Cohen, Lemaire, et l'islamobsession numérique
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Cohen, Lemaire, et l'islamobsession numérique

"Pardon de commencer par ce qui n'y figure pas" s'excuse Patrick Cohen, en recevant la secrétaire d'Etat au numérique Axelle Lemaire

, à propos de son projet de loi sur "la République numérique". Ce qui n'y figure pas ? Comme Rue89, Cohen va-t-il insister sur la disparition, dans le projet de loi, de toute tentative de définition du domaine public (explications ici) ? Pas du tout. Chacun son tropisme. Un seul sujet intéresse Patrick Cohen : "Quand un adolescent de quinze ans agresse à la machette un enseignant juif, et qu'il dit qu'il s'est radicalisé sur Internet, et seulement sur Internet, il n'y a pas quelque chose à faire ?" Et les questions se succèdent, en rafale, toujours à propos de la propagande djihadiste : "il est normal que les grandes sociétés soient irresponsables de ce qui transite dans leurs tuyaux ?" "Xavier Bertrand a parlé de l'imam Google, vous pourriez reprendre l'expression à votre compte, ou vous la jugez excessive ?" "Vous allez légiférer sur le revenge porn. C'est très bien. Mais vous comprenez le sentiment de nombreux citoyens, qui trouvent que vous pourriez aussi légiférer sur la propagande djihadiste ?" Enfin, à 8 heures 29, une minute avant la revue de presse, car il faut bien donner son sussucre à la ministre : "dans votre projet de loi, quelle est la disposition dont vous êtes la plus fière".

Il y aurait beaucoup de choses à dire sur ce projet de loi, sur ce qui a disparu sous la pression des ayants droit, mais aussi sur tout ce qui y subsiste, et que l'on n'apprend d'ailleurs sur France Inter que quasi-accidentellement, à la fin de la séquence quand le chroniqueur littéraire Augustin Trapenard vient se faire le porte-parole de l'éditeur scientifique Elsevier, en demandant à Lemaire si, en autorisant la mise en libre accès de travaux scientifiques, elle a pour dessein caché de tuer l'édition (tout notre dossier sur la rébellion des chercheurs contre les abus de l'édition scientifique est ici).

Mais non. Un seul sujet intéresse Patrick Cohen, comme tous ses homologues : la propagande djihadiste. Que Internet, le méchant Internet, soit rendu responsable des attentats, des guerres, des overdoses, des maffias, de la pédophilie, notamment par les vedettes de l'audiovisuel, cela fait vingt ans que ça dure. Pas totalement à tort, d'ailleurs. La "fantastique liberté d'Internet" ne devrait pas être un totem bloquant tout débat, et oui, les "géants du Net" pourraient être plus rapides, plus vigilants, dans la mise hors ligne de toutes sortes de contenus problématiques. Le plus navrant, c'est de voir cette panique-là bloquer toute autre réflexion, ne serait-ce qu'en monopolisant le temps d'antenne. De voir une certaine élite française -pas seulement médiatique, mais aussi politique, comme le dénonçait la députée Isabelle Attard- si recroquevillée sur son islamobsession et son ressentiment à l'égard des "géants anglo-saxons", qu'elle s'auto-aveugle aux exigences et aux enjeux de l'innovation. S'il y a une "victoire des terroristes", elle est bien là aussi.

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