Démission de la présidente des Scouts : "Le Figaro" ne sait pas écrire "homophobie"
"Critiquée pour son engagement au Parti socialiste, la nouvelle présidente des Scouts et guides de France démissionne". C'est ainsi que Le Figaro a fait le choix de titrer son article à propos de la toute récente démission de Marie Rosset, révélée le jour même dans les colonnes de La Croix. Sur X, le média conservateur résume l'affaire ainsi : "Élue PS dans le 5e arrondissement de Paris et ancienne candidate à deux reprises aux législatives avec la NUPES puis le NFP, Marine Rosset avait fait l'objet de vives polémiques après sa nomination en juin comme présidente des Scouts et guides de France". Le tout complété par un texte sur le visuel accompagnant le tweet : "Critiquée pour son engagement au Parti socialiste, la nouvelle présidente des Scouts et guides de France démissionne". De "vives polémiques" et des "critiques" liées à son "engagement au Parti socialiste". Voilà ce que Le Figaro a estimé comme un fidèle résumé de l'affaire.
Certes, Marine Rosset affirme dans La Croix
que "ce qui a changé la donne, c'est l'annonce imprévue d'une élection législative partielle dans [s]a circonscription
(où elle a été candidate en 2022 et 2024, NDLR)".
Mais elle complète en précisant qu'ainsi, "la
moindre de [s]es prises de parole aurait été surveillée"
. Pourquoi ? C'est surtout parce que cette élue socialiste (du 5e arrondissement de Paris), lesbienne, élevant un enfant avec une autre femme et assumant (comme ici dans une interview pour Émile, le magazine de Sciences Po) son engagement pour les"droits des femmes, des homosexuels, le droit à avorter" face à "la peste brune", faisait déjà l'objet d'un violent harcèlement depuis son élection à la quasi-unanimité le 14 juin 2025.
L'article lui-même évoque le harcèlement homophobe qu'a subi Marie Rosset, reprenant des extraits de son interview (mais sans pour autant jamais le nommer): "J’ai été attaquée tous les jours sur les réseaux sociaux, avec des messages souhaitant ma disparition. Il ne faut pas être dupe, la critique sur mon engagement politique était souvent un moyen de me critiquer sans évoquer mon homosexualité". Le Figaro reprend également l'extrait où elle dit être "en colère, notamment parce qu'on a parfois pu remettre en cause [s]a foi, du fait de [s]on homosexualité. C'est blessant". Juste avant, elle estimait être "
devenue l'objet d'une haine"
et plus loin, avoir reçu un "déversoir de haine" et avoir vécu ces derniers mois "colère"
et "souffrance".
Alors pourquoi si mal nommer les choses ? Pourquoi reléguer ainsi les violentes attaques lesbophobes subies ? Peut-être faut-il chercher du côté de "
la vague médiatique, les mensonges et l’essentialisation", qu'
évoque également Marie Rosset dans La Croix ?
Et remonter, par exemple, à cet article du Figaro Magazine de juin dernier titré : "Présidente pro-IVG, ateliers sur l’orientation sexuelle pendant les week-ends : où va le mouvement des Scouts de France ?"
qui s'ouvrait par les propos d'une mère de famille se demandant si ses enfants allaient "être embrigadés", et visiblement effrayée à l'idée que son fils de 13 ans puisse participer à un atelier "Non mais genre"
lors duquel "le
s questions posées faisaient l’amalgame entre les violences sexuelles et le fait de ne pas banaliser l’homosexualité". Il en serait sorti "chamboulé et déstabilisé".
Même lorsqu'il cite le communiqué des Scouts et guides de France apportant son "soutien à la plainte que Marine Rosset a déposée à la suite de menaces en ligne", Le Figaro oublie d'ajouter la partie où il dénonce des "violences, notamment homophobes" décrites comme "profondément contraires" à leur "éthique éducative et associative". Il faut se tourner vers Libération ("
Homophobie -
Ciblée par l’extrême droite, la présidente des Scouts de France démissionne")
ou encore vers
L'Humanité
("Victime d’homophobie et de sexisme, la présidente des Scouts et guides de France, Marine Rosset, contrainte de démissionner"
) pour lire les mots "homophobie"
et "extrême droite"
.
Et vers Le Huffington Post, pour voir cités les médias d'extrême droite (Frontières et Boulevard Voltaire) ayant participé à la charge "anti-Rosset". Tout comme Valeurs Actuelles
qui n'avait pas hésité, en juin, à titrer sur "la nouvelle présidente (gauchiste) des scouts"
et à déplorer l'élection d'une femme "aux nombreux contrastes"
, "parfois difficile à suivre"
et "à l'opposé des valeurs du magistère catholique"
devenue la "porte-parole d'un mouvement de jeunesse, lui aussi de plus en plus gangréné par l'idéologie woke".
"Dire que c'est son engagement (très) à gauche qui posait problème est de l'hypocrisie : c'est bien évidemment son homosexualité revendiquée et militante et son soutien à l'IVG qui sont en cause. Manque de cohérence lorsqu'on est à la tête d'un mouvement qui s'affiche catholique",
peut-on lire parmi les plus de 250 commentaires sous l'article du Figaro. La franchise réactionnaire et lesbophobe a le - seul - mérite d'énoncer les choses clairement !
Cet article est libre d’accès
En vous abonnant, vous contribuez
à une information sur les médias
indépendante et sans pub.
Déjà abonné.e ? Connectez-vousConnectez-vous