Coup d'arrêt Taxe Tobin : le pantouflage en cause (Mediapart)
Brève

Coup d'arrêt Taxe Tobin : le pantouflage en cause (Mediapart)

Pourquoi la taxe sur les transactions financières – dite aussi TTF ou taxe Tobin – est-elle en souffrance ? En cause : le pantouflage. Après l’annonce hier d’un nième report de la TTF à l'échelle européenne, Mediapart révèle le transfert de Benoît de La Chapelle, spécialiste de la Taxe Tobin auprès des institutions européennes, vers la Fédération bancaire française, le lobby de l'industrie bancaire. Une porosité qui n’aide pas la taxe à voir le jour.

Quelle surprise ! Hier, sur le site d’Euractiv, on apprenait que "les 11 pays de la zone euro concernés ne sont pas parvenus à se mettre d'accord sur les grandes lignes d'un projet de taxe sur les transactions financières (TTF) avant la fin de l'année, ce qui remet en cause l'instauration de ce prélèvement contesté début 2016 comme prévu". Les ministres des Finances réunis aujourd’hui mardi 9 décembre ne trancheront donc pas sur les contours de cette taxe.

Une taxe reportée sine die ? Un diplomate cité par Euractiv et interrogé sur le prochain calendrier estime qu’il faudra "beaucoup de volonté politique". Comprendre : c'est loin d'être gagné. D'autant que la volonté des Français n'est pas flamboyante. Selon Ludovic Lamant, journaliste de Mediapart basé à Bruxelles et parfois à Madrid, le ministre des finances Michel Sapin ne pousse pas vraiment la création d’une taxe ambitieuse. En novembre encore, il annonçait vouloir limiter la portée de la TTF aux seules actions et à certains contrats d’assurance contre le défaut de paiement d’une action. Adieu donc la taxe sur les dérivés – le plus gros des transactions.

Rappelons que ce manque d’ambition se retrouve également à l'échelle nationale car la TTF créée sous Sarkozy, taxe finalement réduite à peau de chagrin, n'a pas du tout été étoffée depuis l’arrivée des socialistes au pouvoir comme on pouvait l'espérer. Des socialistes français montrés du doigt par leurs camarades européens selon Lamant, qui cite un courrier révélé par Les Echos et dans lequel les partis sociaux-démocrates allemand (SPD) et autrichien (SPÖ) demandent aux socialistes européens mais surtout aux Français d’inclure tous les dérivés "car le trading international de dérivés a désormais atteint un volume d'environ douze fois le PIB mondial."


Pourquoi ce manque d’ambition ? Lamant met en cause les questions de transfert "dont la France a le secret". En effet, la France semble championne des pantouflages dans le secteur financier. Dernier exemple en date : le cas de Benoît de La Chapelle. Mediapart explique qu’il était depuis 2010 "responsable des «affaires financières et monétaires» au sein de la représentation permanente française auprès des institutions européennes. Un poste influent à Bruxelles, qu'il a occupé en pleine tempête économique. Il l'a quitté pour rejoindre, le 3 novembre 2014, la Fédération bancaire française (FBF). À 44 ans, De la Chapelle est désormais directeur délégué de la FBF, lobby de l'industrie bancaire française, et l'un des plus fervents adversaires à l'actuelle taxe sur les transactions financières". Autre cas encore plus récent cité par Mediapart, celui d’une "autre experte des questions financières, cette fois au service de Bercy […] qui vient de rejoindre, fin novembre, la Société générale, l'une des banques qui a le plus à perdre d'une taxation des produits dérivés".

Le phénomène de pantouflage n’est pas nouveau et il expliquait déjà les freins empêchant une taxe sur les transactions financières digne de ce nom comme nous le racontions ici. Cette porosité n’a pas aidé non plus à la naissance d’une réforme bancaire ambitieuse. Souvenez-vous : lors des discussions à l’Assemblée nationale en janvier 2013 suivies par @si, le député socialiste Pascal Cherki interrogeait Jean-Laurent Bonnafé, patron de BNP-Paribas, sur l’embauche de l’ancien sous-directeur du ministère de l’Economie en charge des relations internationales en tant que responsable des affaires fiscales de la banque. Cette pratique, véritable "capture" dénoncée par Christian Chavagneux et Thierry Philipponnat dans un récent ouvrage cité par Lamant, "explique la volonté, non avouée mais bien réelle, de Paris de ne pas réformer la structure des banques"…" et encore moins d'avancer sur la taxe Tobin ajoute le journaliste.

Et la volonté d’encadrer le pantouflage ? Le gouvernement n’a pour l’heure fait aucune proposition. A moins qu’elle ne soit cachée dans la Loi Macron dite loi Fourre-tout ? Promis, on va fouiller.

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