Bref, une fois l'an, ouvrir le Libé des écrivains...
Le matinaute
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chronique

Bref, une fois l'an, ouvrir le Libé des écrivains...

Changer de focale. Se décentrer. Laisser mourir en soi le bruit.

Le distiller, le bruit, pour tenter de n'en recueillir que l'essence, la quintessence.

Bref, une fois l'an, ouvrir le Libé des écrivains.

Il suffirait peut-être de cela, pour résister : ne lire qu'un journal par an. Et tous les autres jours, plonger dans les livres, ou le chant des mésanges. Il est peut-être là, le piège : dans le tempo qu'on nous impose. "Au fond, dit l'Américain Paolo Bacigalupi, tout ce bruit autour de Trump aujourd’hui obscurcit le fait qu’il est né de courants qui ont vu le jour il y a bien longtemps. La politique de propriété intellectuelle de Facebook est tout aussi responsable de l’avènement de Trump que Breitbart. Le revenu publicitaire de Fox News l’est autant que la présence de David Duke [suprémaciste blanc, ndlr] sur Twitter. Nous avons regardé les médias créer une nouvelle réalité depuis des décennies, ces tendances n’ont cessé d’augmenter jusqu’à n’être rien d’autre qu’un rugissement".

On nous claudiaschiffer, on nous paulloupsulitzer, chantait déjà Souchon le siècle dernier. Aujourd'hui on nous trumppe. On nous poutinne. On nous cafédesevranne. On nous fabrique une réalité que nous transformons en réalité, par lassitude. Sans nous laisser le temps de trouver les mots pour décrire ce qu'on nous impose.

L'avantage de solliciter les mêmes écrivains d'une année sur l'autre, c'est qu'on peut les mettre face à leurs prophéties de l'année écoulée. L'an dernier, dans le même Libé des écrivains, comme presque tout le monde, Marc Weizmann jugeait improbable la victoire de Trump. Il met aujourd'hui cette erreur sur le compte de "l’incrédulité fascinée, teintée de désir" que sucitait l'événement : "Cela ne pouvait pas arriver, ce serait trop incroyable". Il serait facile de se moquer. Mais ce serait tellement absurde. Par les temps qui courent, on ne demande pas aux écrivains d'être prophètes. On leur demande seulement de poser les mots les plus justes possibles sur l'impuissance à prophétiser. C'est déjà beaucoup. Mais tout de même, Weitzmann, "teintée de désir", avez-vous dit ? "Passée l’euphorie de la fin de la guerre froide, l’Occident, qui s’est découvert libre, a commencé de s’ennuyer. Il est désormais tenté par la narration de son suicide. Il s’agit d’en finir avec «nous», individus occidentaux modernes dotés de l’épuisante obligation de choisir".

Il serait facile de se moquer. C'est qui, à propos, "l'Occident" ?Bernard Arnault ? La finance américaine ? Le fermier du Minnesota ? Le chômeur de Hénin-Beaumont ? Un qui ne tourne pas autour du nom du coupable, c'est l'Américain David Vann, auteur du géant Sukkwan Island. "Les menaces qui pèsent sur la France et sur l’Amérique, qu’elles soient internes ou viennent de l’extérieur, ont Dieu pour origine. Bien que le respect de la liberté religieuse soit une pierre angulaire de la démocratie occidentale, force est de reconnaître que les religions elles-mêmes n’apportent aucune liberté, mais plutôt l’asservissement et la perspective d’une guerre inéluctable". Si vous voulez lire la suite, achetez Libé. Tant qu'à n'acheter qu'un journal par an, autant que ce soit celui-là.

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