Syrie, le parcours du combattant des journalistes (AFP)
Brève

Syrie, le parcours du combattant des journalistes (AFP)

En Syrie, le chemin vers l'information relève du parcours du combattant pour les journalistes. L'AFP décrit sur son blog "Making-of" le "travail de détective" des reporters, parfois précaires, qui tentent d'enquêter sur place.

Un "travail de détective" étudié à la loupe. L'AFP fait son making-of et présente l'imbroglio auquel est confronté le journaliste qui veut informer sur la guerre civile en Syrie. Entrer sur le territoire, s'y déplacer librement, choisir ses sources et rester en vie : autant de points auxquels il faut veiller avant d'espérer recueillir une information fiable.

Première embûche: pénétrer en terre syrienne. "Les journalistes sont devant l'alternative: se rendre illégalement, comme le fait la majorité, dans le Nord contrôlé en grande partie par les rebelles (en se déplaçant sous leur escorte), ou tenter d'obtenir un visa, distribué au compte-gouttes", commente le journaliste qui écrit le billet depuis les environs d'Alep, Iskandar Kat. Et le précieux visa ne donne accès qu'à l'information officielle soigneusement contrôlée: "comme dans tout régime autocratique, les reporters sont contraints d'être accompagnés par un "guide" du ministère de l'Information, ce qui limite sérieusement les contacts avec les opposants et n'encourage pas les gens dans la rue à parler librement". Et faire défaut à son "guide" est mal perçu par les nombreux "agents de renseignement" du régime qui arpentent les rues, et se chargent d'interpeller les journalistes contrevenants. Bien sûr, la reconduction du visa dépendra de la façon dont le pouvoir syrien apprécie les articles produits.

Pour tous ceux qui entrent illégallement sur le territoire, le travail n'est pas moins encadré. "Les reporters ne disposent d'aucune autonomie de mouvement et risquent d'être pris pour cible lors d'une attaque militaire." Et l'escorte des rebelles ne suffit pas à assurer leur sécurité. Pour beaucoup de reporters, il faut couvrir le conflit à découvert: "Nous sommes totalement vulnérables. Beaucoup n'ont même pas de gilet pare-balles ou de casque", affirme Mayte Carrasco, photographe espagnole. Toutes ces restrictions expliquent l'importance du rôle pris par les réseaux sociaux et les médias officiels pour relayer l'information.

Mais informer sur la Syrie depuis l'extérieur n'est pas chose aisée non plus, étant donné la difficulté "d'authentifier le déluge d'informations et de vidéos disséminées quotidiennement via courriel et sur YouTube", remarque le journaliste. C'est pour cela, explique-t-il, que "confrontés à la fois à la propagande du régime et aux informations partielles de militants, beaucoup s'appuient sur une ONG basée en Grande-Bretagne: l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH)". Nous nous sommes déjà penchés sur la fiabilité de source très employée par les  journalistes.


"J'espère que ce sera un tremplin"

Autre point décrypté par l'AFP, la condition des journalistes indépendants sur place. Beaucoup d'entre eux voient dans le conflit syrien une opportunité de se faire connaître dans le métier, à l'instar du photographe italien Giulio Piscitelli: "Ici, j'espère que ce sera un tremplin pour ma carrière professionnelle. Et comme les grandes agences ne peuvent déployer sur le terrain autant d'équipes qu'elles le voudraient, cela me permet de vendre ma production". Mais ceci au prix de très gros risques, car "le journaliste indépendant doit assumer le fait que tous ses frais sont à sa charge. Il n'a pas de couverture médicale, il n'est pas accrédité par un grand média. Le pigiste est seul, tout seul", raconte l'Argentine Karen Maron, qui a elle-même été pigiste dans les territoires palestiniens, lors de la deuxième Intifada en 2000. Les plus jeunes font malgré tout montre d'enthousiasme, vite modéré par les plus expérimentés. " "Tu te sens quand même exploité", avoue le vidéaste espagnol Roberto Fraile. Karen Maron, fataliste, ajoute que "le pigiste fait un boulot extraordinaire, il est reconnu pour la qualité de son travail et, ensuite, on va le jeter sans explication ni considération. Mais on sait bien qu'il n'y a aucun engagement écrit qui stipulerait qu'après une couverture réussie tu aurais droit à un contrat en bonne et due forme".

Comment distinguer les bonnes sources sur les événements en Syrie ?  Notre enquête est ici.

(Par Antoine Machut)

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