Cottrez-Pérol, deux procès
Brève

Cottrez-Pérol, deux procès

Pendant que la Grèce et l'Europe frôlent le précipice, qu'éclatent les bombes

, qu'on mitraille les touristes sur une plage de Tunisie, une femme répond de huit infanticides devant la Cour d'Assises de Douai. Le procès de Dominique Cottrez est suivi passionnément par les chroniqueurs judiciaires de ce qu'il reste de la presse française. Les stars de la profession, Durand-Souffland, Millot, Robert-Diard, l'ont même préféré au procès pour prise illégale d'intérêt de François Pérol, ex-conseiller de Sarkozy, aujourd'hui président de Banque Populaire Caisses d'Epargne après avoir supervisé la fusion des deux banques, qui se déroule simultanément. Et, attiré par les signatures, par la qualité des plumes, on lit évidemment les compte-rendus. Comment cette femme a tué à la naissance huit de ses nouveaux-nés. L'amour pour elle de ses deux filles, ses premières nées, aujourd'hui âgées de 26 et 28 ans. Son spectaculaire revirement, quand elle avoue finalement que non, elle n'a pas été violée par son père dans son enfance.

Et chaque jour on se demande : mais que font-ils là ? Et que faisons-nous là, nous, à les lire ?

Que font-ils là, c'est clair. La Justice est rendue en public. Ils ont donc le droit d'y être, comme nous avons le droit de les lire. Mais qu'est-ce qui justifie que cette tranche de vie nous soit ainsi offerte ? Les faits jugés sont-ils en telle progression statistique qu'il soit urgent d'en informer le public ? Ont-ils pour cause un dysfonctionnement des institutions, qu'il importe de dénoncer bien fort ? L'accusée est-elle soutenue, ou combattue, par de puissants mouvements d'opinion, de puissants intérêts ? Le procès a-t-il une dimension politique ? Une loi pourrait-elle y mettre fin ? Autant de questions auxquelles, dans le procès Pérol, la réponse est "plutôt oui, a priori", tandis qu'elle est "plutôt non" dans le procès Cottrez. Ajoutons que sur le plan purement scénaristique, le procès Pérol se défend bien lui aussi, comme dans cette audience où l'accusé s'efforce de convaincre le tribunal que rien, strictement rien, ne se décidait à l'Elysée de Sarkozy, ou encore lorqu'il explique que Sarkozy "s'est trompé" en affirmant faussement que la commission de déontologie avait été saisie de son cas.

L'affaire Cottrez n'a aucun autre intérêt que sa monstruosité intrinsèque.  Huit meurtres, une accusée aide-soignante en surpoids de 160 kilogs : c'est ce hors-normes, qui a attiré les chroniqueurs judiciaires vers ce procès pénal "chimiquement pur", plutôt que vers le procès politico-financier. On dirait d'ailleurs que certains s'en rendent compte, tentant l'impossible pour ne pas en livrer davantage qu'il n'est strictement nécessaire. Par exemple, dans Libération, Ondine Millot ne désigne les deux filles de la prévenue que par l'initiale de leur prénom, E. et V. tandis que Stéphane Durand-Souffland, dans Le Figaro, n'hésite pas à dévoiler les prénoms entiers de Emeline et Virginie. Comme si c'était là toute leur marge de manoeuvre.

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