Avortement : les petits cœurs du Texas
Tout ne va pas si mal en Afghanistan. Ainsi, les citadines afghanes ne seront pas condamnées à la burqa, mais simplement obligées de se couvrir la tête, "ce qui était déjà la norme"
précise Le Monde
. Dans les villages, c'est autre chose, comme le racontaient les reporters reçues dans notre émission de la semaine dernière.
Pendant que les talibans progressaient en Afghanistan, ils progressaient aussi dans un autre État : les États-Unis d'Amérique. Ils viennent d'y remporter une victoire spectaculaire. La Cour Suprême n'a pas retoqué la loi texane du Heartbeat Act
("loi du cœur qui bat"), qui interdit les IVG à partir du moment où bat le cœur du foetus (à la sixième semaine de grossesse), même en cas de viol ou d'inceste, et sauf danger vital pour la mère. Les talibans texans ont été rusés. Ce n'est pas l'État du Texas qui interdira les IVG, mais les militants locaux qui seront encouragés à poursuivre les contrevenantes, et leurs complices (le médecin, ou le proche qui les aura conduites à la clinique). En cas de victoire judiciaire, le "pro-life" dénonciateur pourra percevoir un dédommagement se montant jusqu'à 10 000 dollars. Vous avez entendu tout cela aux radios du matin.
Les anti-IVG texans ne portent pas de burqa, et ne manquent pas d'imagination dans la guérilla qu'ils mènent depuis des années. En 2020, le gouverneur Greg Abbott a tenté de prendre prétexte du Covid pour interrompre les avortements. En 2016, une loi avait déjà interdit aux centres médicaux pratiquant des IVG de se débarrasser des embryons dans des décharges sanitaires, les enjoignant à enterrer ou à incinérer les foetus , ce que la presse pro-choix a résumé par "obligation de funérailles". Gouverneur républicain du Texas, Greg Abbott avait officiellement, là encore, invoqué des raisons sanitaires -limiter la propagation d'éventuelles maladies contagieuses - mais avait été plus clair dans un courrier adressé à ses donateurs, estimant "qu'il est impératif d'établir des standards plus élevés pour démontrer que nous respectons la sainteté de la vie humaine".
Pour repérer les contrevenantes, et faciliter les dépôts de plaintes, un site de délation a été créé, sous le nom de "Lanceurs d'alerte pro-life" (site inaccessible à l'heure où j'écris). Outres quelques attaques DDOS facilement repoussées, il a déjà reçu plusieurs dénonciations fantaisistes, ayant pour but de bloquer son fonctionnement (arme militante dont ne disposent pas les adversaires des talibans en Afghanistan). "Nous aimerions remercier tous les internautes pour cette publicité gratuite, y compris ceux qui ont encouragé les fausses dénonciations. Toute attention portée au combat contre l'assassinat des enfants non-nés est toujours une bonne chose"
a réagi la directrice de la com' du site, qui, sans nul doute, manifeste sans burqa, et en tenant un ballon en forme de petit cœur (qui bat, donc, vous l'avez ?)
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