Echirolles, Montpellier, ces sacrés faits !
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Echirolles, Montpellier, ces sacrés faits !

Les faits sont sacrés, c'est entendu.

Mais aussi, sacrément difficiles à établir dans les récits médiatiques immédiats. Prenons le double meurtre d'Echirolles, fait-divers national de la semaine (visite surprise présidentielle, marche blanche, ministre de l'Intérieur mâchoire serrée chez Pujadas). Et lisons le blog de notre excellent confrère Frédéric Helbert (plusieurs fois reçu dans nos émissions). Se fondant sur le témoignage d'un policier, lequel prend tout naturellement fait et cause pour les victimes, Helbert et Karim Hacène racontent les origines de l'épisode. L'affaire aurait apparemment commencé par une altercation entre le petit frère de Kevin (l'une des deux victimes) et l'un des meurtriers présumés. Le petit frère de Kevin subit alors des jets de gaz lacrymogènes. Récit du policier: "vers 20h, prévenu par son frère,Kevin N. réunit quelques amis, et retourne sur les lieux de la bagarre pour obtenir une explication. C’est là qu’une deuxième altercation va éclater. Kevin N. va contraindre par la force son adversaire Mohamed el Amine E. à présenter des excuses à son jeune frère".

Relisons la phrase. Kevin "réunit quelques amis et retourne sur les lieux de la bagarre pour obtenir une explication": combien "d'amis" ? Comment, en quels termes, sur quel ton, tentent-ils "d'obtenir une explication" ? Que signifie exactement "par la force" ? Sont-ils armés ? Autant de détails qui ne sont pas livrés par ce policier anonyme, et qu'il serait intéressant de connaître. Non que cela retire quoi que ce soit à l'horreur du meurtre des deux victimes, lors d'une troisième altercation (7 coups de couteau pour Kevin, 27 plaies à l'arme blanche pour Sofiane, toujours selon ce policier), mais simplement pour mieux comprendre l'ensemble de l'histoire. A propos de ces détails, je repense évidemment à l'expulsion forcée de Roms par des riverains à Marseille, expulsion dont on nous avait d'abord expliqué, sur la foi de la version de la préfecture, qu'elle s'était déroulée "sans violence", avant que nous apprenions quelques jours plus tard (de la bouche des expulsés) que certains des expulseurs étaient porteurs de bidons d'essence, et brandissaient des briquets.

Les faits, ces sacrés faits, que l'on aime tant tordre dans le sens dominant du moment. Tiens, sur la partie de handball fatale. Comme le raconte Sebastien Rochat, les meilleurs limiers de nos meilleures chaînes de télé, emboitant le pas au procureur de Montpellier qui s'est vaillamment improvisé arbitre en une nuit, se sont penchés sur les images du fameux match Montpellier Cesson, pour y déceler les preuves du truquage. Et les ont trouvées dans ce commentaire live de match, à propos d'un tir raté par Montpellier: "oh la la, ça c'est rare, un immanquable qui est manqué". Et toutes les chaînes de diffuser l'accablante séquence. Mais L'Equipe (dont les journalistes s'y connaissent certainement moins bien que le procureur de Montpellier) objecte que le pourcentage de succès du gardien de Montpellier en première mi-temps a été sensiblement identique à celui de son adversaire, et de son remplaçant en seconde mi-temps. Certes, cela ne signifie nullement que le match n'ait pas été truqué. Mais cela signifie simplement que les preuves apparentes n'en sont pas. Si tous ces pinaillages ne changent rien à la conclusion de l'histoire, demanderont les confrères, pourquoi alors perdre son temps à tenter d'établir les faits, dans leur sacralité ? Au nom de quelle nécessité supérieure ? Sacrée question.

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