombe pile (haha).

Pour celles et ceux qui n'ont pas vu le doc de fr3: il est visible sur le site de télérama (mais pas longtemps je crois, se dépêcher donc)
Bonjour,

Dans l'après-midi, nous avons supprimé quelques commentaires qui relevaient davantage du règlement de comptes que du débat public. Encore une fois, les messages privés sont fait pour ça. Et ce d'autant plus que les nouveaux @sinautes qui arrivent sur les forums peuvent rapidement être largués...

Très bonne soirée.

P.
Plein de choses a dire, j'avais commence a ecrire, pour essayer de ne pas faire trop de messages, pour essayer de ne pas faire trop long non plus.
Ca avait plutot bien demarre au sujet des commentaires lies a la chronique.

Et, la, en fait, plus trop envie de partager ces idees ici maintenant.
Moi, je veux bien être nourrie, logée, habillée sans travailler, je ne dis pas non.
Le problème, c'est que je dépendrai de ceux qui me logent, nourrissent, habillent.
Et puis ça m'ennuie franchement que certains se crèvent à la tâche pour que je vive pépère.

Tiens ! Mais des gens qui vivent plaisamment pendant que d’autres se fatiguent pour eux ! Le documentaire en parle largement :
les actionnaires !
Et Frédéric Lordon, dans le documentaire, souligne à plusieurs reprises les raisons de ces nouvelles souffrances
au travail : l’entreprise financiarisée (vs l’entreprise capitaliste "traditionnelle").

Contrairement à vous, Judith, je crois qu'il faut s'arrêter sur ce constat. Trouver des solutions pour réduire le rapport de force actionnaire / travailleur.

C'est entre les mains de nous tous, du domaine du possible.
Et "La mise à mort du travail" y participe. Un grand merci à Jean-Robert Viallet pour la qualité de son travail (éh !!!).
Merci pour ce très joli texte, qui vous a demandé beaucoup de "travail" je pense. C'est toujours un plaisir de vous lire depuis les Etats-Unis.
Message 1/5max du 29/10/09.

Puisque l'inertie collective alliée au puissance du capital nous empêchera à jamais de changer de système, je n'y crois pas une seule seconde, ce qui est en notre pouvoir et ne nécessite l'autorisation de personne, c'est de changer notre regard sur le travail et ceux qui en sont bannis.

De même que nous n'avons pas à reproduire l'opprobre que certains souhaiteraient nous voir porter sur certaines activités humaines, au nom d'un moralisme tout aussi simpliste que rétrograde, nous n'avons à reproduire sur autrui et/ou sur nous le seul regard que peut porter sur nos vies les capitalistes.

Il n'y a aucune honte à avoir, à être ou avoir été chômeur.

Car, contrairement à ce qu'avancent les libéraux, ce n'est pas au mérite que nous sommes récompensés, c'est juste en fonction de la place que nous occupons dans la pyramide libérale.

Un maçon, un balayeur ou un PDG d'une multinationale ne méritent ni les uns, ni les autres leur rémunération, ce n'est pas en fonction de leur investissement, de leur compétence qu'elle est fixée, mais juste en fonction de l'offre et de la demande, soit une relation aveugle à quelque chose d'aussi qualitatif que le mérite.

Ne soyons pas dupe.

yG
Ne faut-il pas distinguer le travail de l'emploi? Ce n'est pas qu'une distinction sémantique: dans le premier cas, il s'agit d'un processus demandant un effort dans le but de produire un bien, un service, un savoir, etc. Pour ma part, j'adore travailler à quelque chose, m'y consacrer, aussi dure que soit la tâche à accomplir. La notion d' "emploi" ramène l'être humain à sa faculté d'employabilité, notion consubstantielle à celle de capitalisme. Souvent d'ailleurs, il ne s'agit pas tant de travailler au sens de progresser, que de souffrir, de s'aliéner, voire de régresser (combien de mes amis, sitôt entrés dans le monde du travail, ne parlent plus que de leurs quotidiens terre-à-terre, tout vidés qu'ils sont de leurs "emplois"?). Les emplois proposés dans la société d'aujourd'hui représentent-ils vraiment une valeur "travail"? Ont-il un sens par rapport aux êtres humains qu'ils engagent? ....
C'est pourquoi je rejoins tout à fait Judith sur son analyse de l'aliénation.
J'ai beaucoup aimé les 2 volets de "Mise à mort du travail" . Je trouve que la lumière est faites sur tout les agissements des acteurs d'une
entreprise quels qu'ils soient . Sur les 2 émissions il a été question de Carglass mais aussi de Fenwick et d'Intermarché . Comme le dit la voix
off à plusieurs reprises dans les entreprises nous sommes tous coupables par nos petites lachetés , nos démissions , nos trahisons d'un
système de plus en plus déshumanisé . Par nos renoncements nous acceptons finalement la décadence de notre société qui déshumanise
à tous de bras en licenciant plus de 100 personnes chez Fenwick (je crois que le site est en région centre) en ayant au préalable inciter ces
mêmes salariés à optimiser leur outil de travail par des boîtes à idées , en fait une incitation à la collaboration du système capitaliste qui va
foutre des vies de salariés et des familles à la rue . Chez Fenwick le document montre très bien la collaboration au système des commerciaux
les plus performants afin de pousser encore plus les commerciaux (moins bons) vers des objectifs de plus en plus innatteignables et tout
ça sous les sourires carnassiers des RH toujours en quête de la solution la plus extrémiste pour satisfaire des actionnaires de plus en plus
assoiffés de sang (des employés) et sutout de pognons . L'exemple d'Intermarché est terrifiant en effet des employés ont été virez pour
syndicalisation ou bien pour avoir été trouvé avec 2 paquets de ChewinGum dans les poches .
C'est émouvant de voir ses dames pleurant car oui judith , ses personnes aiment leur travail , c'est comme une deuxième famille et pour la
plupart c'est le seul lien social vers l'extérieur . La scéne du tribunal des prud'hommes est édifiantes avec une patrone que vous avez envie
de crucifier avec son avocat tout aussi arrogant . Comment ne pas réagir devant ses techniciens de Carglass pressurisez à mort dans les
garages acceptant des cadences toujours plus élevés . 1 chiffre un technicien change un pare brise en 45 mn et on montrait qu'on les
poussait à 2 pares brises par heure . Le Taylorisme dans toute sa splendeur ou plutôt le Toyotisme , issu de la firme Toyota en pointe pour
presser le citron au maximum (y compris dans l'usine de Valenciennes) .
Comme je disais nous sommes tous coupables par nos renoncemments , notre laisser faire , notre côté lèche cul du patron pour entuber les
collègues ect ... ect ...
J'ai été syndicaliste dans le passé et tout ses comportements je les ai obsevé de l'intérieur et je peux dire que le stress au travail ,
l'humiliation devant les collègues , les têtes de turcs des cadres toutes ses situations et bien d'autres existent malheureusement partout .
C'est pour cela , Judith , que votre ton désinvolte et parfois méprisant envers le monde du travail m'agace au plus haut point . Je discutait
il y a peu avec un ami avec qui on observais bien le côté coupé de la réalité des enseignants , car en effet passer du statut d'étudiants à
diplomé puis enseignants est ce que cela traduit une expérience du monde du travail ?? En aucune façon .
Vous enseignants , étalez votre science en utilisant des termes compliqués afin que les pauvres serfs ne comprennent rien , là est bien
votre problème mais tout en sachant que vous ne connaissez du monde du travail et de ses viscicitudes . Vous n'avez aucune crédibilité .
Je commencerai par une citation perso ... Mon père m'a fait un jour une réflexion sur le fait que nous sommes en train de manger notre pain blanc dans le monde du travail ... ce qu'il entendait par là c'est que des générations ont œuvrées pour nous permettre aujourd'hui de discuter avec une certaine aisance du Travail ...

Est il au centre, est il néfaste, est il intemporel .... le travail existait au temps de l'Egypte ancienne ... et dans la quasi ... puis je le dire ... toutes nos sociétés humaines. Il n'est donc pas pour moi négociable dans sa réalité ...

J'avoue avoir un mal de chien .... le pauvre ... a accepter les théorisations du monde des sciences humaines ... Par moment j'ai l'impression que ans ces domaines ont se dit ... faisons table rase des lois précédentes on va en ré-inventer de meilleures ... Euuuuh

Le travail avant d'être une théorie centrale du capitalisme .... pour les gens des millénaires précédents ... avant JC quoi ... ils travaillent parce qu'il fallait bien vivre et se nourrir ... cultiver son champs, chasser pour avoir de la viande ou s'occuper des animaux, ça je ne vois pas comment on pourrait aujourd'hui le remettre en cause ... du moins j'aimerai bien le découvrir.

Maintenant ce que je mettrais dans ce débat c'est surtout ce que nous mettons aujourd'hui dans le terme Travail ... Pourquoi ne reconnait on uniquement comme travail, un emploi "Productif", pourquoi l'exemple donné par Judith n'est il pas valorisé ?

Peut-être parce que rendre service pour le bien de la communauté n'est plus dans les mentalités et ça c'est un problème ... toute peine mérite salaire hein ... pour moi non ... il y a des peines que j'effectue pour assouvir ma soif de connaissance.

Je suis tout sauf clair ... désolé
Bonjour,
Le ton semble très apaisé aujourd'hui, je me risque donc.
Cela fait plusieurs années que je pense à la possibilité d'une rémunération de base qui ne dépende pas de l'activité (du tout). Cela pose évidemment tout un tas de questions d'organisation sociale. Mais à part quelques personnes avec qui j'en ai discuté je manque beaucoup de références et de culture, avez-vous lu ou vu des réflexions contruites dans cette direction?
( j'ai lu avec bonheur le livre de Delphine De Vigan, il m'a pourtant laissé le même petit regret que Judith concernant la remise en cause du "travail".)

J'ajoute également une question sur l'emploi du mot "travail". En revisionnant l'interview de Delphine De Vigan, il est étonnant de voir que tous utilisent le mot "travail" indistinctement pour désigner le travail litteraire et le travail rémunéré.
Car bien sûr je ne remettrais pas en cause le travail au sens d'un processus créatif lent et difficile qui seul permet de progresser ou de construire quelquechose (et ce sans aucun rapport avec la rémunération)...
Comme quoi la distinction n'est claire pour personne encore.

Sophie
Bonjour Judith,

Cet article part d'un présupposé qui m'embête, autour de la définition du mot travail : la critique que tu fais du travail est celle du "travail économique".

Mais c'est oublier que dans notre société, toute capitaliste qu'elle est, le travail économique n'est pas du tout le seul existant. Sans exhaustivité, on trouve : l'artiste, le sportif, l'animateur BAFA, le médecin, le chercheur etc. Ces hommes ne recherchent pas tous le profit au quotidien et pourtant, ils travaillent. Et même qu'ils aiment ça, parfois ! La société actuelle les reconnaît comme acteurs (à divers degrés selon le cas).

Pour moi, toute activité qui permet le déploiement d'un talent quelconque, en échange d'une rémunération, est un travail.

Le problème de notre société capitaliste n'est donc pas de faire du travail un absolu sans fin, mais de hisser le travail économique largement au-dessus des autres. Ca, c'est mortel.

Du coup, je sens que tu as une vision toute formatée du mot, qui réduit et appauvrit à la base la définition du travail.

Et pis, franchement, le travail est chose toute relative : y'a certains qui sont accrocs, d'autre non. Cette différence fondamentale est irréductible, liée à la biographie de la personne, et à son tempérament.

Sur ce, je retourne...travailler.
Que de questions! Et pas anodines avec ça: faut-il jeter le travail à la trappe? L'aliénation est-elle notre lot commun, que nous en soyons conscients ou non? De quoi remplir des encyclopédies entières! Bon, je vais essayer d'être plus succinct que cela; le débat m'interpelle.

Tout d'abord, un point d'accord avec cette chronique: en effet, jamais, à ma connaissance, le travail en soi n'est remis en cause. Il fait partie de la base à laquelle le plus contestataire jamais ne s'attaque. Voilà, j'en ai terminé avec ma convergence avec Judith.

Car il est un autre présupposé qui se cache dans la chronique, qui guide la réflexion dans ses étapes et jusque dans l'ouverture finale: entre le discours optimiste de l'employé épanoui et celui critique du documentariste, l'un a raison, et l'autre tort. La question est de trancher entre deux positions présentées comme incompatibles. Or, lorsqu'on aborde un sujet lié à l'humain, et plus encore à un groupe d'humains, il y a de bonnes chances de ne jamais aboutir si l'objectif est de disqualifier une option au bénéfice de l'autre.

Je m'explique: le documentaire (que je n'ai pas vu) présente des employés heureux de leur sort, et d'autres qui en souffrent. L'angle de la chroniqueuse est de démonter le discours positif pour montrer que son auteur, en fait, souffre aussi, mais à son insu. CQFD: le travail est une aliénation, parfois occultée mais toujours réelle. C'est là que je ne suis pas d'accord: à mon avis, tout le monde a raison (comme à l'Ecole des Fans). La souffrance morale, par définition, est une notion subjective; elle est intangible, impossible à mesurer sinon à travers la parole de celui qui la ressent. Lorsque les employés du call center disent leur mal-être au travail, on peut certainement leur faire confiance: les méthodes de management dans ces services sont parfaitement inhumaines, et tirent parti d'une certaine misère sociale (sur le mode du "si t'es pas content, y'en a d'autres qui attendent de prendre ta place"); mais ceci est un autre débat. A contrario, le chef d'atelier se déclare heureux dans son travail. Et pourquoi pas? Certes, il assume des horaires lourds, "il a pas d'vie". Mais si c'est effectivement son choix, alors oui, je veux bien croire qu'il s'épanouit, qu'il aime sa situation, malgré les difficultés qui pour d'autres seraient intenables. Je connais bien des collègues qui lui ressemblent, et qui n'ont rien de dépressifs. Le bonheur aussi est subjectif, et ses conditions sont personnelles. Et il n'y a pas d'opposition, à mon avis, entre le "c'est mon choix" et le "j'ai pas le choix"; le premier se rapportant au mode de vie qui est le sien (CE travail, avec ses satisfactions ET ses problèmes), et le second faisant référence aux contraintes "locales" qui, implicitement, sont acceptées via le premier choix: en gros, il a choisi ce travail et en accepte les contraintes. L'essentiel, je pense, est justement que les soucis qu'il subit sont reconnus et tolérés parce que justement il a CHOISI en premier lieu. Contrairement aux premiers employés, qui eux ont le sentiment de ne pas avoir le choix: il n'acceptent un travail difficile que par nécessité.

J'apprécie donc que le documentariste prenne du recul par rapport à son propre discours. Dans un premier temps, il va chercher les témoignages qui expriment le ressenti des employés, et les met en parallèle avec la communication d'entreprise, nous montrant l'écart qui les sépare. Mais, loin de modérer une contestation, je considère au contraire qu'il évite de tomber dans un excès généralisateur: "il y a des gens qui souffrent dans leur travail, donc remettons en cause le travail". Excès dans lequel vous tombez allégrement, Judith. Un peu comme si le gouvernement décrétait le jogging illégal parce que le Président aurait eu un malaise lors de sa séance dominicale (toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé etc...). Car, telle que je l'ai comprise à travers votre chronique, votre position n'est pas tant "remettons en cause sans préjugé la notion de travail pour savoir où cela nous mène" (ce qui constitue une démarche louable) que "jetons aux orties la notion de travail que tout le monde accepte sans y penser et qui est un fondement de l'exploitation capitaliste" (ce qui constitue un raccourci idéologique). A ce point de mon commentaire, j'espère que vous m'arrêterez pour me dire que je ne vous ai pas comprise.

En ce qui concerne la notion d'aliénation, j'estime que le titre de votre dernier paragraphe est le plus juste: "c'est l'impensé qui nous aliène". Cela rejoint ma réflexion ci-dessus à propos du choix. C'est-à-dire que la souffrance ne provient pas tant de la description objective d'une situation, que du sentiment d'en être prisonnier. Je ne développerai pas ici mon point de vue car j'ai déjà été long et que j'ai beaucoup à en dire, mais en guise de résumé je me réfèrerai à une citation de Sartre (parce que c'est bien vu de frimer avec des citations qui en jettent):
"la liberté ce n'est pas faire ce que l'on veut mais vouloir ce que l'on fait".

Enfin, quelques mots sur l'idée de fond de la chronique: la remise en cause du travail. Quelle définition donnez-vous du travail? Car lorsque je lis que "le travail, c'est quand même dingue qu'il faille le rappeler, c'est tout bêtement une nécessité économique déterminée par un système bien précis - le capitalisme", je m'interroge. Le travail n'existe pas dans un système communiste? Féodal? Clanique? En fait, dans quel type de société le travail est-il absent? Car si le travail ici et maintenant a bien pour objectif principal de permettre la satisfaction des besoins de base (nourriture, vêtements...), ces besoins sont justement universels et demandent une activité quotidienne pour être satisfaites; bref, demandent du travail, fut-il limité à la cueillette, la chasse, et la couture. Dans notre société (comme dans beaucoup d'autres, présentes ou passées), le travail dépasse largement cet objectif de base et je pense que c'est sur ce "supplément de travail" que les questions doivent être posées. Le système capitaliste moderne permet d'utiliser la masse de travail globale à des fins extrêmement diverses, qui vont de l'enrichissement démesuré de certains à la conquête spatiale, en passant par l'art, le loisir, la guerre... que sais-je?

A mon avis, donc, ce n'est pas le travail qu'il faut remettre en question, mais sa finalité dans notre société. A quoi doit servir le travail quotidien de chacun, en tant que réalisation d'un objectif personnel, mais aussi, et surtout pour atteindre un but commun? C'est un CHOIX (on y revient) bien plus pertinent à mon sens. Et c'est aussi malheureusement un IMPENSE, tant la notion de rêve commun, d'objectif collectif, est absente de la politique dès que l'on sort du court-termisme habituel. Plutôt qu'un candidat à la présidentielle qui nous annonce fièrement qu'il sera "le président du pouvoir d'achat", je rêve de celui qui se présentera comme "le président de la démilitarisation globale comme première étape d'une humanité en harmonie avec son environnement capable de s'élancer dans la colonisation de la galaxie à la recherche de Dieu". Bon OK, là je m'emballe un peu, mais vous voyez l'idée...

Vous n'allez certainement pas me croire, mais j'ai tenté ici d'être aussi synthétique que possible. Je suis désolé donc que ce commentaire soit si long, mais cette chronique est riche de nombreux sujets. J'espère avoir été clair dans mon exposé, et serai ravi d'en débattre.
Je ne crois pas que le débat souhaité par Judith Bernard entre les "julien" et le réalisateur serait productif. Pour connaître certains des co-auteurs de l'ouvrage collectif "journalistes précaires" (sous la direction d'Alain Accardo, aux éditions "Le Mascaret", réédité chez Agone), je sais les difficultés à faire parler des personnes qui ne veulent pas admettre leur condition d'esclaves salariés, qui sont dans le déni. La plupart de ceux qui finissent par admettre les difficultés de leur situation (et par donner des exemples concrets) ont commencé par les nier : "J'ai choisi d'être pigiste, c'est la liberté", "je peux m'organiser comme je veux, je ne supporterais pas d'avoir un chef qui me dit quoi faire", "je suis libre, je peux travailler à mon rythme, choisir les sujets que je veux traiter", voilà le genre de réflexions que l'on peut entendre dans un premier temps du côté de ces nouveaux prolétaires qui s'ignorent.
À les entendre, ils ne travailleraient pour rien au monde en CDI, dans une rédaction. Comme disait Accardo, persuadé que la plupart d'entre eux finiront par accepter d'intégrer une rédaction (ça s'est vérifié plus tard, quand il a fallu assurer des bonnes conditions matérielles à leur famille, quand ils en ont eu marre des galères, de la concurrence de plus en plus féroce entre les pigistes, avec un prix du feuillet qui ne cesse de baisser.), "ils font de nécessité vertu. C'est trop douloureux d'admettre que, quelque part, ils se font avoir. C'est ce qui s'appelle se bercer d'illusions".

Sans doute le réalisateur ne veut pas débattre avec les "Julien" parce qu'il sait tout ça. Peut-être que votre "Julien", Judith, est dans une position intermédiaire, avec l'ambition de devenir chef et qu'il a choisi son camp ? Peut-être qu'il nie sa condition de salarié et qu'il est sensible au discours patronal (les fariboles habituelles du genre : "on est une équipe, une famille, on a les mêmes intérêts") ?
Judith, est-ce que je peux me permettre de vous conseiller le visionnage du documentaire de Pierre Carles Attention Danger Travail (si ce n'est déjà fait) ?

Il est disponible sur youtube, et voici les deux première partie

http://www.youtube.com/watch?v=zELKWYA8lqg
http://www.youtube.com/watch?v=Umc-Qd_c340

La séquence sur Dominos Pizza est à voir absolument.
Je faisais la bouffe et une idée m'est venue, le problème ne me semble pas être le travail en tant que tel (dans la mesure où nous sommes condamnés à travailler, quel qu'en soit le produit) mais la place accordée au travail, condition de notre statut social, (qui fait bien - genre médecin - ou rend riche - valeur suprême actuelle - ).

Voilà. A plus.
J'ai vu l'émission, j'ai aimé le décortiquage du système productiviste
qui ne profite évidemment pas à celui qui travaille...
Tout comme l'avis de Judith, cela ouvre à la reflexion, nous avons un bout de ficelle,
à nous de défaire la pelote....
(le cousin reviendra, patience ).
Pour ma part, je m'interroge sur les outils possibles pour montrer ou réfléchir ou réveiller, sur cette aliénation. Interrogation théorique car je n'ai pas vu l'émission, n'ayant pas de télé.
Qu'est-ce qui est plus efficace, ou stimulant: le livre de D.deVigan ou l'émission? L'angle psychologique et symbolique ou social? Les mots ou les images?
La question posée par cette fantastique chronique est en quelque sorte le prolongement d'un débat entamé sur le forum de la chronique précédente. Incroyablement ambitieuse et difficile.

Je n'ai pas lu les auteurs cités dans la chronique aussi il m'est presque impossible de répondre avec les bons outils.

Mais rapidement, comme ça, je me demande si le capitalisme est vraiment le grand satan qui place le travail au cœur du système.
La recherche de l'argent ne me semble pas être le fond du problème : elle est liée au fait que dans nos sociétés, l'argent est le vecteur des échanges. Il a d'ailleurs préexisté au capitalisme - il existe, en fait, depuis que les sociétés humaines, pour la plupart d'entre elles, ont abandonné le troc.

Il me semble en réalité que nous n'avons pas d'autre choix que de travailler, dans le sens où la survie exige la recherche de nourriture, d'eau, d'un abri, de vêtements, pour manger, étancher sa soif, s'abriter et se protéger du froid. L'homme n'a pas commencé à travailler avec le capitalisme, il a toujours travaillé, sauf à faire partie d'une caste privilégiée qui lui permet d'exploiter le travail d'autrui : esclavage, servage, etc. Et encore, l'homme qui ne travaille pas ne vit que par la force du travail d'autrui.

Je pense donc que nous n'avons pas le choix : une société sans argent n'évacuerait pas le problème de la puissance économique, qui s'exprimerait à travers la nature des objets, plus ou moins précieux, dont on peut faire l'échange. La recherche de l'argent, pour certains, serait remplacée par la culture de la terre, pour se nourrir, le retour de la chasse, pour bouffer, tandis que d'autres fabriqueraient des objets à troquer contre les fruits de la terre.

Une activité qui ne "produit pas" de richesses directement exploitables au bénéfice du ventre de chacun ne suffirait pas à la survie.

C'est vraiment basique mais pour l'instant c'est ce qui me vient à l'esprit.
Ce débat, il le faut, pour notre bien-être a tous, on a face a nous un documentaire qui décrypte tout ce que nous avons vécu et vivons au jour le jour, je pense comme le réalisateur .En tout cas dans les deux premières parties, la dernière partie est un peu plus capilo-tracté et joue plus sur nos émotions et sur un arrière-gout de déjà-vu et déjà démenti, mon esprit critique ne peut se résoudre a l'accepter tel quel, il faut creuser pour moi ...

Je n'ai pas le temps de pouvoir développer plus , mais j'y reviendrai, pour moi ce docu a eu un tel écho en moi, que je n'en ai pas dormi de la nuit.

J'attendais depuis trop longtemps ces images, qu'elles m'ont permis de mettre le doigt sur quelque chose de trop fort pour que je puisse m'exprimer a l'heure actuelle, je suis en état de choc complet et total...

Je suis très heureux, et je l'attendais depuis lundi soir l'ouverture de ce débat au sein du site @si

Merci Judith, et j'attends avec impatience le plateau absolument nécessaire !!!

PS: je reviendrai témoigner de mon expérience dés l'état de choc passé ! il faut bien sur que j'arrive a prendre du recul par rapport a mes émotions

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