Dieu assassin ? Ceux qui ne sont plus Charlie, et les autres
Brève

Dieu assassin ? Ceux qui ne sont plus Charlie, et les autres

Dieu assassin ? Coupable ? Mais au fait, quel Dieu ? Un Dieu chrétien, ou un Dieu universel ? La Une du numéro de Charlie Hebdo paru cette semaine, un an après l'assassinat de onze personnes à la rédaction du journal par les frères Kouachi, est âprement discutée dans la presse et sur les réseaux sociaux. Riss y figure un Dieu en sandales, taché de sang, kalachnikov au dos, avec cette légende : "Un an après, l'assassin court toujours".

C'est un Dieu. Mais quel Dieu ? Le personnage dessiné par Riss pour ce numéro de Charlie Hebdo porte des sandales, une kalachnikov, et est surplombé d'un œil dans un triangle. Œil de la providence métaphore d'un Dieu générique ? Ou symbole plus spécifique de la Trinité chrétienne ? Pour le directeur de la rédaction de l'hebdomadaire chrétien La Vie Jean-Pierre Denis, pas de doute, c'est le Dieu chrétien qui est visé :

Cela semble être également l'interprétation d'un abbé des Yvelines, Pierre Amar, qui regrette que "huit jours après Noël où on fête un Dieu désarmé pacifique couché dans la paille, Charlie Hebdo insulte, salit et dénigre" :

Chrétien, "l'assassin" ? Le symbole de l’œil dans le triangle a déjà été utilisé par les dessinateurs de Charlie pour faire référence au Dieu chrétien, mais pas que. Si en novembre 2012, Luz l'associait (dans une mise en scène peu orthodoxe) à la trinité chrétienne...

Une de Charlie Hebdo, 7 novembre 2012

... en octobre 2002, il était cette fois utilisé par Cabu pour illustrer un Dieu vraisemblablement musulman, puisque figurant aux côtés d'un homme lançant une bombe depuis un minaret-obus :

Une de Charlie hebdo, 16 octobre 2002

Un Dieu indéterminé, donc. C'est précisément ce que regrette la directrice de la rédaction de Causeur Élisabeth Lévy : "J’ai de l’amitié pour Riss. Qu’il me pardonne donc de penser que là, il charrie grave – même s’il est sûr que son édito est meilleur que sa une. Qu’il ne veuille pas dessiner Mahomet, c’est son affaire. Qu’il noie le poisson à ce point, c’est aussi la nôtre. (...) Le message hyper-finaud caché derrière le dessin, c’est que l’homme est bon et que c’est la religion qui le corrompt. Et toutes les religions ont leurs criminels… Il me semble qu’il y en a une qui en sécrète plus que d’autres à notre époque, mais ce ne serait pas gentil de le rappeler."

Isabelle Balkany n'a pas apprécié non plus le dessin de Riss, lui préférant une image du pape François colombe à la main. "Je ne suis plus Charlie", annonce l'ancienne conseillère générale des Hauts-de-Seine : "Oui, sans réserve, à la liberté d'expression des journalistes, mais oui aussi, et sans aucune réserve, à celle des croyants des religions monothéistes ! Halte au terrorisme intellectuel de la laïcité !"

Une déclaration qui a manifestement soulagé une partie de la rédaction du journal. "Je suis, ils sont, nous sommes rassurés..." a ainsi répondu l'essayiste Caroline Fourest au message d'Isabelle Balkany.

Du côté des éditorialistes de la presse régionale également, la Une de Riss a fait réagir. Le rédacteur en chef adjoint du Midi Libre Yann Marec regrette un dessin "incendiaire" : "Les traits inflammables de cette caricature vont à nouveau nourrir des affrontements verbaux entre les tenants de la laïcité et du fait religieux. Ensuite et surtout, le risque de la mèche incendiaire peut exploser dans les milieux terroristes. La France pouvait en faire l’économie."

Des réactions de surprise... surprenantes, pour l'historien des médias Christian Delporte. "Plaisantes ces bonnes âmes qui découvrent que est antireligieux. Il l'est depuis sa fondation, en 1970 :-)", commente-t-il.

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