Balkans, migrants, djihad : trois hantises sur la crise grecque
L'imagerie ordinaire du "couple franco-allemand", à la barre dans la tourmente. Hollande parle, puis Merkel. Déjà les invités de BFM commencent à gloser sur "la position franco-allemande", quand Thierry Arnaud, chef du service politique, les interrompt : "n'allons pas trop vite. On n'a pas entendu exprimer de position franco-allemande". Et c'est vrai. Jamais les deux monologues n'ont semblé si éloignés l'un de l'autre. Hollande, le good cop, insistant sur "les valeurs" de l'Europe, tandis que Merkel, la bad cop, se réfugie derrière les 18 membres de l'eurozone, comme terrifiée soudain par sa responsabilité. Guère de position commune, rien d'autre que la capitaine et son fidèle second, aggripés au bastingage de ce paquebot dans la tempête, qui s'appelle l'Union européenne. Qui larguera l'amarre du petit canot grec ? Qui le retiendra ? Soudain, toutes les mains tremblent.
Faut-il que l'heure soit grave, les "pères de l'Europe" sont de sortie. Pour Giscard, il faudrait mettre les Grecs "en congé" de l'euro, afin qu'ils puissent rester dans l'UE. Larguer l'amarre, oui, mais en gants blancs. Il ne changera jamais. En douceur, Delors invitait l'autre jour à élargir le champ, au-delà de la piste de danse des centaines de milliards. Condamner la Grèce au chaos, c'est risquer de mettre le feu à une triple poudrière : Balkans, migrants, Djihad. Trois hantises, trois fantasmes de guerre. Toujours sur BFM, Pascal Lamy, co-signataire du même texte, insiste sur le motif. On voit bien le calcul : prendre le contribuable allemand par son seul point sensible, la trouille, puisque tous les autres sont barricadés. Arguments d'ailleurs repris par Merkel, dans son petit monologue de l'Elysée.
Crise à son point de fusion : jours sans repères, jours sans certitudes, jours sans maîtres. Pour la Grèce, est-il préférable de rester dans l'euro, ou d'en sortir ? Et pour l'Europe ? Oui, la menace de guerre mise à part (pour l'instant), la situation rappelle l'engrenage somnambulique de juillet 14, auquel nous consacrions notre série d'été, l'an dernier. Comment se résout-on à la catastrophe ? "Parce que dans les têtes, rappelait Védrine, s'était glissé le poison de l'idée qu'elle était inéluctable". Et qu'elle ne serait d'ailleurs pas si catastrophique, une promenade de santé. En est-on là ? Est-on prêts à payer pour voir ?
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