Le Monde et le Brésil  : bien, mais aurait pu mieux faire (médiateur)
Brève

Le Monde et le Brésil  : bien, mais aurait pu mieux faire (médiateur)

Non, Le Monde n'a pas été partial dans sa couverture de la crise politique au Brésil - crise qui pourrait conduire à la destitution de la présidente Dilma Rousseff. Mais il aurait pu faire mieux. C'est l'avis du médiateur du journal, Franck Nouchi, interpellé par des lecteurs.

Pour une partie des lecteurs du Monde, c'est entendu : dans l'affaire Rousseff, le journal s'est placé du côté de ceux qui voulaient la tête de la présidente. Dans un courrier adressé au quotidien, des lectrices brésiliennes vivant à Paris s'interrogent : "Le Monde a-t-il ses raisons de choisir la partialité pour aborder la crise politique brésilienne ? Y a-t-il une raison pour laquelle Le Monde a choisi de ne pas poser de questions, de ne pas aborder de nouveaux angles, et de ne pas écouter de voix en contrepoint à la chorale monocorde des médias brésiliens ?".

Ce type de lettres, Le Monde en a reçu assez pour que le médiateur du journal, Franck Nouchi, s'empare du sujet. Après avoir relu l'ensemble des articles et éditos consacrés au Brésil, et s'être entretenu avec leurs auteurs, Nouchi s'est fait un avis : il "ne partage pas les critiques qui sont adressées [à son journal]" – mais émet tout de même quelques (légères) réserves.

Il s'arrête d'abord sur les deux pleines pages et l'éditorial consacrés à la crise politique au Brésil dans Le Monde du 19 avril. La correspondante du journal à Sao Paulo, Claire Gatinois, y décrivait les enjeux et le déroulement du vote de la procédure de destitution de Rousseff par les députés brésiliens. Avec des mots peu tendres pour ces élus : "Loin de donner une leçon de vertu, les députés ont surtout pensé à leur propre carrière lors d’une session aux allures de spectacle." Pour Nouchi, ces articles témoignent d'un "souci de rendre compte largement et équitablement de cette crise".


Mais le médiateur exprime toutefois trois (légers) regrets. Le premier concerne un éditorial plus ancien, daté du 31 mars, qui selon lui "n'était pas suffisamment équilibré".



"Brésil : ceci n'est pas un coup d'Etat" : l'éditorial du Monde daté du 31 mars

Titré "Brésil : ceci n'est pas un coup d'Etat", l'édito prenait le contrepied des déclarations du Parti des travailleurs (dont est issue Rousseff). Pour ce dernier, la destitution de Rousseff relève du "coup d'Etat". L'édito du Monde, à l'inverse, préférait souligner la légalité du processus : "Parler de coup d’Etat dans un pays sorti il y a à peine trente ans d’une dictature militaire relève d’un amalgame douteux. (...) [Les] mots [de Rousseff et Lula] ont pour objectif de disqualifier les manifestants et l’opposition. Ils révèlent des dirigeants aux abois, dans le déni de leurs erreurs et de leurs fautes."

Problème : le texte "ne rappelait pas que, parmi les partisans de la destitution de Mme Rousseff, beaucoup sont impliqués dans des affaires de corruption, à commencer par Eduardo Cunha, l’actuel président de la Chambre basse", regrette Nouchi.

Le second mea culpa du médiateur concerne un aspect de la vie politico-médiatique du Brésil absent des analyses du quotidien : "Nous n’avons pas suffisamment souligné le manque de pluralité des médias brésiliens. En janvier 2013, Reporters sans frontières avait pourtant ­consacré un dossier très complet à ce qu’il ­appelait « le pays aux trente Berlusconi ». Au Brésil, constatait RSF, « dix principaux groupes économiques, issus d’autant de ­familles, se partagent toujours le marché de la communication de masse »."

Dernière réserve de Nouchi : les moyens humains consacrés à la couverture de cette crise politique mais également sociale : "Dans un Monde idéal, sans doute aurions-nous dû, afin de seconder notre ­correspondante, elle-même accaparée par la couverture de la crise politique, envoyer un reporter sur place, de manière à davantage décrire les fractures de la population révélées à l’occasion de cette crise."

L'occasion de relire notre article consacré aux (vraies) raisons de la cabale contre Rousseff : "Non, Dilma Rousseff n'est pas destituée pour corruption!"

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