Invité ce mardi matin de France Info, le Premier ministre Édouard Philippe a désavoué le ministre de la Justice sur son appel d'intimidation à Radio France.
Le coup de téléphone de Bayrou au directeur de la cellule investigation de Radio France Jacques Monin, avait été révélé par Mediapart le 9 juin, comme nous vous le relations. Le garde des Sceaux s'était plaint auprès de Monin de l'enquête de journalistes de France Info visant le Modem. Le parti que le ministre préside aurait en effet usé d'emplois fictifs d'assistants parlementaires européens entre 2009 et 2014.
Le ministre de la Justice s'était défendu auprès de Mediapart de toute tentative d'intimidation, bien qu'il ait menacé Radio France "d'éventuelles plaintes pour harcèlement." Surtout, il avait affirmé avoir réalisé cet appel en-dehors de ses fonctions : "Ce n'est pas le ministre de la justice ni le président du Modem qui a appelé, c'est le citoyen", s'était-il justifié.
Il a donc été recadré aujourd'hui par le chef du gouvernement. "Quand on est ministre, on ne peut plus réagir comme quand on est un simple citoyen", avertit Philippe au micro de France Info, même s'il "comprend" que Bayrou ait pu être "agacé" par "la façon dont les questions étaient posées" par les journalistes aux salariés du Modem. "J'ai indiqué à l'ensemble des ministres qu'il fallait systématiquement penser à cette question de l'exemplarité" ajoute-t-il.
Cet après-midi, Bayrou persiste et signe. "Chaque fois qu'il y aura quelque chose à dire à des Français, des responsables, qu'ils soient politiques, qu'ils soient journalistiques, qu'ils soient médiatiques, chaque fois qu'il y aura quelque chose à dire, je le dirai", affirme-t-il, faisant fi des recommandations du Premier ministre.
Le ton de Philippe tranchait avec celui du porte-parole du gouvernement Christophe Castaner qui, le dimanche 11 juin dernier, relativisait sur BFMTV l'attitude de Bayrou : "Je vais vous faire une confidence mais chacun le sait ici. Nous passons notre vie à échanger, entre journalistes et politiques, ça s'appelle le off, c'est un grand sport national et on en fait tous." Le "off" consiste à recueillir des informations auprès d'une source sans que celle-ci accepte d'être citée, ou sans que l'information ne puisse être dévoilée publiquement. Une pratique assez différente d'un appel de pression de la part d'un ministre sur une enquête en cours.
(Par Hélène Assekour)
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