Télé "d'après", obsessions d'avant
chronique

Télé "d'après", obsessions d'avant

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Ça s’est joué à un cheveu. Pendant le confinement, les débats ont fleuri à la télé pour imaginer le monde d’après (“plus humain”, “plus altruiste”, grâce à l’ouverture d’un “cycle de régénération”). Des perspectives humanistes, d'autres un peu barrées. Mais à la minute où on a pu sortir, fini les réflexions philosophiques, priorité au direct et retour aux obsessions économiques du monde d'avant : les journalistes se sont précipités chez les coiffeurs et dans les magasins pour scanner en temps réel la croissance du PIB. Car c’est bien beau d’avoir rêvassé pendant deux mois, mais il est temps de revenir au réel. En commençant par travailler (beaucoup) plus.

Fermez les yeux. Inspirez. Et imaginons le monde d'après.

Un monde où on prendrait l’avion en s’asseyant à l’envers...

Où les parcmètres seraient remplacés par des distributeurs de gel hydroalcoolique...

Histoire de débloquer automatiquement le tourniquet d’un magasin grâce à ses mains propres...

Un monde où on attendrait avec impatience cette collection Printemps/été...

Bref, ça va ressembler à quoi le monde d’après ? Pendant les deux mois de confinement, les éditorialistes ont essayé d’en imaginer les contours. Dès la mi-avril, Calvi a tenté de “réinventer le monde” avec ses calvinologues en pleine forme (l'émission de Canal+ est passée de 200 000 téléspectateurs début mai 2019 à 337 000 pour l’émission du 7 mai 2020 par exemple).

Rêvons par exemple avec Dominique Reynié : “Nous sommes dans un cycle de régénération ou bien de disparition. L’idée de se réinventer n’est pas une option, c’est une nécessité, une obligation.(...) Nous sommes de plain-pied dans une nouvelle époque historique”. A quoi pourrait-elle ressembler ? “On voit bien que se bousculent dans cette crise toutes les dimensions de nos vies, le biologique, l’économique, le politique, le culturel, le psychologique, etc., le conscient, l’inconscient mais aussi la planète entière”.

On est un peu perdu mais c’est normal, d’après Stéphanie Germani, psychologue-clinicienne et éditorialiste chez Calvi : “Finalement, on est face à la castration (...), on est tous face à une perte là. Et c’est un peu le cycle de la vie : perdre son emploi, ça peut arriver sans coronavirus. Perdre un membre de notre famille, ça peut arriver sans coronavirus. On a souvent tendance à oublier que la mort existe, que la maladie existe. On est un petit peu dans une toute puissance narcissique. Là, finalement, ça nous renvoie à nos certitudes et nos incertitudes, c’est-à-dire que cette période, c’est une castration symbolique (...) mais après l’effondrement, il y a aussi la reconstruction”.

Également présente sur le plateau, la porte-parole du Medef voit  encore plus loin : “Est-ce que, dans un futur qui n’est pas une bande dessinée, pour aller dans les transports en commun, on ne sera pas tous muni d’un casque, qui sera intelligent, ou d’une visière ou de lunettes de soleil qui seront intelligentes..."

Un monde ultraconnecté, le monde d’après ? “Le monde d’après, c’est deux mondes : digitalisation ok, mais pas pour tout le monde. Il y a le monde virtuel, et il y a le monde réel”, notait fort justement une invitée de Pascal Praud. Lequel confirmait que “le monde, c’est pas un fichier Excel”.

Pas un fichier excel, non. Le monde d’après, c’est le retour de l’humain. Une spécialité de Jacques Attali, un visionnaire qui avait prévu la pandémie (et donc le monde d'après)...

 “Nos sociétés ne consacrent pas assez de moyens à tout ce qu’on pourrait appeler les industries de la vie”, nous assure Attali. Il faut donc “mettre l’accent sur les métiers empathiques, sur l’altruisme. Les métiers empathiques, ce sont les métiers de la santé, de l’alimentation, de l’information, de la distraction, de la culture, de l’éducation. Ce sont tous les gens qui mériteraient d’avoir beaucoup plus de revenus et aussi d’être plus nombreux. Une société peut fonctionner parfaitement bien en ayant 60% de sa richesse consacrée aux métiers dont je viens de parler”.

Plus humain, altruiste, connecté mais pas trop, ce monde d’après sera… ou ne sera pas.

On en était là dans ces réflexions le 10 mai au soir. Quand soudain…

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