Clearstream : Sarkozy pouvait-il faire appel ?
Brève

Clearstream : Sarkozy pouvait-il faire appel ?

Nicolas Sarkozy pouvait-il faire appel ou non dans le procès Clearstream, qui a abouti hier en première instance à la relaxe de Dominique de Villepin ? La question a surgi dans la blogosphère et sur le réseau social twitter. Le pouvait-il au civil ? Le pouvait-il au pénal ? Aucun ? Les deux ? Attention, sortez votre code de procédure pénale et accrochez-vous.



"Le tribunal a considéré que le rôle de M. de Villepin dans la manipulation ne pouvait être prouvé. J'en prends acte tout en notant la sévérité de certains attendus le concernant"
, annonçait hier Nicolas Sarkozy dans un communiqué. Il ajoutait : "Dans ces conditions, j'annonce que je ne ferai pas appel de la décision du tribunal correctionnel".

Peu après, le journaliste de Libération Nicolas Cori écrivait sur le site du journal : "Mais, en tant que partie civile, Sarkozy ne peut pas faire appel de cette décision de relaxe. L'article 497 du code de procédure pénale précise que, en matière correctionnelle, seul le parquet et les personnes condamnées sont en droit de le faire. La partie civile peut faire appel «quant à ses intérêts civils seulement», dixit la loi. Et comme Villepin n'a pas été condamné à verser quoi que ce soit, cette phrase est sans objet. Une erreur surprenante de la part d'un président, dont la profession première est avocat..."

De même, l'avocat-blogueur Gilles Devers l'assure sur son blog : "Sarkozy n’avait aucune possibilité de faire appel. L’alinéa 3 de l’article 497 limite l’appel de la partie civile «à ses intérêts civils seulement». Alors, qu’avait demandé Sarkozy ? Il avait dit beaucoup de choses à l’encontre de Villepin, mais sa «demande» était la condamnation solidaire de Lahoud, Gergorin, et Villepin à lui verser 1 euro de dommages et intérêts. A trois pour payer un euro. Et il a obtenu son euro de dommages et intérêts, ce qui est pour lui un succès total. Certes le tribunal a réservé la charge de cette condamnation à Lahoud et Gergorin, les deux seuls condamnés au pénal. Mais il n’y a pas de doute: la partie civile Sarkozy a fait carton plein en obtenant les dommages et intérêts demandés, même si la charge du paiement ne repose plus que sur deux personnes. Donc, l’appel aurait été radicalement irrecevable."

Le célèbre avocat-blogueur Maître Eolas, lui, n'est pas d'accord avec cette version. Sur son blog, il écrit : "Je ne partage pas l’analyse de mon excellent (quoique provincial) confrère Gilles Devers qui estime qu’en tout état de cause, le Président de la République serait irrecevable puisqu’il a été rempli de ses demandes (c’est comme ça que l’on dit qu’il a obtenu l’intégralité des sommes demandées soit 1 euro). Sa demande visait à la condamnation solidaire de MM. Gergorin, Lahoud et Galouzeau de Villepin. Il n’a pas obtenu cette condamnation en ce qui concerne ce dernier. Cela suffit à mon sens à rendre l’appel recevable, car la partie civile a un intérêt à agir pour faire constater que l’un des prévenus avait bel et bien commis l’infraction dont il a été victime, quand bien même il aurait déjà été indemnisé par les autres condamnés. Après tout, il s’agit d’une demande d’un euro symbolique. Cela signifie que le but de l’action n’est pas financier mais symbolique. Et savoir si tel prévenu était coupable ou innocent, c’est un symbole plutôt important. Je vais faire des recherches de jurisprudence voir si la Cour de cassation a tranché ce point, mais tout coup de main sera le bienvenu."

Message codé de Sarkozy, mais lequel ?

Interpellé sur Twitter par @si, le journaliste de Libération Nicolas Cori répond : "Maitre_Eolas ne remet pas en cause mon "analyse" (complétée dans Libé papier aujourd'hui). Je parlais d'appel pénal." En effet, on pouvait lire ce matin dans Libération, sous la plume du journaliste : "une partie civile n'a pas le droit de faire appel au niveau pénal. Seuls le parquet et les condamnés le peuvent. Un appel de Nicolas Sarkozy n'aurait été possible qu'au niveau civil, mais même si le président avait eu gain de cause, Villepin n'aurait été condamné qu'à des dommages et intérêts".

Eolas rétorque : "La question est : Sarkozy parlait-il de l'appel pénal ?" Nicolas Cori, qui s'est entretenu avec un conseiller de l'Elysée jeudi, en est persuadé.

Hier, certains avaient en effet voulu voir dans les paroles du Président un message codé : sa volonté de "ne pas faire appel", dans une situation où son statut de partie civile ne l'aurait pas permis, aurait pu signifier qu'il ne demanderait pas au procureur de faire appel non pas en tant que partie au procès, mais en tant que président de la République.

Aujourd'hui, alors que le procureur a annoncé avoir décidé de faire appel, ce lapsus d'hier prend un autre sens pour Nicolas Cori. Selon lui, l'Elysée annonçait déjà qu'il s'abstiendrait de se porter partie civile lors d'une procédure en appel. lancée par le Parquet C'est d'ailleurs ce que déclare aujourd'hui le porte-parole de l'UMP Frédéric Lefebvre : "Le président de la République a été très clair" jeudi en disant que le jugement du tribunal correctionnel de Paris relaxant Dominique de Villepin "lui avait donné satisfaction" et qu'il "ne ferait pas appel", a-t-il déclaré sur RTL."Ca veut dire qu'il n'est plus partie civile, ça veut dire que son avocat, son conseil, ne participera pas au prochain procès." En disant cela, Frédéric Lefebvre montre qu'il confond allègrement civil et pénal.

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