Lemonde.fr : les journalistes protestent contre un "tchat" avec Areva
Brève

Lemonde.fr : les journalistes protestent contre un "tchat" avec Areva

On n'arrête pas l'innovation en matière de publi-rédactionnel. Hier, LeMonde.fr organisait un "chat live" à 19 heures avec Areva, annoncé à grand renfort de pub sur le site. Enfin non, c'est plutôt Areva qui organisait un "chat live" promotionnel sur le site du Monde.fr, car aucun journaliste du site d'information n'y participait. Une nouvelle forme de publi-rédactionnel donc. Certes, sur la page du chat, il était bien indiqué que c'était un "supplément partenaire", mais les journalistes de la rédaction ont peu goûté ce mélange des genres, dénonçant dans un communiqué interne une opération qui "nuit gravement" à l'image du Monde.fr.

Les lecteurs du Monde.fr pouvaient difficilement passer à côté. A la veille d'un "chat live" d'Areva sur Lemonde.fr, une grande publicité avait annoncé cette opération et incitait à débattre.

"Fukushima remet-il en question l'utilisation de l'énergie nucléaire ? Posez dès maintenant votre question et venez débattre demain avec Areva", pouvait-on lire sur le site. Un "chat live" comme Lemonde.fr en fait régulièrement ? Pas tout à fait, car il s'agit ici de publi-rédactionnel : Areva a sélectionné les questions et répondu aux interrogations d'internautes. Selon nos informations, le module de chat n'était même pas hébergé par LeMonde.fr.

De la pub 24 heures avant (capture d'écran par Clément Larrive) picto

Sur la page du "chat", il était bien indiqué qu'il s'agissait d'un "supplément partenaire". En bas de page, une mention précisait que "cette publi-information a été rédigée à des fins publicitaires. La rédaction du Monde.fr n'a en aucune manière participé à sa production". C'est la société Take Part Média qui a réalisé ce supplément. Malgré ces mentions, cette mise en page pouvait-elle prêter à confusion ? Sur twitter, le PDG du Monde Interactif, Philippe Jannet, a réfuté toute ambiguïté : "Quand c'est aussi clairement de la publicité, faut être myope ou de mauvaise foi pour s'en offusquer...", a-t-il écrit.

Il faut croire qu'au Monde.fr, il y a donc des journalistes myopes et de mauvaise foi. Car un communiqué interne du bureau de la Société des rédacteurs du Monde interactif et du conseil de la Société des rédacteurs du Monde dénonce un mélange des genres : "La page appelée depuis la “Une” prête à confusion.Sous une têtière “Supplément partenaire”, elle propose aux internautes de poser leurs questions, sans que soit mentionné le fait que c’est Areva qui sélectionnera les questions et y répondra, ce qui est s’avère très différent d’un chat que Le Monde.fr organiserait avec Areva.

Cette confusion est renforcée par le fait que ce formulaire est accompagné d’une sélection d’articles à nous relatifs au nucléaire, et par le fait que la maquette de la page est proche de celle du reste du site", précise le communiqué. Quant à la mention indiquant qu'il s'agit d'un publi-rédactionnel, elle serait "trop peu visible pour que le lecteur ne s’y trompe pas". Conclusion : "Nous pensons que ce type d’opération nuit gravement à notre image et à notre crédibilité."

picto Le "supplément partenaire" comprenait une sélection d'articles du Monde.fr

Ce n'est pas la première fois qu'Areva envahit les sites par sa publicité. En 2008 déjà, Areva avait "illuminé la Tour Eiffel" et le site de Libé avec une belle publicité. Plus récemment, le site Rue89 avait dû s'expliquer auprès de ses lecteurs suite à la mise en ligne d'une imposante publicité Areva, en précisant qu'il n'y avait "aucune intrusion d'un annonceur dans le contenu rédactionnel". Avec son chat, LeMonde.fr a franchi un cap.

Et pour vous décontaminer de toute cette com' radioactive, consultez notre dossier "Nucléaire, gaz de schiste, brûlants débats".

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