Vendôme vendue
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Vendôme vendue

Les amateurs de joaillerie pourront bientôt acheter des bijoux de la marque Vendôme. Ces bijoux seront commercialisés par la société Louis Vuitton, filiale de la multinationale du luxe LVMH. Cette future marque fait bien entendu référence à la place Vendôme, à Paris, haut lieu de la joaillerie parisienne (en même temps que siège du ministère de la Justice). Pour ce faire, Louis Vuitton a dû acheter la marque... à la ville de Vendôme (Loir-et-Cher) qui en est propriétaire. Laquelle ville s'est empressée de la lui céder pour une somme de... dix-mille euros. 

La modicité de cette somme a suscité une certaine émotion, notamment de notre animatrice Nassira El Moaddem, originaire de Romorantin, et à qui rien de ce qui concerne le Loir-et-Cher n'est étranger. Nassira a fait remarquer que Louis Vuitton, détenteur de la même marque dans la classe de la maroquinerie, commercialise par exemple des chaussures au prix de 1180 euros la paire, soit environ un dixième du prix auquel elle a acheté la marque à la ville de Vendôme.

Pour sa défense, le maire de Vendôme, Laurent Brillard (UDI) fait valoir que LVMH, qui a déjà ouvert un atelier de maroquinerie à Vendôme, devrait créer à terme 500 emplois à proximité. "J’ai fait le calcul: 10000 euros, cela représente six secondes des gains de Bernard Arnault", s’indigne auprès de Libération Florent Grospart, conseiller municipal d’opposition Europe Écologie-les Verts, qui a voté contre la cession.

À certaines oreilles, le nom de Vendôme n'évoquera pas seulement la place parisienne du même nom, mais aussi un très ancien refrain français de la guerre de Cent Ans, contemporain de Jeanne d'Arc : "Mes amis que reste-t-il / À ce dauphin si gentil / Orléans / Beaugency / Notre-Dame-de-Cléry / Vendôme, Vendôme". Ce canon lancinant est parvenu, au XXe siècle, à Aragon, qui y fait référence dans sa poésie de la Résistance, dans les vers suivants : "Je vous salue ma France arrachée aux fantômes / Ô rendue à la paix Vaisseau sauvé des eaux / Pays qui chante Orléans Beaugency Vendôme / Cloches cloches sonnez l'Angelus des oiseaux". Après Aragon, le Carillon de Vendôme a été notamment repris par David Crosby (de Crosby Stills Nash and Young), ou par Laurent Voulzy, liste non exhaustive.

À de jeunes écolières qui, en 1951, l'interrogeaient sur l'association de ces trois noms, Aragon répondit  qu'il s'était, en effet, inspiré de "cette chanson très belle et très nostalgique qui imite, dans son mouvement et ses paroles, le chant des cloches, comme si les clochers de France se répondaient, et le nom de Vendôme y joue, à cause de sa syllabe longue et sourde, le rôle du bourdon". Il est inimaginable que Laurent Brillard, maire de Vendôme, ne connaisse pas la totalité de cette histoire. Il est d'autant plus étrange qu'il n'ait pas négocié auprès de LVMH, en échange de ce morceau de patrimoine historico-poétique, un petit supplément.

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