Maroc / Espagne : deux presses, et l'étrange grâce d'un pédophile
Brève

Maroc / Espagne : deux presses, et l'étrange grâce d'un pédophile

Indignation générale au Maroc, après la décision du roi Mohamed VI d'accorder la grâce à un pédophile espagnol. Cet homme faisait partie d'une liste de 48 prisonniers internés au Maroc dont le roi d'Espagne Juan Carlos aurait demandé la grâce. Mais l'identité de l'homme et ses crimes ont rapidement été révélés par les associations de défense des droits de l'homme provoquant ainsi de violentes manifestations. Suite à ces réactions, le roi Mohamed VI a décidé d'annuler la grâce royale. Le pédophile vient d'être arrêté dans le sud-est de l'Espagne. Au Maroc, le directeur de l'administration pénitentiaire a été révoqué.

C'est une affaire de rois. En visite au Maroc en juillet, Juan Carlos Ier, le roi d'Espagne, a demandé la grâce de prisonniers espagnols qui y purgeaient leur peine, la grande majorité pour trafic de drogue, depuis un ou deux ans. La demande a été acceptée par le roi Mohamed VI, qui a ainsi rendu la liberté à 48 ressortissants espagnols. Seulement voilà, parmi ces prisonniers figurait Daniel Galvan Viña, un homme de 64 ans, condamné pour actes de pédophilie sur onze mineurs marocains. En 2010, il avait été arrêté en possession de CD et clés USB sur lesquels se trouvaient des photos et des vidéos de lui abusant d'enfants. Il avait été condamné à 30 ans de prison ainsi qu'à des amendes de 4400 euros pour chacun des six enfants. Sa sentence avait été confirmée par la justice: en appel puis en cassation selon ce qu'affirme le quotidien espagnol la Vanguardia. Libéré de la prison de Kénitra (à 40 kilomètres de Rabat) mercredi soir, le pédophile a immédiatement regagné l' Espagne. Evidemment plusieurs journaux espagnols font leur Une sur le sujet.

Les révélations de l'identité et des crimes de l'Espagnol ont provoqué de nombreuses manifestations la semaine dernière au Maroc. Selon le journal Marocain Libération, "Depuis vendredi, le Maroc vit sous pression. A l’appel de réseaux sociaux, des manifestations sont organisées –et réprimées- dans les principales villes du pays. La rue gronde. A Rabat, des scènes de violence inouïes ont lieu au centre-ville". (Libération est le journal de l'union socialiste des forces populaires).

Libération (journal marocain), 5 août 2013, photo de manifestants blessés lors des derniers jours de révolte à Rabat picto

Le site indépendant Lakome, a également publié des photos et des vidéos des incidents survenus à Rabat. L'affaire est même devenue un sujet important sur Twitter sous le hashtag : #DanielGate, un nom que reprennent désormais les médias marocains.

Et l'histoire a également fait des remous à l'international. Les réseaux sociaux se sont ainsi mobilisés pour protester contre cette grâce royale. Une page Facebook en anglais dénonce les actes du pédophile et s'insurge contre sa remise en liberté : "Pas de liberté pour un violeur d'enfant".

Devant la révolte des Marocains, le roi a réagi en plusieurs temps. Il a d'abord assuré dans un communiqué qu'il n'était pas au courant de la gravité des faits imputés au gracié. Il a annoncé, de plus, qu'une enquête serait menée pour déterminer les raisons de cette erreur et pour réformer l'attribution de la grâce royale. Dimanche, dans un nouveau communiqué relayé par l'agence de presse marocaine officielle MAP, il a enfin annoncé qu'il annulait la grâce royale de manière "exceptionnelle". Enfin, le roi a annoncé, aujourd'hui, le limogeage du directeur de l'administration pénitentiaire. Selon le journal Le Monde, c'est la première fois au Maroc qu'une décision royale est si fortement remise en cause.

Reste une question fondamentale : la peine sera-t-elle effectuée par Galvan ? En effet, une grâce royale est a priori irrévocable. Le pédophile purgera-t-il sa peine en Espagne où il a finalement été arrêté ce lundi ? Face à ces difficultés juridiques, les deux ministres de la Justice devraient se réunir, mardi 6 août, pour discuter de la situation. De leur côté, suite aux révélations du site Europapress.es, les médias espagnols affirment aujourd'hui que l'Espagne avait demandé l'extradition de Galvan et non pas sa grâce. Sur les 48 prisonniers, l'Espagne n'aurait ainsi demandé de gracier que 18 d'entre eux, espérant seulement l'extradition des 30 autres. Une information qu'aurait confirmé l'ambassadeur de Rabat selon le site El Confidencial.

Qui est vraiment Galvan ?

A ces polémiques sur les responsabilités de la grâce de Galvan, vient s'ajouter un autre aspect. En effet, ce sont les services secrets espagnols le CNI (Centro Nacional de Inteligencia) qui auraient demandé la libération de ces prisonniers, selon le quotidien El Pais. Le site internet marocain, Lakome évoque même la possible appartenance de l'intéressé aux services secrets ibériques.

Mais qui est vraiment Galvan ? C'est la question qui revient au Maroc et qui est posée aussi par Le Monde. L'homme aurait soutenu à son avocat qu'il était un officier de renseignement irakien. C'est ce qu'affirme le site internet Lakome, un journal marocain indépendant.Ces hypothèses du journal indépendant Lakome, ont été reprises par Le Monde.

Si le mystère plane donc sur l'identité de l'Espagnol, sa délinquance sexuelle, elle, est avérée. Ainsi, lors de son procès en 2011, le juge lui aurait demandé : "Pourquoi es-tu venu ici abuser de petits enfants?". Question à laquelle il aurait répondu : "parce qu'ils ne coûtent pas cher et que tout se fait avec de l'argent" selon El Pais.

Par Mathilde Gracia

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