Adidas : Tapie n'a pas été lésé (le Monde)
Brève

Adidas : Tapie n'a pas été lésé (le Monde)

Non, Bernard Tapie n’a pas été lésé dans la revente d’Adidas par le Crédit Lyonnais. Vingt ans après le début de l’affaire, un rapport de police remis aux juges qui enquêtent sur l’arbitrage en faveur de Tapie et que Le Monde a pu consulter, est sans appel : l’ancien homme d’affaires n’a pu être lésé puisqu’il a pleinement participé aux opérations. Cette conclusion a pourtant déjà été formulée, notamment sous la plume du journaliste de Mediapart Laurent Mauduit.

Ce n’est plus un nième rebondissement dans l’affaire Tapie – résumée ici-même – mais bien un changement total de scénario que racontent Gérard Davet et Fabrice Lhomme dans Le Monde aujourd’hui : selon un rapport de police consulté par les deux journalistes, la thèse selon laquelle Bernard Tapie aurait été lésé lors de la revente d’Adidas par le crédit Lyonnais à Louis-Dreyfus n’est pas avérée. L'homme d'affaires a en effet toujours soutenu que la banque avait fait une culbute sur son dos.

Cette thèse, Tapie en a fait son miel, ce qui lui a permis d’obtenir "plusieurs décisions de justice en sa faveur, et surtout un arbitrage, facilité par son ami Nicolas Sarkozy, en juillet 2008. La sentence lui a même été si favorable qu'il a obtenu 405 millions d'euros…" Arbitrage aujourd’hui contesté et objet d’une enquête menée par les juges Serge Tournaire, Claire Thépaut et Guillaume Daïeff.

C’est dans le cadre de cette enquête que les trois magistrats ont demandé un rapport pour déterminer si oui on non l’homme d’affaires avait été floué par le Crédit lyonnais. Conclusion après deux ans d’investigation : non.

Selon le rapport remis le 9 juillet dernier, l’enquête menée "a permis de déterminer que M. Tapie avait été pleinement associé aux opérations" (de revente, NDR) qui ont eu lieu en 1993. Tapie était donc au courant de toutes les tractations. Mais le rapport souligne une autre malversation en évoquant deux courriers adressés en 2001 et 2005 à Tapie par l’industriel Robert Louis-Dreyfus, candidat au rachat d’Adidas et aujourd’hui décédé. Dans l’une de ces missives, censées résumer les opérations, il est fait état d’une estimation d’Adidas à 670 millions d'euros, une formulation "inexacte" au début des négociations selon les policiers. En effet, tous les témoins, et même les proches de Tapie, s’accordent à dire qu'au moment des négociations, l'estimation ne dépassait pas les 320 millions d'euros. Le prix de 670 millions, qui sera finalement le prix d'achat d'Adidas par Louis-Dreyfus, a donc été artificiellement gonflé dans ce courrier très postérieur à la vente, pour faire croire que dès le départ Tapie aurait été floué. Et ce sont ces deux missives qui ont été remises au tribunal arbitral par Tapie, lequel a pu arguer pendant des années avoir été spolié par la banque. Le rapport regrette que "leur contenu inexact a été retenu par M. Estoup et ses co-arbitres, pour démontrer l'existence d'une vente au double par le Crédit lyonnais."

On peut cependant s’étonner, après les dizaines de rebondissements qui vont de l’escroquerie en bande organisée aux mises en examen de Christine Lagarde et de Stéphane Richard, et surtout après la multitude d’articles écrits sur le sujet, que la thèse chère à Tapie n’ait pas volé en éclat plus tôt. D’autant que Laurent Mauduit, journaliste à Mediapart et auteur d’un ouvrage copieux sur l’affaire, a souvent affirmé que cette thèse ne tenait pas. Dans un article daté du 26 décembre 2013 intitulé Le Crédit lyonnais n'a jamais berné Tapie : la preuve !, le journaliste a publié "un document signé de la main de Robert Louis-Dreyfus qui vient confirmer ce que de nombreux indices laissaient penser depuis longtemps. Contrairement à ce qu’il prétend, Bernard Tapie n’a jamais été abusé par le Crédit lyonnais lors de la vente du groupe de sports, en 1993, et cela, pour une raison que ce document révèle : les négociations en vue de la cession d’Adidas ont mis face à face non seulement le Crédit lyonnais et le pool d’acquéreurs, mais aussi – c’est ce qu’atteste ce document– «la société venderesse» (c’est-à-dire le groupe Tapie)."

Alors pourquoi la justice a-t-elle mis autant de temps pour en arriver à cette conclusion ? Gérard Davet, joint par @si, ignore si des enquêtes ont été menées sur cette question au moment de l’affaire, dans les années 90. Lui-même ne travaille que sur le dossier Tapie que depuis deux ans. Reste que l’enquête décidée par les trois magistrats saisis du problème de l'arbitrage vient mettre à mal la version de Tapie qui, selon Le Monde, "conteste vigoureusement ce rapport et réserve ses explications".

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