L'après Charlie : défis, et tensions dans la rédaction (Le Monde)
Brève

L'après Charlie : défis, et tensions dans la rédaction (Le Monde)

Le prochain numéro de Charlie Hebdo est prévu pour le 25 février. Plus d'un mois après la tuerie, Le Monde revient sur les défis que doit surmonter la rédaction, notamment le recrutement de nouveaux dessinateurs et la nouvelle répartition de l'actionnariat du journal. Pas évident, surtout que des tensions sont apparues en interne.

Six semaines après la tuerie de Charlie Hebdo, et après quelques jours de vacances, les membres de la rédaction du journal satirique ont recommencé à travailler. Toujours accueillie par Libé, la rédaction pense avoir trouvé de nouveaux locaux dans le 13ème arrondissement de Paris. Les journalistes ont visité les lieux avec des "spécialistes en blindage et dispositifs antibombes", précise Le Monde. "Deux mois auparavant, toute la bande aurait henni de rire de se voir ainsi discuter d’alliages résistants aux balles et de caméras de surveillance, comme dans un James Bond ", relève avec amertume Riss, le nouveau directeur de la rédaction de Charlie.

En attendant le déménagement, la rédaction cherche à recruter de nouveaux dessinateurs. En vain. "Le vivier des dessinateurs de presse est réduit. Il y a encore vingt ans, les caricaturistes venaient proposer leurs petits paquets de croquis, attendant la parution du journal pour voir si on les publierait. (...) Aujourd’hui, la plupart des auteurs de talent se tournent vers la bande dessinée, plus lucrative et moins contrai­gnante", explique Le Monde. Résultat ? "Les quelques dessinateurs contactés pour rejoindre la rédaction ont décliné l’offre". Pourquoi ? "Ils demandent “Est-ce que je serai obligé d’assister à la conférence de rédaction ?”, “Faut-il que je signe de mon vrai nom ?”, et donnent rendez-vous pour dans six mois", assure Riss.

Ce n'est pourtant pas l'argent qui manque. Entre les 8 millions d'exemplaires vendus (qui aurait fait rentrer 10 millions d'euros de bénéfices), les dons (1,75 millions d'euros) et les aides diverses du fonds Google (250 000 euros) et de l'association "Presse et Pluralisme" (200 000 euros), l'hebdomadaire n'a plus de problème de trésorerie. En revanche, des tensions sont apparues à propos de la nouvelle répartition du capital. Avant la tuerie, les trois principaux actionnaires étaient Riss (40%), Charb (40%) et le directeur financier Eric ­Portheault (20%). Charb ayant été tué, Riss et Portheault ont proposé à Luz, auteur de la une "Tout est pardonné", de récupérer ses 40%. Ce que le dessinateur a refusé : Luz "milite, comme les autres, pour une forme de coopérative, une société des rédacteurs qui serait actionnaire du journal", indique Le Monde.

L'ancien directeur de Charlie, Philippe Val, a bien tenté de revenir. "Le soir même de l’attentat, il a proposé son aide par l’intermédiaire de Richard Malka", l'avocat de l'hebdomadaire, assure Le Monde. Un possible retour qui n'a pas été bien accueilli au sein de la rédaction. "Val incarne le Charlie des années 1990. Nous ne voulons pas de ses grilles de lectures, de ses amitiés ou de sa façon de gérer. Il a fait son temps et ce temps est révolu", estime le journaliste de Charlie, Laurent Léger. Val n'a pas laissé que des bons souvenirs. L'équipe ne veut pas revivre ce qui s'est passé en 2008 : un an avant son départ, Val avait empoché 300 000 euros de dividendes, grâce notamment à la vente du numéro sur Mahomet "C'est dur d'être aimé par des cons". A l'époque, le versement de ces dividendes (Cabu avait perçu la même somme, Bernard Maris et Portheault un peu moins) avait suscité de vives critiques. Devant ces réticences, Val a donc fini par jeter l'éponge et renoncer à revenir : "Je n’y retournerai pas. Je ne connais pas les gens de cette équipe", a-t-il déclaré au Point, le 5 février.

Au-delà du cas de Philippe Val, d'autres tensions sont apparues au sein de l'équipe : "Les manières de Riss, cultivé mais moins rond que Charb ne l’était, heurtent, assure Le Monde. L’influence qu’exercerait Richard Malka, l’avocat de Charlie, suscite parfois la controverse. L’arrivée d’Anne Hommel, recommandée par le défenseur du journal pour gérer la presse dans l’urgence, a semé ­le trouble. La jeune femme avait été la conseillère en communication de ­Dominique Strauss-Kahn et de Jérôme Cahuzac". Malgré ces tensions, l'équipe est prête pour sortie d'un nouveau numéro de Charlie. "Nous sommes là à empêcher pour les autres que les limites de la liberté d’expression ne se referment. Mais le plus dur, ce sera de retrouver une légèreté d’esprit, cette envie de rire de tout qui était notre ADN", conclut Riss.

L'après Charlie ? Daniel Schneidermann publie un nouveau livre intitulé On n'a pas fini de rire

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