Le 9 décembre, France 2 diffusait un reportage sur les algues vertes, qui chaque été polluent certaines plages bretonnes. Sur Slate.fr, Nicolas-Jean Brehon, chargé d'enseignement en master de finances publiques à la faculté Paris I Sorbonne et spécialiste de la PAC, estime que les agriculteurs, dont la production de lisier est le principal responsable du problème, sont victimes d'un "lynchage médiatique".

Les bretons connaissent le problème depuis longtemps : les nitrates issus de l'élevage de porcs intensif de la région se concentrent dans les baies, et s'y transforment en algues vertes qui se déposent sur les plages. En séchant, elles produisent un gaz toxique, l'hydrogène sulfuré.

Quand, au mois d'avril, Thalassa s'était penché sur le sujet, les Bretons n'avaient pas apprécié. Cet été, la mort d'un cheval sur la plage de Saint-Michel-en-Grève avait attiré les caméras des jités. Le 9 décembre, c'était au tour d'Envoyé spécial de consacrer un reportage à ce sujet, baptisé sobrement "l'algue tueuse". La caméra de Caroline Benarrosh et Guillaume Viart est allée voir sensiblement les mêmes acteurs que les autres reportages : officiels, médecins, associations, agriculteurs, mais aussi plusieurs riverains pointant les risques de santé publique.

Pour Nicolas-Jean Brehon, chargé d'enseignement en master de finances publiques à la faculté Paris I Sorbonne, spécialiste de la PAC et contributeur de Slate.fr, montrer du doigt les pratiques intensives des agriculteurs comme le font ces reportages s'apparente à un "lynchage médiatique".

"Comment ne pas s'offusquer devant ce lynchage médiatique avec d'un côté les méchants — on les connaît — et de l'autre, les représentants des associations de la nature, chevaliers blancs des algues vertes mesurant les émanations qui se dégagent des tas déposés au bout des champs et prétendant que leurs enfants prennent des risques quand ils viennent jouer par ici (sur les tas de fumiers en décomposition ?). Peut-on progresser ainsi ? Chacun enveloppé dans sa certitude. La caricature ne mène à rien. On ne sortira pas de ce lisier en accusant les uns et les autres. Les agriculteurs sont confrontés à des concurrences européennes car la France n'est qu'un producteur parmi d'autres, loin derrière l'Allemagne et l'Espagne", écrit-il.

Il s'en prend ensuite à la construction du reportage d'Envoyé Spécial. "La télé ne sert-elle qu'à émouvoir ? Un reportage plus utile aurait été de savoir s'il y a des algues vertes ailleurs. Que font les Allemands, les Espagnols, de leur lisier indigène pour leur propre consommation de charcuteries? Que font les Danois du lisier des Européens? Et la Chine, premier producteur mondial? Quelles solutions sont envisagées aujourd'hui? La piste du compostage, celle des carburants? Les grandes surfaces ne vont-elles pas se détourner immédiatement des productions locales si leur prix augmente? Les consommateurs sont- ils prêts à payer leur porc plus cher? Peut-on, enfin, trouver des solutions ensemble: producteurs, consommateurs, distributeurs, élus, Etat et médias. Ensemble? Vous avez dit ensemble? Comme c'est bizarre."

Les agriculteurs sont-ils victimes d'un lynchage médiatique ? Pour vous faire votre propre idée, allez voir notre émission consacrée au problème des algues vertes.