"Radicalisation de l'islam" ou "islamisation de la radicalité" ? (O. Roy, A. Bertho)
Brève

"Radicalisation de l'islam" ou "islamisation de la radicalité" ? (O. Roy, A. Bertho)

Deux chercheurs aux objets d'étude différents, deux conclusions quasiment similaires. Dans une tribune publiée par Le Monde, le politiste spécialiste de l'islam Olivier Roy estime que le djihadisme salafiste n'est pas la conséquence d'une "radicalisation de l’islam", mais d'une "islamisation de la radicalité", dans un contexte où l'islam est devenu l'une des dernières offres politiques disponibles "sur le marché de la révolte radicale". Une thèse également défendue - notamment chez @si - par l'anthropologue Alain Bertho, spécialiste des émeutes.

Et si l'on envisageait le groupe Etat islamique... comme une offre politique ? Une offre politique en situation de quasi-monopole sur le marché de la radicalité politique depuis l'effondrement du communisme et des groupes d'extrême-gauche des années 1970. Dans Le Monde , le chercheur Olivier Roy décrit ainsi la trajectoire de ces jeunes Français en quête d'une "cause" : "Daech puise dans un réservoir de jeunes Français radicalisés qui, quoi qu’il arrive au Moyen-Orient, sont déjà entrés en dissidence et cherchent une cause, un label, un grand récit pour y apposer la signature sanglante de leur révolte personnelle. (...) Demain, ils se battront sous une autre bannière, à moins que la mort en action, l’âge ou la désillusion ne vident leurs rangs comme ce fut le cas de l’ultragauche des années 1970."

L'analyse de ce spécialiste de l'islam rejoint étroitement celle d'un anthropologue, spécialiste, lui, des émeutes. "La réussite d’une telle offre politique, celle de l’État islamique, tient au fait que, pour des gens déstabilisés, elle donne du sens au monde et à la vie qu’ils peuvent y mener. Elle leur donne même une mission", estime Alain Bertho dans cet entretien accordé à Bastamag. Il voit tout de même une différence fondamentale avec les mouvements d'extrême-gauche des années 1970 : "[La bande à Baader en Allemagne ou les Brigades rouges en Italie] sont des gens qui, de leur point de vue, sacrifient leur vie pour l’avenir des autres. C’est un passage à l’acte criminel voué à l’échec, mais qui s’inscrit dans un combat pour un avenir révolutionnaire qu’ils veulent meilleur. Avec l’État islamique, il n’y a rien de cet ordre-là : on sacrifie sa vie pour la mort de l’autre".

Outre cette différence pointée par Bertho, les deux chercheurs en concluent, dans les mêmes termes, qu'il faut cesser de réflechir à une supposée "radicalisation de l'islam", pour penser une "islamisation de la révolte radicale". Révolte teintée de nihilisme, "violence moderne", qui rapproche, selon Olivier Roy, le combattant de l'Etat islamique d'un Breivik ou d'un "tueur de masse" américain.

Uneislamisation des révoltes plutôt qu'uneradicalisation de l’islam ? C'était déjà la thèse defendue par Alain Bertho sur notre plateau, en juillet dernier. Il était accompagné du journaliste de RFI spécialiste du djihadisme David Thomson. Retrouvez l'intégralité de l'émission ici.

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