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"Les appelés, consentants ? Mais ils n'avaient pas le choix !"

Dans notre série d'été, nous vous faisons revivre, en temps réel, le passage de la paix à la guerre à l'été 1914.

Derniers commentaires

Le making of a enrôlé pas mal de fautes d'orthographe, consentantes ou pas. Et certains mots ont carrément déserté, on dirait.
L'homme est violent envers lui-même. Il est depuis un siècle en train de s'auto-détruire par le réchauffement du climat.
Il était domestique agricole, au plus bas de l'échelle sociale, n'était plus tout jeune, avait une petite fille, avait été réformé pour sa trop petite taille et tout de même appelé au front où il est mort en 1918. Il n'avait jamais quitté son Aveyron natale, n'était pas instruit, ne devait pas avoir spécialement envie de partir se faire trouer la peau ni pas plus de trouer celle des "ennemis". Je pense qu'il n'a pas eu le choix comme des millions d'autres. La pulsion de violence, peut-être mais pas sûr, la volonté de survivre sûrement, tuer ou être tué, comment aurait-il pu en être autrement. C'était mon grand-père.
Certains chantaient la chanson de Craonne, on ne peut l'oublier. Très bonne émission, merci.
Je dispose des tomes de "L'Illustration" pendant la guerre, ils consacraient plusieurs pages aux morts et blessés et les soldats sans grade n'étaient pas les mieux représentés alors que j'imagine ils étaient plus nombreux à mourir pour ??? C'est la question à laquelle je ne trouve pas de réponse.
Bonjour,

Très chouette émission, merci a ceux qui l.ont animé et préparé.
le débat porte à un moment sur la question de l'écriture de l'histoire par "les élites".
A propos de ces dernières, on (quelqu'un de plutôt bien informé) m'a indiqué un jour que la défiance des français envers les élites datait justement de la grande guerre, sans préciser plus avant sa ou ses sources.
Ça a débuté comme ça.
La "violence" semble être au coeur du débat de fond qui oppose les deux historiens présents sur la plateau.

Sur ce sujet, j'ai en tête l'ouvrage d'Olivier Maurel qui dénonce le fait que jusqu'à très récemment, aucun professionnel travaillant sur la violence humaine (qu'il soit philosophe, écrivain, sociologue, médecin, poête...) ne prenait en compte l'impact de la violence éducative ordinaire.

Selon cet ouvrage, près de 90% des enfants de toute l'humanité sont, depuis plus de 3000 ans et encore aujourd'hui, éduqués de façon violente.
Les châtiments corporels (baton, fessé...) administrés "pour son bien" sur un enfant en construction par un adulte par ailleurs protecteur et aimant ont pourtant des impacts sur tous les pans de sa vie présente et future, et notamment sur sa réaction face à l'autorité et à la violence.

Ref: Oui, la nature humaine est bonne ! Comment la violence éducative ordinaire la pervertit depuis des millénaires. Ed. R Laffont http://www.oveo.org

Par ailleurs, les travaux sur l'impact de violences extrêmes telles que celles expérimentées en temps de guerre sont eux aussi très récents. Aujourd'hui, il y a notamment Muriel Salmona, qui a expliqué comment ces violences (ainsi que les violences sexuelles) induisaient une mémoire traumatique qui venait influer sur toute la vie et les comportements des victimes.

Le mécanisme est aujourd'hui bien compris (sidération du cerveau face à une violence inexplicable, amygdale cérébrale sécrétant des alertes jusqu'à risque mortel d'overdose, coupure entre l'amygdale et le cortex et état de dissociation en résultant) mais n'est que très peu enseigné.
Les implications de cet état post traumatique pourraient pourtant peut-être expliquer en partie pourquoi les hommes ont "tenu" dans les tranchées.

Ref: Le livre noir des violences sexuelles, Ed Dunod. http://www.memoiretraumatique.org
Superbe émission, mais qui aurait mérité une référence à La Grande Illusion, chef-d'oeuvre de Renoir qui, précisément, traite du rapport des classes durant la Grande Guerre (certes dans un camp de prisonniers et pas au front).

Un extrait sur les "maladies de classe" :
https://www.youtube.com/watch?v=1xhgCgpq8OA
Le montage d'archive de Bruney est partiellement sonorisé : les bruits de bottes sur le défilé des troupes allemandes, et pas sur celui des troupes françaises... Le topos du bruit de bottes allemand, qui renvoie à l'occupation allemande de 40-45. En 14 on ignore quel est le son des défilés de troupes ou le son d'ambiance des foules de "spectateurs", acclamation ou silence.
Un sujet de réflexion pour vos invités : les partis pris dans la sonorisation des archives muettes de 1914.

Et bravo pour cette série de grande qualié.
Merci pour cette série d'été. Le sujet développé en plusieurs émissions (prendre le temps de creuser les choses, c'est vraiment agréable), les débats entre les historiens qui montrent que l'écriture de l'histoire n'est pas monolithique, le décalage entre les exigences de Daniel ( Bon, alors, ils se comportés comme ça ou non ? Une réponse claire et nette, s'il vous plaît!) et les réponses compliqués, nuancées, frustrantes, des historiens qui n'ont pas de réponses claires, pas d'archives ou des interprétations différentes.
Merci vraiment, ce sont de superbes émissions.

annexe-poil-à-gratter-féministe : Sinon, c'est à ce point un domaine de mec l'histoire de la première guerre mondiale ? Parce que c'est tout de même pas mal paritaire l'histoire comme discipline universitaire.. et on n'est tout de même pas TOUTES spécialisées sur les périodes antérieures toute de même ? Et au fait avez-vous prévu d'aborder le rôle des femmes dans ces années de guerre ?
Emission très intéressante qui montre bien la complexité de la société du début du 20 ème. Nous voudrions des réponses univoques à une situation où les divergences étaient nombreuses. Le débat historique en ce sens est enrichissant car il permet de regarder le même objet avec des éclairages différents.
Quant aux écrits sur la guerre, on peut écouter les cours et séminaires de Antoine Compagnon au Collège de France. On trouvera beaucoup d'informations qui viennent compléter les travaux historiques.

http://www.college-de-france.fr/site/antoine-compagnon/course-2014-01-14-16h30.htm
Je n'ai pas encore vu l'émission mais je me permets de signler ce sommet du bourrage de crâne paru dans l'Illustration :

http://www.memorial-14-18.net/?p=3224

L’académicien Henri Lavedan, rentré précipitamment à Paris à cause des événements, est tombé nez à nez, le 1er août 1914, sur le petit Maurice Barrès. Et quand un académicien rencontre un autre académicien, forcément, l’instant est toujours grave et solennel, en tout cas loin de l’ordinaire « salut toi, comment tu vas ? » du quidam primesautier.

Lavedan écrit dans L’Illustration ce passage d’une insondable cuistrerie:

« C’est à ce moment, et comme je débouchais sur la place de la Concorde, que j’aperçus Barrès à quelques pas, au coin de la rue Royale. Je pris la main qu’il me tendait. Je m’écriai d’une voix étranglée: «Ah! mon ami! que vous dire!»–«Il n’y a rien à dire, me répondit-il. Que pourrions-nous dire? C’est l’heure. Voilà. J’ai confiance.» Et avec un accent de simplicité charmante, jeune, et un gentil mouvement du menton relevé comme s’il s’agissait d’un coup de tête qu’il fallait lui pardonner, il me déclara: «Je m’engage.» Et c’est sur ce mot que me quitta le Président de la Ligue des Patriotes pour se perdre dans la foule qui s’entr’ouvrait, cordiale et respectueuse devant lui, comme si elle avait compris et deviné qu’il ne fallait pas le mettre en retard. »

Un académicien français ne marche pas parmi la foule. Il la fend comme Moïse fendait les eaux.

Gageons que le petit Barrès trouve rapidement le bureau d’engagement.

Le saviez-vous ? Le président de la Ligue des Patriotes mourra sagement dans son lit en 1923. Le journaliste Henri Jeanson écrira au sujet de cette rencontre inopinée : « Maurice Barrès n’atteignit jamais, jamais le bureau de recrutement – Paris est si grand ! – et il se retrouva dans la calme tiédeur d’un cabinet de travail où s’enracina l’auteur des Déracinés. » (cf. H. Jeanson, Soixante-dix ans d’adolescence, Stock, Paris, 1971, p. 154)
Au sujet de la réaction de Stefan Zweig; Daniel Schneidermann a lu pendant l'émission le récit d'"Un monde d'hier", un récit de Zweig publié à vingt ans de distance où il se dédouane de la fièvre nationaliste de l'été 1914 ("Si je ne succombai pas moi-même à cette subite ivresse patriotique, je ne le dus nullement à une lucidité ou à une clairvoyance spéciales...", p. 270).

Ce qui est une réécriture de sa véritable réaction d'août 1914, qui a été d'un nationalisme germanique virulent ; il écrit dans la Neue Freie Presse de Vienne, le 1er août, l'article "Parole d'Allemagne" (Essais, ed. Poche, Paris, 1996, p. 1207) : "il n'y a pas d'autre façon de penser à l'Allemagne qu'en lui accordant une confiance totale et sans condition". C'est un véritable panégyrique à la supériorité allemande. "Une joie dépourvue d'envoie doit régner sur la compétition que se livrent les deux armées (Autriche et Allemagne) pour la victoire"... ! Encore en septembre, dans son article "Aux amis de l'étranger", paru en Allemagne, il leur écrit "le plus ordinaire des paysans bas-allemands, qui ne comprend guère un mot de ma langue et certainement aucun de ceux de mon coeur, est en ce moment plus proche de moi que vous, mes amis..."
Quel est l'état d'esprit des soldats? [...] Partent-ils consentant ou sous la contrainte?

J'ai pas encore visionné l'émission, mais cette phrase tirée du texte de présentation de D.S. n'est pas de bon augure.
Je la sens pas bien, cette émision. Nos pioupious ne seraient donc pas partis au front la fleur au fusil? On nous aurait bourré le mou? Je suis choqué! On se permet de contester l'histoire offiicielle. Sait-on jusqu'où ce comportement irresponsable peut conduire ? Ca sent le révisionisme !!!
On peut, si on veut, utiliser l'expression "consentement patriotique", mais alors il faut avoir conscience que la definition du mot "patriotique", que met en jeu cette expression, met necessairement en jeu des considerations sur le plan des valeurs.

Le patriotisme, comme l'heroisme, ou le courage, est d'abord une notion de philosophie morale ou politique, et non une notion neutre sur le plan des valeurs. Par definition, c'est une bonne maniere d'aimer son pays et d'etre pret a se battre pour lui ; toute attitude mauvaise, et qui pretend etre une attitude patriote, n'en est en verité pas une, et merite d'etre qualifiee, plutot, de nationaliste. Ainsi, celui qui juge que telle ou telle attitude est patriote, plutot que nationaliste, doit expliquer en quoi selon lui cette attitude a de bonnes motivations, et pour cela, il doit dire quelles sont les bonnes motivations et les mauvaises. Par exemple, il pourra classiquement dire que les bonnes manieres de vouloir se battre pour son pays, celles donc vraiment patriotes, sont celles de celui qui croit defendre son pays contre un agresseur injuste ; tandis que l'attitude de celui qui se bat au nom de son pays, sans se soucier de savoir s'il se bat contre un agresseur injuste, mais juste pour le plaisir de se battre, ou pour dominer un autre pays, n'est pas une attitude patriote, mais nationaliste.

Il aurait été intéressant que les historiens, sur le plateau, en plus de discuter de savoir s'il y a eu consentement ou pas, se soient demandé de quelle nature etait ce consentement : dans quelle mesure il etait patriotique, et dans quelle mesure il etait plutot nationaliste. Mais en les entendant discuter, il m'a semblé qu'ils donnaient indifféremment, au patriotisme comme au nationalisme, le meme nom de patriotisme, comme s'ils ne faisaient pas la difference entre patriotisme et nationalisme. S'ils ne veulent pas avoir le peu de reflexion sur le plan des valeurs, necessaire pour parler de "patriotisme" ou de "consentement patriotique" correctement, ils feraient mieux d'eviter d'utiliser ce genre d'expressions.
En effet, excellente émission, plus particulièrement la fin qui révèle la fracture historiographique autour de la question de la reproduction des structures de dominations sociales parmi les combattants. En gros, l'exceptionnalité du temps de guerre où l'homme est "nu", retrouvant sa condition d'homme sans distinction de classe ; par opposition à une conception de l'homme travaillé par le social et le politique. C'est peut-être là que le statut de l'indigène soldat aurait permis de reposer cette question de la reproduction des dominations au coeur même d'un corps qui se décrit comme homogène et solidaire. Il aurait été intéressant de savoir si ces soldats ont témoigné, de quoi, et comment ? Et surtout, qu'ont-ils appris aux historiens qui se sont penchés sur ces vies d'hommes qui ont combattu pour une nation qui leur a refusé pour leur grande majorité une citoyenneté pleine et entière.
Bravo. Passionant !
Un peu frustré par la conclusion trop rapide à mon goût alors je suis allé chercher quelques éléments de la controverse dont vous parlez à la fin :
- 1914-1918 : retrouver la controverse, une réponse de gens du CRID à l'article Le champ de bataille des historiens
- un article de Nicolas Mariot : Faut-il être motivé pour tuer ?

Dans l'émission, la position de Nicolas Mariot me semblait curieuse comme si il sous-entendait une forme de pacifisme béat chez les soldats du rang mais, à la lecture des articles, c'est tout autre chose.
Un petit extrait du 2e article qui me semble intéressant :

"Ou enfin du cas d’un soldat qui terrasse et veut voir son travail terminé alors que ses compagnons quittent les lieux, leur expliquant alors, « avec une nuance de gouaillerie dans la voix » :
« Moi je suis pour le travail fini. J’aime qu’on aille jusqu’au bout en tout, comprends-tu ? La victoire comme le reste. Ça durera ce que ça pourra. Mais on les aura . »
A. Prost conclut alors sur la culture de guerre en disant qu’il faudrait lui préférer la notion de « culture professionnelle ». Suivant cette idée, on tirerait sans doute profit à faire appel aux analyses de la sociologie des professions, en particulier à celles qui se sont attachées à l’étude de la part de « sale boulot » (dirty work ) inhérente à toute activité professionnelle, fût-elle particulièrement prestigieuse. Certaines études de sociologie des professions médicales se sont efforcées de décrire les modalités d’acceptation ou d’évitement, parfois collectives, des tâches considérées comme dégradantes, indignes ou psychologiquement difficiles, particulièrement celles ayant trait aux déchets, aux déjections du corps, au sang ou à la mort. Elles ont montré en particulier que le dirty work, à des fins de retournement du stigmate qu’il fait porter sur ceux auxquels il est dévolu, peut être pris en charge et accepté précisément sous la forme du travail « bien fait » ou « fait à fond », sur un mode ludique ou au contraire très sérieux. Peut-on supposer des formes de transposition dans la guerre de modalités de gestion de situations professionnelles dominées intériorisées dans le monde civil ? Dans le même ordre d’idée, est-il possible de poser l’hypothèse que la division taylorienne du travail de tuerie (celle que décrit C. Ingrao dans le cas des Einsatzgruppen) est d’autant plus poussée que le statut socioculturel des tueurs est élevé, précisément pour leur éviter que le sale boulot à faire (et qu’ils assument idéologiquement) ne soit en plus un « boulot (trop) sale », indigne de leur rang et de leur formation, et qu’ils délèguent alors, lorsque cela est possible, aux positions hiérarchiques inférieures ou, mieux, aux supplétifs ?"


Ca devrait parler à tous ceux qui ont passé un peu de temps à l'armée : les corvées, le travail bien fait, ordre et hygiène, alignez-moi ces cadavres s'il vous plait, ça ressemble à rien ce tas.
Très beau texte de stefan zweig
Captivant. Je pensai que tout avait été dit sur la der des der, en repensant à mes cours d'histoire au secondaire, mais il y a encore de la matière à creuser...

Cela me fait penser à ce qu'on disait de Pierre Bourdieu : il y avait autant de champs et concepts sociologiques qu'il avait de thésards à encadrer.
L'Histoire n'existe pas. En effet, la présence du Présent est immuable, et il n'y a d'histoire que du Présent. Ce que nous appelons " histoire" n'est qu'une illusion idéologique, servilement liée à un des mythes les plus ringards, celui du progrès. Merci à ASI, puissamment aidé par Henri Guillemin, de nous faire apparaître cette évidence.
Ce n'est pas parcequ'elle n'existe pas que l'on peut faire l'économie de l'étudier. Ne pensez-vous qu'une des causes majeurs des guerres d'aujourd'hui, de la Libye à l'Ukraine en passant par l'Irak et beaucoup d'autres, est l'absence de culture historique de nos dirigeants ?
Tout dépend comment on l'étudie... Je suis persuadé qu 'Hollande se croit très cultive quand il en fait des tonnes en terme de commémoration... C'est assez ironique d'imaginer qu'en faisant l'accolade avec le chancelier allemand, il s'imagine oeuvrer pour le plus jamais ça, alors que toute sa politique oeuvre pour le toujours la même chose...
« le chancelier allemand ».

L’accolade était avec le président allemand.
"la présence du Présent est immuable"
Poétique! tac, tic, tac, tic...
Henri Guillemin ne se trompe pas sur le cœur de l'homme et l'un des invités d'ASI devrait essayer de comprendre le DÉNI qu'il oppose à cette réflexion que fait Guillemin La violence, l'envie de nuire et d'anéantir est la pulsion la plus ancienne chez l'animal humain et commence au jardin d'enfant.
REFUSER cette évidence est le problème personnel de cet invité qui ferait mieux de réécouter l'émission et ce qu'il en dit : Guillemin un pur intellectuel !!! alors que Guillemin convoque toujours l'âme humaine et ses ressorts cachés ,..toutes ses émissions en témoignent...
L'invité est un pur esprit et fait l'impasse (mais cela l'arrange ?)sur le plus puissant moteur des gouvernements à préparer les guerres, c'est à dire la pulsion de mort dont ont parlé tous les psychologues, psychanalystes, guerres, meurtres, massacres qui depuis la nuit des temps sont pérennes sous tous les cieux. !!
La non violence par contre n'a pas beaucoup d'adeptes..et ils sont généralement mis sous les verrous dans de telles situations !! .Comment l'invité pourrait-il expliquer cela ??
Dire qu'on fait la guerre parce que la nature humaine est violente, c'est comme dire qu'un somnifère endort parce que c'est sa nature, ça n'explique rien, ça ne fait que dire la même chose sous une autre forme. L'aptitude à la violence de l'humanité est évidente mais pourquoi le soldat français suit les ordres plutôt que d'affronter la hiérarchie et stopper la guerre, est-ce qu'un paysan se retrouvant dans une tranchée a le même genre de violence qu'un général qui décide d'envoyer 10 000 hommes se faire massacrer dans un assaut stérile etc., tout un tas de questions un peu plus riches que "on s'entretue parce qu'on est violent".
Et pour ce que j'ai compris de leur méthodologie, il s'agit de savoir ce qu'ont réellement fait les gens durant la guerre plutôt que ce qu'ils ont dit et pensé : par exemple, un combattant peut toujours dire et penser qu'il se bat pour la patrie, par sens du devoir etc., dans les faits les plus concrets, il partira peut-être à l'assaut parce qu'il a un sous-off' au cul avec un flingue à la main qui gueule "A l'attaque !". Entre l'instinct, le sens du devoir, toutes les histoires qu'on se raconte sur l'humanité et sortir sous la mitraille, il y a un tas de causes intermédiaires à prendre en compte.
Au même titre que la chasse, le duel, la vendetta, ou le cannibalisme, la guerre est une transgression rituelle de l'interdit du meurtre. Le lion ne fait pas la guerre aux gazelles, ni les fourmis rouges aux fourmis noires. Dans la nature, il n'y a ni guerre, ni duel, ni chasse, ni vendetta, ni cannibalisme, pour la bonne et simple raison qu'il n'y a pas de meurtre. Caïn était un homme, c'est même le meurtre, son interdit, ses transgressions rituelles, qui inaugurent l'humanité, au même titre que l'inceste et son fameux tabou. Ces débats sur la boucherie de 14-18 font un peu vite l'impasse sur la soif de guerre qui peut animer les peuples. On appelle " nation" l'ensemble de ceux qui, ne serait-ce que par livres d'histoire interposés, ont fait la guerre ensemble. La guerre soude, en futilisant ce qui sépare. Le Renoir de " la grande illusion" l'a compris, et surtout regarde en face ce pouvoir socialisant de la guerre, car seule cette froide lucidité peut faire du pacifisme ( auquel j'adhère) autre chose qu'un rêve pour bisounours.
Il me semble que dans toute cette affaire, deux paradigmes(?) s'opposent. D'un coté, on considère une nation comme un tout dans lequel chaque individu porte une part de responsabilité plus ou moins grand dans l'enchaînement des évènements. De l'autre, ce qui me semble être le point de vue de NM et de ses comparses, on considère qu'une partie de la nation, l'immense majorité, subit l'influence d'une minorité. Evidemment, ces deux positions peuvent être nuancées. Mais la seconde repose sur une croyance qui sous entend que l'homme, par nature, tend à la paix.
Si ce second point de vue peut paraitre arbitraire, on ne peut pas lui opposer un point de vue tout assi arbitraire.
Ce questionnement peut par exemple nous amener à nous demander pourquoi -quand il semble évident que les soldats montaient à l'assault sous la menace d'un pistolet dans leur dos- 10000 soldats ne se sont pas tournés contre un seul pistolet au lieu de foncer vers les 10000 devant eux.
L'expression "pur intellectuel" appliquée à Guillemin m'a aussi fait tiquer. Henri Guillemin est un catholique de gauche, un puissant moraliste qui s'élève contre les "puissants", et surtout d'abord un "littéraire" (thèse sur Lamartine, sauf erreur). C'est un historien autodidacte qui assume son point de vue et qui ne craint pas de dire d'où il parle.
Le débat de la fin de l'émission est très intéressant, bravo à ces deux historiens qui bravent les effets de champ de leur école respective!
La pulsion de mort, au sens de la psychanalyse, n'est pas du tout une pulsion guerrière ou meurtrière : ici le mot "mort" est trompeur.
La pulsion de mort, c'est la recherche de l'immobilité, de la décharge des tensions, d'une forme d'ataraxie (Freud parle aussi d'homéostasie). La pulsion de vie, c'est le désir, la pulsion de mort, c'est l'extinction du désir. En ce sens, il y a plusieurs manières de rechercher la pulsion de mort, extrêmement différentes. La recherche de nirvana par les bouddhistes est une forme de pulsion de mort, les bouddhistes cherchent à ne plus avoir de désir en arguant que le désir est source de la souffrance humaine et de toutes les violences qui s'ensuivent - d'ailleurs, ce qu'ils semblent exprimer ici, retraduit en psychanalyse, ce serait donc que c'est la pulsion de vie qui est destructrice et meurtrière...
Mais à l'opposé de la méditation bouddhiste, la jouissance est également une pulsion de mort : la jouissance éteint le désir, c'est une décharge qui vient apaiser une tension. En ce sens, le capitalisme cherche lui aussi la pulsion de mort, mais par un tout autre biais, la recherche de la jouissance illimitée.

Bref, ce couple tension/détente au centre du fonctionnement de la psychés humaine n'est pas, fondamentalement, une violence meurtrière qui ferait que l'Homme est mauvais et violent par essence. Ce couple pulsion de vie/pulsion de mort peut mener éventuellement, par différentes voies, à la violence, mais la violence n'en est pas du tout le moteur premier.

Il faut se méfier de cette croyance, celle que l'Homme est mauvais et destructeur par essence : c'est une croyance occidentalo-centrée, judéo-chrétienne et reprise par le libéralisme des Lumières. Beaucoup de recherches sur l'Homme montrent que la violence, le meurtre sont des conséquences, des éruptions secondaires.
Par exemple, Marcel Mauss a mis à jour qu'un des fondements de la société humaine, c'est l'expérience du don/contredon (au sens de donner, et de rendre). Ce n'est donc pas du tout une violence meurtrière, à la base. Cependant, certains mécanismes peuvent amener ce principe de base, dans certains cas, dans certaines cultures, à de grandes violences : parce qu'il y a besoin dans ces cas-là d'expulsion, de décharges de très fortes tension accumulées. Ce n'est donc pas parce que l'Homme serait violent par nature, mais parce que sa nature peut induire, dans certaines conditions, à s'épancher dans la violence - ce qui est très différent.
Autre exemple, qui va dans le même sens : certaines recherches sur la sociabilité des grands singes montrent qu'une des conditions pour faire société chez les primates est l'empathie - ce qui paraît être fortement applicable à l'Homme. Mais ces mêmes recherches ont montré que l'empathie provoque, là encore dans certaines conditions, des tension extrêmes qui ont besoins de se relâcher, et plus les tension ont été fortes, plus ce relâchement peut comporter de la violence (par exemple sur un bouc-émissaire).

Par conséquent, ne venons pas prétendre que l'Homme est fondamentalement meurtrier et destructeur, par que ce n'est simplement pas vrai. Observons plutôt les conditions qui l'amènent à le devenir, quelles sortes de tensions demandent à être expulsées avec violence, quelle éducation forme le petit d'Homme à éviter les conditions de violence. Le capitalisme, avec sa recherche de toute-puissance et de jouissance illimitée de la part des dominants, et la frustration des dominés d'être exploités à ces fins, paraît être bien plus violent par essence que l'Homme tout court.
Le capitalisme ce n'est pas l'homme?
Un jour, Djac Bawer, on vous retrouvera signataire d'une pétition pour requalifier la sociologie en science dure.

Vous parlez de modèles explicatifs. Votre discours n'est que théorique. C'est complètement faux de dire que telles recherches, tels travaux mntrent quoi que ce soit. A la rigueur, pourraient amener à considérer... Mais montrent???!!!

Il y a beacoup de choses qui sonnent juste dans vos propos. Mais je ne reviendrai que sur les fausses notes.
Par exemple :
Par conséquent, ne venons pas prétendre que l'Homme est fondamentalement meurtrier et destructeur, par que ce n'est simplement pas vrai.
Par conséquent de quoi? Vous pouvez contester l'aspect violent de la nature humaine, mais vous ne pouvez pas affirmer ce qu'elle n'est pas. Ni ce qu'elle est, d'ailleurs.
Ce n'est donc pas parce que l'Homme serait violent par nature, mais parce que sa nature peut induire, dans certaines conditions, à s'épancher dans la violence - ce qui est très différent.
Mis de coté tout ce qui - dans un discours qui analyse les systèmes, les contextes - fait sens pour moi, je voudrais souligner ce qui me parait être un angle mort dans votre démonstration. Ou disons ce qui demande à être précisé.
Le fait de lier l'apparition de la violence à des conditions veut il dire qu'elles sont toutes observables? Par exemple, on peut observer la culture dans laquelle baigne un individu, on peut observer son éducation, on peut observer un contexte sociologique... Mais peut on observer la réaction d'un individu au fait d'exister, au fait d'être mortel?
Et puis, parler de conditions veut il dire qu'il faille jouer sur les niveaux de telle ou telles variables pour produire... Pour produire quoi? Un homme béat? Un homme neutre?
L'homme doit il vivre sa vie dans le désir, dans la jouissance? dans l'absence de désir? Dans un savant équilibre?

Si on se borne à ne considérer les évènement que sur un plan observable, on résonne comme si l'individu était une page blanche. C'est un postulat qui in fine sera insuffisant. Et c'était d'ailleurs le point de vue de Guillemin, qui parlait de désespoir qu'il faudrait être capable de dépasser, en dehors même de tout contexte.
Votre discours n'est que théorique

L'ethnologie est on ne peut plus pratique. Et si, on peut affirmer certaines choses à partir de recherches.

Quant au reste, j'ai l'impression que vous surinterprétez beaucoup mes propos, dans des directions que je ne comprends pas.
L'ethnologie est une étude qui à un objet et un cadre. Les affirmations que vous faites sortent du cadre des recherches que vous citez.
L'ethnologie, la sociologie peuvent produire des règles qui concernent des individus, des agents, des sujets.
L'homme n'est pas qu'un sujet, qu'un agent, qu'un individu.
Vous avez tendances à aller un peu trop vite dans vos affirmation...
Emission passionnante. Merci à toute l'équipe.
Très belle série. Merci à toute l'équipe.

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