BFMTV, les gendarmes et le journaliste embarqué qui dit "on"
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BFMTV, les gendarmes et le journaliste embarqué qui dit "on"

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Il est 19 h 42 sur BFMTV ce jeudi 13 avril, 12e jour de mobilisation contre la réforme des retraites. En plateau, Yves Calvi introduit : "On retrouve nos reporters sur le terrain, qui sont en train d'accompagner cette formation de gendarmes mobiles place de la Bastille."

Océan de gendarmes casqués à l'écran. On aperçoit à peine les manifestants derrière la nuée de boucliers. "On était pas mal de temps aux alentours de cette place de la Bastille, on était au boulevard Beaumarchais pour empêcher les gens de repartir en cortège sauvage", explique un homme en voix off. "On n'a pas essuyé de pluie de pavés, on n'a pas essuyé un feu nourri de la part des manifestants. Là, on s'est avancés tranquillement, on les a repoussés, il y a eu quelques huées, mais comparé à ce qu'on a pu vivre dans d'autres manifestations, pour l'instant, c'est relativement calme."

Est-ce un gendarme qui parle de son expérience de précédentes manifs ? Un coup d'œil au bandeau de la chaîne d'info nous informe du contraire : c'est bien un "journaliste BFMTV", envoyé-spécial-avec-les-forces-de-l'ordre, embarqué avec cet escadron de la gendarmerie mobile, qui vient de décrire la scène à la Bastille. En disant "on". Pronom indéfini qui inclut le locuteur. "On", donc, c'est le reporter-sur-le-terrain-et-les-gendarmes-mobiles, sans distinction.

"On", c'est l'accomplissement de trois mois de couverture BFMesque du mouvement social contre la réforme des retraites, des duplex en direct des poubelles, à la répétition systématique et sans distance à l'antenne des messages WhatsApp de la préfecture (la cheffe du service police-justice de BFMTV a évidemment remis ça ce 13 avril), en passant par la cascade de notes de renseignements lues telles quelles en plateau, ou la dénonciation des vio-len-ces des manifestants (mais jamais celles de la police, enfin, pardon, des collègues, "on" s'entend). "On", c'est le journalisme de préfecture à son paroxysme, c'est l'union de la "neutralité journalistique" et des enquêtes classées sans suite de l'IGPN.

Le "journaliste BFMTV", dont le bandeau de la chaîne ne précise jamais le nom (pas plus que ne le font ses collègues en plateau), prend très à cœur son job de reporter-flic. Il poursuit : "Il y a toujours cet objectif de repousser les manifestants, d'essayer de réduire cette place pour les inciter à partir. C'est ce qu'on est en train de faire, on est en train de les repousser un petit peu." Le prix Albert Londres n'est plus très loin. 

Déjà, le 29 mars, BFMTV livrait un splendide publireportage embarqué avec une unité de la Brav-M, ces escadrons descendant des voltigeurs, accusés régulièrement de violences policières depuis le début du mouvement social. Désormais, BFMTV dit "on" en parlant des forces de l'ordre. "On" est dans de beaux draps.

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