Mory Ducros : faux "collectif des salariés"
Brève

Mory Ducros : faux "collectif des salariés"

La petite manip a bien fonctionné. Alors que l'accord pour la reprise du transporteur Mory Ducros était mal engagé en raison du refus de la CFDT de signer un accord (celui-ci a finalement été signé), un mystérieux "collectif des 2 100" a exhorté les syndicats à ne pas bloquer le processus de reprise. Un message repris notamment par l'AFP et plusieurs médias régionaux. Or, selon un document que se sont procurés Mediapart, France Info et L'Humanité, ce collectif était en fait piloté... par des directeurs régionaux.

La CFDT a finalement accepté, mardi 4 février, l'accord de reprise du transporteur Mory Ducros par le fonds Arcole Industrie. Pourtant, ce n'était pas gagné. Le syndicat majoritaire refusait jusqu'à présent de donner son aval à un accord dont il contestait les conditions des 3 100 licenciements (pour 2 100 emplois sauvés). Or, l'enjeu était important : la signature de tous les syndicats faisait partie des clauses de reprise d'Arcol. Autant dire qu'il fallait à tout prix que la CFDT signe. A tout prix ?

La veille de la signature, un collectif de salariés a fait son apparition. Comme l'a raconté notamment Mediapart, un mystérieux "collectif des 2 100" (reprenant le chiffre des emplois sauvés) a abreuvé différents médias d'un communiqué. "Entre lundi 3 et mardi 4 février, Mediapart a reçu une douzaine de messages, signés à chaque fois par des salariés différents, employés sur divers sites, mais au contenu similaire : « L'offre de reprise déposée par Arcole Industrie prévoit de "sauver potentiellement" 2 210 emplois et 50 agences, écrit le site. Le collectif déplore les licenciements annoncés et la fermeture programmée de certaines agences, mais estime en conscience que la sauvegarde de 2 210 emplois et plusieurs milliers de sous-traitants ne peut pas être mise en péril. »". Ce communiqué, notamment relayé par l'AFP, est présenté comme émanant d'un collectif de salariés.

Outre l'AFP, plusieurs quotidiens régionaux ont relayé cet appel : les Dernières Nouvelles d'Alsace (DNA) ont par exemple expliqué que "Les salariés de l’agence Mory Ducros de Strasbourg avaient « exhorté » lundi les syndicats à signer l’accord qui doit permettre au tribunal de Pontoise de statuer aujourd’hui sur l’offre de reprise d’Arcole Industrie, comme l’ont fait un peu partout en France « les collaborateurs » du transporteur « qui potentiellement pourraient être sauvés »". De son côté, France Bleu a souligné que les "35 salariés du site Mory Ducros de la Riche [soutenaient] le collectif des 2 210".

Problème : ce collectif n'est pas vraiment une réunion spontanée de salariés. Un document, que se sont procurés Mediapart, France Info et L'Humanité, "démontre que le texte du communiqué a été transmis par le directeur régional de Nancy, Alain Maubrun, à huit de ses collègues, répartis sur tout le territoire, à Orléans, Rennes, Le Mans, Marseille, Toulouse, Beauvais, Lyon et Gonesse", écrit le site d'information. Dans le mail qui valide le texte du communiqué, le directeur régional de Nancy donne ses consignes : les autres directeurs régionaux doivent trouver des "interlocuteurs en agence en leur traduisant le présent mail afin qu'ils sachent ce que l'on attend d'eux". Ces salariés, triés sur le volet (ils ne doivent bien évidemment pas faire partie des futurs licenciés), devaient ensuite s'exprimer dans les médias. Mais attention, "ce correspondant devra être ferme sur le fait qu’il n’y a aucune instrumentalisation de la part des directeurs régionaux et que ce sont des âmes de bonne volonté qui se sont concertés pour rédiger le document", précise le mail. Une belle instrumentalisation donc.

Contacté par Mediapart, l'un des directeurs régionaux, nie pourtant toute manipulation : "Une manipulation de quoi ? S’il y en a qui veulent polémiquer là-dessus, pourquoi pas, mais on voulait simplement se faire entendre". En tout cas, l'opération réussie : la CFDT a signé, la procédure de reprise peut continuer.

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