30% de salariés atteints de bore out ? Le Monde récidive
Brève

30% de salariés atteints de bore out ? Le Monde récidive

Le Monde adooooore le bore-out – autrement dit le syndrome d'épuisement professionnel par l'ennui. Déjà, l’an passé, le quotidien consacrait un article à ce "nouveau mal du siècle". Rebelote en mars dernier. A chaque fois, Le Monde cite l’économiste Christian Bourion qui assure qu'un tiers des salariés seraient atteints de bore out. Pourtant, comme l’ont signalé deux professeurs dans un billet de blog hébergé… par Le Monde, et comme nous l’avions également constaté, ce chiffre n’est qu’une estimation. Ce qui n’empêche en rien le quotidien de récidiver avec un troisième article sur le sujet, sans nuancer là encore le chiffre de Bourion.

Et de trois ! En deux ans, Le Monde a consacré trois articles au bore out, syndrome d'épuisement professionnel par l'ennui. Le premier, publié l’an passé, évoque un "nouveau mal du siècle". Le deuxième, publié en mars dernier, assure que "le phénomène est loin d’être marginal". Et enfin le troisième, publié mercredi 5 mai, estime que 15% à 30% des salariés seraient atteints du syndrome, la fourchette haute étant celle de Christian Bourion, professeur à ICN Business School Nancy-Metz et auteur d’un livre sur le sujet. Conclusion du quotidien : "chiffrer le bore-out est particulièrement difficile car il est tabou."

Tabou, le bore out ? Pas vraiment. Comme nous le racontions ici, les médias raffolent de ce nouveau syndrome – à distinguer du burn-out, syndrome d'épuisement professionnel qui lui tente d’être reconnu comme maladie professionnelle. Et à chaque article sur le sujet, une source : l’économiste Bourion. Pourtant, à la lecture du billet de blog (hébergé par Le Monde) publié le 10 avril dernier et signé par deux professeurs en science de gestion, Emmanuel Abord de Chatillon et Céline Desmarais, les travaux de l’économiste sont à prendre avec des pincettes. Et notamment le chiffre de 30% de salariés atteints par le bore out qui repose sur un sondage réalisé auprès… de demandeurs d’emploi. Interrogé à l’époque par @si, Bourion reconnaissait que ce chiffre était une "espèce de moyenne", une "estimation" établie à partir des données collectées sur Internet. Autrement dit, des conversations de personnes disant s’ennuyer au travail.

Si l’ennui au travail est un vrai sujet en soi, en revanche, conclure qu’un tiers des salariés seraient atteints de ce syndrome susceptible de déclencher des pathologies cardiovasculaires ou des dépressions, est tout de même exagéré. Les deux professeurs ont d’ailleurs alerté de nombreux médias sur cette approximation, et notamment Le Monde. Peine perdue : comme nous le racontions également, le quotidien a refusé de publier un rectificatif ou même de faire un simple renvoi au billet des professeurs. A ce jour, et à notre connaissance, seul le magazine Psychologies a ajouté une ligne à son dossier qui renvoie au billet d’Abord de Chatillon et Desmarais. A noter également le coup de gueule de l’ancien journaliste spécialiste de la santé Vincent Olivier – et aujourd’hui à la tête d’une société de conseil en communication – qui dénonçait hier sur son blog hébergé par L’Express "une manipulation statistique".

Pourquoi un troisième article du Monde ? Peut-être pour surfer sur l’actualité. Comme nous le racontions ici, les médias se sont jetés en début de semaine sur le "premier cas de bore out" examiné par le Conseil des prud’hommes de Paris. Pourtant, à regarder de près, ce cas est plutôt celui d’une mise au placard du salarié – et encore, l’affaire semble compliquée – et non d’un épuisement dû à l’ennui au travail. Mais bore out, c’est tellement plus vendeur et moderne !

>> L’occasion de lire ou relire notre article "Bore out : tabou ou concept bidon ?"

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