Les 100 000 mails fantômes d'Hadopi (Numerama)
Brève

Les 100 000 mails fantômes d'Hadopi (Numerama)

L'Hadopi a-t-elle vraiment envoyé 100 000 e-mails d'avertissements aux internautes pirates depuis début octobre ? Le site Numerama, activement opposé à la Haute autorité, affirme que le chiffre, évoqué partout dans la presse depuis dix jours, "est faux".

Dans un article du Monde le 18 décembre, Eric Walter, le secrétaire général de l'Hadopi, affirmait qu'"un total de 100 000 mails en deux mois" avaient été envoyés à des internautes indélicats qui ont téléchargé illégalement de la musique ou des films. Il défendait ainsi le bilan de l'institution, qui a commencé son travail le 2 octobre.


Elle est notamment critiquée par les représentants des industriels de la musique et du cinéma, qui signaleraient, selon le Monde, "50 000 adresses IP suspectes" par jour, et estiment que la machine met du temps à démarrer…

Quelques jours plus tard, le site du Nouvel Observateur relayait un article de ZDNet, qui signalait le scepticisme de certains observateurs. Numerama, déjà, disait son étonnement devant ce chiffre. Sur son compte Twitter, le responsable juridique de Free Alexandre Archambault, ironisait : "Erreur de décimale. Ou alors c'est que les abonnés Free sont plus vertueux qu'ailleurs."

Ces doutes n'ont pas empêché Le Figaro d'assurer, dans un bel article promotionnel, que la haute autorité "a mis en garde 100 000 internautes". En dix jours, le nombre de signalements des industriels est passé, lui, à 70 000 par jours. Le Monde évaluait à 4% la proportion de cas signalés traités par l'Hadopi ; Le Figaro la ramène donc à 3%. "Nous avons choisi volontairement cette proportion pour tester le dispositif, évaluer les réactions", assurent les trois magistrats de la Haute autorité dans l'article…

Le même jour,pour appuyer le propos, les représentants de la Hadopi signent une tribune dans Le Monde, destinée à "couper court à des rumeurs fantaisistes". Et si l'on en croit la dépêche AFP qui résume cette tribune, les magistrats sont cohérents : l'agence de presse assure que l'Hadopi "a adressé 100 000 courriels d'avertissement aux internautes depuis octobre". Et cette affirmation est immédiatement reprise partout sur la toile, via les sites d'info qui relayent automatiquement les dépêches… Numérama énumère les titres : "Reuters ("Hadopi a envoyé 100000 avertissements en trois mois"), 01Net ("celle-ci aurait envoyé 100000 courriels"), Metro ("100.000'pirates' avertis"), Le Figaro ("L'Hadopi a mis en garde 100000 internautes"), Generation NT ("100000 e-mails d'avertissement ont été envoyés"), L'Informaticien ("L'Hadopi, qui a mis en garde 100000 internautes"), Europe 1 ("100000internautes avertis par Hadopi"), Ouest France, L'Expansion, le JDD, Sud Ouest, France 2, etc., etc."

En voici un petit échantillon, sur les sites du Nouvel Obs, de Métro, du Télégramme de Brest
et de Ouest France :



Sauf que… Le texte des représentants de l'Hadopi ne parle pas, en fait, de mails "envoyés" aux internautes. En revanche, ses auteurs indiquent noir sur blanc que "depuis la mise en oeuvre effective du dispositif, début octobre, nous avons adressé aux fournisseurs d'accès 100 000 demandes d'identification". Les demandes d'identification sont envoyées par l'Hadopi aux fournisseurs d'accès internet, afin qu'ils indiquent le nom et les coordonnées de l'internaute indélicat dont l'ordinateur est identifié par une adresse IP. "Concrètement, explique Numerama, l'Hadopi envoie chaque jour une liste d'adresses IP que les FAI doivent retourner complétée des noms, adresse e-mail et autres informations personnelles concernant les abonnés (…). Ca n'est qu'à réception de cette liste complétée que la CPD décide, ou non, d'envoyer des mails aux abonnés identifiés. Ce qu'elle ne fait pas, tout du moins pour l'instant, de manière automatique et massive."

En effet, bien que personne ne dispose de données précises, il semble que l'Hadopi n'envoie pas d'avertissement (ou "recommandation", selon la terminologie officielle) à tous les internautes repérés. Ne serait-ce que parce que des erreurs se glissent dans la liste, comme l'avait révélé PCInpact. Mais aussi peut-être parce que l'institution craint d'être débordée. Ainsi, dans une interview repérée par Numerama, sa présidente Mireille Imbert-Quaretta reconnaissait en novembre que si "pour chaque recommandation envoyée", l'internaute répondait, pour faire une remarque ou demander quelle œuvre il aurait illégalement téléchargée, "cela aura forcément des conséquences sur le volume des recommandations qui suivront". Traduction: si trop de gens demandent des explications, la quinzaine de salariés seront vite submergés.

Combien de mails ont été réellement envoyés ? Selon PCINpact, ce serait plutôt entre 20.000 et 25.000, soit bien loin des 100.000 demandes. Le flou et les "rumeurs fantaisistes" persistent.

Pour en savoir plus sur Numerama, lisez le portrait que nous avions tiré des sites d'info anti-Hadopi, ou écoutez son fondateur Guillaume Champeau sur notre plateau.

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