Walter Mitty le mytho
Brève

Walter Mitty le mytho


Le mercredi 1er janvier est sortie sur les écrans une bobine intitulée La vie secrète de Walter Mitty. Ce film, interprété et réalisé par Ben Stiller, bénéficie d'une dizaine d'affiches différentes. Soit à peu près autant que pour un film de super-héros à la Marvel ou DC Comics.


Sauf que Walter Mitty et Ben Stiller n'ont pas exactement l'étoffe des super-héros. Alors, pourquoi cette débauche d'affiches ? Pour assurer une remarquable promotion à ce film ? Certes, mais pas seulement. Car en vérité, Walter Mitty ne cesse de s'imaginer d'héroïques destins.

La vie secrète de Walter Mitty est en partie inspirée d'une nouvelle de James Thurber parue en 1939 dans le New Yorker. Ce texte parut aux USA en 1942 dans un recueil de nouvelles intitulé My World and Welcome to It, et en France en 1948 sous le titre La vie secrète de Walter Mitty. Les éditions 10/18, qui le publièrent en poche en 1981 et en 1996, n'ont pas jugé utile de le rééditer alors que paraît le film de Ben Stiller :


La nouvelle de James Thurber s'ouvre sur une scène nous montrant un pilote faisant décoller un hydravion de la U.S. Navy. Sauf qu'en vérité il s'agit de Walter Mitty qui, conduisant sa femme au drugstore, se fait disputer par elle parce qu'il roule trop vite. Il imaginera ensuite quatre autres scènes : passant devant un hôpital et enfilant ses gants, il se rêvera chirurgien ; entendant un crieur de journaux annonçant l'ouverture d'un procès, il deviendra assassin aux assises ; tombant sur un article à propos de la maîtrise des airs par la Lutwaffe, il sera pilote de bombardier de la Royal Air Force. Dans son dernier rêve éveillé, alors qu'attendant son épouse il sera appuyé contre un mur fumant une cigarette, il s'inventera un destin de condamné à mort face au peloton d'exécution. Voici la dernière phrase de la nouvelle : « Alors, avec un léger sourire flottant sur ses lèvres, il fit face au peloton d'exécution ; droit et immobile, fier et dédaigneux, Walter Mitty l'Invaincu, à jamais impénétrable. » Le texte de James Thurber s'achève donc de la même manière qu'il a commencé, sur une rêverie éveillée de Walter Mitty, une rêverie plus forte que le réel.

En 1947 parut une première adaptation cinématographique de cette nouvelle, signée Norman McLeod. Avec Danny Kaye dans le rôle de Mitty, la très oubliée Virginia Mayo, et le très inquiétant Boris Karloff.


L'histoire filmée par McLeod est assez différente : petit bonhomme sans cesse malmené par sa famille et ses collègues (il est employé dans une maison d'édition de magazines à bon marché), Walter Mitty ne cesse de s'imaginer en héros de fabuleuses aventures délivrant une splendide jeune femme - toujours la même - des situations les plus dramatiques. Jusqu'au jour où, patatras, la femme de ses rêves apparaît dans sa vraie vie et l'entraîne dans une incroyable mais bien réelle aventure d'espionnage où il est question de bijoux royaux néerlandais et de nazis teutons.

Afin d'assurer la promotion de cette adaptation - que James Thurber détesta - , les distributeurs éditèrent toute une panoplie d'affiches illustrant les différents rêves éveillés de Walter :


Le film de Ben Stiller qui sort ces jours-ci s'inspire tout autant de la nouvelle de Thurber que du film de McLeod : Walter Mitty, toujours rêveur, est ici iconographe au magazine Life qui va faire paraître son dernier numéro papier, avant de devenir accessible par la seul ouèbe. Et voilà que le négatif de la photo choisie pour cette ultime couverture s'avère manquant, disparu. Walter Mitty va alors partir à la recherche du photographe, en reportage au Groenland.


Qu'aurait pensé James Thurber de cette adaptation ? Mystère. En tout cas une chose est sûre, la promotion de ce film nouvellement paru utilise le même ressort que la bobine de 1947, soit une série d'affiches illustrant les différents rêves de Walter le rêveur :


Le Walter Mitty de James Thurber est un classique de la littérature américaine. Dès avant la première adaptation filmée, les termes Walter Mitty et Mittyesque étaient entrés dans le langage afin de désigner quelqu'un qui passe son temps à rêver ou tentant de se faire passer pour ce qu'il n'est pas. Voilà pourquoi cette affiche de 1947 pose la question : « Are You a MITTY? »


L'occasion de lire ma chronique intitulée Last but not least, la dernière une de Newsweek papier.


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