L'INSEE, la croissance, et le bonheur
de la "courbe du bonheur" publiée par l'INSEE. Cette courbe fait la joie des radios du matin, qui ont amorcé leur décrue Obama. Elle est certainement promise à un grand succès médiatique. "Dans le contexte actuel des doutes sur la croissance économique et sa capacité à être le moteur principal du progrès social, le bonheur (re-)devient un objet d'études privilégié pour les économistes" analyse l'INSEE.
Résumons : dans une existence humaine, on atteint le pic de ses
revenus à 45 ans, mais le comble du bonheur seulement vingt ans plus
tard, entre 65 et 70 ans. C'est forcément vrai, puisque c'est l'INSEE
qui l'assure. Après 70 ans, ajoutent joliment les statisticiens,
l'indice de satisfaction décroît rapidement. Ces chiffres implacables
sont extraits du "portail social annuel" de l'INSEE, lequel, si l'on en
croit l'AFP qui l'a lu jusqu'au bout,
inclut aussi des statistiques moins réjouissantes: l'inflation, en
2007, a atteint son plus haut niveau depuis 1991, même (si on comprend
bien) si elle est tout de même moins élevée que ce qu'imaginent les
sondés. Mais ces chiffres-là auront moins de succès que la "courbe du
bonheur".
Il
est dommage que la sophistication statistique n'ait pas été aussi
développée qu'aujourd'hui à l'époque d'Alphonse Allais, qui aurait
certainement proposé une grande réforme biologique, limitant
l'existence aux "années heureuses", entre 65 et 70 ans. Ces révélations
statistiques, en tout cas, projettent le matinaute quinquagénaire, dans
sa salle de bains, sur les montagnes russes de la frustration et de
l'espoir. A l'accablement de se savoir sur la pente inéluctable du
déclin financier, succède l'impatience : encore quinze ans avant
l'extase absolue ! Consolation pour le quinqua: les infâmes quadras, et
les ignobles trentenaires, qui poussent derrière lui, sont encore moins
heureux, et n'en finissent pas de se dessécher dans l'interminable
traversée du désert qui s'étend entre 20 et 65 ans, dont lui-même, avec
des jumelles, voit enfin le bout.
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