Corn flakes et info gratuite
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Corn flakes et info gratuite

Petit miracle quotidien de l'interactivité: vous avez été quelques uns, sous le billet d'Aurélie Windels consacré à la pub qui fait grossir les enfants, à nous signaler une séquence de télévision, injustement passée inaperçue (y compris de l'équipe d'@rrêt sur images, avouons-le humblement).

La scène est extraite de "Faites passer l'info", nouveau magazine mensuel d'investigation sur la consommation, présenté par Jean-Baptiste Rivoire, sur Canal . Elle se déroule en octobre 2006. On y voit Xavier Bertrand, ministre de la Santé de l'époque, proprement humilié par le lobby de l'agro-alimentaire.

C'est à déguster sans modération.

A l'heure où je vous l'offre, cette video sur Dailymotion n'affiche "que" 975 vues. Elle mérite davantage. Faites passer l'info ! Le méchant de la scène (le président de l'Association Nationale des Industries Alimentaires, Jean-René Buisson) est si caricatural qu'on le croirait tiré d'un film américain. A la vérité, nous avions eu vent de son existence. Pendant son enquête, Aurélie a tenté de le joindre à plusieurs reprises, sans succès. Eh bien, le voilà. L'homme qui gave vos enfants de pub a non seulement une secrétaire et un numéro de téléphone, mais un visage. Et il parle vraiment comme dans les films américains -ah, ce glaçant "nous vous renverrons l'ascenseur", à Xavier Bertrand !

A elle toute seule, la séquence donne l'explication de l'incompréhensible anomalie décrite dans le billet d'Aurélie: pourquoi les impératifs de santé publique sont-ils si faibles, face aux intérêts de l'agro-alimentaire ? La réponse est là, assise au premier rang. Dans ce terrible sourire jaune du ministre.

Mais si l'on creuse toutes les raisons de cette impuissance, ça va évidemment plus loin.

Tout se passe comme si non seulement les Etats, garants de la santé publique, mais les journalistes aussi, avaient définitivement capitulé face à la pub. Les mécanismes psychologiques de la pub, le pouvoir économique des annonceurs, la légitimation idéologique de la pub. Pourquoi ? Parce qu'elle les fait vivre, pardi. Evidemment, le rapport de force n'est pas toujours exposé de manière aussi cynique que dans la séquence de Canal . Les choses sont plus insidieuses, parfois inconscientes. Même avec les plus pures intentions, même si on a toujours rêvé d'être Woodward et Bernstein, on ne mord pas la mamelle à laquelle on s'abreuve. Il est symptômatique, par exemple, que ce soit une chaine à péage, dépendant davantage des abonnements que de la pub, qui ait osé créer ce que le service public audiovisuel n'a jamais osé: une émission de consommation qui -accrochez-vous!- cite les marques.

Et cette pub, qui a anesthésié les medias traditionnels, est en passe d'anesthésier les medias alternatifs sur Internet. La voilà. Elle accourt. Elle se précipite. Elle va déferler, abondante, bienfaisante, nourricière. Grande victoire: le Financial Times on line va passer en gratuit ! Et les meilleurs, les plus pugnaces parmi les hérauts des medias alternatifs, comme nos confrères de Rue 89, de crier hosannah : le marché a tranché, vive l'info gratuite sur Internet. Plus la peine de tenter même autre chose.

Eh bien non. Quand je lis et relis l'enquête d'Aurélie, quand je regarde Bertrand se faire sermonner par Buisson, désolé, mais je me sens conforté dans la voie que nous avons choisie, et dans laquelle vous nous suivez (bientôt 20 000) : l'indépendance, grâce à vous.

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