Le 22 septembre 2013, une page de soutien à Hervé Gourdel, guide de haute montagne niçois enlevé en Algérie, apparaît sur Facebook.

Sur cette page, on trouve des textes d'hommage à l'otage, présenté comme une "nouvelle victime du terrorisme islamiste". Mais les administrateurs de la page en question ont également posté de bien curieux messages, comme cette capture d'écran du profil Facebook d'un jeune collégien niçois qui témoignerait d'une montée de l'islamisme en France.

On y voit notamment le drapeau noir du groupe terroriste "Etat Islamique". Et on peut lire ceci : "L'islamisme se répand extrêmement vite, il faut y mettre un coup d'arrêt le plus rapidement possible".

Dans les commentaires de la page Facebook, on trouve également des propos contre les musulmans :

Une page de soutien... ou une page politiquE ?

On trouve également sur cette page Facebook des messages d'un certain... Philippe Vardon.

Qui est ce monsieur Vardon ? En faisant une recherche sur Google, on tombe sur son site officiel. Pour savoir qui est à l'origine d'un site, c'est parfois très simple : regardons la page "Qui suis-je ?" de ce site. On apprend que cet habitant de Nice est un ancien porte-parole des Jeunesses identitaires, et co-fondateur du Bloc identitaire. Et comme l'indique la page Wikipedia de ce mouvement, le Bloc identitaire est un mouvement d'extrême-droite.

Autre indice qui montre le lien entre cette page Facebook et des groupes d'extrême-droite : le jour de la création de cette page, les groupes Facebook Bloc Identitaire et Génération Identitaire en ont immédiatement fait la promotion.

Autre bizarrerie qui laisse penser que cette page n'est pas neutre : elle n'a pas fait la publicité de la marche silencieuse, organisée à Nice le samedi 27 septembre et à laquelle ont participé plus de 3 000 personnes, dont la famille d’Hervé Gourdel, pour rendre hommage à l'otage. Sans doute parce qu'elle jugeait cette marche insuffisamment politisée.

Un autre rassemblement a même été organisé la veille par les administrateurs de cette page, où les participants étaient invités à venir “avec drapeaux niçois ou français”. Sur les photos de ce “contre-rassemblement”, postées sur Facebook, figurent Vardon mais aussi Jacques Peyrat, ancien maire de Nice soutenu par les identitaires aux municipales de 2008 et deux conseillers municipaux FN.

Dernier indice qui montre le lien entre cette page Facebook et l'extrême-droite : quand cette page Facebook relaie une pétition en ligne, signée par plus de 800 personnes, elle reprend au mot près plusieurs points d’un communiqué de Philippe Vardon, daté du 23 septembre 2014 (et publié sur la page de soutien). Dans celui-ci, Vardon demandait "à tous les élus du département de s'engager en défendant l'application de la déchéance de la nationalité française, et évidemment l'interdiction de revenir en France, pour tous les djihadistes binationaux". Il demandait aussi -comme la pétition le réclame- de "cesser immédiatement toutes relations avec les associations islamistes – que celles-ci se réclament du salafisme ou de la doctrine des Frères Musulmans promue par l'UOIF".

Par conséquent, si on ne connaît pas le nom du créateur de la page Facebook, on peut affirmer qu'elle a bien été récupérée par l'extrême-droite. La preuve ? Interrogé par France 3, Philippe Verdon lui-même a reconnu que son mouvement avait apporté une "aide logistique" au rassemblement de soutien à l'otage organisé par cette page Facebook.

Qui se cache derrière une page Facebook ?

En regardant les commentaires, les liens postés et les photographies, on arrive à identifier les auteurs ou les tendances politiques des auteurs de pages Facebook. C'est important pour comprendre les raisons cachées de la diffusion de certaines informations. Dans le cas de cette page Facebook de soutien à Hervé Gourdel, l'objectif est clair : utiliser la mort de cet otage pour désigner les musulmans comme des ennemis. Cette page Facebook fait clairement l'amalgame entre l'Islam (la religion) et l'Islamisme radical (qui peut aboutir à des actes terroristes). Deux notions qui n'ont pourtant rien à voir.